Patrice Revillard, le nez qui monte, qui monte
Il est l’un des jeunes parfumeurs qui monte, son nom, Patrice Revillard. J’entends parler de lui de plus en plus et, depuis que je sais que c’est à lui qu’a été confiée la lourde tache de réinterpréter « L’Iris de Fath » créé en 1947 sous le nom de « L’Iris Gris » par la parfumeur Vincent Roubert et que j’ai eu la chance de découvrir chez Sens Unique à Paris, je me suis penché sur son travail pour d’autres maisons et sur les créations plus accessibles qu’il a pu réaliser. Je suis donc allé sentir plusieurs fragrances dont il est l’auteur et j’ai été aidé dans cette tâche par mon amie Clotilde de la chaîne YouTube Iris Factice qui s’est, elle aussi, intéressée de près à son travail. J’entends beaucoup parler de l’originalité et de la subtilité de ses compositions et je brûlais de les découvrir. Je dois dire que je ne suis pas déçu car j’ai identifié quelques pépites qui ne sont pas forcément pour moi mais dont je sais identifier la qualité tant au niveau de la création que de la réalisation. J’en ai sélectionné cinq très différentes et je vais essayer de les développer au mieux peut-être pour vous donner envie.
C’est en 2019 que Sylvaine Delacourte lance sa collection des fleurs d’oranger et elle confie à Patrice Revillard le soin de créer « Oranzo » qu’elle décrit comme « pétillant, végétal et givré ». La fleur d’oranger est ici associée à l’orange, au petit grain et à l’estragon pour donner une fragrance dont elle livre l’inspiration de la façon suivante : « Un parfum dont le nom reprend la racine latine « aurantum » signifiant « oranger ». Oranzo est le nom d’un palais italien, caché dans une des îles Borromées, où la végétation luxuriante invite à une balade à travers un labyrinthe mystérieux. Au bout d’une déambulation à l’ombre de la végétation un oranger en fleurs s’offre enfin au regard. Niché au pied d’une cascade vive et généreuse, les pétales blancs des fleurs viennent se mêler à l’eau fraîche et limpide de cette source ». Je suis donc allé le redécouvrir car j’étais un peu passé à côté. Le départ de bigarade, de petit grain et d’estragon est très frais et à la fois assez « explosif » et aromatique. Le coeur de fleur d’oranger n’est pas nécessairement ce que je préfère mais je le trouve très délicat. Au bout de son évolution, le parfum se pose sur un lit de muscs blancs et de notes vertes. Idéal pour un été de canicule, « Oranzo » est résolument moderne. Je ne peux pas dire qu’il soit forcément adapté à mes goûts mais je dois dire qu’il m’a pas mal dérouté tout au long de son évolution.
« Les souvenirs des îles Méditerranéennes, la Corse, Ithaque en Grèce, les îles Baléares ou encore la Sardaigne. Île Mythique est en quelque sorte le parfum d’une île proche de notre cœur et de notre âme. Les notes de lavande, d’anis, de fèves Tonka et de benjoin apportent un sentiment de liberté sauvage, une intimité étroite avec la nature, un moyen de nous redécouvrir face à une dimension mythique » ainsi la maison Chabaud décrit elle « Île Mythique » créé par Patrice Revillard en 2018. Boisé, épicé, ce parfum que j’avais découvert il y a déjà un certain temps sans connaitre le nom du parfumeur qui l’avait composé. J’ai toujours eu un faible pour les bois de réglisse en parfumerie et le moins que l’on puisse dire c’est qu’après un départ aromatique (anis, basilic, estragon, lavande), cette note prend toute sa place au coeur. Construit autour de l’ambroxan, le fond est cuiré, résineux et arrondi par la fève de tonka avant de se faire franchement vétiver. Pour ma part et sur ma peau « Île Mythique » représente l’équilibre parfait. Je regrette, hélas, qu’il ne soit pas distribué chez nous car je l’aurai essayé plus précisément. Je n’ai jamais oublié son effluve. De ce que je connais du travail de Patrice Revillard, ce parfum est sans doute celui qui me conviendrait le mieux. Je me suis fait très plaisir à le découvrir à Paris l’an dernier et, même si j’ai opté pour autre chose, il est toujours resté dans un coin de ma mémoire.
