Philippine Courtière, une sensibilité olfactive à suivre
Parmi les jeunes parfumeurs à suivre, il y en a une dont le travail m’intéresse de plus en plus. Il s’agit de Philippine Courtière que j’avais découverte il y a quelques années grâce à son travail en binôme avec Daphné Bugey pour Oriflamme. Depuis, j’ai senti ou essayé quatre des créations qu’elle a composé et je dois dire que je trouve que c’est un beau travail tout en délicatesse, en simplicité et, n’ayons pas peur des mots, en talent. Goutal Paris, Maison Matine ou encore Chloé, Philippine Courtière donne son interprétation de la féminité même si plusieurs de ses parfums sont plus androgynes ou plus masculins. J’aime vraiment l’écriture épurée et toujours extrêmement bien vue de ses créations et j’avais envie, même si j’en ai déjà parlé récemment, d’y revenir pour donner, peut-être, une vue d’ensemble de ce que je connais de son travail.
C’est avec Camille Goutal que Philippine Courtière crée, pour Annick Goutal, en 2016, ce qui se révèlera être un vrai succès. J’ai nommé « Rose Pompon » en eau de toilette. Je me souviens parfaitement du lancement de cette fragrance qui m’avait un peu déstabilisé. Je m’attendais à quelque chose de très dans l’esprit maison, un peu poudré et feutré et bien pas du tout. C’est un floral fruité absolument éclatant et tout à fait différent de l’idée que je m’en faisais. « Rose Pompon » m’avais surpris. « Une fraîcheur addictive, un manifeste de féminité... Rose Pompon est à l'image des créations olfactives d'Annick Goutal twistée d'une audacieuse modernité ». Pour être moderne, il est moderne ce duo de rose de Bulgarie et de Turquie twisté avec des notes de poivre rose, de cassis, de framboise et de pivoine posées sur un lit de cèdre, de patchouli et de muscs blancs. Si, en règle générale je n’aime pas trop genrer les parfums, je trouve que « Rose Pompon » a vraiment quelque chose de très féminin mais aussi de vraiment éclatant entre fraîcheur et rondeur. C’est un parfum ciselé et il ne faut pas s’arrêter à ses notes de tête mais le laisser vivre, évoluer, changer devenir beau et plein de petites facettes tendres et lumineuses à la fois. Il m’avait surpris, presque rebuté mais je me suis laissé porté et je l’ai beaucoup aimé. Je le préfère en eau de toilette qu’en sa déclinaison en eau de parfum sortie l’an dernier en 2020 que je trouve un peu trop capiteuse et avec des notes de vanille et de violette et qui, à mon sens, perd un peu en finesse. En tout cas, c’est une rose fruitée bien réalisée, sans aucune lourdeur et qui reste, malgré le thème très usité, très niche et, pourquoi pas, un peu Goutal.
Je ne peux m’empêcher de revenir sur le travail de Philippine Courtière pour Maison Matine car j’ai eu vraiment un coup de coeur pour cette marque sans prétention, peu onéreuse, et dont les créations sont réussies et efficaces. Je vais donc, une fois encore, évoquer « Bain de Midi » qu’elle a créé en 2019 et qui, il faut bien le dire, est un beau succès. Un départ de bergamote douce et fraiche à la fois, associée à la noix de coco qui nous emmène déjà au soleil, un coeur de fleur de tiaré, de gardénia qui enveloppent un ylang-ylang plus que solaire et un fond vanillé et musqué confèrent à ce parfum dont chaque ingrédient est savamment dosé, une véritable identité et en même temps quelque chose de simple et net qui le rend facile à s’approprier. Il n’a aucune prétention, il est un compagnon de vacances idéale et rend le soleil aux journées grises. J’ai essayé ce parfum l’an dernier et je ne l’ai jamais oublié car je le trouve tout à fait réussi et je dirais même « impeccable ». En général, je trouve ce que je pourrais appeler les parfums de plage un peu trop féminins et ce n’est pas le cas de celui-ci, il est tellement facile à porter que je pourrais tout à fait me l’approprier et je pense que c’est le cas de beaucoup de garçons. C’est un un concentré universel de soleil, d’été et même un peu de front de mer. Je le trouve vraiment réussi et, même s’il peut sembler un peu sage, il est jubilatoire.
Il y a quelques années, j’ai été vraiment ravi de voir que Atkinsons, une ancienne maison britannique renaissait de ses cendres. J’ai été, en revanche, très déçu de voir que la marque avait disparu des rayons du Printemps Haussmann mais je pense que la maison a d’autres points de vente en France. Sans savoir que c’était Philippine Courtière qui l’avait créé en 2018, j’avais une dose d’éssai de « Gold Fair in Mayfair » qui renoue avec la grande tradition des ambrés floraux avec un départ tout à fait déroutant de noix de muscade et d’absinthe, un coeur de fève de cacao très aromatique et d’iris et un fond construit autour de cette note si particulière d’ambroxan avec des accents de styrax et de vétiver. Vous l’aurez compris, il a quelque chose de très ambré et un peu oriental et il n’est pas nécessairement pour moi mais il faut bien admettre qu’il s’en dégage une élégance absolue un peu éloignée des parfums à l’anglaise dont la marque s’est beaucoup affranchie. Luxueuse, opulente, c’est une fragrance classique et élégante qui ravira les amateurs d’ambrés fleuris qui tendent un peu être mis de côté dans les marques de niche. La petite note d’absinthe qui est très persistante donne un côté anisé et même un peu aquatique au parfum ce qui lui retire toute lourdeur. J’ai bien aimé le redécouvrir.
S’il est une marque dont je ne parle jamais c’est Chloé et pourtant je reconnais que la collection privée appelée Atelier des Fleurs est très belle. Elle compte tout de même 12 fragrances inspirées de fleurs et de feuillages et il serait grand temps que je m’y penche un peu plus d’autant que les trois ou quatre que je connais m’ont plu. J’ai découvert en avant-première, grâce à l’une d’entre-vous, « Narcissus Poeticus » qui doit sortir avant la fin de 2021 cet été et il ne pouvait que me plaire. La marque le décrit ainsi : « Cette Eau de Parfum révèle l’odeur miellée délicate du Narcisse, première fleur dont la parfumeuse Philippine Courtière soit tombée amoureuse. Enfant, elle se promenait avec sa grand-mère dans les allées du jardin du Luxembourg, où elle cueillait cette fleur de printemps pour en confectionner de petits bouquets ». J’aime beaucoup la note de narcisse un peu cuirée et je me suis rendu compte qu’elle n’était pas travaillée de manière classique mais vraiment florale et légèrement poudrée avec une facette miellée. C’est vrai que ce parfum m’a évoqué les jardins urbains. C’est un bouquet floral dominé par cette note profonde et pleine de facettes. La marque ne communique pas sur la pyramide olfactive mais je peux dire que j’ai trouvé le parfum vraiment agréable à sentir et à découvrir. Je ne sais pas si je le porterais mais vraiment sa délicatesse m’a été agréable.
Philippine Courtière a une vraie signature. J’ai hâte de découvrir d’autres parfums qu’elle a pu créer ou qu’elle va inventer. Son travail me touche. Je suis complètement réceptif et j’aime bien le côté simple et direct de ses créations. Je souhaite vraiment qu’elle rencontre le succès qu’elle mérite et qu’elle continue longtemps de nous faire rêver.
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 227 autres membres