La noix de muscade, une note que j'aime particulièrement
J’aime bien la noix de muscade en cuisine mais c’est surtout une de mes notes de prédilection en parfumerie. Discrète ou plus présente, elle apporte aux fragrances dans lesquelles elle est présente une petite touche atypique et chic. J’ai découvert cette addiction en portant l’un de mes parfums préférés sur lequel je vais revenir. Je trouve que c’est une note tout à fait unique qui donne quelque chose de clair obscur complètement unique. Elle peut être utilisée dans des créations très épicées, associées à la cannelle, au gingembre ou à d’autres matières premières mais aussi dans des orientaux auxquels elle donne une vraie personnalité différenciante et je crois que je vais la remarquer tout de suite.
C’est avec « Noir Épices » créé en 2000 par Michel Roudnitska pour les Éditions de Parfum Frédéric Malle que j’ai découvert que j’aimais beaucoup la note de muscade. Je porte ce parfum depuis déjà plusieurs années et je ne m’en lasse pas. Il ne ressemble à rien d’autre. Je l’ai déjà évoqué souvent mais il est vraiment parmi les créations que je préfère à la fois dans la marque mais aussi dans toute la parfumerie contemporaine. Créé à l’origine comme « un grand féminin pour des brunes élégantes », il s’est avéré devenir non seulement adopté par des blondes puisque Catherine Deneuve, l’une des plus emblématiques l’a porté, mais surtout, il est, contrairement à ce qu’attendait Michel Roudnitska, par autant d’hommes que de femmes. C’est un « unisexe sans le savoir ». Pour ma part, il a été un coup de foudre intense et ça ne s’est jamais démenti. Frédéric Malle, qui a l’art de « raconter » les parfums, l’a décrit ainsi : « Un parfum composé comme une toile de Rothko, où couche après couche, les textures et les couleurs deviennent de plus en plus sombres, profondes, et mystérieuses. Un bouquet d’épices qui repose sur une base crépusculaire de bois de santal et de patchouli. Un départ d’orange et de géranium provoque un léger clair-obscur et ajoute une vibration supplémentaire à ce tableau abstrait ». Après un départ d’orange amère et de géranium, les épices explosent et on retrouve, autour de la noix de muscade, le clou de girofle, la cannelle et le poivre blanc pour évoluer sur un fond de santal mais surtout de patchouli. C’est une merveille d’originalité, de sensualité et de classe. Pour moi, et je pèse mes mots, « Noir Épices » est sans doute en bonne place des dix plus beaux parfums que j’ai pu découvrir.
C’est un mythe à n’en pas douter. « Habanita » est décrit ainsi par la maison Molinard : « Véritable icône de la parfumerie, Habanita révolutionne les codes en 1921, en s'imposant comme le premier parfum oriental de l'histoire. Hier audace suprême, sa pointe de vétiver jusqu'alors réservée aux hommes séduit alors les femmes, en quête de liberté. Aujourd'hui parfum mythique, sa signature olfactive évolue à fleur de peau, déployant un sillage floral, boisé, poudré, infiniment sensuel, d'une richesse sans pareil ». C’est seulement en 2012 que la marque le lance en eau de parfum et livre sa version la plus facile à trouver. C’est un parfum oriental d’une grande complexité avec un départ de géranium, de lentisque et de petit grain, un coeur de noix de muscade, de vétiver de jasmin et de rose et un fond d’ambre, de santal de Mysore et de mousse de chêne. La pyramide est loin d’être exhaustive car j’y détecte également des notes de mimosa, d’ylang ylang et d’héliotrope et un fond vanillé et même de patchouli et de musc presque animal. Je n’ai pas connu la version parfum et l’ancienne eau de toilette mais je dois dire que « Habanita » tel que je l’ai découvert est sans aucun doute l’une des créations les plus complexes et intemporelles que j’ai pu sentir dans le circuit sélectif. Clivant, opulent et doté d’une très grande personnalité, il ne plaira pas à tout le monde. Pour ma part, je le trouve un peu difficile d’accès mais il est vrai que je ne suis pas fou des parfums orientaux et que je préfère des créations plus épurées et qui auraient un esprit un peu plus contemporain. Il reste un incontournable et une fort belle recréation.
