Passion Parfums

Ce week-end, nous étions à Dijon, haut lieu d’histoire et de gastronomie de la Côte d’Or mais aussi une ville merveilleuse de culture, pleine de petits endroits où se poser, boire d’excellents vins mais aussi d’excellents thé et je voulais, non pas vous rendre compte de mon week-end privé mais surtout vous parler de parfums car, si Caroline, qui avait créé Ma Belle Parfumerie dans la très belle rue Vauban a décidé d’aller vivre de nouvelles aventures (j’en profite d’ailleurs pour lui faire un clin d’oeil car nous avons passé en sa compagnie des moments parfumés géniaux), une autre boutique est en train de se réinventer. Les Ateliers du Parfumeur, fondée en il y a 37 ans je crois par trois soeur, et qui faisait la part belle à L’Artisan Parfumeur et à Diptyque, a été rachetée par Nathalie avec qui nous avons vraiment beaucoup sympathisé. Son dynamisme et sa fraîcheur sont très agréables et elle a su donner un souffle nouveau à cette très belle boutique nichée non loin de la gare et de la porte Darcy, dans la rue Mably qui ouvre sur le centre historique de Dijon. À ce jour, Nathalie a fait rentrer, en plus des maisons qu’elle distribuait déjà et auxquelles s’étaient adjointes GAS et Trudon, de très belles marques telles La Petite Madeleine qu’elle m’avait fait découvrir et à laquelle j’avais consacré déjà un article mais aussi L’Orchestre Parfum, Atelier Materi, La Manufacture et bien évidemment Lubin. Quelques jours après avoir fêté le premier anniversaire d’Odorem à Lyon, nous étions donc heureux de souhaiter le sien à Nathalie car, il faut le dire, c’était un pari risqué et tout a l’air de vraiment bien se passer. Pour parler de la boutique, j’ai décidé de remettre mon nez dans trois créations que nous avons redécouvert et vraiment décryptées ensemble durant les moments que nous avons passé aux Ateliers du Parfumeur. Nous l’avons fait de manière ludique, dans une franche bonne humeur mais avec sérieux quand même.

Le tout premier parfum qui m’est venu sous le nez, avait été mon coup de coeur lorsque je l’ai découvert à sa sortie et il s’agit de « Narcisse Taiji » créé en 2021 par Marie Hugentobler sous l’impulsion de la fondatrice de la marque Véronique Le Bihan qui en décrit ainsi l’inspiration : « L'interprétation olfactive du Yin et du Yang, dans laquelle la fleur de Narcisse est travaillée en clair-obscur. Un jeu de contraste entre ombre et lumière, force et délicatesse ». Ce parfum, c’est tout ce que j’aime : un départ de gingembre très doux, enveloppé des notes suaves de la poire et de la tubéreuse, un coeur de narcisse poudré par un accord foin et enfin un fond de cuir, de muscs blancs et de patchouli. Marie Hugentobler exploite, avec de multiples petites facettes, le côté cuir poudré du narcisse et le met en valeur de la plus belle des manière. Bien sûr, il faut aimer ce côté singulier de cette fleur pas si utilisée que cela en parfumerie mais, pour ma part, « Narcisse Taiji » demeure vraiment mon parfum préféré dans la marque et, sans doute l’une des plus belles créations que j’ai pu sentir dans la boutique surtout si je veux être vraiment objectif. La marque décrit ainsi cette création : « La force et la délicatesse du narcisse, un parfum entre ombre et lumière. La parfumeuse Marie Hugentobler sélectionne un narcisse naturel d'une qualité exceptionnelle, celui des prairies d'altitude des montagnes françaises de l’Aubrac. Près de mille six cent kilogrammes de ces fleurs sauvages, cueillies par des producteurs locaux, sont nécessaires pour produire un kilogramme d’absolue de narcisse, aux facettes florales puissantes et délicates. Dans Narcisse Taiji, la parfumeuse met en lumière les forces contraires de cette fleur précieuse aux mille visages. Aux facettes lumineuses à la fraîcheur végétale et humide de la fleur juste cueillie, le parfumeur oppose la part sombre et animale du narcisse, renforcée par des accents cuir et patchouli. Un équilibre parfait, surprenant et sensuel ». Avec cette composition, et même si cela peut sembler un peu pompeux, on peut vraiment parler de haute parfumerie.

