Margaux Le Paih Guérin, la gourmandise de la création
Depuis quelques mois, j’entends son nom souvent, je découvre des parfums qu’elle a créé. Elle, c’est Margaux Le Paih Guérin et j’ai décidé d’aller voir d’un peu plus près si je connaissais d’autres compositions inventées par elle. Sa signature est devenue incontournable non seulement chez Studio Flair dont elle a intégré l’équipe mais aussi dans plusieurs marques plus ou moins confidentielles notamment dans les nouveautés 2025. Prolifique, inventive, c’est un nom qui compte et, en quatre créations, j’ai eu envie de me promener dans ses oeuvres. En attendant de découvrir Yzkine, une maison dont j’ai pas mal entendu parler et pour laquelle elle a collaboré, je me suis promené, au fil des composition, dans ses univers souvent gourmands mais pas seulement. Je vous emmène donc avec moi sur les traces de Margaux Paih Guérin.
« Jany » a été créé en 2023 par Margaux Le Paih Guérin pour Sora Dora était le parfum dont j’avais beaucoup entendu parler et qui me donnait envie de découvrir la collection. La parfumeuse en exprime ainsi l’inspiration : « Nous avons travaillé quasiment une année sur un accord « boulangerie ». j'ai finalement trouvé l’inspiration pour cette note si particulière. Après cela, tout est devenu limpide, le souvenir d’une tarte Tatin … ». Le moins que l’on puisse dire est que c’est réaliste. J’ai vraiment l’impression d’une tarte tatin qui sort du four. Le départ de pomme un peu caramélisée se pare de notes de pêche et d’abricot qui assurent encore plus de rondeur. Le coeur est un vrai accord de pâte feuilleté, beurrée et très profond qui est renforcé par un très lumineux osmanthus, une noix plutôt dark et une prune ronde et confite. Le fond de caramel et de vanille avec le côté amande s’enveloppe de muscs blancs. Je suis vraiment impressionné par le résultat mais je ne crois pas que j’aimerais porter un parfum qui sente la tarte tatin. J’aime beaucoup la pâtisserie en tant que tel mais le côté culinaire assumé me dérange peut-être un peu malgré quelque chose d’addictif. Il n’est pas pour moi mais je reconnais qu’il est parfaitement bien vu. Je suis très éloigné de mes goûts habituels mais j’ai aimé redécouvrir ce parfum il y a quelques mois.
L’une des créations de Margaux Le Paih Guérin que j’ai découvert récemment, est « Towédé », qu’elle a composé en 2023 pour Note de Bas de Paje. : « Une étreinte dont on aimerait ne jamais se défaire. Des pieds nus frappent la terre rouge. Ils la soulèvent et forment un nuage brun qui voyage au gré des vents. Peu à peu, le nuage s’éclaircit, jusqu’à s’évaporer subitement au contact d’un bitume dur et froid. Towédé a quitté une terre magique où les esprits flottent entre les arbres, pour une nouvelle terre qui fait fi des mythes et du paranormal. Une terre qui clame sa modernité et sa rationalité. Mais Towédé est une force que rien ne peut aseptiser. C’est une douceur féroce, une tendresse farouche. Towédé, c’est la rencontre de deux mondes. Ils cohabitent, empiètent l’un sur l’autre, s’entrelacent, s'entremêlent, s'interprètent. Pourtant, l’équilibre s’installe sans que l’un ne s’efface au profit de l’autre, sans que l’un ne donne complètement raison à l’autre ». J’avoue que le postulat de départ et l’inspiration m’a un peu dérouté et qu’il m’a vraiment fallu me faire mon propre imaginaire pour comprendre ce parfum qui oscille entre gourmandise et épices chaudes. Dès le départ, je sens des notes de noix de muscade et de cannelle qui, je trouve, sont déjà addictives. Le coeur d’ambre gris et de chocolat noir est, sur ma peau, résolument original et j’ai bien aimé le fond très enveloppant de cashmeran, de vanille et de patchouli. Je ne suis pas vraiment très attiré par la note de chocolat en parfumerie mais le côté plus cacao amer, très ethnique, presque un peu brut, me plait assez et je trouve, qu’avec le patchouli et une vanille plus épicée que réellement gourmande, l’effet est assez bien vu. Pour moi, « Towédé » est vraiment un parfum « d’aventurière ou d’aventurier » dans le sens romanesque du terme. Je respecte bien sûr l’inspiration des directeurs artistiques et de la parfumeuse mais mon ressenti est un peu différent. C’est la magie de l’expression artistique.
