Délicieuse prune
* Article entièrement réécrit
Depuis que je m’intéresse vraiment à la parfumerie, je me suis rendu compte que j’avais une véritable attirance pour la note de prune sous toutes ses formes. J’ai beaucoup hésité à lui consacrer un article car, bien évidemment, j’ai déjà évoqué plusieurs des parfums qui sont construits autour de ce fruit atypique et qui peut prendre plusieurs formes mais j’ai décidé, au risque de me répéter un peu, de « compiler » mes parfums préférés dont la prune est une note dominante. Suave, prenante, très présente, elle donne à ces fragrances quelque chose, pour moi, de complètement addictif et, vraiment, je suis fasciné par le côté à la fois rond et acidulé de chaque création.
Lorsque je pense à cette note, le premier jus, et je l’ai déjà largement évoqué, qui me vient à l’esprit est « Le Parfum de Thérèse » créé par Edmond Roudnitska, sans doute trop atypique pour que Dior ou Rochas se décident à le sortir et que, dans le milieu de la parfumerie, tout le monde appelait « la Prune ». C’est lors d’une conférence avec Michel, le fils du créateur, que j’ai découvert, complètement par hasard ce parfum que je trouve fascinant. Il était devenu uniquement la fragrance personnelle de Thérèse Roudnitska lorsque, quarante ans après sa création, en 1997, Frédéric Malle qui créait sa maison d’édition de parfums, demanda à pouvoir le lancer et, en 2000, « le Parfum de Thérèse » devient (enfin) disponible. Je lui ai déjà consacré un article à part entière car je considère qu’il est le chef d’oeuvre de son créateur qui pourtant a vraiment inventé des merveilles mais je vais revenir rapidement sur les notes. Le départ d’orange et de melon est déjà très surprenant et on évolue vers un coeur de rose et de prune confite soutenu par un fond de cèdre, de vétiver et de notes cuirées. Je ne suis pas certain de pouvoir porter « le Parfum de Thérèse » mais, depuis plusieurs années, je tourne autour tant ses effluves me fascinent, tant je le trouve beau, équilibré et plein d’originalité. Je pense qu’il n’est, hélas, pas l’un des plus grands succès des éditions Frédéric Malle mais, vraiment, pour moi, il est dans le top cinq des plus belles réussites de la parfumerie toutes catégories confondues.
C’est lorsque je fréquentais beaucoup le salon du Palais Royal à Paris que j’ai découvert « Bois et fruits » créé par Christopher Cheldrake et lancé en 1992 pour la marque de Serge Lutens. Cette histoire-là, je vous l’ai peut-être déjà racontée, mais je m’y colle à nouveau. En fait, « Féminité du Bois » est la réunion de deux parfums « Bois et Fruits » et « Bois de Violette » mais je les ai toujours préférés séparés. Cher à Serge Lutens et Christopher Cheldrake, le bois de cèdre est, ici, conjugué avec nombre de fruits confits et, si je ne peux pas tous les identifier, je reconnais évidemment très facilement la note de prune qui éclipse tout de même un peu les autres. Il y a dans « Bois et Fruits » une originalité et une gourmandise sans sucre tout à fait délicieuses. Je suis toujours très attiré par le côté « confit » de la prune. On dirait presque un alcool de fruits revisité pour être porté. Addictif et fascinant, il a beaucoup de sillage et, lorsque je l’ai essayé, je n’étais pas prêt à l’assumer complètement. Je ne sais pas si « Bois et Fruits » existe toujours dans les collections autres que celle des flacons de table mais, vraiment, si vous tombez dessus, à la boutique du Palais Royal ou au détour d’un corner parisien (je pense qu’on peut le trouver au Printemps Haussmann), surtout n’hésitez pas à aller le découvrir car il est vraiment super beau.
À une époque, je prenais beaucoup le train avec une jeune fille qui travaillait, chez nous à Lyon, au Printemps, pour le stand de l’Artisan Parfumeur (hasards de la vie) et qui me parlait énormément de « Voleur de Roses ». Nous échangions beaucoup nos impressions et elle me disait que je ne pouvais qu’aimer ce jus lancé en 1993 et créé par Michel Almairac mais, n’étant pas un fanatique de la rose, je ne comprenais pas pourquoi et j’avais laissé un peu cela de côté en pensant qu’il était sans doute un solinote. Je ne l’ai découvert qu’il y a quelques mois et j’ai eu un choc olfactif. En fait, contrairement à ce que laissait entrevoir son nom, c’est un parfum complexe et il y a une vraie osmose entre les notes de rose, de prune et de patchouli. C’est un parfum atypique, complexe, singulier et particulièrement envoûtant. Je l’ai adoré. J’attends un peu que l’été passe pour vraiment l’essayer complètement mais, sur mon poignet et sur le dos de ma main, j’ai été vraiment séduit par ce curieux jus, très dans l’esprit de la marque, comme un « bricolage » chic autour de la rose, la prune et le patchouli. Je trouve que c’est un parfum « duel à trois », dans lequel chacune des notes dominantes veut tirer son épingle du jeu. J’ai vraiment beaucoup aimé découvrir « Voleur de Roses » mais il me semble qu'il a été discontinué.
