Passion Parfums

Il y a quelques années, j’avais mis mon nez dans les parfums Hiram Green et je n’avais pas accroché. Je ne dis pas souvent « jamais » et, lorsque Fabien de la boutique Yuuminoki qui a vu le jour au coeur du Béarn et dont nous reparlerons, ma proposé de les réessayer, j’ai sauté sur l’occasion. Les flacons sont magnifiques et la démarche 100% naturelle est intéressante d’autant que je sais que la qualité des jus est excellente. Serais-je plus sensible que la première fois ? Je vais essayer de vous livrer mes impressions de mon mieux.

 

Hiram Green

J’ai commencé mes essais chez Hiram Green par « Arbolé » que le parfumeur a créé en 2016 Et qu’il a décrit ainsi : « Arbolé tire son nom et son esprit du poème de Federico Lorca, qui s'ouvre sur le vers « arbre, arbre, sec et vert ». Pensez à un après-midi d'été paresseux quelque part dans l'arrière-pays d'Ibiza : un vent salé et sec soufflant à travers les arbres et une trace d'encens persistant dans l'air. C'est un parfum romantique avec une touche vintage. Arbolé s'ouvre sur une explosion de patchouli terreux qui se fond lentement avec le bois de cèdre riche et le bois de santal velouté. La vanille et la fève tonka ancrent le parfum et fournissent une base douce et poudrée ». Il est, pour moi, très linéaire, il n’a pas vraiment de pyramide olfactive avec des notes de tête, de coeur et de fond. Il est un peu construit comme les parfums Serge Lutens en version 100% naturel. C’est comme un coeur qui se pose sur un fond de cèdre et de bois de santal directement. J’ai du mal à sentir le patchouli par contre, j’ai bien le côté amandé de la fève tonka qui se développent sur ma peau et se mêlent au côté « copeaux de crayons à papier fraichement taillés » du cèdre et lacté du bois de santal. Je dois dire que ce parfum, auquel je ne nie pas une certaine originalité, n’est absolument pas pour moi. Il a tendance à m’écoeurer un peu surtout à la toute fin de son évolution. Il est complètement hors de ma zone de confort et je ne pense pas, dans l’immédiat, pourvoir me l’approprier. Ceci dit, il est très original et extrêmement bien réalisé.

J’avais beaucoup entendu parler de « Slowdive », littéralement « plongée lente », lancé en 2017, qui a été également créé par Hiram Green qui a réalisé chacune des créations de sa marque. Je dois dire que j’en attendais beaucoup. C’est un travail autour de la tubéreuse, du miel, des fruits secs avec un départ de néroli et de fleur d’orange et un fond très résineux. Le côté miel et surtout cire d’abeille est prépondérant sur ma peau et je dois dire que ça m’a pas mal dérangé. La marque le décrit ainsi : « Slowdive est un parfum chaleureux sur le thème du tabac qui capture l'ambiance de ces après-midi langoureux où la douceur de l'air de l'été indien est presque palpable. Le parfum enivrant des fleurs d'été et le bourdonnement des abeilles vous entourent alors que vous fuyez le grand soleil d’été. Le parfum s'ouvre sur des notes de tête fraîches et fleuries de néroli et de fleur d'oranger avant que la fleur de tabac, le miel et la cire d'abeille ne prennent le dessus. Le cœur - riche et profond, avec des notes de fruits secs et de tubéreuse crémeuse - est délicatement ancré par une base de résines chaudes qui donnent à Slowdive sa touche douce et exotique ». Finalement très oriental, « Slowdive » est très très rond, gourmand et vraiment la tubéreuse reste un peu médicinale. Je dois dire que ce n’est pas vraiment l’interprétation que je préfère. Je crois que je ne pourrais absolument pas porter ce parfum mais je sais qu’il va plaire beaucoup à celles et ceux que le côté miellé à l’extrême est « la tasse de thé ». Pour ma part, j’ai eu l’impression de sentir un peu le miel de sureau que je connais depuis mon enfance. Le côté fleur de tabac ressort très bien. C’est certain, c’est un parfum qui a des qualités mais il est un peu trop éloigné de ma palette olfactive de prédilection.

