Olivier Cresp, Akro etc...
Non, la carrière d’Olivier Cresp ne se résume absolument pas à Akro, la marque qu’il a créé en 2018 avec sa fille. Depuis bien des années, il invente des parfums à la fois pour des marques grand public et pour des maisons plus confidentielles. Le choix est large mais j’ai quand même décidé de lui consacrer un petit portrait parfumé avec ce que je considère comme les parfums les plus audacieux qu’il a composé. Depuis une quinzaine d’années. La signature d’Olivier Cresp est très reconnaissable dans le sens où il ne s’interdit rien mais que les jus qu’il signe sont toujours d’une très grande cohérence. J’aime bien son travail et je me suis rendu compte que je n’avais jamais vraiment exploré son travail. Je vous emmène donc dans les univers de ce parfumeur à la fois prolifique et inventif.
Avec « Infuse » qu’il a créé cette année pour sa maison Akro, « Juniper Sling » lancé 2011 par Penhaligon’s est mon parfum d’Olivier Cresp préféré. « Quelqu'un pour du gin ? Un éclat de fraîcheur au genièvre. Angélique taquine et poivre noir. Épices chaleureuses et cœurs chaleureux. Cette eau de toilette est un cocktail complexe. Mieux vaut en faire un double ». La composition en est simple, une envolée très nette de baies de genièvre, un coeur de poivre noir et un fond de vétiver. Le tour est joué. Ce parfum, c’est le milieu un peu nocturne de Londres. Un gin tonic, une cigarette blonde, beaucoup de chic, un peu de rire et il me réjouit. Il y a quand même un bémol : sa concentration eau de toilette nécessaire à la beauté de la fragrance fait que sa tenue est un peu limitée et je ne comprends pas du tout la marque qui en a fixé le prix au même niveau que les eaux de parfum. J’avoue que ça me freine un peu pour le racheter et pourtant je l’aime vraiment beaucoup. C’est un merveilleux parfum dont la finesse et l’élégance est révélateur du talent formidable d’Olivier Cresp.
Pour décrire l’inspiration de « Flash Back » qu’il a créé en 2013 pour Olfactive Studio, Olivier Cresp écrit : « Le flash back est une matière hautement expressive et désirable. Nous voudrions que ce visage à l’écart du lissage digital soit le nôtre ; habité de pensées sereines, débarrassé des stigmates de la cosmétique numérique, animé par la joie des pixels voulus par l’artiste. Il fixe un instant suspendu, cette zone de mémoire qui profondément incruste la rétine. Et fait vivre un lointain souvenir, peut-être un déjà vu : celui d’un visage, d’un corps, d’une émotion devenue présence ». Je connais ce parfum depuis longtemps et je l’ai toujours bien aimé. Là encore, le parfumeur s’est éloigné des codes consensuels de la parfumerie pour inventer une composition originale qui démarre avec une envolée acidulée de rhubarbe, d’orange et de pamplemousse. Le côté un peu amer me plait énormément. Le coeur de pomme et de poivre rose est vraiment étonnant. Il s’avère un peu pétillant et rond à la fois. Je ne sais pas pourquoi mais il me fait penser à quelque chose de régressif. Le fond, très tendre, de vétiver, d’ambre, de muscs blancs et de cèdre assure une très bonne tenue à ce parfum d’exception. J’aime beaucoup ce parfum très singulier et je pourrais parfaitement le porter.
« Parfum de peau sale et collante. Mon dos s’est cambré comme un arc et il a respiré lourdement juste derrière mon dos en sueur ». « Dirty Rice », créé par Olivier Cresp en 2022 pour la marque coréenne Borntostandout se présente comme un parfum très subversif, provocateur, presque érotique. J’avoue que j’avais certaines craintes lorsque je l’ai senti mais elles ont étés vite apaisées. En effet, c’est une création audacieuse, pas toujours agréable pour moi, mais elle s’avère très cohérente. Je ne sais pas pourquoi mais j’ai eu un peu l’impression d’être plongé dans le texte d’une chanson de Brigitte Fontaine ou d’Higelin. « Dirty Rice » a quand même un côté très baroque avec son départ de bergamote et d’amande qui pourrait paraître parfaitement bizarre mais qui fonctionne parfaitement. Les notes de riz et de lait du coeur, associées à la pivoine me sont presque désagréable et pourtant, je dois bien l’admettre, je ne décolle pas mon nez du parfum lorsque je le sens. Le fond est très santal même si la marque évoque des notes de vétiver, de cèdre, d’ambroxan et de muscs blancs. Ce parfum m’a évoqué le goût d’un riz au lait peu sucré. Je dois dire que je ne le trouve pas tellement provocateur mais original c’est certain. Je suis incapable de dire si je l’aime ou pas. Il est étonnant, un peu dérangeant pour moi par son côté crémeux mais je le trouve un peu dans la lignée d’un « Blanche Bête » de Liquides Imaginaires. En tout cas, c’est un travail à découvrir car il sort des sentiers battus.
« Bake » créé en 2023 par Olivier Cresp pour sa maison Akro avait tout pour ne pas me plaire sur le papier. Le parfumeur en décrit ainsi l’inspiration : « C'est un shot de citron combiné à un sucre vanillé. Quand je le sens, je me transporte dans ma pâtisserie préférée à Londres ». Je ne suis pas du tout amateur de fragrances sucrées et « pâtissières » hors, lorsque Marion, qui travaille pour la marque, me l’a fait essayer en avant-première, j’ai été plus que surpris. En effet, ce parfum matche avec ma peau comme c’est rarement le cas des gourmands. Je ne pouvais pas finir ma sélection de parfums réalisés par Olivier Cresp sans le mentionner tant il m’a surpris. Le départ de citron et de rhum peut être, sur certaines peaux, très rond et sucré voire même liquoreux. Sur moi, il s’avère vif et tout à fait rafraîchissant. L’accord praliné et chantilly du coeur est quasi inexistant sur ma peau alors que je l’ai bien senti sur d’autres utilisateurs. Le parfum citronné se pare d’une vanille certes un peu gourmande en fond mais elle n’est jamais too much. Je vais même vous faire une confidence : ce parfum qui est aux antipodes de mes goûts, j’ai même pensé à le porter ! Pour moi, il est super abouti. C’est une référence du genre qui montre la virtuosité d’Olivier Cresp. Je l’ai re-senti pour écrire mon article et n’ai pas pu m’empêcher de le mettre sur ma peau. Il est addictif.
J’aurais pu faire d’autre chois dans l’osmographie d’Olivier Cresp mais je me suis dit qu’il fallait choisir quatre réalisations percutantes. Je me suis fait très plaisir à découvrir « Dirty Rice » et à remettre mon nez dans « Bake », « Flashback » et « Juniper Sling ». J’aime la signature très étonnante de ce parfumeur qui semble savoir tout faire. En tout cas, il reste parmi les nez que je préfère. Son travail est éclectique mais toujours d’une grande qualité.
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