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À chaque fois que je monte à Paris, je vais faire un tour rue de Castiglione à la parfumerie Jovoy mais, malgré l’accueil très agréable, j’ai un peu de mal à trouver quelque chose qui me fasse réellement envie. Trop de marques, trop d’informations, peut-être même trop envie de découverte et j’ai beaucoup de mal à faire le tri entre ce qui m’intéresse et ce que je veux écarter. Pourtant, la dernière fois, sans conseil, tout seul comme un grand, je me suis arrêté sur une marque. Il s’agit de Akro, qui regroupe des parfums créés par le parfumeur Olivier Cresp et qui est supposé s’inspirer de nos addictions telles le tabac ou le café par exemple. Créée en 2018, cette marque, qui gagne ses galons, recèle de très belles réalisations et il n’est pas dit que je ne franchirai pas le pas car je trouve que tous les parfums sont réussis.
Olivier Cresp
La marque présente sa démarche ainsi : « Nous sommes Akro. Nous partageons la même addiction, la même désinvolture, le même lâcher-prise. Rien ne nous retient. Nous nous retrouvons sur le terrain de l’excès, pour échanger nos impressions. Nos tentations, nos folies, nos humeurs. Nous sommes un gang, nous sommes un groupe. Nous sommes une famille, nous assumons notre droit à la jouissance et à l’outrance. ». Je trouve que ça pose bien le manque de limites que s’impose cette toute récente maison de parfum et que ça traduit bien ce que j’ai ressenti en découvrant les parfums.
La toute première création que j’ai découvert tourne autour du café. « Awake », est légèrement gourmand mais surtout je trouve qu’il a vraiment un côté « expresso » malgré une envolée de citron à l’ouverture et un fond de vétiver. Le café est omniprésent tout au long de l’évolution et, n’aimant pas spécialement cette note en parfumerie, j’ai vraiment accroché car je l’ai trouvé complètement hors-norme et singulier. J’ai vaporisé ce parfum sur mon poignet et j’ai vraiment été séduit par le côté « petit caf’ du matin ». Je pense que c’est un parfum qui pourrait être très énergisant surtout à l’entrée de l’hiver.
Le chocolat noir en parfumerie vous connaissez ? Non ? Moi je n’avais jamais encore découvert cette note comme ça lorsque j’ai senti « Dark » qui semble exprimer toutes les facettes de la fève de cacao à plusieurs stades de torréfaction. Il se fait tour à tour amer, végétal, rond ou encore épicé. Des notes de vanille de Madagascar, de cannelle et de noisette lui donnent plein de facettes différentes. Je ne l’ai pas vraiment essayé donc je ne connais pas encore son évolution mais, sur la touche, je l’ai trouvé fort intéressant, plus sophistiqué et moins ethnique que « Cacao Aztèque » de Perris Monte Carlo comme quoi il y a plein de manières de travailler cette fève en parfumerie.
Les notes dominantes de « Haze » sont évidemment la menthe et l’absinthe qui représentent cette boisson très addictive dont écrivains et poètes romantiques abusaient au XIXème siècle. Elles sont conjuguées avec de l’eucalyptus et de la sauge sclarée pour aller vers un fond de patchouli et de cuir. « Haze » fait partie des parfums de cette maison que je porterais bien. Je lui trouve quelque chose de très masculin voire même androgyne lorsque c’est une femme qui le porte. Frais sans excès, aromatique mais vert, il ne ressemble à aucune autre création que j’ai pu essayer. La tenue est exceptionnelle. J’avais une dose d’essai et je l’ai portée avec beaucoup de plaisir.
À l’image de Catherine Frot dans « Mon Petit Doigt m’a Dit », le film de Pascal Thomas tiré du roman d’Agatha Christie, il y a des amateurs de parfums qui sont aussi amateurs de whisky pure malt. Il n’en fallait pas moins à Olivier Cresp pour créer « Malt » justement. L’ouverture de rhum et de whisky très gourmande s’ouvre sur un accord cuir de Russie classique et un fond d’algues et de patchouli. Quand je pense à « Malt » je me dis que c’est « un parfum de pirate » ! Incroyable, il est opulent. Je ne l’ai pas essayé mais sur la touche il m’a énormément plu.
Comme dans chaque collection, il y a un oud et c’est celui que j’ai le moins aimé. « Night » est sans doute le plus attendu de toute la collection puisqu’on y retrouve la dualité entre le oud et la rose dans un accord puissant de ce parfum du soir. L’originalité est la note de safran très présente tout du moins en tête et une persistante note de cumin qui, si je l’aime en cuisine, me plait moins en parfumerie. Je trouve que si « Night » est sophistiqué, il est aussi assez compliqué à porter. Il doit s’adresser à des amateurs voulant mettre en avant une forte personnalité. Personnellement je ne le porterai pas mais je reconnais qu’il est très bien réalisé.
