Dora Baghriche, une vraie signature
C’est suite à une interview en podcast que j’ai découvert que je connaissais plusieurs des créations de Dora Baghriche parfumeur chez Firmenich. Je dois dire que j’ai beaucoup aimé sa démarche artistique et j’ai eu envie de me pencher sur son travail. De plus, il y avait longtemps que je n’avais pas écrit de portrait parfumé et j’ai trouvé agréable de me promener dans quatre fragrances que la maître parfumeure a inventé. Je suis allé remettre mon nez sur deux d’entre-elles car je les avais un peu oubliées. J’ai pris conscience qu’il y avait un fil conducteur entre toutes ses créations. Tout d’abord, une dimension gourmande sans jamais être gratuitement sucrée. Il y a aussi, je trouve, dans plusieurs parfums, une dimension à la fois florale et aquatique. J’ai fait l’impasse sur les deux « Eau d’Issey » d’été qui viennent de sortir et qu’elle a créé avec Marie Salamagne et Daphné Bugey car je pense que je leur consacrerai un article à part entière et je me suis concentré sur des fragrances que je trouve vraiment significatives.
Le premier parfum que je connaissais déjà a déjà plus de dix ans et pourtant je le trouve d’une rare modernité. Il s’agit de « Still Life », créé par Dora Baghriche pour Olfactive Studio en 2011. « Parfum pétillant et festif, « Still Life » est une célébration de la vie ! Un parfum surprenant et lumineux qui invite à faire la fête avec éclat dans un tourbillon de cocktails exotiques. L’éclat du Yuzu, agrume nippon à forte personnalité, qu’accompagne un cocktail fusant de poivres rares, de rhum et de bois chauds. Un contraste absolu entre une fraîcheur toujours présente et des notes chaleureuses. Un parfum hespéridé boisé contrasté, pop et vivant ! ». Je le trouve ultra facetté avec son envolée de yuzu très fraîche, d’élémi et de différents poivres tels que le noir, le rose et le poivre du Sichuan qui lui donnent un volute à la fois épicé et presque aromatique. Le coeur, très vert, de badiane et de galbanum, s’arrondit avec des notes de rhum brun, de cèdre et d’ambroxan. « Still Life » est très original et il a à la fois une certaine fraîcheur verte si j’ose dire, et une rondeur un peu liquoreuse et inattendue. Je dois dire que je pourrais tout à fait me l’approprier. Je l’ai trouvé très beau sue la peau. Il est épuisé sur le site mais je pense qu’on peut le trouver encore en parfumerie assez facilement. J’avais une dose d’essai et je l’ai utilisée intégralement pour mon article. J’ai beaucoup aimé.
Je l’avoue humblement, je ne connaissais pas du tout « Caligna » créé par Dora Baghriche pour L’Artisan Parfumeur en 2013. Je suis passé des centaines de fois devant le flacon sans jamais tenter de sentir le parfum et j’ai eu tort car je le trouve tout à fait dans l’esprit inventif de la marque. « Les paysages de Grasse racontés autour d'une sauge lumineuse. Une matière fraîche et aromatique alliée à des notes de figue et de jasmin, sur un fond de pin ». C’est un parfum à la fois aromatique, floral et franchement fruité. J’ai trouvé qu’il avait quelque chose d’assez déroutant. Le départ de figue, de sauge sclarée et de rose ne me plait pas forcément mais j’aime beaucoup le coeur jasmin et violette rendu complexe par une note de lentisque. Le fond est tout aussi déroutant car il associe une essence de pin très résineuse à un versant cèdre et à un autre très ambré. Pour résumer, je dirai que ce parfum, très facetté, est particulièrement original. Sur ma peau, il évolue vraiment vers un côté très jasminé et légèrement gourmand. Il ne reste absolument pas aromatique. Je lui trouve une dualité très intéressante et je pense que, comme beaucoup de création, il faut vraiment l’essayer sur soi. Je ne sais pas s’il serait vraiment pour moi mais je l’ai trouvé très intéressant.
En 2016, à la demande de la marque, Dora Baghriche a décliné « Still Life » pour inventer « Still Life in Rio » que je trouve très différent. Il est ainsi décrit : « L’art de la lumière s’exprime pleinement avec cette nouvelle création, mais il s’agit du rayonnement de l’astre, de la lueur originelle, qui convient parfaitement à ce parfum solaire. Exotique et lumineux, Still Life in Rio est un nouveau cocktail inédit avec son départ de yuzu, de gingembre, de menthe et d’essence de citron, il s’épanouit et se réchauffe avec l’alliance de poivres, de piment baies, et d’eau de coco, emportés par l’essence de Rhum et de baume de Copahu du Brésil ». Dès la vaporisation, il m’a fait penser à un aromatique classique mais il ne faut pas s’y fier. Comme son prédécesseur, l’ouverture est assez explosive avec des notes de yuzu, de gingembre très présent, de menthe, de citron et de mandarine puis le coeur se fait très épicé avec la baie de piments, les poivres noirs et rose et s’arrondit, avec toujours cet accent gourmand, en s’enrichissant d’un accord eau de coco. Le fond de rhum, de baume de copahu est très rond et liquoreux mais jamais écoeurant car il est contrebalancé par des notes cuirées. Sur ma peau, j’ai préféré quand même l’original même si je trouve les deux parfums très différents et intéressants. Je pourrais porter les deux mais j’ai quand même une préférence pour « Still Life ».
« Gardénia Antigua est une réinterprétation olfactive de l’île d’Antigua, le petit paradis de Giorgio Armani où il aime passer de précieux moments. De la même façon que la lumière et le soleil créent des reflets uniques sur les eaux d’Antigua, ce parfum unisexe symbolise l’harmonie parfaite entre des notes lumineuses et chaudes. Le parfum de la fleur de gardénia se voit atténué par une fraîcheur marine iodée et des notes de mandarine ». J’aime beaucoup la collection Armani Privé et pourtant, l’an dernier à sa sortie, j’étais complètement passé à côté de « Gardénia Antigua ». Je l’ai découvert lors de mon dernier passage à Paris et vraiment, c’est l’un de mes coups de coeur dans la marque. Le départ est à la fois très « juteux » avec une très belle essence de mandarine, et floral avec des notes de néroli, le coeur, construit autour d’un accord de gardénia enveloppé de jasmin sambac très rond et légèrement animal me plait beaucoup. Le fond de patchouli, d’ambroxan et de muscs blancs lui donne une facette très « propre » et envoûtante. Ce parfum, sorti en 2021, est vraiment une trouvaille. Sur ma peau, il a un petit côté addictif et vintage à la fois. C’est un gardénia comme je les aime, profond, floral et quand même un peu singulier. J’espère qu’il rencontrera son public.
J’ai encore beaucoup à découvrir du travail de Dora Baghirche. Je me rends compte que j’aime bien sa signature. En faisant quelques petites recherches pour écrire cet article, je me suis rendu-compte que je rentrais dans son univers très facilement et que, malgré une belle personnalité, ses parfums sont faciles à porter et plaisants. Je leur trouve toujours un petit côté qui donne envie d’y revenir.
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