Passion Parfums

« Le baume de Tolu est un baume originaire d'Amérique du Sud (Colombie, Pérou, Venezuela). Il est similaire et souvent confondu avec le baume du Pérou. Il est extrait des troncs vivants de Myroxylon balsamum var. balsamum1. Le baume frais de Tolu est une masse brunâtre, collante, semi-fluide. Il devient progressivement un solide cassant, mais se ramollit à nouveau lorsqu'il est chaud 2. Le baume contient une quantité assez importante d'esters benzyliques et cinnamyliques des acides benzoïque et cinnamique » (Source internet). Très différente du baume du Pérou, cette matière première est utilisée souvent dans des compositions complexes, souvent ambrées ou chyprées. J’ai mis très longtemps à en apprécier la douceur suave presque « étouffante » lorsque la note est trop présente. Aujourd’hui, je maîtrise ses effluves un peu mieux et je sais l’identifier. Je trouve que le baume de tolu confère aux parfums qui en contiennent, quelque chose de rond et de suave, un peu comme le benjoin. J’ai choisi quatre compositions dans lesquelles, je l’identifie très bien. Je vous emmène avec moi et j’espère bien échanger sur le sujet.

Complexe, luxueux, vraiment incroyable, « Chypre Palatin » créé par Bertrand Duchaufour en 2012 pour MDCI est un parfum qui m’a toujours fait très envie mais le budget est important alors il faut que je sois vraiment sûr. C’est un néo chypré très moderne, ultra complexe, avec un formule longue qui vraiment renoue faussement avec les grands parfums à la française de l’entre-deux guerres. Je dis « faussement » car l’interprétation est contemporaine. Il s’ouvre sur une envolée très verte de galbanum, de clémentine, de jacinthe, de thym, de ciste, de lavande et d’aldéhydes puis vient un coeur « juteux » de prune associé au jasmin, à la rose, à l’iris et au gardénia. C’est en fond que le baume tolu prend le relais du patchouli pour s’associer à la mousse de chêne et donner au parfum une rondeur assez étonnante. Des notes d’immortelle, de styrax, de benjoin, de vanille associées à un accord castoreum. Le résultat est un peu dans la lignée de création comme « Le Parfum de Thérèse » créé par Edmond Roudnitska mais avec des notes beaucoup plus rondes et presque un peu liquoreuses. Le baume de tolu est vraiment un plus dans la composition. Je trouve « Chypre Palatin » magnifique et peut-être un jour franchirais-je le cap.

 

 

En fouinant dans mes doses d’essai je suis tombé ce matin sur « Winter Palace », créé par Aliénor Massenet et sorti chez Memo l’an dernier. Je me suis dit « et pourquoi pas aujourd’hui ? » et dès la sortie de la douche, je l’ai essayé. Je me souviens que je l’avais bien aimé à sa sortie et je voulais voir si j’en pensais encore la même chose. « Winter Palace » est un parfum qui n’appartient pas forcément à l’une des grandes familles olfactives, en tout cas, tel est mon ressenti. Je trouve qu’il est baumé, rond, avec quelques petites pointes de thé et d’agrumes. Je lui trouve une facette épicée très exotique qui pourrait m’entrainer dans les films en noir et blanc des années trente, du style « Shanghaï Express » de Josef von Sternberg ou encore « Macao, l’enfer du jeu » de Jean Delannoy. Il a comme quelque chose d’un peu interdit et pourtant d’assez attirant. Ma seconde impression est son côté plus ambré tout en restant frais, je reconnais le benjoin et une note discrète d’une vanille précieuse. Je trouve que cet aspect a un côté très contemporain, très original et plein de relief. Une fois de plus, Aliénor Massenet me surprend et m’entraine dans un univers Memo à la fois sophistiqué et raffiné. Je dois dire que je suis toujours assez séduit par « Winter Palace ». Il est beau, enveloppant sans excès et son sillage est modéré. Les notes d’agrumes en tête restent en place même après une heure d’évolution et je trouve que ce côté frais qui vient s’ajouter aux baumes et aux épices est, ma foi, très agréable. Pour finir, je ne sais pas si je pourrais m’approprier « Winter Palace » mais je le trouve particulièrement intéressant car il ne ressemble à rien d’autre et qu’il est, comme souvent dans la marque, une vraie création originale. C’est du jamais vu, jamais senti, jamais porté. En bref, je dirai que c’est une véritable réussite et je suis content de le porter aujourd’hui.

