Passion Parfums

Germaine Cellier

« Germaine Cellier, née le 26 mars 1909 à Bordeaux et morte le 12 juin 1976 à Clichy, est une parfumeuse française. Connue pour avoir créé des fragrances comme Bandit ou Fracas, elle est une des premières femmes à avoir acquis une notoriété, grâce à plusieurs créations couronnées de succès, dans ce métier de nez, à l'époque dominé par les hommes ». Depuis que je m’intéresse à la parfumerie, je suis assez fasciné par la figure de Germaine Cellier, première femme parfumeuse, après la seconde guerre mondiale, non seulement pour l’inventivité de ce qu’elle a composé mais aussi pour la figure qu’elle représente et qui a ouvert une voie. En effet, aujourd’hui il y a autant de femmes que d’hommes qui exercent l’art de créer en parfumerie mais elle a été la première. Bien sûr, elle n’est pas restée dans les mémoire que pour cela mais je trouve que ça compte. Après, il y a le romanesque du personnage. Germaine, c’était quelqu’un. Elle avait, on le sait, un caractère bien trempé, « clope au bec », elle faisait déjà tomber les barrières. Je rappelle qu’elle a créé le très subversif « Bandit » (qui était destiné à devenir un féminin uniquement) en 1944 quand la France était encore occupée et qu’elle a pris ses risques d’artistes, tout comme le couturier Robert Piguet, de lancer sur le marché un parfum vraiment subversif, androgyne et particulièrement impressionnant. Pour re-situer, même si j’en ai parlé souvent, même si j’en ai parlé souvent vu qu’il existe toujours, il s’agit d’un chypré cuiré et vert dans lequel les fleurs n’ont qu’un rôle accessoire. Il a été très fondateur pour nombre de créations qui ont vu le jour par la suite, je citerai « Cabochard » de Grès ou encore « Dioressence » de Christian Dior par exemple. Il avait été supprimé au profit d’un « Suprême Bandit » composé par Aurélien Guichard il y a quelques années mais est ressorti il y a quelques années. Je parle facilement de « Bandit » parce que je l’ai beaucoup porté. C’est un intemporel d’une rare androgynie.

Germaine Cellier a également composé « Vent Vert » pour Balmain en 1947. J’ai eu la chance de connaitre ce parfum dans sa version originale et je peux vous dire qu’il était tout sauf consensuel. Vif comme un éclair, tranchant comme une lame et vert comme une promenade dans un jardin au début du printemps, il ne passait pas inaperçu. J’ai adoré ce parfum dans mon enfance et je crois que je suis toujours dans une quête de la fragrance verte idéale à cause de cela. J’ai, d’ailleurs été très déçu de la réinterprétation de ce parfum par Shyamala Maisondieu et Calice Becker en 2024. Je l’ai trouvée assez insipide même si c’est quand même l’une de celles qui « se tient le mieux ». Germaine Cellier n’était pas une femme de consensus. Elle y allait à fond. Je n’ai pas eu la chance de sentir les autres parfums qu’elle a composé pour Balmain comme Élysées 64 83 », « Jolie Madame » ou encore « Monsieur Balmain » mais je crois que ça m’aurait plu. D’autres créations comme « La Fuite des Heures » pour Balenciaga ou encore « Coeur Joie » pour Nina Ricci ne sont pas non plus venus jusqu’à moi et pourtant j’aurais bien aimé. En revanche, je connais « Fracas » qu’elle a créé pour Robert Piguet en 1948 et qui est, pour moi, vraiment « le » parfum à l’origine de toutes les tubéreuses un peu subversives qui ont suivi. Je l’aime « Fracas ». Il me fait de l’oeil depuis des années et je suis certain qu’il fait partie des chefs-d’oeuvres de la parfumerie. Il a « habillé » nombre de personnalités dont Juliette Gréco, c’est dire que c’est un phénomène. Je ne me verrais pas le porter car il est la quintessence d’une féminité presque vénéneuse. Encore une fois, il faut le remettre dans son époque, il fallait oser le côté ultra-charnel. J’aime énormément ce parfum qui a du évoluer au cours des décennies mais la version proposée actuellement me séduit énormément.

Alors que reste-t-il de Germaine Cellier hormis les deux parfums qui sont encore commercialisés ? Et bien je dirais tout. En effet, elle a ouvert la voie à une parfumerie féminine, voire féministe et ses héritières sont nombreuses. Je pourrais citer Anne Flipo bien sûr, qui travaille les notes naturalistes comme personne mais aussi Daphné Bugey qui ne s’interdit rien, surtout lorsqu’elle compose des parfums pour La Botanique de l’Artisan Parfumeur mais il y en a tant d’autres. Sa signature a aussi énormément inspiré les parfumeurs. Je parlais, du « chemin » qu’a ouvert « Bandit » mais je pourrais aussi évoquer « Synthetic Nature » d’Anne Flipo justement pour les Éditions de Parfums Frédéric Malle et quelques autres qui ont étés inspirés par l’univers luxuriant et frais de « Vent Vert ». « Fracas » aussi, a mis la tubéreuse au centre du jeu… Aujourd’hui, nous avons encore des parfums dont elle compose le coeur et je crois que le petit flacon noir de Robert Piguet n’y est pas pour rien.

C’est vrai que je suis particulièrement impressionné par la personnalité et l’aura du talent de Germaine Cellier. Je me plais à penser que ses parfums n’ont pas pris vraiment de ride tant ils sont intemporel même si je me demande même s’ils n’auraient pas un certain succès s’ils débarquaient aujourd’hui sur le marché. Alors Germaine précurseur, Germaine visionnaire… Je ne sais pas pas mais surtout Germaine sans portes fermées. C’est une force qui lui a permis de venir, olfactivement sur ma peau.