Camille Chemardin, de très beaux débuts
J’avais envie de continuer de parler des nouveaux visages de Studio Flair. Après Margaux Le Paih Guérin, je me suis intéressé au travail de Camille Chemardin notamment grâce aux parfums qu’elle a créé pour Marylise Mirabelli que je trouve vraiment très réussis. Je suis allé chercher ce que ce nouveau nom de la parfumerie a composé d’hors et déjà et je me suis rendu-compte que je connaissais finalement déjà pas mal son travail. Je trouve sa signature déjà très affirmée et plutôt très belle et élégante. Je pense qu’elle a une vision du parfum assez innovante mais surtout très intéressante dans le sens que, malgré son jeune âge, elle s’affirme déjà comme très présente dans ses créations. J’en ai sélectionné quatre que je trouve très significatives de son style. Je vous emmène donc sur les traces parfumées de Camille Chemardin.
« C’est dans le jardin en face de la demeure, construite en 1702 au-dessus du site de production, qu’Henri Frapin aime se relaxer en ces dimanches de printemps. Il pense à cette région, de bois, de rivières et de pâturages, qui l’a vu naître et qui coule dans ses veines. Il réfléchit à cette manne prodiguée par ce nectar que la famille produit depuis 1889. Son moment favori est celui où son fils se joint à lui vers 11h lorsque les rayons du soleil réchauffent ce promontoire de forêt au-dessus de Segonzac. L’échiquier est déjà prêt. Son fils s’assoit et, sans un mot, reprend le cours de ce combat métaphorique, de cette union avec son père dans le plaisir du jeu. La brise printanière entraîne sur ses ailes l’odeur fraîche des bosquets environnant. Le soleil réchauffe les agrumes qui mûrisse… ». Créé conjointement par Anne-Sophie Behaghel et Camille Chemardin en 2021, « Checkmate » est le premier parfum que j’ai pu découvrir et redécouvrir et je trouve qu’il prouve, une fois encore, combien il faut compter avec Frapin et comme la marque recèle des merveilles. Après un départ de bergamote, de citron et de cardamome indienne vient un coeur de cuir vert très original et adouci par les notes amandées de l’héliotrope et poudrées de l’iris qui se renforce avec un fond contruit autour d’un accord daim très doux, conjugué avec le cashmeran et soutenu par le cèdre de Virginie. « Checkmate » est une pépite et je pense qu’il est le parfum que je préfère dans la sélection faite pour ce portrait parfumé. C’est un parfum à la fois atypique et très facile à s’approprier, ce qui n’est pas toujours une évidence.
Comme je l’ai dit, j’ai beaucoup aimé les créations de Camille Chemardin pour Marylise Mirabelli. Également proposé dans une concentration extrait, « Club 30’s » lancé en 2022 est vraiment très intéressant. La marque en exprime ainsi l’inspiration : « Soyez transportés dans une ambiance de repaire de gangsters des années 1930. Club 30's, incarnez un dandy charismatique. Club 30's est une fragrance boisée saisissante. Son ouverture captivante de notes fraîches et pamplemousse, crée un souffle d’air frais. Sa fraîcheur est accompagnée par un brin de lavande, et une touche de féminité délicate, avec l’onctuosité des fleurs blanches. Le rhum, et les bois de cèdre, de santal et vétiver, ajoutent une enveloppe chaleureuse à l'atmosphère de ce club mystérieux ». L’envolée est très fraiche et amère avec une note de pamplemousse vraiment fusante, presque juteuse qui nous emmène sur un coeur de lavande et de fleurs blanches qui demeure quand même aromatique mais qui s’arrondit avec l’accord rhum associé au cèdre de Virginie et au vétiver en fond. On ne va pas se mentir, je pense que « Club 30’s » plaira plus volontiers aux hommes. Il m’emmène effectivement dans les années trente, à New York, par exemple, dans un club de jazz un peu clandestin un peu enfumé et presque subversif. Il exhale une élégance toute particulière. Je trouve que la parfumeuse a déjà une très étonnante signature car cette création n’est pas pour tout le monde et je pense que c’est assumé. J’ai beaucoup aimé « Club 30’s » mais je ne sais pas si je pourrais le porter. Il n’en demeure pas moins une vraie réussite.
Je ne pouvais pas passer à côté de « Mary Jane », créé par Camille Chemardin pour Borntostandout en 2024 car, il me faut bien reconnaitre, que la création m’avait quand même impressionné quand je l’ai découvert. « Ce parfum est une rébellion – le cannabis broyé, la menthe glacée et une grosse dose de liqueur de pin symboles du défi à l'ordinaire. Terreux et sucré, séduisant mais surprenant... C'est la liberté en flacon ». L’accord chanvre et cannabis en tête pourrait me déranger car je trouve qu’il y a quelque chose d’âcre et de presque écoeurant dans l’odeur de ces matières première mais elle est est contrebalancée par un accord menthe glaciale ainsi que le pamplemousse et le rhubarbe. Le coeur semble étonnant avec la sauge sclarée utilisé avec le fruit de la passion un peu acidulé et le côté vert de l’élémi. Le fond d’essence de pin, de cashmeran et de caramel finit très bien une construction assez complexe que je n’attendais pas. Cette composition est particulièrement clivante. Je ne pourrais pas le porter. La note de cannabis finit par me déplaire. Ce sont les mystères de l’olfaction.
« Tulaytulah Obscur est un parfum sensuel, avec ses notes labdanum, davana, assez liquoreuses, et ses épices chaudes -cumin, cannelle-, avec un effet peau chauffée au soleil ». Avec « Tulaytulah Obscur », lancé en 2024, est le pendant très sombre d’un parfum créé par Delphine Thierry. Je suis allé le découvrir lors de mon passage à Paris pour écrire cet article et c’et vrai que j’ai trouvé ce parfum absolument intrigant et très sophistiqué. Le départ est très original avec des notes de fleur de cerisier épicé de cannelle et de cumin, ce qui produit un effet seconde peau très intéressant. Le coeur de labdanum est adouci par les notes d’amande et d’héliotrope ainsi que de davana. Je ne sens, en revanche, pas vraiment la note de cassis. En revanche, le fond baumé et cuiré me fait l’effet d’un parfum très élégant et presque mystérieux. « Au son de l'Angelus répond le chant de l'Adhan, et à ce signal, le ciel de Tolède s'embrase des dernières lueurs du jour. L'eau du Tage frémit toujours à cette heure précise, telle la peau de l'amante face à la tendresse de l'aimé. Sur le rivage, une main gantée de bleu trempe une Corne de- gazelle dans une liqueur de cerise des bois. Et pour contempler sa grâce, le temps s'arrête un instant ». Je suis très impressionné par le fait que ce parfum hyper complexe soit composé par une si jeune créatrice. En tout cas, il est incroyable et il faut absolument le découvrir.
Camille Chemardin est vraiment un nom à suivre. J’ai beaucoup aimé le côté hétéroclite mais toujours très abouti que ce que j’ai pu découvrir. J’ai trouvé qu’il y avait beaucoup d’inventivité dans son travail. J’ai pris beaucoup de plaisir à écrire cet article et à faire des essais avec ces quatre parfums. Si vous les connaissez, je serai content d’échanger avec vous sur vos impressions et de les confronter avec les miennes.
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