 

 

 

Un peu moins rond mais tout aussi baumé, « L’Astre » créé pour Le Galion par Rodrigo Flores-Roux en 2023, avait été l’un de mes parfums préférés des sorties de l’an dernier. « Lors de sa rencontre avec Paul Vacher, parfumeur et propriétaire de Le Galion, celui-ci, subjugué, demande à Ava de devenir l’ambassadrice et l’égérie de Sortilège, un parfum évoquant les soirées extravagantes de l’époque et devenu la signature olfactive de la haute-société des ‘fifties’. Suite au succès de cette collaboration, Ava Gardner réclame à Paul Vacher une création sur-mesure, imaginée spécialement pour elle. Le parfumeur, tenant en haute estime la distinction féminine, s'exécute avec joie et compose la fragrance qui deviendra L’ Astre. Un élixir d’opulence à balayer les inhibitions et abolir les hésitations. Un parfum qui recherche - et capte à coup sûr - la plus totale des attentions. " The Ava Gardner Trust est heureux de présenter L'Astre, Etoile Incendiaire, en collaboration avec la maison de renommée mondiale Le Galion. Cette sortie cristallise la relation intemporelle et continue entre Ava et LeGalion d'une manière remarquable. Rappelant les parfums opulents de l'âge d'or d'Hollywood, cette reformulation contemporaine est un parfum qu'Ava porterait ; distinctif, chaleureux et invitant. C'est l'authentique Ava Gardner ! ». Le départ est très moderne avec des notes de gingembre, de fenouil, de thym et de cardamome surprend un peu mais le coeur d’ylang-ylang, de tubéreuse et de fleur d’oranger puis le fond de baume de tolu, d’ambre de vanille et de daim. Entre floral et néo-chypre, ce parfum faussement vintage me plait énormément. Je le trouve peut-être un rien trop féminin pour moi mais il me plait. C’est une addiction. Le côté baumé en fond me plait beaucoup et je trouve qu’il s’harmonise parfaitement avec la star qui l’a inspiré, j’ai nommé « le plus bel animal d’Hollywood, Ava Garder.

 

 

 

« Un patchouli sombre, enivrant, ourlé de la sensualité des baumes ». Le dernier parfum est également oriental et porte le nom évocateur de « Patchouly Bohème » et je dois dire que c’est un coup de coeur. Il est tout aussi étonnant dans sa construction que le précédent. La marque le décrit ainsi : « Relevé de la fraîcheur du géranium en tête, le patchouli, précieux bois d’Indonésie, plonge dans la chaleur du cuir et tabac. Ses notes boisées et terreuses s’habillent des rondeurs du Baume du Tolu et de la fève tonka, sur un lit de muscs. Un parfum troublant et mystérieux ». Après une envolée de feuilles de géranium d’Égypte, le côté frais est contrebalancé par une note boisée et le parfum évolue vers un coeur de patchouli d’Indonésie, de tabac de Virginie et de cuir. Le fond de muscs, de baume de Tolu et de fève de Tonka ouvre le parfum dans une véritable symphonie de notes qui s’harmonisent vraiment parfaitement. Il ne ressemble à rien d’autre et je dois dire que, sur ma peau, alors qu’il prend sa place petit à petit, il devient de plus en plus chic et l’interprétation du patchouli me plait beaucoup. Je dois dire que je retrouve, dans cette création, le travail que j’aime tellement de Mona di Orio. Il a beau être une commande, je le trouve vraiment singulier et très original.

 

 

 

J’ai choisi quatre parfums dont j’ai peu parlé et que je pourrais porter.Le baume tolu revêt toujours un côté rond qui met la touche finale aux parfums des lesquels il est présent en fond. J’ai bien aimé me plonger dans ces quatre parfums très réussis. Je me suis demandé si je pourrais les porter et je me suis répondu que oui. Ce sont quatre merveilles. J’ai beaucoup aimé chacun de ses parfums et ils me plairaient tous.

 

 

 

Non, la carrière d’Olivier Cresp ne se résume absolument pas à Akro, la marque qu’il a créé en 2018 avec sa fille. Depuis bien des années, il invente des parfums à la fois pour des marques grand public et pour des maisons plus confidentielles. Le choix est large mais j’ai quand même décidé de lui consacrer un petit portrait parfumé avec ce que je considère comme les parfums les plus audacieux qu’il a composé. Depuis une quinzaine d’années. La signature d’Olivier Cresp est très reconnaissable dans le sens où il ne s’interdit rien mais que les jus qu’il signe sont toujours d’une très grande cohérence. J’aime bien son travail et je me suis rendu compte que je n’avais jamais vraiment exploré son travail. Je vous emmène donc dans les univers de ce parfumeur à la fois prolifique et inventif.