 

Le second parfum que nous avons vraiment décrypté, redécouvert, re-senti est « Bruma », créé par Antoine Lie en 2017 et qui fait la part très belle à l’iris. « Bruma renferme une sensualité animale, celle d’une cavalière qui puise une force féminine intérieure dans les éléments extérieurs qui l’entourent – sa monture et la profondeur d’une nuit en forêt. Ils l’imprègnent pour lui donner une aura magnétique et charnelle ». Si ce parfum n’est peut-être pas celui qui me touche le plus dans la collection, force m’est de constater que, vraiment et par dessus tout, c’est un travail d’une grande pureté et une construction dans lequel l’iris, matière très noble, très onéreuse et longue à obtenir, est travaillée de manière élégante et sophistiquée. C’est avec un client de la boutique que j’ai redécouvert ce parfum à côté duquel j’étais un peu passé il faut l’admettre et je me suis rendu-compte que j’étais finalement plus sensible que je n’aurais cru à cette création ciselée, presque aquarelle, toute en petites touches et en minuscules. facettes. Avec « Bruma », Antoine Lie crée un iris « à sa manière ». Le parfum s’ouvre avec le côté très frais et tranché du poivre noir, rendu légèrement aromatique avec un effluve de lavande puis un peu vert avec le galbanum. Après cette envolée, le coeur, construit autour de l’association iris et violette s’enrobe de jasmin sambac et de pivoine pourpre qui n’a jamais un côté rose mais garde sa propre identité. Le fond de labdanum, de vétiver haïtien et de fève tonka est légèrement cuiré mais ce n’est, encore une fois, qu’une facette. J’aime beaucoup ce parfum mais il m’a fallu le sentir sur la peau de deux personne pour en discerner toute la finesse. Il faut absolument essayer cette composition et ne pas l’acheter à l’aveugle car elle réserve des surprises.

 

« La gourmandise d'une composition suave et solaire, où la tubéreuse joue sa partition sensuelle » Delphine Thierry. Le troisième et dernier parfum que j’ai redécouvert et dont j’ai eu envie de parler fait partie de la collection Portraits de Femmes de Lubin. Il est signé Delphine Thierry et demeure, à ce jour, l’une des très belles tubéreuses du marché. Lancé en 2021, floral, fruité, baumé et sophistiqué, il est, pour moi, l’une des réussites de la marque et je ne l’avais peut-être pas forcément apprécié à sa juste valeur lorsque je l’ai découvert. En remettant mon nez dessus, j’ai eu un choc olfactif. Il m’a évoqué une femme élégante mais moderne, le flacon très « en courbes » trompe un peu sur la facette très contemporaine de la création. Je parle bien évidemment de « Magda » que la marque décrit ainsi : « Floral tubéreuse, fruité gourmand Magda, artiste et muse des poètes du Paris de la fin du XIX siècle, inspire un parfum exotique et envoûtant, adouci par des notes poudrées, suaves légèrement teintées d’amertume. Sensuel et gourmand, son parfum raconte la force et la douceur d’une femme vibrante et vous entoure d’une sensation chaleureuse et tendre ». Quand j’ai découvert l’envolée de cassis et de mandarine, je me suis dit que « Magda » était un chypré moderne et bien pas du tout. Quand apparait le coeur de tubéreuse, de fleur d’oranger et de gardénia rehaussé et adouci par des petites notes de cannelle, j’ai compris qu’il s’agissait d’un floral fruité mais pas convenu comme tout ce que l’on sent maintenant, il est original, élégant, très intrigant. Le fond d’amande, de santal et de vanille vient arrondir la fragrance et lui donner ce chic impossible à décrire. Là encore, il ne faut pas sentir « Magda » superficiellement pour en apprécier toute l’élégance. Il faut le porter et vivre avec. Ce n’est pas un beau parfum, c’est un grand parfum !

 

Je trouvais agréable de résumer ma visite aux Ateliers du Parfumeur à travers trois redécouvertes que nous avons pu faire avec toute l’énergie et la bonne humeur de Nathalie. Si vous êtes près de Dijon ou même plus loin en Bourgogne Franche Comté, il faut absolument faire la démarche d’aller lui rendre visite. Vous verrez, vous vous laisserez séduire par son côté pétillant mais aussi et surtout par sa très belle sélection.