Il y a quelques mois, j’ai fait la découverte de deux parfums créés par Patrice Revillard pour la marque française Nolença. Pour écrire mon article, je n’ai pas pu re-sentir « Le Thé » que j’avais bien aimé mais j’ai pu redécouvrir « Swing Feather » que la marque décrit ainsi : « L’évocation délicate et charnelle d’une peau chauffée un soir d’été. La brique de Toulouse est encore chaude du soleil de la journée, comme notre peau, mais commence à se rafraîchir. On sent quelques effluves de violette. C’est un moment de souffle et de bonheur. On prend le temps de regarder les joies du jour qui vient de passer, on profite de ce moment léger qu’est la tombée du jour en été ». J’avoue que j’ai moins accroché que je l’avais fait avec « Le Thé » dont j’avais trouvé l’équilibre très étonnant sur ma peau. La marque le rapproche du roman de Francis Scott Fitzgerald « Tendre est la nuit » mais il ne m’évoque pas vraiment l’univers de l’auteur de « Gatsby le Magnifique ». C’est un parfum à la fois baumé et fleuri et j’identifie surtout les notes poudrées de l’iris et de la violette posées sur un fond musqué et résineux. Je ne l’ai pas essayé sur la peau mais je pense que son développement doit être très violette. J’ai un peu de mal à me faire une idée mais je pense que c’est un parfum très conforme à l’univers délicat de cette maison de parfums dont j’entends beaucoup parler. Mon goût irait plutôt vers la fraîcheur et la transparence de l’autre création de Patrice Revillard pour Nolença, « Le Thé ». Ceci dit, je trouve qu’il y a quelque chose de très réconfortant dans « Swing Feather ».
En 2020, la maison Teo Cabanel a lancé une nouvelle collection de trois créations appelée Les Impressions Parfumées. Parmi ces trois nouveautés, Patrice Revillard a créé « Oh Là Là » un travail autour de l’iris et la noisette qui, le moins que l’on puisse dire, m’a surpris. Le départ de noisette et de safran est assez étonnant. Si d’emblée, j’ai senti ces deux notes assez distinctement, ensuite la tournure du parfum avec son arrivée au coeur de tabac et d’iris sur ma peau a été très étonnant. Il y avait presque un côté « plastique » ou encore « caoutchouc ». Je l’ai gardé sur ma main très longtemps et j’ai pu sentir son évolution à tous les stades. Le fond est très santal et pas forcément pour moi mais j’ai trouve que « Oh Là Là » était complètement inédit. En tout cas, il l’est pour ma mémoire olfactive. La maison Teo Cabanel le décrit ainsi : « Cette rencontre entre la noisette, l’iris et le santal va vous surprendre... Oh là là porte bien son nom. Parfum boisé audacieux aux notes chaleureuses d’Iris et de tabac, il dévoile un sillage longue tenue mariant le santal et la fève tonka. Un crush total, une formule magique, une signature dont on ne se passe plus ! ». Je ne sais pas ce qu’il en est des autres parfums de cette collection mais je dois dire que celui-ci est complètement en rupture avec ce que je connaissais de la marque et notamment les créations très classiques de Jean-François Latty. « Oh Là Là » est une curieuse effluve, intrigante, originale et assez prenante. On aimera ou pas mais je pense qu’il est intéressant de la découvrir.
Après m’y être penché, je comprends l’engouement pour le travail à la fois très moderne et personnel de Patrice Revillard. Pour l’instant, je n’ai pas encore trouvé la création qui va me donner envie mais c’est un jeune parfumeur dont l’avenir est évidemment prometteur. Je lui reconnais bien volontiers beaucoup de talent et d’inventivité. Évidemment, je suis tombé complètement sous le charme de « L’Iris de Fath », élixir précieux qui n’est, hélas pas dans mes moyens (1470 euros le flacon) et je me contenterai d’en rêver et de le re-sentir à chaque fois que j’en aurai l’occasion. En revanche, j’essaierai bien, lors d’un prochain passage à Paris, un peu plus précisément « Île Mythique » qui est, à ce jour, la création que je connais que j’ai préféré.
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