« Vivacious » est sorti en 2020 et il est l’un de ceux de la collection que je ne connaissais pas du tout. Le parfumeur le décrit ainsi : « Vivacious est un parfum sur le thème de la violette qui s'inspire de ces victoriens primitifs qui adoraient tant cette fleur précieuse. Mis à jour pour le 21e siècle, ce parfum a un flair joyeux et insouciant. Le parfum s'ouvre sur une bergamote lumineuse et joyeuse qui se fond harmonieusement dans un bouquet floral de violette séduisante et d'œillet épicé. L'iris cireux ancre en douceur ce cœur bruyant et l'ambre doux et poudré ajoute une finition chaleureuse et luxueuse. Vivacious est un parfum exubérant et joyeux ». Le départ est très vif et m’a un peu dérangé je dois bien le dire. La bergamote est très dense et travaillée de manière très verte. Le coeur a quelque chose d’animal avec l’association iris et violette vue d’une manière ni poudrée ni classique et le fond ambré vient s’ajouter à ce parfum singulier entre notes vertes, florales et presque un peu orientales. Je dois dire que je suis très dérouté par « Vivacious ». Il est vraiment très intéressant dans son évolution mais sa tenue sur ma peau est relativement limitée. Par contre, il demeure, dans la marque, l’un de mes préférés du moins au moment où j’écris cet article. Il est très facetté, intéressant et floral. Je pourrais tout à fait le porter. Il m’emmène dans un jardin imaginaire et m’évoque, je ne sais pas pourquoi, les fleurs qui parlent dans « Alice au pays des merveilles » de Lewis Carroll.

Telle une tubéreuse à la tombée de la nuit, « Moon Bloom », lancé en 2013 est un faux soliflore puisque la fleur mythique est entourée d’un départ de notes vertes et épicées, d’un coeur de jasmin, d’ylang-ylang et de noix de coco associé à d’autres épices tropicales sur lesquelles la marque ne communique pas. Le fond, résineux n’est là que pour soutenir la fragrance et lui donner, « l’épaisseur » qui lui convient. C’est un parfum très intéressant car la tubéreuse, pour une fois, revêt toutes ses facettes et ne reste jamais unique. La marque décrit ainsi « Moon Bloom » : « Moon Bloom s'inspire de la tubéreuse, une fleur à l'arôme doux et crémeux unique qui est souvent appelée la maîtresse de la nuit. Non seulement parce qu'il libère son parfum pendant la nuit, mais aussi en raison de ses propriétés aphrodisiaques intenses. Moon Bloom est une exploration de la brève vie de la tubéreuse. L'odeur verte fraîche de la tige et des feuilles vous prépare à peine à un cœur opulent narcotique plein de fleurs blanches sucrées et épicées. Au fur et à mesure que le parfum sèche, le parfum mûrit en une base épaisse, humide et presque tropicale de noix de coco crémeuse et de résines chaudes. Moon Bloom était le premier parfum d'Hiram Green et reste l'une de ses créations les plus populaires ». À mi-chemin entre une interprétation vintage et l’intemporalité d’une fragrance contemporaine, ce parfum 100% naturel réussit à être aussi facetté qu’un autre tout en mettant la matière première travaillée en majeur en avant. C’est mon premier vrai coup de coeur dans la marque car son évolution sur la peau est très belle et je trouve la création très aboutie. Je l’avoue, j’étais complètement passé à côté lors de ma découverte de Hiram Green.