Avec « Infuse » qu’il a créé cette année pour sa maison Akro, « Juniper Sling » lancé 2011 par Penhaligon’s est mon parfum d’Olivier Cresp préféré. « Quelqu'un pour du gin ? Un éclat de fraîcheur au genièvre. Angélique taquine et poivre noir. Épices chaleureuses et cœurs chaleureux. Cette eau de toilette est un cocktail complexe. Mieux vaut en faire un double ». La composition en est simple, une envolée très nette de baies de genièvre, un coeur de poivre noir et un fond de vétiver. Le tour est joué. Ce parfum, c’est le milieu un peu nocturne de Londres. Un gin tonic, une cigarette blonde, beaucoup de chic, un peu de rire et il me réjouit. Il y a quand même un bémol : sa concentration eau de toilette nécessaire à la beauté de la fragrance fait que sa tenue est un peu limitée et je ne comprends pas du tout la marque qui en a fixé le prix au même niveau que les eaux de parfum. J’avoue que ça me freine un peu pour le racheter et pourtant je l’aime vraiment beaucoup. C’est un merveilleux parfum dont la finesse et l’élégance est révélateur du talent formidable d’Olivier Cresp.

 

 

Pour décrire l’inspiration de « Flash Back » qu’il a créé en 2013 pour Olfactive Studio, Olivier Cresp écrit : « Le flash back est une matière hautement expressive et désirable. Nous voudrions que ce visage à l’écart du lissage digital soit le nôtre ; habité de pensées sereines, débarrassé des stigmates de la cosmétique numérique, animé par la joie des pixels voulus par l’artiste. Il fixe un instant suspendu, cette zone de mémoire qui profondément incruste la rétine. Et fait vivre un lointain souvenir, peut-être un déjà vu : celui d’un visage, d’un corps, d’une émotion devenue présence ». Je connais ce parfum depuis longtemps et je l’ai toujours bien aimé. Là encore, le parfumeur s’est éloigné des codes consensuels de la parfumerie pour inventer une composition originale qui démarre avec une envolée acidulée de rhubarbe, d’orange et de pamplemousse. Le côté un peu amer me plait énormément. Le coeur de pomme et de poivre rose est vraiment étonnant. Il s’avère un peu pétillant et rond à la fois. Je ne sais pas pourquoi mais il me fait penser à quelque chose de régressif. Le fond, très tendre, de vétiver, d’ambre, de muscs blancs et de cèdre assure une très bonne tenue à ce parfum d’exception. J’aime beaucoup ce parfum très singulier et je pourrais parfaitement le porter.

 

 

 

« Parfum de peau sale et collante. Mon dos s’est cambré comme un arc et il a respiré lourdement juste derrière mon dos en sueur ». « Dirty Rice », créé par Olivier Cresp en 2022 pour la marque coréenne Borntostandout se présente comme un parfum très subversif, provocateur, presque érotique. J’avoue que j’avais certaines craintes lorsque je l’ai senti mais elles ont étés vite apaisées. En effet, c’est une création audacieuse, pas toujours agréable pour moi, mais elle s’avère très cohérente. Je ne sais pas pourquoi mais j’ai eu un peu l’impression d’être plongé dans le texte d’une chanson de Brigitte Fontaine ou d’Higelin. « Dirty Rice » a quand même un côté très baroque avec son départ de bergamote et d’amande qui pourrait paraître parfaitement bizarre mais qui fonctionne parfaitement. Les notes de riz et de lait du coeur, associées à la pivoine me sont presque désagréable et pourtant, je dois bien l’admettre, je ne décolle pas mon nez du parfum lorsque je le sens. Le fond est très santal même si la marque évoque des notes de vétiver, de cèdre, d’ambroxan et de muscs blancs. Ce parfum m’a évoqué le goût d’un riz au lait peu sucré. Je dois dire que je ne le trouve pas tellement provocateur mais original c’est certain. Je suis incapable de dire si je l’aime ou pas. Il est étonnant, un peu dérangeant pour moi par son côté crémeux mais je le trouve un peu dans la lignée d’un « Blanche Bête » de Liquides Imaginaires. En tout cas, c’est un travail à découvrir car il sort des sentiers battus.

