Passion Parfums

Lancée en 2019, la Collection Confidentiel compte à ce jour quatre parfums et je vais donc pouvoir vous en faire une revue complète. Je dois dire que je suis partagé. Sur les quatre, il y a deux créations qui me plaisent et deux qui me touchent moins. C’est ainsi la parfumerie. Les fragrances font appel à nos émotions. Il n’y a rien d’objectif là-dedans bien au contraire. Mes avis ne sont que subjectivité et je l’assume complètement. Alors je vous emmène dans ces univers modernes et très particuliers qui vont me plaire ou me rebuter. En tout cas, dans cette collection, le travail de Pierre Guillaume ne me laisse en aucun cas indifférent.

« “Dans la peinture de Jacques Monory, le bleu pardonne tout. Il rend le crime esthétique, la menace fascinante. Baignant dans des camaïeux de bleus hautement désirables, la violence urbaine et contemporaine devient paradoxalement hypnotique”. À travers une vapeur d’Encens mêlé de Vétiver, s’élève l’amertume boisée d’un accord de Bois de Cacao, de Safran et d’Amyris. Anti-Blues déploie sa nature gourmande et sombre en étirant son spectre olfactif de l’odeur du Foin et du Chocolat noir jusqu’aux nuances animales d’une Vanille ourlée de Cuir et de Tabac. Pierre Guillaume revisite la structure “Dark Gourmand” caractéristique de ses premières créations et exécute un parfum boisé chaud et minéral. En opposant la vibration animale du chocolat noir à la froideur urbaine suggérée par les notes d’encens, de safran et de vétiver, le parfumeur, influencé par l’œuvre de Monory, compose un tableau à l’atmosphère sombre et électrique ». J’avais beaucoup entendu parler de « Anti-Blues » créé en 2019 et je dois dire que j’en attendais beaucoup. Je trouve qu’il y a quelque chose d’hyper gourmand dès l’envolée avec des notes de safran, de pamplemousse et d’encens associées à un coeur de bois de cacao, de notes de foins et d’amyris puis un fond de cuir, et de vanille entourant un vétiver très identifiable. Je dois dire que je n’ai pas accroché. Je trouve ce parfum trop gourmand, avec presque un côté café dans son évolution et, vraiment, les notes gourmandes me gênent assez vite. C’est un parfum clivant. Il peut être addictif pour les uns et répulsif pour les autres. C’est mon cas et je ne mets absolument pas en cause la qualité de la réalisation et des matières premières utilisées. C’est juste que le parfum me dérange lorsque mon nez est exposé de manière prolongé.

Également créé en 2019, « Noir Okoumé » est mon coup de coeur de la collection. C’est un cuir chic et boisé avec un côté sombre mais aussi fumé. J’ai aimé ce parfum sur ma peau et et cette curieuse évolution avec un thé oolong rond associé à la myrrhe plus résineuse. « Cœur de Bois…”J’ai toujours été fasciné par la beauté futuriste et le génie plastique de certaines oeuvres de la statuaire africaine. Mystérieuses et hypnotiques elles semblent avoir été façonnées par des mains extra-terrestres. La rencontre avec une figurine de gardien reliquaire Fang (Gabon) m’a donné envie d’explorer à nouveau la thématique africaine, dix ans après Aomassaï…” Noir Okoumé nous parle du Bois-Roi des forêts équatoriales et de la résine de Kandéa du Gabon, évoqués à travers un accord de Loban, de feuilles d’Oolong, de Myrrhe, de Bois de Santal et d’Iris. Pierre Guillaume signe un nouveau Boisé profond et tendre à la fois fumé et poudré. Noir Okoumé est un accord contemporain convoquant des matières primitives brutes ». J’aime la dualité entre le thé oolong et les notes fumées et boisées qui révèlent presque un côté cuir goudronné sur ma peau. Vraiment c’est un beau parfum très tranché. Il est à la fois brut et très élégant. Je le dirai « ethnique » et pourtant très contemporain et urbain. « Noir Okoumé » est à mi-chemin entre une fumée chamanique et un parfum urbain. L’équilibre est trouvé et je dois dire que je l’ai porté plusieurs heures avec un grand plaisir.

À sa sortie, en 2020, j’avais assez aimé « La Nuit de l’Orchidée ». C’est un ambré fleuri très moderne et très élégant avec ce côté orchidée suave et enveloppant qui le rend addictif. « “Fleur sorcière, au fruit semblable à un fourreau de cuir, l’Orchidée Vanille est une pécheresse renfermant un orage sensoriel”. Pierre Guillaume offre à la peau le vertige d’un cuir liquide : le parfum des gousses noires foudroyées lors d’une nuit d’orage ». Avec ce parfum, Pierre Guillaume dépoussière le genre. Je sais qu’on ne doit plus dire oriental mais, franchement, c’est ce que m’évoque « La Nuit de L’Orchidée » que je trouve très élégant. C’est une ode à une vanille sombre et profonde avec des notes fleuries très élégantes et presque vénéneuses. Je trouve ce parfum un peu mystérieux et je dois dire que je l’aime bien même si je ne me vois pas le porter. C’est un parfum étrangement addictif que je pense beaucoup aimer sur les autres mais qui, c’est vrai, est doté d’une super belle construction. En tout cas, je suis content d’avoir remis mon nez dedans. J’aime beaucoup ce parfum mais, il n’est résolument pas pour moi. J’en apprécie les qualités artistique à leur juste valeur. C’est un très beau parfum, plein d’élégance et de séduction.

J’ai été bluffé par l’opulence très envahissante de « À Une Madone » créé en 2021 et je dois dire que je l’assumerai pas c’est clair. « “Cultivée sur les collines volcaniques de l’Ouganda, bénéficiant de deux saisons des pluies et de deux récoltes en Janvier et principalement en Juillet, la vanille d’Ouganda est une Planifolia, large et plate à la robe mate développant des facettes animalisées, des notes de cuir, de cacao fruité et de single malt tourbé. Un garçon manqué !” La découverte de cette vanille contradictoire m’a immédiatement replongé dans mes recherches pour la création de “Louanges Profanes” (2009). L’œuvre de Charles Baudelaire illustrait alors pour moi comment, de la plus belle des manières, la passion humaine peut emprunter le vocabulaire sacré jusqu’aux limites du blasphème. “À une Madone”, extrait des Fleurs du Mal nous dépeint un rituel dans lequel la femme Baudelairienne est à la fois une divinité resplendissante et un Être purement charnel embrasant ses sens d’un désir de possession destructeur » et c’est pourtant vrai que ce parfum nous entraine dans l’univers baudelairien clivant et étrangement vénéneux. Lacté, vanillé et presque animal, « À Une Madone » me déroute mais, vraiment, c’est « je t’aime, moi non plus ». Il m’est tour à tour agréable puis insupportable. Je ne sais pas vraiment comment le décrire mais je ne sais pas non plus quoi en penser. Je ne pourrais pas le porter mais je reconnais qu’il a une certaine étrangeté qui mérite d’être découverte.

 

Pour moi, la Collection Confidentiel est sans doute l’une des plus sophistiquées. Pierre Guillaume l’a vraiment pensée comme un exercice de style et pourtant, elle trouve son public. Comme quoi, la niche, la vraie, peut avoir des adeptes en grand nombre. En tout cas, j’ai trouvé l’idée magique et, même quand je n’aime pas, je suis bluffé par le travail artistique. C’est une collection onéreuse alors, avant d’acheter, il faut vraiment être sûr. Mon seul credo, « essayer, essayer encore » !