Passion Parfums

Ce début d’année est particulièrement riche en sorties. Je suis très désireux en permanence d’y mettre mon nez. J’ai fait, cette semaine, plusieurs découvertes en parfumerie et il m’a semblé intéressant de les regrouper dans un article. Bonnes surprises, réponses à mes attentes où déceptions, tout y est et c’est normal. Encore une fois, mes ressentis n’ont absolument pas valeur de critiques, ils ne sont qu’impressions, interprétations de mes goûts et subjectivité. Parfois conforté dans ma zone de confort, parfois dérouté, souvent surpris, je suis content d’assister à ce fourmillement créatif et olfactif.

J’ai découvert « Musc Noir for Her » lancé au début de l’année 2021 et créé par Sonia Constant pour Narciso Rodriguez. J’avoue que je ne m’étais jamais penché sur cette collection malgré le fait que j’en ai beaucoup entendu parler dans la blogosphère.  Je l’ai aimé tout de suite. C’est un coup de coeur immédiat. C’est quand j’ai regardé la pyramide olfactive, affichée dans la parfumerie, que j’ai compris pourquoi. « Musc Noir for Her » coche toutes les cases : une envolée de prune, un coeur d’héliotrope et de muscs blancs et un fond de daim. Ce cocon à la fois plus sombre que les autres dans la marque, est une véritable pépite. Je ne suis pas un adepte des féminins de cette maison et encore moins des multiples flankers qui envahissent les linéaires des parfumeries du circuit sélectif mais celui-ci est vraiment une excellente surprise. J’ai trainé la touche avec moi toute la journée et je n’ai cessé d’y revenir. Il est estampillé féminin mais je le porterai facilement. C’est un cocon tout à fait réconfortant, très doux mais doté d’un côté un peu intense, poudré par l’héliotrope et les muscs blancs. C’est une très jolie réalisation et je pense qu’elle se retrouvera dans mon top des sorties 2021 à la fin de l’année.

 

 

Pierre Guillaume est prolifique et j’étais un peu passé à côté de « Animal Mondain » qu’il a lancé il y a déjà quelques mois dans sa collection noire. J’ai été influencé pour aller le sentir et je ne l’ai pas regretté. Je remercie d’ailleurs chaleureusement Anne de la Mûre Favorite à Lyon qui distribue la marque et qui a parfaitement joué le jeu pour que je puisse le découvrir à ma convenance. Pierre Guillaume le décrit ainsi : « Entre la fougue épicée de Cozé et l’opulence baumée et liquoreuse de Liqueur Charnelle, Animal Mondain s’interpose comme un nouveau Tabac dans ma production. Dépouillé de tout artifice c’est un corps olfactif non genré inspiré par l’architecture moderniste d’un fumoir signé Mallet-Stevens. Les éclats de rires d’une société mondaine heureuse de festoyer y fendent les volutes de tabac qui s’étirent doucement sur les fauteuils en cuir et le long des boiseries de poirier et d’acajou… ». C’est un tabac orientalisant à la fois épicé, poudré et légèrement boisé. On y retrouve des notes de feuilles de poirier, un absolu de tabac turc et un fond de bois d’acajou. Je trouve qu’il a des accents miellés également. J’ai re-senti « Cozé 02 » mais je lui aurais plutôt trouvé une parenté avec « Vétiver Oriental » créé par Christopher Sheldrake pour Serge Lutens et « Roaring Radcliff » de Daphné Bugey pour la collection des portraits de Penhaligon’s. Je dois le dire, c’est un coup de coeur. Il me plait beaucoup. Je le trouve ultra chic et addictif.

Je n’avais même pas remarqué qu’un nouveau Diptyque et j'ai découvert « Orphéon » créé par Olivier Pescheux et qui sort ces jours-ci. Je suis donc allé le sentir et même l’essayer. L’univers est celui d’un bar de Saint-Germain-des-Prés près de la boutique mère de la maison et l’élégance des femmes et des hommes qui le fréquentent. L’histoire ne pouvait que me faire envie. Le départ est très aromatique. La marque ne communique pas beaucoup sur les notes mais la responsable de boutique a évoquée le genièvre et la sauge sclarée en tête, un coeur de jasmin et un fond de cèdre et de fève tonka. Pour ma part, j’ai trouvé à ce parfum quelque chose de poudré et presque un peu poussiéreux derrière son côté aromatique. Je le trouve beaucoup moins « botanique » que ceux de la maison que je connais et il me semble qu’il est un peu hors de l’univers imposé par la marque depuis de très nombreuses années. Il est beau, très délicat et intéressant. Sur ma peau, il a vite un côté très jasminé mais il semblerait qu’il soit complètement versatile et ne se développe pas du tout de la même manière selon les individus. Je suis séduit par cette création que je trouve particulièrement élégante et facile à aborder. Je ne sais pas si j’aimerais le porter mais je lui trouve quelque chose de très agréable et je suis vraiment content de l’avoir découvert.