Il y a très peu de temps, j’ai découvert un peu mieux la marque Bon Parfumeur et j’ai eu un vrai coup de coeur pour ne numéro « 401 » que j’ai largement évoqué dans ma revue sur la marque et dont les notes principales sont cèdre, prune confite et vanille. Cette dernière est la première que je sens lorsque je vaporise le parfum et je dois dire que je n’aime pas tellement le départ de cette création de Nathalie Koobus sortie en 2017 mais alors l’évolution est très surprenante. On retrouve, très vite une prune suave, intense, jamais écoeurante car elle garde un côté acidulé et sa dualité avec le cèdre est une petite merveille. Sur moi, « 401 » est idéal car il a une excellente tenue, un sillage modéré et que je peux identifier la qualité des matières premières utilisées. J’ai appris, sur la chaine YouTube Des Paons Danse Cent Heures Parfums que ce jus avait des notes communes avec l’un des parfums de la Private Blend de Tom Ford mais je ne le connais pas encore alors je n’en parlerai pas ici mais j’y reviendrai sans doute.
En règle générale, je n’accroche absolument pas avec les parfums de la marque By Kilian mais il y a, comme souvent, une exception qui confirme la règle et c’est « Liaisons Dangereuses » supposé nous emmener sur les traces de Valmont et de Madame de Merteuil. Bon, moi je ne le trouve pas très XVIIIème siècle mais plutôt ultra moderne et les liaisons dangereuses se situent surtout entre les notes. Tout le parfum est construit dans une dualité entre les fruits noirs, notamment le cassis et la prune et les différentes notes boisées du fond. Le coeur est plus floral et épicé ce qui équilibre le parfum. Créé en 2007 par Calice Becker, « Liaisons Dangereuses » est avant tout, pour moi, un boisé avec une « prune sur le gâteau » et il faut admettre qu’il est très bien construit. Pour l’aborder, j’ai du faire abstraction du prix délirant du flacon et du côté bling bling de la maison qui a un peu tendance à m’agacer mais je ne le regrette pas car le jus est intéressant. Il n’est pas ma prune préférée mais j’aime assez.
Même s’il a été arrêté, il m’est bien difficile de parler de la note de prune sans évoquer « Mon Parfum Chéri par Camille », créé par Isabelle Doyen pour Annick Goutal avec la collaboration de sa fille Camille et lancé en 2011. Il a été arrêté il y a deux ou trois ans et c’est un de mes plus grands regrets. J’en avais déjà parlé dans mon article sur la marque mais je voulais y revenir car je trouve qu’il manque vraiment. C’était un parfum très linéaire, très « boudoir » avec des notes d’iris, d’héliotrope, de violette et de prune confite soutenues par un fond de patchouli. J’ai vraiment adoré cette création inspirée, extravagante voire même excentrique entre oriental et floral. Pour moi, avec « Mandragore Pourpre », il reste l’une des plus belles réussites de la maison après la disparition de Madame Goutal. Singulier et envoûtant, « Mon Parfum Chéri » a été vraiment inventé par et pour Camille Goutal et, lorsqu’elle en parlait, on se rendait bien compte qu’elle était consciente qu’il ne serait pas un gros succès mais simplement un ovni dans le milieu de la parfumerie. Je trouve qu’il y avait, dans ce jus, toute la créativité et le talent d’Isabelle Doyen qui, lorsqu’elle s’écarte des grands classiques, comme elle l’avait fait pour « l’Eau du Fier » qui n’existe plus ou pour « Sables », sait vraiment délirer et passer outre tous les codes. Oui, « Mon Parfum Chéri » est un de mes grands regrets car il était merveilleux.
J’ai très envie d’un parfum « prune » et je suis un peu hésitant entre le fait de vraiment investir en sachant que je le porterai peu mais que j’aimerai le sentir ou d’aller vers un budget plus raisonnable afin d’apprivoiser la note sur moi avant d’être plus audacieux. Dans cet article, c’est vrai, je n’ai pas exploré de nouvelles pistes mais plutôt fait le tour de mes goûts en matière de parfumerie « fruitée » qui n’est pas le versant que je préfère d’habitude… Mais j’y viens…
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