Passion Parfums

De mémoire, j’ai toujours aimé les parfums et j’ai toujours eu des goûts un peu à contre-courant. Je commence à prendre de l’âge et parmi ceux qui ont accompagné ma vie, certains ont été reformulés (pas toujours de la plus belle manière d’ailleurs) et d’autres ont été purement et simplement retirés de la vente. Je ne suis venue à la parfumerie de niche (cette appellation avait encore du sens à l’époque) il n’y a qu’une douzaine d’années. Avant cela, je portais des créations du circuit sélectif et, ce qui me semble curieux aujourd’hui, j’ai même eu des périodes où j’étais « monoparfum ». J’ai eu envie de faire un bond dans le passé pour me remémorer ceux qui m’ont accompagné le plus longtemps avant que je ne découvre « Datura Noir » de Serge Lutens et que je devienne vraiment passionné. J’en ai retenu cinq mais il y en a eu d’autres dont j’ai eu peu de souvenir.

Adolescent, j'ai porté un flacon de "l'Eau du Coq" de Guerlain mais, très vite, je me suis rendu compte qu'il ne tenait pas (déjà à l'époque) et que j'avais envie de quelque chose de plus intense. Et ce fut "Égoïste" de Chanel qui était sorti depuis peu. Très honnêtement, en entrant, à l'époque à ce qui était "la Grande Parfumerie Lyonnaise" qui se situait à peu près au milieu de la rue de la République pour ceux qui s'en souviennent, avec ma mère, je n'avais pas la moindre idée de ce qui allait me plaire. J'avais vu la publicité réalisée par Jean-Paul Goude que j'ai choisi comme illustration, et j'ai eu envie de découvrir ce parfum. La vendeuse s'était montrée dubitative. À l'époque, je pense que j'avais seize ans et c'était un oriental vanillé (l'un des premiers des collections pour hommes, comme quoi, Francis Kurkdjian n'a rien inventé avec "le Mâle" de Gaultier). Je pense qu'il s'adressait beaucoup plus à quelqu'un de plus âgé qu'à un adolescent qui découvre mais, je ne sais pas pourquoi, c'est de celui-là dont j'ai eu envie. Réinterprétation de « Bois des Isles » en plus opulent et plus vanillé, créé par Jacques Polge et sorti en 1990, c'était une petite révolution dans le milieu de la parfumerie "masculine" et je lui trouvais beaucoup de chic. Bon, je l'utilisais avec parcimonie car j'avais conscience qu'il possédait un sillage très important et que, d'un naturel plutôt timide, j'aimais bien passer inaperçu. Je l'ai énormément aimé et j’ai plaisir à le sentir encore aujourd’hui.

 

 

Ensuite, j’ai porté "Cristobal pour Homme" de Balenciaga jusqu'à ce qu'il disparaisse. Créé par Gérard Anthony, c’était un oriental fougère très aromatique. Je me souviens parfaitement da sa complexité. Dès que je l’ai eu essayé, il m’a fait envie. Je l’ai porté pendant plusieurs années avant qu’il ne disparaisse. Les notes de têtes étaient la bergamote, la lavande et le poivre. Les notes de coeur, bois de santal, cèdre, patchouli et thé noir. Le fond, plus oriental oscillait entre résine oliban, tabac, ambre et vanille. Jamais « plombant », « Cristobal » me plaisait car il était déjà complètement intemporel et que je ne le trouvais ni désuet ni ultra-moderne. Il avait une très belle identité mais pas vraiment d’extravagance. C’était une concentration eau de toilette et je crois que je me parfumais vraiment beaucoup avec lorsque je le portais. Je l’aimais bien. Je pense qu’il a été l’un des parfums importants de ma vie. Je ne sais pas si je le porterais toujours si je le retrouvais aujourd’hui mais j’ai gardé un flacon vide et l’odeur est encore présente dans le cabochon. J’aime toujours… Je sais qu’on trouve quelques flacons à des prix un peu élevés sur internet mais je n’ai jamais franchi le pas. J’ai un peu peur que mes goûts aient tellement évolué que je finisse par le trouver un peu ordinaire alors que j’en garde un super souvenir. La page est tournée… peut-être.

 

 

 

Mon troisième parfum était, à l’époque, un classique. Il s’agit d’ « Habit Rouge » créé, pour la version eau de toilette, une 1965 par Jean-Paul Guerlain. Il m’avait fait de l’oeil pendant longtemps et, lorsque j’ai perdu la trace de « Cristobal », j’ai eu envie de le porter. Au départ, une seule concentration existait et j’ai adoré son côté poudré vanillé. À cette époque, j’aimais les orientaux. Je trouvais que mon parfum sentait comme les loges de théâtre dans lesquelles les odeurs de cuir, de velours, de poudre de riz et de cosmétiques en tout genre se mêlaient. À l’époque, à sa sortie en 2003, l’eau de parfum était très poudrée et je l’ai adopté après un flacon d’eau de toilette. J’aimais beaucoup son côté très dense conféré par la rose et le patchouli. Je me souviens de l’étui en cuir qui entourait alors le flacon. Et puis, une chose curieuse s’est produite. Flacon après flacon, je sentais le parfum changer de plus en plus, petit à petit, les notes de tête hespéridées qui était fugaces se faisaient encore plus tenace. Puis les bois utilisés ont changé, le côté poudré a disparu peu à peu pour devenir un vague patchouli vanillé. Je me suis mis à ne plus aimer mon parfum et j’ai fini par l’abandonner. À cette époque, j’ai commencé à alterner avec « Sables » d’Annick Goutal que j’avais acheté des années auparavant mais que je n’avais jamais vraiment porté. Puis j’ai abandonné « Habit Rouge ». Les progressives reformulations ne me convenaient pas. Je ne le regrette pas car, aujourd’hui, lorsque je le sens, je ne retrouve plus du tout mon parfum d’alors. Quel dommage !

Il s’en est suivi de nombreuses tentatives de parfums vendus dans le sélectif mais j’ai commencé à en avoir plusieurs en même temps. Je vous en cite quelques uns : « Lolita Lempicka pour Homme », « Man » de Rochas, « Héritage » puis « Vétiver » et "Mitsouko" de Guerlain, enfin « Hanae Mori pour homme » dont j’ai du porter deux flacons quand même. Ensuite, nous étions vers la fin des années 2000 et j’ai découvert « Datura Noir » de Serge Lutens dans une parfumerie indépendante et je n’ai plus vu les fragrances de la même manière. Cet univers a commencé à me passionner et voilà toute l’histoire… Curieux d’avoir fait ce petit retour dans le passé.