 

« Bake » créé en 2023 par Olivier Cresp pour sa maison Akro avait tout pour ne pas me plaire sur le papier. Le parfumeur en décrit ainsi l’inspiration : « C'est un shot de citron combiné à un sucre vanillé. Quand je le sens, je me transporte dans ma pâtisserie préférée à Londres ». Je ne suis pas du tout amateur de fragrances sucrées et « pâtissières » hors, lorsque Marion, qui travaille pour la marque, me l’a fait essayer en avant-première, j’ai été plus que surpris. En effet, ce parfum matche avec ma peau comme c’est rarement le cas des gourmands. Je ne pouvais pas finir ma sélection de parfums réalisés par Olivier Cresp sans le mentionner tant il m’a surpris. Le départ de citron et de rhum peut être, sur certaines peaux, très rond et sucré voire même liquoreux. Sur moi, il s’avère vif et tout à fait rafraîchissant. L’accord praliné et chantilly du coeur est quasi inexistant sur ma peau alors que je l’ai bien senti sur d’autres utilisateurs. Le parfum citronné se pare d’une vanille certes un peu gourmande en fond mais elle n’est jamais too much. Je vais même vous faire une confidence : ce parfum qui est aux antipodes de mes goûts, j’ai même pensé à le porter ! Pour moi, il est super abouti. C’est une référence du genre qui montre la virtuosité d’Olivier Cresp. Je l’ai re-senti pour écrire mon article et n’ai pas pu m’empêcher de le mettre sur ma peau. Il est addictif.

 

 

J’aurais pu faire d’autre chois dans l’osmographie d’Olivier Cresp mais je me suis dit qu’il fallait choisir quatre réalisations percutantes. Je me suis fait très plaisir à découvrir « Dirty Rice » et à remettre mon nez dans « Bake », « Flashback » et « Juniper Sling ». J’aime la signature très étonnante de ce parfumeur qui semble savoir tout faire. En tout cas, il reste parmi les nez que je préfère. Son travail est éclectique mais toujours d’une grande qualité.

 

 

 

Décidément, cet automne, les marques lancent toutes leurs collections d’extraits et Atelier des Ors ne fait pas exception à la règle avec deux créations de Marie Salamagne à la fois luxueuses, sombres et très onéreuses. Elles dépassent le budget que beaucoup d’entre-nous se sont fixés mais j’ai eu l’occasion de les découvrir et je ne me voyais pas ne pas en parler. L’univers est dark comme le flacon opaque et noir. Les parfums sont complexe, clivants et très étonnants. Je suis quand même content d’avoir mis mon nez dessus. Je pense que, ne serait-ce que pour notre culture olfactive, il fat les sentir voire même les mettre sur peau. Je vous emmène donc au pays d’Atelier des Ors et des belles matières premières très fortement concentrées.

J’ai été un peu dérouté par « Kawa Karda » avec son départ très sec de café épicé de cardamome, son coeur de safran, de cèdre et de rose. Le fond de vétiver est très sec, même boisé. Il me sort quand même un peu de mes goûts. Je sais reconnaitre le côté très qualitatif du jus mais il ne me parle pas vraiment. « Au fil des conquêtes et des explorations, dans les poches des aventuriers ou dans les soutes des navires marchands, le café a accompagné un processus d’exploration aux frontières, de découverte du monde. Une création autour d’un café puissant, addictif et contrasté, illuminé par une cardamome fraîche et fusante. Riche en matières premières naturelles et exceptionnelles, cet extrait est travaillé à 40%, concentration de matières comme décuplée. Il s’inscrit dans leur évidence et la puissance de leur imaginaire ». J’ai eu un peu de mal à poser « Kawa Karda » sur ma peau. J’ai tout de même tenté l’expérience. Je mesure qu’il s’agit d’un beau parfum mais le côté café sombre et boisé est difficile pour moi. Je ne pourrais pas le supporter une journée entière. Il va énormément plaire aux amateurs de ce type de fragrances car il s’avère quand même très réussi.

