Passion Parfums

Passion Parfums

Noms subversifs : Provoc' gratuite ou vraie audace olfactive ?

Un parfum au nom provocant tient-il toujours ses « promesses » ? Telle est, en substance, la question que m’a posé l’une d’entre-vous et, je dois bien le dire, j’ai trouvé qu’apporter des éléments de réponse méritait bien un article. J’ai trouvé cela ludique et je me suis penché sur plusieurs créations dont les noms peuvent intriguer, choquer voire même faire fuir ou, au contraire « donner envie ». Je vais tenter de me rendre compte si tous sont aussi subversifs qu’ils le laissent supposer où si, au contraire, ils s’avèrent beaucoup plus sages et ont rencontré facilement un public large, toute proportion gardée puisqu’ils sont issus de la parfumerie dite de niche car je ne voulais pas tomber dans la facilité d’aller explorer le succès d’un « Opium » ou d’un « Poison ».

 

On ne va pas tergiverser, dans le monde de la provoc’ en parfumerie, Étienne de Swardt, fondateur d’État Libre d’Orange, est le roi. Son slogan est quand même « Le parfum est mort, vive le parfum ». Voilà un directeur artistique qui s’entoure de la fine fleur de des créateurs de France et de Navarre pour « casser les codes » et, volontiers, par les noms qu’il choisit (même si c’est un peu moins vrai aujourd’hui), choque l’esprit de ceux qui vont les découvrir. Mais les jus sont-ils aussi clivants que l’image utilisée ? Il faut quand même l’admettre, dans la marque, c’est rarement le cas. La plupart du temps la création est beaucoup plus sage qu’on pourrait le supposer. Je pense notamment à des parfums comme « La Fin du Monde », « Charogne », qui était un très bel oriental mais n’a tellement pas trouvé son public qu’il a fini par disparaitre, ce qui est bien regrettable, « Tom of Finland » (qui porte aujourd’hui le nom de « Clean Suede » que je trouve beaucoup plus adapté à un joli cuir élégant et doux) ou encore, bien évidemment « Putain des Palaces », un très joli poudré chic, un peu suranné mais certainement pas subversif. Alors vous allez me demander : Quid de « Sécrétions Magnifiques » créé en 2006 par Antoine Lie et ainsi décrit par la marque : « Comme le sang, la sueur, le sperme, la salive, les magnifiques Sécrétions est aussi réelle qu'un coït olfactif qui en envoie un en flaptures, au pinacle de plaisir sensuel, à un moment extraordinaire et unique lorsque le désir triomphe de la raison. La tension masculine libère une précipitation d'adrénaline dans une cascade de notes aldéhydoises élevées. La sensation de fraîcheur est saisissante. Ensuite, le parfum révèle un côté métallique, précis et aussi fort que le désir non accompli. Nous sommes sur un rasoir ... la peau et la sueur se mêlent, et des goûts de musc et de bois de santal. L'effet marin légèrement salé agite, suscite des soucises et met votre couture à la bouche. Les langues et les sexes se retrouvent, le plaisir explose et tout va bien. La confusion règne suprême. Un parfum subversif et dérangeant. C'est l'amour ou la haine à première vue. Le juting sensuel est rarement satisfait de demi-mesures ... Entre Don Juan et la femme qui se propose, les armes sont couplées ... Qui sera le premier à se rendre ? Avec presque un culte d'amour ou de haine, Sécrétions magnifiques a secoué le monde des parfums quand il a été lancé, et ça fait encore. Une œuvre de parfumerie conceptuelle conçue pour parler à tous les sens à la fois. Une règle: attraction et répulsion ». Et bien, je dois bien admettre que là, directeur artistique et parfumeur tapent très fort. Après une envolée qui mêle des accords marins et salés très synthétiques à des alédéhydes, le coeur rappelle le sang, le lait et même l’adrénaline puis le parfum se pose sur un fond de bois de santal, d’iris et d’opoponax. Je vais être honnête, le parfum, en tant que tel, peut rebuter dès la vaporisation. Les notes de tête et de coeur, en tout cas sur une touche car je n’ai pas osé le mettre sur ma peau, me dérangent vraiment et j’aurais tendance à le trouver parfaitement importable or, il se trouve que j’ai une connaissance qui ne craint rien et qui porte « Sécrétions Magnifiques » et je dois bien admettre que, lorsque je le croise, je sens des notes de fond qui, sur sa peau, sont assez belles. Cela n’empêche pas que je trouve qu’il s’agit-là quand même, d’une promesse tenue.