 

 

 

Retournons chez Pierre Guillaume pour le tout dernier opus ayant pour nom « Alphaora 30» qui vient juste de pointer le bout de ses agrumes. Sorti dans la collection Numéraires, ce 30ème numéro est un hespéridé rond et enveloppant. Pour le décrire, le parfumeur a décidé de nous expliquer comment il l’a conçu : « La structure d’Alphaora est calquée sur l’architecture de Sucre d’ébène (2010) : un cœur floral dominé par une overdose d’Hédione confère  diffusion et volume à un accord boisé-sucré, rafraîchit de notes hespéridées et doucement épicée. Tandis que Sucre d’ébène repose sur un socle massif de musc infusé de notes balsamiques, Alphaora s’épanouit dans une vapeur d’ambre gris, agissant comme une loupe sur un accord de Mousse d’Assam: une mousse d’arbre imaginaire aux reflets de fruits secs et de tabac blond ». Ne connaissant pas « Sucre d’Ébène », je n’avais aucun à-priori. Lorsque je l’ai senti, j’ai été frappé par une envolée d’agrumes arrondis pas des notes ambrées et un peu sucre de canne posé sur l’hinoki, un résineux japonais et de mousse d’Assam. On y retrouve aussi des notes d’albizia aussi appelée la fleur de soie. Je trouve que c’est un parfum très dense, certes un peu sucré et arrondi mais très hespéridé et très estival. Il n’est manifestement pas pour moi mais je le trouve très bien réalisé. Il m’a un peu évoqué « Tudo Azul » de Anima Vinci dans l’idée. Je trouve la note de sucre de canne, même si la marque ne communique pas dessus vraiment, totalement évidente. C’est une gourmandise à découvrir.

 

 

J’étais un peu « grin-grin » lorsque j’ai vu que Christian Dior sortait encore un autre parfum dans sa collection privée. Je me suis dit « encore !!!! » et je dois dire que je n’adhère pas trop à cette collection hors, j’ai entendu dire autour de moi que « Tobacolor » était pour moi ! J’étais très désireux et impatient de le découvrir voire de l’essayer et je dois dire que les personnes qui spéculaient sur le fait qu’il allait me plaire avaient raison. Créé par François Demachy, c’est un oriental mais « à la sauce Dior ». Le parfumeur a repris la thématique de « Diorama » et l’attraction d’Edmond Roudnitska pour la note de prune et l’a transposée dans un univers de tabac vanillé. François Demachy en parle ainsi : « Je souhaitais revisiter la composition classique d’un "tabac" en créant un sillage surprenant autour du paradoxe d’un narguilé froid. J’ai enrobé l'esprit caractéristique de la fumée du tabac de notes fruitées et sucrées, chaleureuses et joyeuses. Tobacolor est aussi puissant qu’il est souriant. C’est un parfum enveloppant, auquel on s’attache aisément ». Un tabac fruité, j’avoue que ça m’intriguait. J’ai trouvé que le départ était manifestement une prune miellée, confite, très dense associée à des notes de tabac et de fleur de tabac pour se poser sur un fond ambré, boisé et vanillé. Je n’ai pas tellement cherché à trouver une pyramide olfactive car je voulais vous donner mon ressenti tel qu’il demeure alors que je suis en train de l’essayer. C’est un parfum dense, arrondi, facile d’accès mais doté d’un très fort caractère et peut-être un des rares orientaux que j’aimerais porter. Il m’emmène dans un univers oriental, onirique et profond. Un seul bémol toutefois. Je trouve qu’il apparait un peu tard dans la saison sur le marché. J’aurais aimé le porter au plus froid de l’hiver.

 

 

Voilà donc ces quelques découvertes de nouveautés. Je suis globalement très séduit par ce que j’ai senti ou essayer. Je trouve que ce premier trimestre est vraiment riche. Les maisons et les parfumeurs ont tant de belles choses à nous dire et à nous faire sentir ou porter. Je voudrais remercier mes lecteurs car ils me stimulent et me poussent à faire de belles trouvailles. En tout cas, j’espère que cet article vous aura plu et je vous donne rendez-vous au prochain numéro.