Un parfum, une couleur : le noir
« Le noir pour moi est couleur de lumière » ("L'enfant laboureur" - Paroles François Wertheimer/Musique Barbara)… J’ai beaucoup hésité dans le choix à faire pour représenter la couleur noir car elle m’évoque plusieurs choses. Tout d’abord l’élégance d’une tenue de soirée ou de scène, ensuite l’incontournable d’une garde-robe ou encore la profondeur abyssale d’une odeur. Alors, j’avais plusieurs options. Celle que j’ai choisi c’est une certaine vision d’une élégance à la fois intemporelle et plutôt adaptée à une soirée de gala. J’aurais pu opter pour un cuir assez dark mais j’ai pensé à l’un des parfums les plus élégants, que j’ai pu sentir dans ma vie d’ailleurs ça se rejoint quelque part. Il s’agit de « Bandit » créé par Germaine Cellier et sorti tout de suite après la guerre en 1945. Sulfureux au possible de part son odeur, en rupture avec les parfums orientaux ou fleuris aldéhydés en vogue à l’époque avec son côté sombre, chypré, presque vert par moment, « Bandit » est sans doute devenu une icône de la parfumerie à la française et, jusqu’à cette année, il est resté commercialisé par la marque avant une reformulation par Aurélien Guichard que je redoute un peu, je dois le dire et qui devrait voir le jour cet hiver et qui aura pour nom « Suprême Bandit ». Il était décrit comme « l’un des premiers chyprés cuir de la parfumerie, « un cuiré sauvage éclairé de violette […], coiffé de fleurs blanches et de vétiver » ». Avant-gardiste, certes, il l’a toujours été mais, alors qu’il avait été légèrement adapté en 1999, il était resté l’un des parfums sombres et profonds les plus incroyables de la parfumerie, que dis-je de la haute parfumerie à la française.
L’envolée de bergamote était déjà complexe avec des notes d’aldéhydes, de férule gommeuse, de gardénia et d’armoise, le coeur, construit autour d’un oeillet épicé enveloppé de racine de violette, de tubéreuse, de rose et de jasmin de Grasse et le fond de patchouli et mousse de chêne enrichi de vétiver, de myrrhe et de feuille de tabac conférait à ce parfum pas du tout vintage à mon sens, une intemporalité impressionnante. Sombre et élégant, il était le complément idéal d’un smoking noir ou d’une robe élégante, très Chanel. C’est pour cela que je le rapproche immédiatement du « noir soirée » tel que je l’entends. Sombre, profond mais en même temps d’une rare élégance, ce parfum m’a toujours fait l’effet d’être une véritable institution. Il a d’ailleurs influencé nombre de parfumeurs dans les décennies qui ont suivi. Je pourrais citer Bernard Chant pour « Cabochard » de Grès en 1959, Paul Vacher pour « Diorling » de Christian Dior en 1963, Nicolas Mamounas et Roger Pellegrino pour « Macassar » de Rochas en 1980 ou encore, plus près de nous et de l’autre côté de la Manche, Julie Marlowe et Julie Dunkley pour « Coeur de Noir » de Beaufort. Pour moi, il est une famille olfactive à lui tout seul et il représente magnifiquement l’élégance de la couleur noire.
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