« A l’Orient de l’Orient s’élève le suprême Orient… sur une carte secrète et tatouée dans l’imaginaire, en des jardins suspendus… A l’heure où la nuit poursuit le jour, tournent des roses désinvoltes dans le sillage de fleurs blanches délicates. Confites dans un sirop de gousses de vanille sombres, de pêches blanches juteuses et de noix de coco à la chair douce, leur chanson se mêle aux fumées rauques du patchouli » tels sont les mots de Stéphanie Poulage pour décrire sa création, « Suprême Orient », qu’elle a lancé dans sa marque Poulage Parfumeur, en 2015. Pour ce jus, elle a utilisé de très belles et rares matières premières, jugez plutôt, une essence de roses turques, un absolu de jasmin sambac indient, un beurre d’iris naturel, un absolu de vanille de Madagascar, un absolu de cacao, un absolu de gingembre de Chine et, nous y voilà, une magnifique essence de noix de muscade de Ceylan. Lorsque j’ai découvert ce parfum, il y a quelques années, la première chose que je me suis dit c’est qu’il ne ressemblait à rien d’autre. Ensuite m’est venu l’idée qu’il était l’un des rares orientaux sur le marché que je pourrais porter. Je l’aime énormément et je pense qu’un jour, je franchirai le pas. Je le trouve vraiment original. Il n’a ni le côté convenu des orientaux ultra vanillés, ni la lourdeur des bois d’oud si en vogue depuis une dizaine d’années. Stéphanie Poulage a réussi le tour de force de créer un oriental tout en transparence, en nuances, en facettes et en élégance discrète. Oui, en re-sentant ce parfum pour écrire mon article, je me dis que je pourrais le porter avec un grand plaisir.
Il n’est désormais trouvable que sur le site de la marque en ligne et peut-être dans les boutiques parisiennes et je le regrette. « Nutmeg & Ginger » a été le tout premier parfum créé par Jo Malone pour sa marque en 1990 et je l’ai toujours beaucoup aimé. C’est une symphonie d’épices construit, comme son nom l’indique, autour du gingembre et de la noix de muscade avec un fond de bois de santal et de cèdre. La marque le décrit ainsi : « Le premier parfum de Jo Malone London. Le bois de santal et le bois de cèdre sont relevés avec de la noix de muscade et du gingembre vif. Inattendu et addictif ». Désormais presque collector, il m’avait séduit dès la première pression et je crois que c’est le premier que j’ai découvert lorsque les boutiques sont arrivées dans la capitale. J’ai toujours trouvé ce parfum d’une extraordinaire finesse et d’une grande élégance. J’ai été particulièrement séduit par la délicatesse dont cette « apprentie sorcière » de la parfumerie a fait preuve en le créant. C’est un parfum résolument moderne, très « londonien » (ceux qui ont sillonné cette ville me comprendront) qui regroupe toute l’attirance des anglais pour les épices et les parfums transparents et élégants. Attention, nous ne sommes pas dans une grande opulence mais plutôt dans un une création pointilliste qui, par petites touches, nous rappelle qu’il est présent. En écrivant, je fais appel à mes souvenirs et je me dis que j’aurais bien envie de « Nutmeg & Ginger ». Je n’achète pas sur internet mais peut-être, qui sait, lors d’un prochain séjour à Paris…
J’aurais pu aussi citer « Soir de Lune » de Sisley mais je ne l’avais pas trop en tête même si je sais que je l’aime bien. Je suis vraiment amateur de la note de muscade et je dois dire que ces quatre parfums sont quand même, dans mon univers olfactif, incontournables. J’ai pris beaucoup de plaisir à écrire cet article qui me tenait à coeur depuis très longtemps. J’ai envie de continuer ma « route des épices » en parfumerie commencée, il y a quelques mois, avec le gingembre… Alors quel sera la prochaine que je vais explorer ? Je ne sais pas encore mais j’ai quelques idées.
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