Passion Parfums

La haute couture et la parfumerie ont été, depuis le début de XXème siècle, intimement liées. Paul Poiret, Gabrielle Chanel, Elsa Schiaparelli, Christian Dior, Marcel Rochas ou encore, plus près de nous, Christian Lacroix, Jean-Paul Gaultier et Thierry Mugler ont lancé leur marque. Yves Saint-Laurent n’a pas été en reste. Dès 1964, il lance « Y » qui constituera le point de départ d’une collaboration fructueuse entre le couturier puis sa maison une fois revendue et nombre de parfumeurs de talent. Je dois dire que je me suis intéressé relativement récemment à cette marque car je ne connaissais que quelques fragrance, comme ça, en passant. Leur nombre est assez immense et il m’a fallu vraiment utiliser la méthode de l’entonnoir pour n’en sélectionner que cinq que je vais développer dans cet article quitte à écrire, dans quelques mois, un second volume. Plusieurs collections, des féminins bien évidemment mais aussi des masculins et des mixtes, trois des quatre concentrations, des créations parfois révolutionnaires telles « Opium » auquel j’ai déjà consacré un article, existent dans la marque et j’ai cherché un peu les jus qui me parlent le plus. Je reviendrai sur l’un d’entre-eux dont j’ai déjà parlé mais qui demeure, au jour d’aujourd’hui, mon préféré… Je vous laisse deviner.

Il m’a fallu retourner sentir « Y » afin de me le remémorer car je le connaissais et, s’il a sans doute été reformulé, je dois bien admettre que c’est vraiment une création que j’aime. « Inventé » par Jean Amic en 1964 à la demande d’Yves Saint-Laurent et reprenant comme nom l’initiale de son prénom, c’’est un chypré fruité qui s’inscrit dans une longue lignée de parfums que j’aime. L’envolée de chèvrefeuille, d’aldéhydes et de prune est enrobé d’un délicat gardénia et d’une note de pêche absolument jubilatoire. Le coeur, floral, de tubéreuse, de jasmin, d’ylang ylang et de rose est poudré par une racine d’iris très présente et le fond de patchouli et d’ambre repose sur un lit de mousse de chaîne et de styrax. Je pense que, déjà à l’époque, il était classique mais chic. Je trouve que c’est un parfum complètement intemporel dans le style foisonnant et complexe. Pour moi, « Y » est une réussite et il entre parfaitement dans le style de parfum féminin que j’aime dans la lignée de « Mitsouko » de Guerlain par exemple. Si la création est originale, elle s’inscrit dans une famille olfactive précise et je pense que j’aime ça.

Créé en 1971 à l’initiative d’Yves Saint-Laurent, « Rive Gauche » est un parfum à la fois floral et poudré qui rappelle la poudre de riz de nos grand-mères. L’ouvertures aldéhydée et très bergamote évoolue vers un coeur de magnolia, gardénia, jasmin, ylang ylang et poudré par la rose. Le fond de bois de santal et de muscs blancs est arrondi par la fève tonka et les muscs blancs. Je n’avais pas trop aimé ce parfum en le sentant pour la première fois. J’ai finalement eu du plaisir en le redécouvrant. Il est très suranné (son flacon aussi d’ailleurs) mais il a toujours ses adeptes et c’est tant mieux car, ainsi, ils n’est pas si mal et son coeur poudré m’a beaucoup plu. J’aime beaucoup les anciens parfums de la maison. J’ai plus de mal avec les création récentes qui sont, à mon sens, beaucoup plus convenues.

Créé en 1981 par Pierre Bourdon dont je vous ai parlé dans un article il y a quelques temps, « Kouros » a été une petite révolution de la parfumerie masculine. Je l’ai porté et je dois dire qu’il ne ressemble à rien d’autre si ce n’est que je lui trouve des notes communes avec « Anaïs Anaïs » de Cacharel, allez savoir pourquoi. L’envolée est très aldéhydée avec des notes aromatiques notamment d’armoise et hespéridées avec la bergamote. Le coeur d’oeillet et de patchouli est soutenu par le géranium et le vétiver. Des notes de jasmin, de cannelle et de racine d’iris paraissent antinomiques et pourtant je trouve qu’elles prennent tout à fait leur place. Le fond miellé, cuiré, ambré et mousse de chêne lui laissent un côté chypré qui me surprend et me ravit. Certes, il est, aujourd’hui, un peu trop opulent pour moi mais je trouve que c’est quand même une belle création. On y retrouve l’originalité de Pierre Bourdon et ce n’est pas pour me déplaire.

