Passion Parfums

J’aime le goût du gingembre en cuisine et même en pâtisserie. Goût des épices ou réminiscence de séjours répétés au Royaume Unis, je ne sais pas. On le dit dépuratif, curatif et même aphrodisiaque. Moi, je ne sais pas mais j’ai découvert, il y a quelques années, qu’il était très facilement utilisé en parfumerie et qu’il donnait pas mal de caractères aux fragrances qui le comptait parmi les ingrédients de leur formule. Qu’il soit solinote ou composé, le gingembre est une épice phare et a inspiré de nombreux nez depuis déjà bien longtemps. J’ai décidé de découvrir et de redécouvrir des fragrances qui le mettent à l’honneur et de venir vous en parler d’une manière plus précise que je ne l’avais fait dans mon article sur les parfums épicés. Alors, exotique, mystérieux, envoûtant ? Comment est-il le gingembre en parfumerie ? Je vais essayer de vous apporter de petits éléments de réponse.

En 2019, la maison grassoise Molinard sort plusieurs solinotes dont « Gingembre » que j’ai découvert en traversant le centre commercial de la Part Dieu à Lyon il y a quelques mois et en trainant un peu le long des rayons d’une parfumerie du circuit sélectif que je ne nommerais pas. Les flacons de cette collection m’ont attiré l’oeil et je me suis évidemment tourné vers « Gingembre ». L’ouverture est très douce et hespéridé avec des notes de pamplemousse, de tangerine, de bergamote et de mandarine mais c’est la dualité du gingembre et du jasmin relevée par le petit grain et la noix de muscade au coeur que j’ai préféré. Le fond est très vétiver et je trouve qu’il s’harmonise très bien avec les notes épicées. Il a un côté simple et en même temps original qui ne pouvait que me séduire. C’est un gingembre translucide, très doux et en même temps il ne manque pas de caractère. Il me faudrait l’essayer un peu mieux mais ma première impression est très positive. Coup de chapeau donc à Molinard pour cette jolie création.

 

 

 

Toujours en 2019, « Ginger » a rejoint « Vanilla Exotica » et « Patchouli » dans la collection des parfums aromatiques de Jean Couturier qui semble renaître de ses cendres. Si je n’avais pas vraiment aimé les deux premiers, je dois dire que celui-ci est assez intriguant et très réussi. J’ai enfin réussi à le sentir. Plus sec et plus baumé que celui de Molinard, ce gingembre-là a un côté très très épicé, voire un peu fort et la matière première est réellement solinote tout en étant poudré par des notes de muscs blancs et intensifié par le benjoin. Il m’a moins plu que le précédent mais nul doute qu’il doit très bien tenir. Rien que sur la touche, il m’a semblé puissant et persistant. C’est un parfum brut, presque « sauvage » sans jeu de mots. Il plaira aux amateurs de fragrances à la fois opulentes et singulières car il est tout de même assez original. Personnellement, je ne le porterais sans doute pas mais je reconnais que c’est une belle création.

 

 

 

Dans le style sympa et pas cher, je peux citer « Gingembre » (pas "Gingembre Rouge" attention) créé en 2003 par Jacques Cavallier pour Roger & Gallet. Ici, la composition oscille entre floral et épicé avec une dualité entre le gingembre et la fleur d’oranger emmenée par une bergamote très douce et agréable et une ambrette suave sur un fond de benjoin et de muscs blancs. Je l’ai senti souvent en essayant de me l’approprier mais sa tenue est très légère et je crains un peu son évolution sur ma peau. Je n’ai pas forcément eu envie de le porter. Ceci dit, je pense que je fais un peu la fine bouche (ou le fin nez si je puis dire) car il est quand même joli, frais et agréablement rafraîchissant pour supporter la canicule. En tout cas, j’aime le sentir et le re-sentir quand j’en ai l’occasion.

 

 

Il est impossible de parler de cette note sans évoquer « Five O’Clock Gingembre » créé en 2008 par Christopher Sheldrake pour Serge Lutens. À sa sortie, j’ai eu un vrai coup de coeur pour ce parfum et je l’ai même un peu porté. L’ouverture « très Earl Grey » de thé noir et de bergamote est absolument magnifique et l’évolution, très brève, comme toujours dans la marque vers le gingembre, l’ambre, le partchouli et le poivre avait tout pour me plaire. Dans la version originale les notes miellées étaient très discrètes et le parfum avait vraiment quelque chose d’épicé et élégant à la fois que j’aimais beaucoup. J’ai re-senti « Five O’Clock Gingembre » il y a peu de temps et je l’ai trouvé plus sucré que dans mon souvenir. Reformulation ? Perception différente ? Je ne sais pas mais j’aime un peu moins. Ceci dit, il reste un très beau parfum, très original… bref très Lutens à découvrir ou redécouvrir. Je ne suis pas certain que je pourrais le porter à ce moment de ma vie mais j’adore le sentir.

 

 

Je ne pouvais pas terminer cette revue sans évoquer « Like This », créé par Mathilde Bijaoui en collaboration avec l’actrice anglaise Tilda Swinton pour État Libre d’Orange en 2010. Je vous ai souvent parlé de ce parfum et vous allez peut-être en avoir assez mais je l’ai porté et je le reporterai sans doute prochainement. Il coche toutes les cases. Il est à dominante d’héliotrope et d’immortelle, délicatement épicé par le gingembre et le potiron, arrondi et poudré par une très belle rose et rafraîchi par la tangerine tout en allant vers un fond boisé de vétiver. Une pyramide olfactive dense et nébuleuse et une impression de couleur orange comme son packaging qui me réchauffe, me rassure, m’enveloppe comme un cocon. « Like This » est vraiment l’un des parfums les plus singuliers qu’il m’ait été donné de porter et je serai très heureux de le retrouver cet hiver. Son FIFI Award du meilleur parfum de niche en 2011 est amplement mérité.

 

 

De la création la plus conventionnelle à la plus originale, le gingembre est une note absolument riche qui permet de nombreuses interprétations et beaucoup d’intensité. Je suis heureux que les parfumeurs l’exploitent autant car cela donne lieu à nombre de très très belles choses. Je suis complètement fan de la note en elle-même et pourtant dans mon top, je n’en n’ai pas parlé. Un oubli désormais réparé. En tout cas, je suis très content de voir que je ne suis pas le seul à accrocher.