 

 

Secretions Magnifiques Etat Libre d'Orange parfum - un parfum pour  homme et femme 2006

 

 

En 2023, c’est le parfumeur italien bien connu pour ses provocations, Alessandro Gualtieri qui, à grand renfort de communication (lancement dans des clubs cuirs, clip vidéo à la limite de la pornographie, série limitée avec un flacon au cabochon en forme de phallus et j’en passe) qui va très loin dans le subversif avec « Sadonaso » qu’il lance non pas dans sa seconde marque, Orto Parisi, ce ne m’aurait pas surpris car on y trouve quand même des parfums aux noms un peu choc comme « Stercus » ou encore « Seminalis » mais dans la première, Nasomatto. Il décrit ainsi son inspiration : « Sadonaso a commencé par une quête pour trouver des désirs secrets dans l'inconnu. Un désir secret peut être considéré comme une graine, cachée dans le sol de notre subconscient. Comme toute graine, elle a besoin de bonnes conditions pour pousser et s'épanouir. Lorsque nous gardons notre désir caché, cela lui permet de germer et de prendre racine dans notre être. Cela donne de l'espace et le temps de le considérer, de l'explorer et de le laisser pousser à son propre rythme. Lorsque la graine commence à pousser, elle peut façonner et influencer nos pensées et nos actions, en nous guidant pour nous libérer. Mais tout comme une graine à besoin des bonnes conditions pour pousser, un désir secret a également besoin d’être nourri et entretenu. Il requiert de l'attention et des soins, ainsi que la volonté de l'accueillir et de le laisser nous guider. Lorsque nous sommes assez courageux pour révéler notre désir secret au grand jour, il a le pouvoir de transformer et de façonner notre avenir de manière profonde et significative. Sadonaso est la poursuite de la sensation incomparable d'un désir secret qui se concrétise. C'est la sueur du plaisir qui laisse une trace au cours du voyage ». Comme toujours, le parfumeur n’avait pas vraiment communiqué sur les notes mais, il faut le dire, l’idée et la communication autour du parfum, laissait supposer quelque chose qui rappelle la sueur, l’humidité minérale, voire même l’urine. Très franchement, je trouve qu’on en est, et heureusement, vraiment très loin. Alors, parmi nous qui l’avons senti, voire même essayé (ce qui est mon cas), les avis sont très partagés. Si certains sont rebutés par le côté quand même animal et musqué et qui évoquent quelque chose de franchement sexuel brut, pour les autres, il s’agit surtout d’un oriental boisé, gourmand et un peu cuiré. Pour ma part, je le trouve beaucoup plus facile d’abord que certains autres parfums dont l’animalité peut me déranger. Je pense par exemple à « Musk Koublaï Khan » de Serge Lutens ou encore « Peau de Bête » (qui a été discontinué) des Liquides Imaginaires. C’est mon ressenti. Je rapprocherais plutôt la toute fin des notes de fond de celles de « Noir Exquis » de L’Artisan Parfumeur (ce n’est que mon ressenti) et, franchement, il y a plus subversif. La seule chose que je peux dire c’est que, sans être pudibond, je trouve que la communication d’Alessandro Gualtieri autour de ce parfum est, quand même un sale tour qu’il joue aux revendeurs car il limite quand même très fort l’envie d’une certaine clientèle. Qui, franchement, à part par goût de la provocation, aurait envie de porter un parfum présenté ainsi sur YouTube ou qui porte un nom pareil ? C’est une question à laquelle je ne peux pas répondre. Je trouve quand même qu’il empêche ce parfum de s’attirer une clientèle à laquelle il aurait pu plaire. Pour ma part, je ne l’aime pas trop mais pas parce qu’il me dérange. Je dirai que le côté un peu trop suave m’en éloigne mais ce n’est qu’une question de goût.

 

 

Sadonaso Nasomatto parfum - un nouveau parfum pour homme et femme 2023

 

 

Alors, provocation gratuite ? Vraie envie de casser les codes et d’aller loin dans l’audace ? La motivation artistique est difficile à définir. En tout cas, moi j’en suis absolument incapable. Je trouve que, parfois, le parfum comme objet de création, lorsque cela est rendu importable soit par la fragrance soit par le nom, est presque dommage mais je comprends tout à fait la démarche. Elle est d’ordre commerciale (ou anti-commerciale selon la manière dont on prend l’idée) ou simplement ludique. En tout cas, pour écrire cet article, j’ai remis mon nez dans tous les parfums que j’ai cité et, bien évidemment, dans ceux que j’ai développé et j’ai essayé de faire abstraction de leurs noms pour ne me concentrer que sur mon ressenti. Et bien le savez-vous ? C’est ludique mais ce n’est pas facile du tout.

 



16/01/2024
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