Les parfums mythiques de Raymond Chaillan
J’avais évoqué Raymond Chaillan dans mon article sur « Opium » d’Yves Saint-Laurent dont il avait co-signé la formule mais je me suis rendu compte qu’il avait créé des parfums d’hier et même encore d’aujourd’hui, que je connaissais et que j’aimais beaucoup. J’ai décidé de lui consacrer cet article et de revenir sur quelques jus mythiques qu’il a inventé. Pour moi, Raymond Chaillan est un véritable artisan d’art qui a, sans répit, visité et revisité les beaux classiques de la parfumerie. S’il en a créé plusieurs, il l’a toujours fait dans le respect des règles de l’élégance à la française, peut-être même à la parisienne. J’ai donc été puisé dans son « osmographie » les parfums que je préférais afin de venir vous en parler. Certains n’existent plus mais il n’est nullement question de ne pas en parler.
Créé en 1971 en collaboration avec Jacques Jantzen pour Balenciaga, « Ho Hang » est, je trouve l’un des fleurons de Raymond Chaillan. Entre oriental et hespéridé, j’ai un souvenir très précis de ce parfum que j’ai essayé et réessayé à l’époque et que j’avais vraiment très envie de le porter mais j’avais opté pour « Christobal pour Homme » sauf pour un flacon que j’ai eu et qui a du être l’un des derniers en vente au début des années 2000. Je me rappelle parfaitement les notes de tête de lavande, d’orange et de bergamote présentes tout au long de l’évolution. Le coeur me semblait être boisé et très patchouli et je lis qu’il y avait des notes de géranium. Je n’en suis pas surpris. Le fond était très muscs blancs et ambre renforcée par une délicate vanille. Pour moi, c’était un parfum à la fois léger et complexe qui m’avait ravi. Je pense que je dois pouvoir le sentir encore car j’ai gardé le flacon et, avec un peu de chance, il en reste quelques gouttes au fond.
J’ai senti toute une partie de ma vie quotidiennement « Boucheron pour Homme », créé par Raymond Chaillan, Jean-Pierre Bethouart et Francis Deleamont en 1991. C’est un hespéridé très aromatique et il m’évoque un ami proche qui le porte depuis plus de vingt ans. Il existe en deux concentrations mais je le préfère en eau de toilette car je le trouve plus subtil. C’est un savant mélange entre des notes d’orange, de lavande, de bergamote, de citron, de verveine, de jasmin, de rose, d’oeillet et d’iris reposant sur un fond de vétiver, de santal et d’ambre. Il fait partie, pour moi, des grands classiques du rayon homme du sélectif et je trouve qu’il n’a pas pris une ride. La tenue, y compris en eau de toilette, est excellente. Si je n’aime pas donner un genre au parfum, je dois bien admettre que je le trouve vraiment très masculin voire même viril. Je ne pourrais absolument pas le porter mais je l’ai toujours trouvé vraiment réussi. L’ami en question a essayé de changer de parfum mais est toujours revenu à « Boucheron pour Homme »… Si ce n’est pas une marque de succè!
Floral, un rien cosmétique, j’ai toujours aimé « Anaïs Anaïs » de Cacharel créé en 1978 Par Roger Pellegrino, Robert Gonnon, Paul Léger et bien évidemment Raymond Chaillan. Le départ de bergamote, de cassis, de lys et de jacinthe est inimitable et le coeur d’iris et d’ylang ylang construit autour d’une rose et d’une tubéreuse très discrète est magnifique et le fond de patchouli et de mousse de chêne donne à ce parfum des accents élégants et chyprés qui me plaisent particulièrement. Je pense que « Anaïs Anaïs » est un parfum d’une grande complexité, typique des succès des années 70 et, s’il s’adressait plutôt aux jeunes filles, je pense qu’il a été sans doute le parfum de bien des femmes modernes et élégantes des années 80. Son succès ne s’est jamais démenti car il existe toujours et, petit plaisir, j’ai toujours un peu de nostalgie lorsque je remets mon nez dedans.
L’un des parfums les plus connus de Raymond Chaillan est sans conteste « Quartz » pour Molyneux. Je dois admettre que je ne l’ai découvert qu’il y a un an ou deux (oh la lacune !) et je l’ai trouvé assez réussi bien que singulier. Créé en 1977, il a un départ très étonnant entre pêche et jacinthe avec des notes de bourgeon de cassis. Le coeur de rose, d’iris et de melon est vraiment très singulier et j’avoue que j’ai bien aimé. Le fond est classique, cèdre, mousse, de chêne, muscs blancs et benjoin mais il demeure tout de même à dominante florale même si j’ai du mal à le classer dans une famille olfactive. Je le trouve désuet certes mais plutôt élégant. Je crois qu’il ne coûte plus grand-chose aujourd’hui et qu’il est un peu oublié sur les linéaires des parfumeries du circuit sélectif et c’est dommage car il serait à redécouvrir. Il est considéré par pas mal d’amateurs de parfums, sur les forums, comme un beau classique et je suis assez d’accord.
Pour finir, j’ai eu envie de traverser la Manche pour évoquer un parfum créé en 1968 et qui, à ma connaissance, n’existe plus et pourtant, je l’ai senti il y a bien des années en traînant dans les boutiques de Portobello à la recherche d’une théière ancienne. Il s’agit de « Khadine « de Yardley qui a été porté par toute une génération de filles quel l’on appellerait branchées aujourd’hui dans les années 70. Il était le parfum anti-beatnik par excellence car c’était une violette poudrée et très florale qui n’est pas sans rappeler celles que l’on peut trouver aujourd’hui chez Creed ou chez Caron par exemple. « Khadine » était assez économique je pense mais avait toutes les qualités d’un parfum de luxe. Je me souviens parfaitement de ce qu’il sentait et, même s’il était sans doute un peu éventé, j’ai compris son succès immédiatement. Je suis persuadé qu’il aurait encore du succès aujourd’hui mais je ne crois pas que la marque le commercialise encore hélas.
Voilà, j’avais envie de revenir sur les beaux jus créés par Raymond Chaillan et qui ont, pour certains hélas, étés arrêtés. J’espère que, au hasard des rachats, des parfums comme « Khadine » ou encore « Ho Hang » pourront être réédités. On peut toujours rêver.
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