Les Cocottes de Paris, un petit air de Belle Époque
J’avais eu un vrai coup de coeur pour Jardins d’Écrivains, créé par Anaïs Biguine et il a été tout naturel que je m’intéresse, dès leur sortie en 2015 aux trois parfums rendant hommage aux demi-mondaines, aux courtisanes qui ont défrayé la chronique de la Belle Époque. Trois parfums féminins (quoi que), assumés, profondément créatifs et délicieusement décadents. Les univers de « Melle Cléo », « La Belle Otero » et « La Castiglione » déclinés en trois fragrances particulièrement bien réussies et tout à fait fascinantes et addictives. Je dois dire que j’ai aimé les trois et que j’ai pu, encore une fois, apprécier le travail plein de goût et de virtuosité d’Anaïs Biguine. Les Cocottes de Paris sont à découvrir ou à redécouvrir. En tout cas, lorsque je les avais sentis à Ma Belle Parfumerie à Dijon, j’avais été séduit. Il me restait quelques gouttes dans des échantillons mais suffisamment pour avoir envie d’y remettre mon nez et, bien évidemment, d’en parler.
« Melle Cléo » s’ouvre sur des notes de bois de rose, de bergamote et de lychee et évolue vers un coeur d’ylang-ylang,de rose et de belle de nuit, une fleur peu utilisée en parfumerie. Le parfum, au bout de quelques temps, se pose sur des notes de lichen et de fleur de coton. C’est une variation autour d’une rose étonnante, cachée, sulfureuse et ronde. La marque le décrit ainsi : « L’eau de parfum Melle Cléo est une sorte de chorégraphie olfactive aux variations imprédictibles. Un bois de rose Botticellien, une belle de nuit digne des Asparas et une fleur de coton pour la plus angélique des Cocottes ». Cléo de Mérode était ambiguë et farouche. Considérée comme la plus belle femme du monde en 1896 elle va séduire, intriguer et passionner ses contemporains. Pour ma part, j’avais lu des choses à son sujet et je l’imaginais plutôt dans des notes de patchouli un peu poudré. Anaïs Biguine en donne une lecture plus intemporelle, jamais datée et, finalement assez contemporaine. J’aime beaucoup le côté très facetté de ce parfum et des matières premières utilisées. Pour moi, c’est une « Cocotte » faussement sage, légèrement androgyne et tout à fait fascinante.
La Belle Otero a, par ses allures de gitane, été la reine de Paris et de la Riviera à la belle époque. Elle évoluait dans les hautes sphères. Anaïs Biguine la figure au sein d’un parfum particulièrement inventif. Une envolée de néroli, de poivre, d’absinthe, de figue et de gingembre nous sidère dès la vaporisation. Le coeur est floral, cuiré, poudré et aromatique à la fois avec des notes de violette, de musc, de buchu, de lavande et de narcisse et le fond poudré et crémeux d’iris et de santal rehaussé d’un peu d’encens. La marque décrit ainsi ce parfum : « L’eau de parfum La Belle Otero est une invitation au dévergondage. Un poivre licencieux, une absinthe illicite, une violette convoiteuse et un santal concupiscent. Son évolution laisse à la peau une certaine délectation ». Ce parfum est mon préféré. Il est atypique, profond et d’une élégance presque provocatrice. Pour moi, il est la quintessence des parfums de la Belle Époque revisités par Anaïs Biguine. Je le trouve mystérieux, vénéneux et vraiment narcotique. Toutes les notes, qui pourraient sembler incohérentes sur le papier, s’harmonisent parfaitement et avec beaucoup d’élégance.
Photographié, respectée, moderne… Je ne sais pas comment qualifier La Castiglione mais le parfum que lui dédie Anaïs Biguine est absolument magique ! « À la lueur des candélabres, l’eau de parfum La Castiglione évoque un émoi luxurieux et fuligineux. Un patchouli ensorcelant, un copahu libidineux, un cade élégant et un ambre gris caressant. Un parfum au panache ténébreux ». Un départ déroutant d’armoise acidulé par le cédrat, un coeur de copahu, de réglisse, de patchouli et de bois de cade lui donne quelque chose, encore une fois, d’ambivalent et même d’androgyne et le fond d’ambre gris, de myrrhe et de styrax s’harmonise magnifiquement avec le reste des notes. C’est un coup de coeur également. J’imagine cette Castiglione se promener discrète et pourtant remarquée sur la rive droite de la Seine à Paris. Je trouve que « La Castiglione » est peut-être le plus « photographique d’une époque » des trois Cocottes. En tout cas, j’ai adoré. Je pense que, à l’instar des deux autres, il doit vraiment être découvert.
Je redécouvre ces trois parfums et je me dis que je les aime décidément beaucoup. Il sont à sentir, à essayer, à porter. Je trouve que ces « Cocottes » ne prennent pas une ride. Elles sont d’aujourd’hui comme d’hier… Intemporelles !
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