 

 

 

Mon préféré est sans aucun doute « Cocoa Kimiya ». « Venu des terres lointaines d'Amérique latine, le cacao y est considéré comme une plante sacrée, « nourriture des dieux » (signification de cacaoyer, théobroma en grec). Le divin dans la matière. Une création autour d’un cacao sombre et intense contrasté par la lumière d’une cardamome singulière et éclatante. Riche en matières premières naturelles et exceptionnelles, ce 2ème extrait est également à 40%, concentration de matières exacerbées. Il oscille entre ombre et lumière, éclat et mystère, addiction et amertume ». Après un départ un peu d’un bloc de cacao et de cardamome vient un très beau coeur de patchouli avec des notes de noix. Le fond, un peu boisé est surtout musqué et poudré par des notes de vanille très qualitative. C’est un parfum vraiment ethnique avec pour sujet principal un cacao plein de nuances. J’ai beaucoup aimé l’évolution qui est très longue compte tenu de la très haute concentration. C’est un parfum quand même très dark au départ mais il se fait clair obscur au fur et à mesure qu’il se développe. Il faut l’essayer sur la peau car il change vraiment. Je trouve que la qualité de la vanille est assez exceptionnelle. « Cocoa Kimiya » me plait beaucoup mais il n’est pas complètement un coup de coeur.

 

 

 

Contenu dans des flacons noirs et opaques qui prennent leurs distances avec le côté un peu doré qui a fait une partie de la renommée de la marque, ces deux extraits sont vraiment bien imaginés et très intéressants d’un point de vue artistique. Je dirai qu’ils ne sont pas facile à porter et que leur prix est très élevé. Je ne pourrais pas les porter mais j’ai beaucoup aimé les découvrir. Ce n’est pas trop mon histoire mais ce sont des créations à essayer absolument. Ils sont singuliers et le parti pris est très net. En tout cas, ça a été, pour moi, vraiment une très belle expérience.

Je ne sais pas où va Goutal Paris. Après la fermeture de la plupart des boutiques, la suppression des partenariats dans beaucoup de parfumeries indépendantes, les points de vente s’amenuisant, voici que « Passion », « Gardénia Passion » et bientôt « Ce Soir ou Jamais » disparaissent du catalogue. De belles erreurs ont étés commises ces dernières années et je trouve que le groupe coréen qui détient la marque mène une politique assez incohérente depuis le départ de Brigitte Taitinger qui préservait, même après le rachat, la marque, son esprit et ses créations. J’avais entendu parler d’une sortie mais finalement, il n’y a eu que la réédition de « Ambre Sauvage » et le lancement d’une collection de bougies. Elles sont belles mais il s’agit quand même d’une moindre consolation. Tout d’abord, il y a eu le changement de nom. Annick Goutal est devenu Goutal Paris puis le changement de flaconnage et de boites. Au-revoir l’esprit vintage et romantique de la marque ! Heureusement, sur ce dernier point, les directeurs commerciaux sont revenus en arrière. Ensuite, la flambée des prix a sans doute découragé certains clients occidentaux. Enfin, la fermeture des points de vente s’est avéré dur pour une clientèle restée fidèle malgré la pandémie. Elle était peut-être moins nombreuse mais toujours présente.

Je suis passé, lors de mon dernier séjour à Paris, au stand du Bon Marché et j’ai été merveilleusement accueilli par une passionnée de la marque comme moi. Nous nous sommes inquiétés ensemble de ce que devenait Goutal Paris. Bien sûr, des pages ont étés tournées. Camille Goutal et Isabelle Doyen sont partie en Voyages Imaginaires vers de nouvelles et belles aventures mais je ne peux pas m’empêcher d’être nostalgique car cette maison, je l’aime depuis vraiment longtemps. Je porte « Sables » depuis de très nombreuses années et je ne compte plus les créations que j’ai aimé depuis. Ma passion pour la parfumerie a grandi avec Annick Goutal puis, malgré tout, Goutal Paris et, lorsque je vois de si belles créations disparaitre, je ne peux m’éviter une certaine nostalgie et pas mal de tristesse. J’ai beaucoup de mal à accepter que cette si belle maison précurseur de la parfumerie de niche n’aille pas très bien. J’espère que l’avenir me donnera tort et que d’autres parfums ne seront pas supprimés. Je souhaite aussi que reviennent des points de ventes plus proches de moi. Enfin, que vive Goutal Paris dans de meilleures conditions.

Francis Miller et Patrick Bertaux

« Des parfums pour le corps et l'âme, dédicacés à ceux et celles qui choisissent l'équilibre de l'être et du paraître » tel est la devise de Miller et Bertaux, une maison française née en 1985 de deux sensibilités et d’une vraie démarche artisanale. Je connais cette maison depuis que je m’intéresse à la parfumerie de niche mais, comme je n’ai jamais porté réellement les créations qu’elle recèle et comme elle a peu d’actualité, je l’avais un peu oubliée. C’est bien dommage. C’est chez Nose, lors d’un récent séjour à Paris, que j’ai redécouvert certaines compositions et que j’ai levé le voile sur une que je ne connaissais absolument pas. L’univers est très boisé et il n’est donc pas forcément pour moi mais je dois dire que les parfums sont beaux, bien réussis, que la démarche est éthique et que la marque peut plaire. Il me fallait donc explorer un peu et en parler. Je vous emmène donc dans l’univers très particulier de Miller et Bertaux. C’est une maison pionnière de la parfumerie d’auteurs et elle existe toujours malgré la grande discrétion de sa diffusion.