J’ai déjà évoqué avec vous « Yvresse », sorti dans un premier temps sous le nom de « Champagne » et créé en 1993 par l’excellente Sophia Grojsman mais il est et reste un de mes bests de la parfumerie du circuit sélectif. J’adore ce chypré fruité, opulent, liquoreux et pétillant à la fois et je trouve qu’il restitue parfaitement le sens de la fête qu’évoque ce vin, fleuron de la culture gustative française. Ah elle aime les formules complexes Sophia Grosjman ! L’ouverture, à la fois fruitée et relevée par une note de menthe, le coeur oscillant entre les notes fruitées du litchi et l’opulence d’un bouquet floral, épicé et poudré est absolument magnifique. Le fond de patchouli et de mousse de chêne est vraiment super élégant. Vraiment, « Yvresse » est l’un de mes parfums préférés tant dans la marque que dans toute la parfumerie grand public. C’est un parfum inter-générationel, intemporel et tout à fait indispensable. Je le porterai très facilement. Il m’a toujours plu. Pour moi, ce jus excellent est l’un des plus originaux créés par la parfumeuse.

 

 

 

J’ai redécouvert, il y a peu (et je crois qu’il va être arrêté) « Cinéma » créé par Jacques Cavallier en 2004. Aujourd’hui, nous dirions que c’est un « floriental » avec une ouverture de mandarine, cyclamen et fleur d’amandier, un coeur de pivoine, d’amaryllis, une fleur un peu oubliée en parfumerie, et de jasmin sur un fond d’ambre, de vanille, de benjoin et de muscs blancs. À la fois floral et vanillé, « Cinéma » a quelque chose d’un peu poudré que je trouve super élégant. Typique des parfums du début des années 2000, il est, pour moi, plus daté finalement que d’autres parfums de la maison mais ce n’est pas une critique car on a envie, parfois, de se replonger olfactivement dans une époque heureuse. Pour moi, « Cinéma » est vraiment un beau parfum au sens ou je l’entends. Il est un peu relégué au rayon des souvenirs et c’est dommage car je pense qu’il pourrait bien trouver de nouveaux amateurs. De plus, je l’ai essayé il y a quelques mois, il a un côté très androgyne que j’aime beaucoup.

Je ne suis pas très branché par les collections privées à quelques exceptions près. En ce qui concerne Le Vestiaire d’Yves Saint-Laurent, j’ai un faible pour « Grain de Poudre » mais surtout je viens de découvrir « Capeline », créé cette année, en 2020 par Juliette Karagueuzoglou à qui l’on doit de très belles choses notamment chez Penhaligon’s (Je pense entre-autres à « Changing Constance » que j’adore) et je trouve que c’est l’une des belles surprises de ce premier semestre. Épuré, élégant, un peu frais, c’est un floral salé… Je ne vois pas ce que je pourrais dire d’autre. L’envolée de mandarine et de bergamote est assez classique mais ne nous y trompons pas, le coeur marin avec des notes de lys et de sel marin sont arrondis par le néroli et l’ylang ylang et le fond de vétiver et de muscs blancs avec un soupçon de vanille est super chic. Malgré son nom, il est considéré par la maison Saint-Laurent comme un unisexe et je trouve qu’il l’est. Facile à porter autant qu’il est original, c’est un petit coup de coeur.

 

 

Il y a d’autres très beaux parfums chez Yves Saint-Laurent, je pense à « M7 » ou à « Paris » par exemple mais je sais qu’il faut que mes revues ne soient pas trop longues sur internet alors je me suis limité. Étant donné que c’est une marque que je découvre petit à petit depuis deux ou trois ans, j’avoue que j’ai un peu de mal à ne pas partir dans tous les sens. J’espère que j’ai été suffisamment synthétique pour être compréhensible. En tout cas, nul doute que d’autres créations de la marque auront leur place, petit à petit, dans les articles de ce blog. J’espère que ça vous plaira car j’aime découvrir ces créations qui ne sont pas forcément pour moi mais dont je reconnais l’originalité et la qualité.