Parmi les nouveautés 2025, découvertes à Paris récemment, j’ai eu envie de parler de « Ashta Symphony », créé par Margaux Le Paih Guérin pour la Collection des Délices d’Ideo Parfumeurs. « On retrouve dans ce parfum addictif et réconfortant la texture veloutée de l’ashta, avec ses notes de pistache et ses notes lactées », tels sont les mots de la parfumeuse pour le décrire. Le départ de fleurs blanches est de toute beauté et le côté très vert du coeur de lentisque et de pistache associé à la fleur d’oranger. Après un certain temps, le fond, très lacté et vanillé se poudre avec le cashmeran et les muscs blancs. J’ai vraiment accroché les notes de tête et de coeur mais, petit à petit, je me sens un peu dérouté par le côté un peu laiteux du fond. Il ne m’incommode pas comme souvent. Il est peut-être un peu rond pour moi mais je ne le trouve pas du tout écoeurant. Il a quelque chose d’exotique, un peu étrange sans doute mais pas désagréable. En général, je suis toujours très gêné par les notes lactoniques mais, dans cette composition hyper équilibrée, il y a comme quelque chose de réjouissant, de tendre. Je l’ai beaucoup aimé. Je ne l’ai pas intégré à mon article sur les nouveautés car je voulais revenir dessus dans ce portrait mais il fait partie des jolies nouveautés de cette année.
« Bois de Mangrove » créé par Margaux Le Paih Guérin est, à mon sens, le parfum le plus luxueux de la nouvelle collection de la marque lyonnaise 100Bon, tout d’abord grâce aux ingrédients utilisés mais aussi parce que la composition est riche, pleine et sophistiquée. « Le Bois de Mangrove, un ingrédient rare et protégé, comme pièce centrale de cette collection. Nous avons donné corps et vie à cette matière première brute, intégrée dans un parfum pour la première fois ». Le départ d’ananas est vraiment du plus bel effet et donne envie de poser ce parfum aromatique et boisé sur la peau. Il évolue vers un coeur très original de laurier, poudré par l’iris et rehaussé par une touche de lavande vraiment très bien travaillée. Le fond est sombre, sec, fumé et presque cuir. Le bois de Mangrove est associé à l’essence de cade que j’aime beaucoup en parfumerie, au cèdre de Virginie et il est adouci par des muscs blancs que je peine à sentir. « Bois de Mangrove » n’est indéniablement pas pour moi mais je le trouve quand même assez intéressant. Il faut le mettre sur peau car, sur la touche, il n’exprime pas du tout ses facettes.
Le talent de Margaux Le Paih Guérin n’est donc plus à démontrer mais à suivre. J’aurais pu revenir sur « Mon Santal », qu’elle vient de composer pour la marque italienne Astrophil & Stella que j’avi vraiment aimé mais il figure dans les nouveautés de cet été. J’ai aussi été très dérouté par « Amow », le premier parfum qu’elle a créé pour Neil Jacquet. En tout cas, nul doute que je reparlerai de son goût pour le gourmand mais pas seulement car je constate parfaitement facilement qu’elle peut s’écarter de ce domaine qui semble de prédilection. En tout cas, j’aime beaucoup l’idée que de nouveaux parfumeurs viennent, dès le départ, imposer leur style. Margaux Le Paih Guérin est de ceux-là.
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