« L'arrière pays américain, une maison de bois se dresse face à l'océan. La nature sauvage et immense se couvre d'un voile brumeux. La chaleur d'un feu de cheminée à l'intérieur. Les grands arbres et les buissons se chargent de l'odeur de fumée d'un camp indien au loin. Le sillage des orangs amères se propage entre les herbes hautes », tel est « Oh, ooOoh… oh » lancé en 2012. Il s’agit de l’une des créations que je préférais lorsque j’ai découvert la marque il y a une dizaine d’années et cela se confirme. Il s’agit d’un boisé très fumé avec un départ d’orange amère, de baies de genièvre et d’armoise, un coeur composé d’un accord cendres, herbe ainsi que de sequoia et de ciste labdanum. Le fond est cuiré, fumé, mousseux et musqué avec un côté encens. Très franchement, je trouve ce parfum extravagant mais j’aime l’avoir sous le nez. Je l’ai redécouvert récemment et il m’a semblé très bien construit. Je ne pourrais absolument pas le porter mais il est vraiment très intéressant. Je pense qu’il ne ressemble à aucun autre parfum fumé. C’est une bizarrerie délicieuse. Il m’évoque effectivement le feu de bois mais aussi les très grands espaces. Je le trouve toujours fascinant.

 

 

 

Créé en 2006, « Close Your Eyes, And.. » est un parfum vraiment très étonnant entre gourmandise et notes florales et baumées. Le très beau départ de citron d’Italie, de mandarine et de poire le rend rond d’emblée et le coeur d’amande et d’héliotrope, épicé de cannelle, rendu légèrement animal par le jasmin et poudré par la rose de Turquie s’avère assez inédit. Le fond, presque gourmand de bois e gaïac lui donne un côté à la fois peau chauffée au soleil et pâtisserie orientale. C’est un parfum très atypique. « « Close your eyes, and… » est un hommage moderne aux grands parfums d’autrefois. Il est une véritable folie olfactive de plus de quarante ingrédients . Il se pose sur la peau comme un baume, comme un voile. Le bois s’y affirme comme la signature olfactive de Miller et Bertaux ». Je le trouve absolument inclassable. Il s’agit sans doute du parfum le plus facile et pourtant le plus original de la marque. Je l’aime bien. Il me plait mais je ne sais pas si je pourrais le porter. Il faudrait que je l’essaye sur la peau. Il a existé en extrait. Je me demande ce que cela pouvait donner.

 

 

 

Le bois de santal travaillé de manière épicée me plait toujours beaucoup. Cela lui évite le côté lacté. « Les expériences sensorielles de leurs voyages en Inde sont la source de ces dernières créations. Safran, curcuma complètent cette évocation basée sur le Santal des Indes et le cèdre du Tibet. Le bois, encore deux fois le bois ! ». Shanti signifie la paix, le salut… « Shanti Shanti » est un boisé floral très bien réalisé. Il s’ouvre avec des notes de poivre rose puis, le coeur de cardamome, de patchouli, d’iris et de rose vient adoucir la fragrance qui s’arrondit sur la peau. Ce parfum, sorti en 2008, j’ai tourné autour à une époque et il est celui que j’ai le plus porté car j’ai accumulé les échantillons. Je ne saurais pas dire pourquoi je ne l’ai pas pris mais je l’ai redécouvert cet été chez Nose à Paris et il m’a beaucoup plu à nouveau. Je le trouve pour le moins exotique. Je trouve qu’il a quelque chose de pétillant et d’addictif dès la vaporisation puis, lorsqu’il s’enrichit de son coeur et de ses notes de fond, il devient plus rond et boisé. C’est, à mon sens, l’une des plus belles réussite de la collection.

