Le nouveau Alessandro Gualtieri : la provocation comme argument ?
Pour une fois, je vais consacrer un article entier à une nouveauté pour laquelle je suis loin d’avoir un coup de coeur mais je dois dire que les réactions que suscitent « Sadonaso », la nouvelle création d’Alessandro Gualtieri pour sa marque Nasomatto sont un sujet en soi. Certes, le parfumeur, surtout d’ailleurs son autre maison, Orto Parisi, a créé des jus à la fois très difficiles à aborder, clivants voire avec une inspiration un peu provocatrice mais, à mon sens, il n’était jamais allé aussi loin qu’avec cette nouveauté 2023. Il suffit de voir le clip de présentation disponible sur YouTube pour s’en rendre compte. Alors, la provocation et le trash sont ils des arguments de vente pour un parfum ? J’avoue que ça me pose question. En plus, le parfumeur a lancé une série « collector », appelée Phallic Collection dont le cabochon est, passez-moi l’expression, tout à fait évocateur. Je dois dire que je ne me choque pas facilement et que je suis plutôt amusé par la démarche de communication autour de ce parfum dont on va, c’est vrai, immanquablement parler. J’ai jeté un oeil au dossier de presse, entendu les témoignages de connaissances qui étaient invitées à la soirée de lancement et je me dis qu’Alessandro Gualtieri ne craint ni le mauvais goût ni la provocation. Mais est-ce gratuit ou non ?
On est habitué à la provocation en parfumerie notamment avec les noms imaginés par Étienne de Swardt pour État Libre d’Orange. En effet, je me dis qu’il fallait oser appeler un parfum « Putain des Palaces », « Charogne » ou encore, « Tom of Finland » par exemple et que certains de ces parfums auraient vraiment pu rater leur cible si on peut dire car les créations sont, somme toute, assez sages voire même très jolies. C’est le cas de « Tom of Finland » qui n’est pas du tout un cuir très animal ni très musc tonkin mais plutôt un suède seconde peau très doux et élégant. Qu’en est-il de « Sadonaso » ? Je vous livre le texte de présentation tel qu’il est : « Sadonaso c'est le plaisir des sens, un parfum qui incarne l’essence des expériences individuelles et réchauffe l’âme. Le parfum révèle toute sa séduction et sensualité avec son sillage puissant, oriental, musqué, animal. Les notes de café fusionnent à du musc et du santal, offrant une sensation de volupté et passion extrême. Les notes de tonka, vanille et animal déploient une abondance de nouvelles sensations et d'émotions à explorer et à savourer » mais je vous ferai grâce du clip ainsi que de la photo de l'édition limitée.
Nous sommes plusieurs amateurs de parfums à avoir découvert, déjà depuis plusieurs semaines, ce parfum si clivant et le plus étrange est qu’il y a deux approches et deux ressentis diamétralement opposés (voire plus) donc décrire « Sadonaso » est vraiment très compliqué. Il y a ceux qui sentent quelque chose qui leur évoque, la sueur, l’humidité d’une cave, le sperme voire même un détergent bon marché horrible. Ceux qui sont franchement dérangés par ce côté très animal du parfum comme c’était déjà un peu le cas avec « Peau de Bête » des Liquides Imaginaires qui, d’ailleurs, n’existe plus. Pour ma part, et je partage ce ressenti avec une amie propriétaire d’une parfumerie à Lyon car nous avons étés dans les premiers à le découvrir, c’est un parfum que je n’aime pas mais il ne m’évoque absolument pas quelque chose d’aussi horrible. La marque ne communique que de manière brève sur les notes mais je sens surtout le café, des notes musquées animales évidemment, mais aussi quelque chose d’ambré, un peu benjoin et vanillé. J’ai du mal à discerner la fève tonka et le tabac. Pour finir, « Sadonaso » ne me plait pas car il m’évoque plutôt un café froid et sucré qu’on aurait laissé trainer sur le plan de travail de la cuisine.
Certes, Nasomatto peut se traduire par Nez Fou mais Alessandro Gualtieri est-il allé trop loin ? La provocation dans la communication poussée à l’extrême est, à mon sens, un handicap pour les revendeurs qui devront proposer ce parfum car, même s’il plait, ce dont je doute quand même un peu, il risque fort de ne pas trouver son public. Très franchement, je ne trouve pas que « Sadonaso » soit un beau parfum. Je n’en comprends pas l’intérêt et je me dis que, même quand le jus est réussi et élégant, il peine à trouver son public lorsque la communication faite autour et le nom sont par trop provocateurs. J’ai en tête, bien évidemment, « Charogne » d’État Libre d’Orange, qui est un très bel oriental, et qui tend à disparaitre car son nom rebute d’éventuels acheteurs. J’ai essayé de vous donner mon ressenti. Alors quel sera votre ressenti ? Franchement, je serais content d’avoir vos retours.
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