Costume National, un univers italo-japonais
Costume National est une maison de couture italienne fondée en 1986 par Ennio Capasa, directeur de la création, et son frère Carlo, PDG. Il a son siège social à Milan. En 2002, la marque lance ses premiers parfums et établit un pont entre son identité italienne et un univers très japonais avec « Intense Scent » créé sous l’impulsion du parfumeur Laurent Bruyère, disparu à l'âge de 43 ans en 2008, à qui l’on doit également des fragrances pour Sisley (« L’Eau d’Ikar »), Salvatore Ferragamo, Paul Smith, Mugler ou encore Cacharel. Par la suite, Costume National va faire appel à des parfumeurs français tels Juliette Karagueuzoglou, Dominique Ropion, Julien Rasquinet, Fanny Bal et Antoine Lie afin de développer d’autres jus toujours dans cet esprit de transparence et d’élégance. Depuis 2002, la maison a lancé pas moins de 18 références. Je dois dire que je suis très attiré par cet univers épuré et très extrême oriental qui, il faut le dire, est assez unique sur le marché. La facette parfumerie de la marque demeure relativement confidentielle car les créations sont distribuées surtout par des boutiques en nom propre ou des multi-marques indépendantes. J’ai la chance d’y avoir accès assez facilement et, depuis quelques mois, petit à petit, j’ai découvert quelques références. J’en ai retenu cinq que je trouve particulièrement représentatives et que j’ai eu la possibilité d’essayer vraiment en les portant. J’en avais évoqué certaines dans des précédents articles mais j’ai décidé de les réunir dans cette revue
Laurent Bruyère
« Scent Intense se dévoile doucement et élégamment avec une note de tête de fleur d'hibiscus et de thé de jasmin, puis change rapidement vers une base plus rock ambrée et boisée. Une énergie éternelle et mystérieuse vous entourera de la chaleur profonde naturelle. Stupéfiant, unique et addictif, c'est une déclaration inimitable d'individualité et de séduction », c’est ainsi que la marque décrit « Scent Intense », qui fut son premier parfum et qui a été créé en 2002 par Laurent Bruyère en concentration eau de parfum en même temps que « Scent » en eau de toilette que je trouve un peu plus féminin peut-être, et qui sortira, quelques mois plus tard en extrait. J’avoue avoir été un peu dérouté lorsque je l’ai découvert. Je m’attendais à un cuir classique et finalement il ne l’est pas du tout. En le re-sentant pour écrire mon article, je me suis rendu compte qu’il était vraiment très original avec un départ de thé noir associé, il me semble à quelque chose qui ressemble à la pomme Granny Smith, un coeur floral entre hibiscus et jasmin et qui peut sembler presque fruité. Le fond, tout en transparence est évidemment ambré et cuiré mais garde une légèreté et une facette sèche que je n’avais jamais sentie il avant. Je crois y discerner l’odeur unique de davana et également du cèdre ou du santal qui vient renforcer l’accord cuir. J’aime beaucoup ce parfum que je trouve vraiment très contemporain et pas du daté.
C’est en 2007 que Juliette Karagueuzoglou créée le « 21 », présenté toujours dans le flacon iconique de la marque mais cette fois-ci qui se fait porcelaine blanche. Costume National le décrit ainsi : « Né pour célébrer le 21e anniversaire de la maison, le 21 se distingue par son caractère unique, fort et énergique. Basé sur l'harmonie entre les éléments les plus purs, il commence par l'ouverture inhabituelle du safran et du lait blanc pur. La légèreté de la fleur d'oranger blanche se fond dans des notes plus mystérieuses comme le bois de cachemire, l'ambre et le musc avec des accents de vanille, de labdanum et de bois de cèdre ». Ce travail autour du cashemeran est un cocon absolu Son départ est directement construit autour de cette note associée à la bergamote mais aussi à un accord lait, safran, fleur d’oranger et ambre. Le coeur est épicé, résineux et met en valeur graine de carvi et le fond est à la fois mousse de chêne, patchouli, fêve tonka, cèdre et vanille. Un peu chypré, pas mal oriental, et légèrement aromatique, ce parfum est également d’une très grande originalité. Je dois dire qu’il me déroute moins. Je trouve le bois de cachemire très prépondérant et il est presque trop doux pour moi du moins au départ. Ensuite, quand la facette chypre arrive, je le préfère. Sur ma peau, au bout d’un certain temps, il devient franchement boisé et je suis moins séduit mais il reste tout de même une très belle création facettée, inventive et d’une élégance très « japonisante ».