 

 

L’an dernier, en 2023, après un long silence, la marque a fait appel au parfumeur Lucien Ferrero por sortir une nouveauté et c’est ainsi qu’est apparu « Like An Egyptian ». J’étais passé à côté mais je l’ai découvert récemment et il m’a donné l’envie d’écrire cet article. « Like An Egyptian, la 17ème Eau de Parfum de Miller et Bertaux, nous transporte à travers le temps et l'espace, évoquant instantanément les origines de la parfumerie à l'époque des pharaons. Réinventant avec audace les parfums anciens, cette création signée Lucien Ferrero est un hommage mystique, inspirée de la recette du Kyphi inscrite sur un lambeau de Papyrus. Cette fragrance boisée et épicée agit comme un pont entre le monde terrestre et divin, symbolisant la force, la puissance, la sensualité et le mysticisme où se marient des notes ambrées, santalées et poivrées ». Très franchement, je ne l’ai pas mis sur la peau mais je le regrette car, sur touche, ce parfum m’a beaucoup plus. Le départ est très épicé et très charnel avec des notes de cumin et de poivres noir et rouge. Le coeur, construit autour des notes ambrées, d’un oud d’Assam et d’une rose très veloutée m’est apparu comme vraiment très réussi mais c’est surtout le fond de ciste, de bois de santal et de vétiver qui vient complexifier la fragrance. Certes ce boisé-là est un peu éloigné de l’esprit d’origine de la marque mais il est super bien réussi et m’a donné envie de remettre mon nez dans les créations des fondateurs. Il fera peut-être renaitre cette maison un peu endormie.

 

 

 

Je n’avais jamais parlé de Miller et Bertaux et cela m’étonne moi-même car c’est l’une des premières marques de niche que j’ai pu découvrir avec Parfum d’Empire. Elle a été sans doute revendue depuis mais je ne connais pas les tenants et les aboutissants. Elle semble se réveiller d’un sommeil un peu imposé et je trouve que c’est plutôt une bonne nouvelle pour les amateurs de parfums boisés. Elle est à découvrir ou à redécouvrir.

Je ne pensais pas que Santa Maria Novella sortirai encore deux eaux de parfum cette année. C’est lors d’un séjour à Paris que j’ai pu les découvrir au stand du Bon Marché. Il y a une ambre et un encens. Je n’ai pas pu trouver beaucoup d’infos à part sur le site officiel de la marque et je suppose qu’elles sont étés composées à nouveau par Gian Luca Perris. Les thèmes sont un peu moins dans mes goûts et je les ai testées un peu superficiellement mais je vais tenter de vous donner mon ressenti dans cet article. J’espère n’être pas trop vague mais je ne les ai pas mis sur peau alors je ne sais rien de la tenue et du sillage.

« Ambra » est le premier des deux parfums que j’ai pu découvrir et il est aussi, même si je suis moins convaincu que par « Acqua » et « Quercia », celui que j’ai préféré. « Un conte olfactif fascinant qui tisse un lien entre l'Orient mystérieux et les agrumes chers à la famille Médicis. Une alliance précieuse, comme les matières premières d'Ambra Eau de Parfum, qui relie l'histoire de Florence aux contrées les plus lointaines ». Le parfum est résolument classique avec une envolée de bergamote, un coeur basé sur le mélange d’un accord ambre et de myrrhe puis se posant sur un fond de patchouli et de bois de santal. Ce parfum, très enveloppant à mon sens, renoue avec la tradition des ambres classiques sans pour autant être fleuri. Il me rappelle un peu l’esprit de « Ambre Précieux » de Maître Parfumeur et Gantier ou encore « Ambre Fétiche » de Goutal Paris. Il est très joli et le côté rond s’harmonise bien avec la force du patchouli. Il me plait assez cependant, ce n’est pas du tout un coup de coeur. Il est, de mon point de vue, destinés à celles et ceux qui aiment ce genre de parfums. Il prendra le relai de plusieurs créations existantes car il est très luxueux et particulièrement chic.

 

« Un arôme capable d'évoquer des atmosphères profondes et envoûtantes. À travers le temps et l'espace, Incenso Eau de Parfum nous emmène à la découverte sensorielle d'un élément qui est à la fois résine, plante et matière précieuse. Une harmonie olfactive boisée et épicée, subtile et pourtant si intense ». Naturellement, je me sens assez éloigné de « Incenso » avec son départ de poivre rose et de cardamome qui s’intensifie en se posant sur un coeur d’encens et de cypriol puis son fond de vétiver. Le travail des notes et la qualité des matières premières en font vraiment quelque chose de très luxueux. Les amateurs d’encens ne peuvent que se retrouver dans ce parfum incroyablement dense. Je suppose que la tenue et le sillage sont très imposants. Je n’ai pas eu envie de l’essayer sur peau alors qu’il faisait quand même froid car, vraiment, ce parfum est très éloigné de mes goûts et j’aurais eu peur qu’il me dérange au bout d’un moment. En revanche, les amateurs d’encens en parfumerie vont s’y retrouver car, il faut bien le mentionner, il est ultra qualitatif.