Le dernier parfum que j’ai pu essayer est « Hyde » sorti en 2018 et je dois dire que j’ai été agréablement surpris non pas par son originalité car je connais déjà au moins deux fragrances qui sont dans cet esprit cuir et liqueur, mais par sa réalisation et sa tenue compte-tenu qu’il ne comporte que des matières naturelles dans sa composition. « Hyde est un parfum sensuel et envoûtant sur le thème du cuir. Hyde s'ouvre sur un puissant éclat de citron et de bergamote éclatants. Ces notes gaies se heurtent alors au parfum sec et vif du goudron de bouleau, rappelant le bois brûlé - et de la cassie, une fleur opulente aux nuances vertes intenses et épicées. Les deux forment une note de cuir vibrante avec une profondeur puissante et un attrait intense. Ce cœur battant est entouré d'une base chaleureuse et élégante de labdanum fumé et de vanille de malt se fondant dans une mousse de chêne terreuse. Séduisant et stimulant, Hyde est une ode à toutes ces âmes en quête d'aventure - un parfum unisexe parfait pour le jour et la nuit ». Construit comme un cuir de Russie autour du bouleau et de la mousse de chêne, ce parfum s’ouvre sur un départ de bergamote et de citron et il est presque liquoreux très rapidement ce qui contrebalance le côté très goudronné de l’accord principal arrondi par une vanille, une fleur de cassie poudrée et des notes de labdanum en fond. Je suis vraiment très impressionné par les facettes de ce parfum et par ce que le parfumeur a réussi avec, dans sa palette, uniquement des matières naturelles. Il me rappelle beaucoup « Alcools » des la collection La Pléïade de Jardins d’écrivains, il peut aussi avoir des accents de certains Beauforts London. Il faut le dire, « Hyde » me plait beaucoup. Il me réconcilie un peu avec la marque que je n’avais pas vraiment aimé lorsque je l’ai découverte.

C’est par « Vétiver » que je termine ma redécouverte des parfums Hiram Green et qui est la nouveauté 2021. « Ce parfum épicé et boisé est ce que nous imaginons sentir comme les idoles de l'âge d'or d'Hollywood : élégant et charmant, mais vigoureux et aventureux. Le parfum tire son nom et se concentre autour du vétiver, une extraordinaire graminée tropicale originaire d'Inde. Son odeur est complexe : à la fois fraîche, épicée, terreuse et boisée. Bien que le vétiver soit un ingrédient populaire dans les parfums masculins, des exemples inspirants de parfums moins masculins peuvent certainement être trouvés dans l'histoire du parfum. Comme vous pouvez vous y attendre, le vétiver de Hiram Green refuse de choisir son camp. Le vétiver s'ouvre sur un mélange aromatique pointu d'agrumes, suivi de gingembre frais. En son cœur, toutes les facettes du vétiver sont présentes. Pour ajouter de la profondeur et de la complexité, nous avons inclus deux variétés de vétiver, l'une d'Haïti et l'autre de Java. Une fois que le cœur de vétiver commence à s'affaisser, le bois de cèdre et la graine d'ambrette offrent une finition douce et douce ». Il semblerait que, cette année, cette matière première emblématique, ait inspiré les parfumeurs et Hiram Green a pris le parti de réinterpréter cette note en la conjugant avec le bois de cèdre et l’ambrette en fond après avoir revêtu des accords frais de citron et de gingembre. Très honnêtement, je dirais que c’est un énième parfum dans lequel le vétiver est travaillé en majeur et l’un des rares dans les gammes 100% naturelles. Ceci dit, c’est senti, senti et re-senti. J’aime beaucoup et je pourrais tout à fait porter « Vétiver » mais je ne vois pas trop ce qu’il apporte à l’offre déjà existante si ce n’est sa composition « green ». Il n’en reste pas moins qu’il est agréable et réussi alors si le coeur vous en dit…

Grâce à Fabien, j’ai pu remettre mon nez dans les créations de la maison Hiram Green et je dois dire que j’ai en partie revu ma copie. Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis ! Certes, je suis toujours assez mitigé et la marque, dans son ensemble, n’est pas un coup de coeur il faut le dire mais sur les six parfums que j’ai pu essayer, j’en ai vraiment aimé deux, j’en ai trouvé deux sympas et, en revanche, je n’ai absolument pas accroché sur les deux autres. C’est ça aussi la parfumerie de niche, des univers clivants, qui ne font pas l’unanimité et qui laissent libre court à la créativité. C’est le cas d’Hiram Green et de sa maison. On sent qu’il s’est fait plaisir. C’est une maison qui, en France, jusque-là, n’a pas vraiment une grande visibilité. Les tentatives parisiennes se sont soldées par un certain insuccès, je remercie donc doublement Fabien d’avoir tenté le pari et de m’avoir fait redécouvrir ces parfums afin que je puisse affiner mon avis et, parfois, changer un peu d’opinion.