Passion Parfums

L’odeur de la fleur d’aubépine en parfumerie a un petit côté à la fois doux et amer. Elle donne souvent beaucoup de relief à une fragrance florale ou chyprée. Je me faisais la réflexion en préparant cet article. J’ai remis mon nez dans certains parfums dont la pyramide olfactive présente cette note de manière majeure et je me suis rendu compte qu’il y en avait plusieurs que j’aimais bien. J’ai choisi quatre créations dans lesquelles je trouve la note très présente et facilement identifiable. Je ne sais pas si vous y aurez accès facilement mais j’espère vous donner envie de les découvrir. J’ai opté pour des fragrances que j’aime en priorité et que je connais bien. Je vous emmène donc sur la route où vous pourrez croiser ce buisson épineux et fleuri à la fois.

« François Rancé a dédié ce parfum à la femme la plus aimée de Napoléon: Joséphine. Aujourd'hui "Joséphine" vit de nouveau par Jeanne Sandra Rancé, l'arrière-arrière-petite-fille de François. L'intensité des fleurs de printemps, la séduction des notes exotiques, l'harmonie pénétrante des fruits et des bois, créent une composition qui est une invitation à la sensualité, dans une atmosphère de riche élégance. C'est à la femme la plus aimée de Napoléon que François Rancé a dédié ce parfum. Aujourd'hui, Joséphine renaît dans une fragrance florale, intime et mystérieuse. En ouverture, la douceur enveloppante de la rose bulgare se mêle à la violette dans un bouquet sophistiqué de fleurs fraîches, avec des accents de groseille. Au cœur, la fleur de vanille, chaude et enveloppante, se mêle à l'opoponax et au poivre rose, dans un mélange épicé et légèrement terreux. Le fond de mousses, modulé comme un velours, est réchauffé par les tonalités boisées et résineuses de l'encens d'Oman. Joséphine : le charme d'une femme brillante, vive, surprenante ». C’est grâce à Florence de la boutique Arcana Rosa de Vichy que j’ai découvert la maison Rancé 1795 et je dois dire que j’ai aimé l’esprit résolument historique des fragrances et particulièrement de « Joséphine », créé par Jeanne Sandra Rancé en 2005 et qui est l’un de mes deux coups de coeur dans la marque. C’est ce que j’appellerai un grand floral qui s’ouvre avec des notes un peu amères d’aubépines adoucies par la rose et la violette qui lui confèrent un côté un peu poudré et acidulé par une note de groseille. Le coeur, vanillé et épicé de poivre rose est enveloppé de l’opoponax qui lui donne plein de nuances. Le coeur peut avoir un côté un peu duel et il soutient merveilleusement une rose très présente. Au fond, les muscs, l’ambre et l’encens assurent à la fragrance une tenue et un sillage très élégant. L’aubépine est vraiment comme un twist élégant et inattendu au coeur de ce fleuri qui pourrait sembler classique sans trop l’être.

 

Lorsque Gian Luca Perris s’est adjoint, pour créer la collection de Grasse pour sa marque, le talent et la singularité du travail de Jean-Claude Ellena, il savait ce qu’il faisait. Quand, à sa sortie, en 2020, j’ai découvert « Mimosa Tanneron », je dois dire que j’ai été vraiment bluffé par l’apparente simplicité qui se fait singularité au fur et à mesure que le parfum évolue sur ma peau. Je l’ai pas mal porté alors je peux en parler facilement. L’envolée est très poudrée comme le mimosa dans la nature mais vraiment l’aubépine lui donne, en coeur, vraiment un côté à la fois floral et boisé et accentue son caractère solaire. Quant à la rose, elle rappelle combien, dans la nature, l’odeur du mimosa est poudrée. Le fond de musc est très beau. Il donne du relief et l’évolution du parfum ne serait pas la même sans cette note d’aubépine travaillée en majeur. « Le mimosa apparait en Provence au milieu de 19ème siècle.  Les Anglais, après l’avoir découvert en flânant dans Hyde Park et son merveilleux Cristal Palace, demandèrent à retrouver l’arbre sur la Côte d’Azur où ils venaient passer l’hiver. La demande fût si forte que l’on planta des mimosas dans le Tanneron. Mimosa Tanneron est une ode à la tendresse et à la douceur, aux premiers émois amoureux ». Contemporain et simple sans jamais être simpliste, il est l’un des plus beaux parfums que j’ai pu essayer dans la marque. Il est pour moi, c’est un fait et j’ai énormément de plaisir à le porter.