Je suis paradoxal c’est vrai. J’aime énormément les parfums « tabac » mais je n’en porte pas beaucoup. Lorsque j’ai senti « Smoke », j’ai eu vraiment envie de ce parfum et, si je n’avais pas trouvé « Fathom V » de Beaufort London, c’est certainement sur celui-ci que j’aurais jeté mon dévolu. J’y ai même pensé beaucoup après l’avoir essayé. C’est un tabac aux notes fumées. Une évidence me direz-vous ? Et bien non, il y a des dizaines de manières d’interpréter le tabac en parfumerie et j’en ai parlé souvent. Là le tabac est associé à la fève de tonka et au benjoin avec sans doute une étonnante molécule qui en fait une construction très moderne. J’ai adoré « Smoke » et j’ai hâte de le sentir à nouveau.
J’avais découvert « Ink », sorti en 2022 lors d’un séjour à Paris et je crois d’ailleurs que j’en avais parlé à l’époque. C’est un parfum parfaitement atypique et complètement addictif c’est vrai. « Froid, séduisant, avec des notes d'encre noire, de goudron, de vétiver et de jasmin, Ink est un parfum qui vous transportera le jour de votre premier tatouage, quand vous le souhaitez ». C’est un clair obscur qui oscille entre le côté très botanique du cypriol et l’odeur un peu goudronnée du bois de bouleau dès les notes de tête puis arrive un superbe coeur de jasmin et un fond de vétiver, d’ambroxan et de muscs. Conceptuel, très stylisé voire même abstrait, « Ink » n’est certainement pas le parfum le plus facile de la collection et pourtant je dois dire qu’il est séduisant, de par son étrangeté qui rend son sens au terme « parfumerie de niche ». En effet, j’aime « Ink ». Il me plait, me séduit et, en même temps, je n’ose pas trop le porter. C’est un parfum faussement simpliste, d’une grande originalité et que j’ai du mal à définir. En tout cas, il faut le découvrir absolument.
C’est avec Marion, formatrice pour la marque, que j’avais découvert « Bake » en avant-première en 2023 quelques jours avant sa sortie. Olivier Cresp le décrit ainsi : « C'est un shot de citron combiné à un sucre vanillé. Quand je le sens, je me transporte dans ma pâtisserie préférée à Londres ». J’avais été à la fois très étonné et un peu attiré par ce parfum qui me fait sortir totalement de mes goûts habituels avec son envolée complètement folle de citron et de rhum, son coeur de praliné adouci encore par un accord de crème chantilly et son fond de vanille et de sucre brun. « Bake » est plus que gourmand, il est sucré, même acidulé. Sur ma peau, la note de citron, fusante, presque tranchante, peine à s’adoucir avec les notes rondes, très rondes et je ne m’en plains pas car, l’effet est, je l’admets, une vraie réussite. Vraiment, ce parfum me déroute. Je ne suis pas très fan des gourmands mais je dois admettre que « Bake » fait partie des exceptions. Il est tellement bien construit et il matche tellement bien avec ma peau que ça me surprend complètement.
« La chaleur mordant la peau. Le bruit des vagues frappant le bord de mer. Les longues journées de farniente. Les plaisirs de l’été, ceux qui se terminent trop tôt. En créant Rise, Akro souhaitait retranscrire le souvenir intense des plus beaux moments de l’été. Le farniente absolu fait de soleil, de cocktails et de longues soirées » Olivier Cresp. Depuis plusieurs mois, j’entends parler de « Rise », sorti également en 2023 mais je n’avais pas eu l’occasion de le sentir. Avec l’arrivée de la marque à Lyon, c’est chose faite. Il s’ouvre sur une envolée de noix de coco, puis vient un coeur de caramel associé à des notes fleuries et il se pose sur un santal très épuré. Je ne vais pas dire le contraire, « Rise » est le parfum le plus consensuel à ce jour de la collection Akro. Pour moi, il est joli, bien réalisé, très « Piña Colada ». C’est un parfum dans l’air du temps, solaire, « très vacances ». Je pense qu’il mettra tout le monde d’accord ou presque. C’est joli, bien fait, agréable mais peut-être que je le trouve un peu trop consensuel par rapport aux autres créations de la marque.
Akro arrive à Lyon et je remercie Marion de m’avoir fait découvrir ce que je ne connaissais pas, y compris, des inédits qui seront lancés dans l’année dont une merveille des merveilles mais chut, je n’en dis pas plus. Olivier Cresp et sa fille Anaïs ont su proposer au public une marque tout à fait différente, avec un vrai univers artistique. J’ai toujours bien aimé Akro et je suis parfaitement ravi de remettre mon nez dans ces collections.