Lancé tout d’abord en eau de parfum en 2012 puis en eau de toilette l’année suivante, « So Nude », créé par Dominique Ropion est présenté comme un féminin mais je dois dire que je le trouve assez mixte même s’il est, indéniablement un floral intense. À nous, les utilisateurs, de casser les codes après-tout. La marque le décrit ainsi : « La fragrance s'ouvre avec un mystère grâce aux notes de tête épicées de cardamome et de cumin, entourée par la délicatesse du néroli. Un coeur floral d'Ylang-ylang, de rose de damascène et de tubéreuse surprend à l'improviste et enchante par son élégance et sa sensualité. Un fond chaud de bois de cèdre de Virginie, de coeur de Patchouli et de bois de Santal offre la profondeur à toute la construction olfactive ». Sur ma peau, il est pour le moins surprenant, aux vues des notes, je m’attendais à un travail nettement autour de la tubéreuse mais je dois dire que si je sens le côté presque médicinal de cette fleur très rapidement après un départ de cardamome et de cumin (que je retrouve beaucoup dans les parfums que j’essaye en ce moment), il s’arrondit avec une très belle note d’ylang ylang et le côté à la fois opulent et poudré de la rose de Damas. Le fond, très « crayon taillé » de cèdre de Virginie s’harmonise parfaitement au côté presque crémeux du bois de santal et plus dense du patchouli. Je ne peux parler que de mon ressenti mais vraiment, je trouve que c’est l’un des très beaux parfums de Dominique Ropion. Je pense que je le trouve peut-être un peu trop intense pour moi (je l’ai essayé en concentration eau de parfum et sans doute que l’eau de toilette aurait suffit) mais je le porterai facilement. Il m’a beaucoup séduit car il est tout en sensualité tout en restant élégant.
Créé en 2015 par Dominique Ropion, « Soul » est vraiment différent des deux précédent. C’est un cuir plus dense, mois en légèreté et beaucoup plus capiteux. Costume National en parle de cette manière : « L'esprit est pure émotion. Un mélange oriental d'ingrédients très précieux, Soul incarne la liberté et l'élégance. La fragrance chaleureuse prend forme autour d'un ingrédient emblématique: l'ambre pur. Un grand favori du designer, l'ambre exprime la liberté et l'élégance absolue ». Cuiré, ambré, il m’apparait tout de même moins sortir des sentiers battus que les précédents et je le trouve tout à fait dans l’air du temps. Dominique Ropion est un virtuose et il le montre une fois de plus en réinterprétant le thème du cuiré boisé un peu oriental avec un départ de poivre rose, de cardamome et de bergamote, un coeur de cuir profond et sombre, légèrement arrondi par une note de géranium et renforcé par une touche de oud (bois d’agar). Le fond est vraiment oriental avec l’ambres gris, le patchouli et la vanille. Plus consensuel, plus tenace, « Soul » est une création qui n’est guère dans l’esprit que je connaissais de Costume National. Il s’adressera plutôt aux amateurs de jus denses et opulents tout en gardant tout de même une certaine transparence qui est le postulat de départ de la maison. Pour ma part, ce n’est pas vraiment un coup de coeur. Si je lui reconnais des qualités indéniables, je dois dire que je ne le porterai sans doute pas.
S’il pourrait sembler semblable à l’original, « Scent Intense Parfum Red Edition » est pourtant une variante légèrement différente et je tends à le préférer car je le trouve plus floral, moins cuiré et toujours tout en transparence malgré sa haute concentration. Je regrette que la marque ne communique pas sur le créateur de cette création de 2018 mais elle le décrit ainsi : « Concentré à 25%, Scent Intense devient Parfum! Scent Intense n'est pas que le parfum du début, c'est la fragrance qui incarne totalement l'esprit CoSTUME NATIONAL. Une âme rock et un style précis et sophistiqué ». Après une version vraiment cuirée, une autre plus boisée, c’est une interprétation florale, toujours épurée que la maison propose avec ce travail autour de la rose et du safran renforcé par une tubéreuse opulente, un patchouli très léger, un jasmin un peu vert et des notes plus ronde d’ylang ylang et d’ambre. Sur ma peau, cette version est très linéaire et change assez peu. Je dois dire que lorsqu’il est passé un peu, je continue de discerner plein de facettes. J’aime beaucoup le côté à la fois fleurie et épicée renforcé le patchouli. Très délicat, c’est un parfum pour moi si j’ose dire. J’ai adoré l’essayer et je pourrais très facilement me l’approprier. Il n’est pas dit que je ne le fasse pas dans les mois à venir car c’est un réel coup de coeur. Il est présenté dans le flacon iconique qui est, cette fois, rouge vif, ce qui explique peut-être pourquoi j’ai été attiré directement lorsque j’ai vu le rayon sur lequel il était exposé. Je n’ai pas regretté car le jus est très beau.
En résumé, je constate que j’aime beaucoup Costume National. C’est une marque très intéressante, et, malgré le fait qu’elle ait été lancée par une maison de mode, je la trouve finalement très peu consensuelle et dotée d’une vraie identité. On aimera ou pas le côté très « japonisant » de la plupart des créations. Les jus sont faciles à porter, très élégants, minimalistes ou plutôt épurés. Pour moi, ce sont de très belles réalisations, pleines de petites touches comme peintes par un pointilliste. J’étais un peu passé à côté jusqu’à ces dernières années et je suis content de ma découverte.
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