J’ai plus de mal à porter « Melograno » qui est vraiment le parfum emblématique de Santa Maria Novella, non seulement décliné en eau de toilette mais également en divers produits pour la maison ou pour le visage et le corps. Son effluve est vraiment identifiable entre mille. En tout cas, je le connais bien. Lancé en 1965, il a su devenir un classique et la note d’aubépine est particulièrement présente même si elle est n’est qu’une composante de la pyramide olfactive. « Melograno vous raconte une histoire enchanteresse, inspirée par 800 ans de tradition, qui ne demande qu’à devenir votre histoire. Un voyage à travers les sens évoquant les sensations rares de la Perse magique, un hymne à la fertilité et à l’abondance. Le parfum Melograno de l’Officina Profumo-Farmaceutica di Santa Maria Novella est un bouquet de notes douces florales et orientales. Le parfum évoque des sensations chaudes et accueillantes et véritablement interprète la signification symbolique de l’arbre. Le grenadier s’est répandu de la Perse à la Méditerranée. Il a embelli de nombreuses tombes de l’Égypte ancien. Le fruit de la grenade a une très riche symbolique. Il apparaît dans le Cantique des Cantiques, dans l’Odyssée et dans le folklore ancien, emblématique de la fertilité et de l’abondance ». L’envolée est vraiment hespéridée et épicée avec la bergamote, l’orange amère et les épices, le coeur de grenade est très beau car il recèle les effluves d’ylang-ylang, de rose et bien évidemment d’aubépine qui le rend très texturé. Vraiment je l’aime beaucoup le parfum à ce stade de son évolution. Le fond de mousse de chêne et de patchouli est légèrement cuiré par le labdanum et les notes musquées rejoignent presque une facette encens. Je ne pourrais pas porter « Melograno » mais j’aime le sentir et je le préfère presque en ambiance même si je reconnais que c’est un très beau parfum.

Je trouve que « Louanges Profanes 19 » créé en 2008 par Pierre Guillaume pour la Collection Numéraire de sa marque éponyme est l’une des plus évidentes expressions de la note d’aubépine. « Une nuit d’amour avec un ange… Un Floral Ambré Immaculé, lumineux et pur. Une Prière Olfactive écrite à l’encre de six symbolismes religieux… ». C’est un floral ambré avec un départ très classique de néroli, un coeur de lys et de benjoin rendu plus sec par l’aubépine et un fond d’encens. Il ne ressemble absolument à rien d’autre et je comprends assez bien le lien ténu entre notes poudrées et sèches. Bien avant que ce type de parfums intéresse les créateurs, Pierre Guillaume a créé un parfum très étonnant et d’une grande élégance. Je pense que ça du être un peu compliqué d’inventer un parfum dont le nom a à la fois une connotation religieuse et païenne. Je dois dire que ça m’évoque quelque chose de sulfureux mais je trouve, finalement, « Louanges Profanes » très double. Il a des aspects sages et, d’un coup, il devient presque addictif. Il est un peu difficile pour moi mais je sais lui reconnaitre une merveilleuse construction chyprée et poudrée. « Louanges Profanes » est un très grand parfum. Je ne pourrais sans doute pas le porter mais je trouve que l’aubépine lui donne vraiment quelque chose d’unique et de complètement singulier.

Bien évidemment, je pourrais citer des parfums aujourd’hui disparus dans lesquels l’aubépine était reine. Je pense à « Vacances » de Jean Patou par exemple ou encore le très beau « Cuir Pleine Fleur » de James Heeley que j’aimais beaucoup mais qui a été supprimé du catalogue. C’est une matière première à découvrir et redécouvrir car elle est vraiment différenciante.