Passion Parfums

Dans ma recherche du cuir idéal, ces derniers mois, j’ai senti plusieurs parfums qui m’évoquent plus le suède, le daim, la douceur blanche d’une matière moins rêche. J’ai trouvé intéressant de recenser ceux qui m’ont le plus séduit. En effet, parfois, cette famille olfactive est un peu difficile à aborder et je dois dire que tenter la douceur pour commencer est une bonne idée. J’aurais bien mixé créations du circuit sélectif et marques de créateurs mais je n’ai pas trouvé vraiment ce que je cherchais dans la première catégorie sauf peut-être, et nous allons le voir, dans la très onéreuse Private Blend de Tom Ford. Pour le reste, j’ai plutôt été explorer des maisons plus confidentielles et dont les créations sont tout aussi belles et plus abordables. Allez, plongeons nous dans ce cuir blanc, ce daim qui pourrait nous réconforter après les beaux jours de l’été.

Donc, le premier qui m’a frappé est très floral et il s’agit de « White Suede », issu de la Private Blend de Tom Ford que la marque décrit ainsi : « Pour Tom Ford, le cuir et le daim exercent une puissante attraction addictive. Dans cette élégante fragrance musquée, il capture l'essence primitive de ces matières souples et sensuelles, en leur donnant une nouvelle dimension magnifique avec un surprenant mélange de muscs rehaussé de rose veloutée et d'ambre chaud. L'attraction addictive du cuir et du daim ». La marque ne communique pas sur le parfumeur qui l’a créé en 2009 et c’est dommage car c’est un très beau parfum qui allie un départ presque aromatique de thym et de thé vert pour évoluer vers un coeur de muguet et de rose un peu poudré puis se poser sur fond construit autour d’un accord cuir assez lumineux associé aux muscs blancs, au bois de santal et à l’ambre. « White Suede » est un parfum tout en nuances. Je suis allé le réessayer pour écrire cet article et, sur ma peau, il est un peu épicé, avec une note peut-être de cardamome ou de cannelle. Il a un côté très doux et léger tout en gardant vraiment le côté cuir doux sans jamais être doucereux. En tout cas, même si je le trouve vraiment très cher, je reconnais qu’il est parfaitement réussi voire même impeccable.

Après la disparition de Mona di Orio, la marque s’est associée au parfumeur hollandais Fredrik Dalman pour prolonger son oeuvre et c’est ainsi qu’est né, en 2017, « Suede de Suede » que j’ai beaucoup aimé. « Inspiré des souvenirs de notre parfumeur maison suédois Fredrik Dalman, Suède de Suède dévoile un parfum qui caresse la peau de manière évocatrice comme de doux gants suédois. L'histoire est soutenue par des notes de chicouté, d'osmanthus, de poivre de Sichuan, de bois de cèdre et du riche caractère terreux du patchouli. Le parfum s'adoucit avec le temps, s'attardant sur une note chaude de suède laiteux gonflée par un musc précieux ». Il a plutôt été chercher quelque chose de tendre, de poudré et de musqué en inventant un départ d’épices comme le clou de girofle et le poivre du Sichuan avant d’habiller le coeur du parfum d’un accord de suede très doux et très « daim », de bois de cèdre et d’osmanthus qui lui donne une très jolie facette un peu fruitée renforcée par la chicouté, une petite framboise dont il a utilisé les feuilles avant que le parfum ne prenne tout son corps en se posant sur un accord castoreum, des muscs très bien travaillés et une belle qualité de patchouli. J’étais un peu réticent à sentir ce parfum mais, finalement, je l’ai bien aimé. C’est un cuir tout doux, très facile à porter, très élégant. Que demander de plus ? Peut-être de le trouver plus facilement.

Il est impossible de parler de ces cuirés doux et faciles à porter sans évoquer le merveilleux « Duel » créé par Camille Goutal et Isabelle Doyen pour Goutal Paris (ex Annick Goutal) et que je retrouve toujours avec le même plaisir lorsqu’il arrive sous mon nez. Estampillé masculin, je le trouve tout à fait facile à porter pour une femme comme pour un homme. Il est doux comme un nuage, suave sans excès et terriblement réconfortant. La marque le décrit ainsi : « Duel trouve son décor dans la mythique forêt de Brocéliande. Camille Goutal et Isabelle Doyen opposent des notes cuirées évoquant l’univers équestre, aux notes rafraîchissantes du petitgrain du Paraguay qui évoquent un sous bois aux effluves de terre humide. Un parfum tout en contrastes, entre force et douceur, raffinement et sensualité ». Attention, ce cuir musqué et profond est tout en rondeur et en chic à la française. Après un départ d’absolu de maté de très belle qualité et de petit grain du Paraguay, le coeur d’iris un peu racinaire poudre brièvement la création avant qu’elle ne se pose sur un suave bois de gaïac, un accord cuir et des muscs blancs. J’ai toujours aimé « Duel » et, si certains lui reprocheront peut-être, un petit manque de caractère, je ne suis pas forcément d’accord. Il est facile à aborder et c’est un peu un cuir pour ceux qui veulent aborder cette famille olfactive. Je l’ai toujours trouvé tout en légèreté et très loin des sombres cuirs de Russie que j’affectionne par ailleurs. Il est un peu passé de mode mais il ne serait pas mal de le redécouvrir.

Créé en 2010 par Alexandra Monet pour Evody, « Cuir Blanc » est un suède comme je les aime. Il est tellement doux et enveloppant qu’il met tout le monde d’accord. C’est un cuir de Russie mais dans son côté daim et très éloigné du style bottes ou selles de cheval. « Dans le secret d’une matière à part, Cuir Blanc emprunte au mystère ses codes de luxe, de délicatesse et de passion. Il paraît tout en retenue, mais sa puissance se développe au contact de la peau où il vibre de sensualité. Un parfum entre ciel et terre où se mêlent le Musc blanc à la suavité fumée et fantasque du cuir de Russie ». Alexandra Monet a réussi le tour de force de créer un parfum qui ravira autant les amateurs de cet accord cuiré ancestral, ceux qui recherchent une certaine modernité et également ceux qui débutent avec ce genre d’odeur. Attention, « Cuir Blanc » est quand même doté d’une très très belle identité. Il ne ressemble à rien d’autre. Je le trouve vraiment très singulier avec son départ poudré de feuille de violette, son coeur poudré et doux d’ambre et d’iris et son fond dans lequel l’accord cuir de Russie est complètement adouci par les muscs blancs qui viennent le rendre à la fois singulier et facile à porter. Je l’ai évoqué plusieurs fois mais je voulais vraiment en parler encore.

Je ne reviendrai pas sur « Suède Elixir » de La Manufacture et « Cuir Velours » de Naomi Goodsir car j’en ai pas mal parlé cet hiver mais le coeur y est. Ils font aussi partie de mes préférés. Je les trouve tout aussi magiques que ceux dont j’ai développé les notes. Je ne m’en lasserai pas. J’ai porté le second une bonne partie de l’hiver. Je trouve qu’il est particulièrement réussi. Quant au premier, je l’ai découvert récemment et c’est un beau coup de coeur. J’espère que je vous aurai donné envie de vous plonger dans ces daims, cuirs doux et enveloppant avant d’aller vers des fragrances plus légères pour l’été et surtout, en prévision des prochaines saisons plus froides.