 

Globalement, vous l’aurez compris, je suis moins séduit par ces deux nouveautés que par les deux précédentes mais ce n’est qu’un ressenti personnel car je ne suis pas attiré par ce style très oriental. Ils n’en demeurent pas moins hyper qualitatifs, plein de belles matières premières. Je me devais de les découvrir. La collection des eaux de parfum de Santa Maria Novella se développe vraiment et apporte un vent de luxe à la plus ancienne officine de la parfumerie.

 

 

C’est au stand Estée Lauder du Bon Marché à Paris que j’ai découvert la très confidentielle collection Legacy d’Estée Lauder dirigée par Frédéric Malle avant sa sortie du groupe. Elle s’ajoute à la Luxury Fragrance collection sortie en 2021 et ne vient pas la remplacer mais s’avère très difficile à sentir. Il s’agit d’une série de cinq parfums qui reprennent les thèmes des créations mythiques de la marque revisitées par Anne Flipo, Carlos Benaïm, et Bruno Jovanovic. Sur les cinq, je ferai l’impasse sur « Knowing » que je n’ai pas pu découvrir pour me concentrer sur les quatre autres. Je connaissais déjà « Private Collection Legacy » et vous en ai parlé il n’y a pas longtemps mais, vu qu’il est mon préféré, j’ai décidé d’y revenir et je vais tenter de vous parler de mon mieux des trois autres. La marque ne propose pas d’échantillons et mon ressenti ne pourra être que superficiel.

Frédéric Malle présente « Azurée Legacy » créé par Anne Flipo de la façon suivante : « Azurée Legacy est vraiment un parfum seconde peau... Il accompagnera une femme sensuelle jour et nuit ». Il s’agit d’un chypre plutôt très épicé et que je trouve très bien construit. Il s’ouvre avec des notes de cardamome, de basilic et d’estragon et cette envolée évolue vers un coeur de jasmin, de clou de girofle et de sauge sclarée. Le fond, patchouli, mousse de chêne et vétiver est adouci par le bois de santal et renforcé par des notes de cuir et de cumin. Ce parfum, somme toute, est construit de manière plutôt classique si l’on excepte l’absence de bergamote en tête. Je ne connais pas la version originale mais Anne Flipo en a fait un intemporel que je trouve très joli mais qui ne m’a pas vraiment surpris ni emballé. C’est un chypré un peu édulcoré « à l’américaine ». J’ai pu le mettre sur ma main et conserver la touche. J’en ai donc saisi une partie de l’évolution. « Azurée Legacy» est très élégant mais il m’a un peu laissé sur ma faim même si, globalement, je l’ai trouvé joli. Son prix est élevé et je ne franchirai pas le pas.

 

 

« Estée Legacy est magnétique... Une douce addiction » tels sont les mots de Frédéric Malle pour décrire le travail effectué sur « Estée Legacy » créé par Carlos Benaïm. Sur le papier, cette composition aurait du être ma préférée. Après une envolée basée sur un accord d’oeillet (clou de girofle, jasmin et rose), vient un très joli coeur d’ylang-ylang et, jusque-là, je me sens assez en accord avec le parfum mais vraiment je ne suis pas fou des notes de fond de santal, de muscs, d’ambre et de miel. « Estée Legacy » est plus que vintage pour moi, il est carrément vieillot. Je comprends bien que ce parfum est dans le thème et qu’il fallait un ambré fleuri dans la lignée des parfums de la marque mais, je l’avoue, je l’ai trouvé passablement ennuyeux. Je n’ai d’ailleurs pas eu envie d’emporter la touche. Le côté « da-dame » ne peut pas toujours me toucher. J’aurais pu me dire que je ne le porterai pas et basta mais je n’ai même pas envie de le re-sentir. Il n’y a rien de plus subjectif que notre rapport à la parfumerie et cela ne remet pas en question la qualité du travail du parfumeur. Ce n’est simplement pas un parfum qui me touche et ça se limite à cela.

 

 

Frédéric Malle écrit « White Linen Legacy, c'est le feu sous la glace, une femme à première vue classique, mais pleine de mystère ». Personnellement, je n’ai pas aimé du tout « White Linen Legacy ». Son départ d’aldéhydes, son coeur de rose et de jasmin et son fond de labdanum, de musc, de vétiver et de cèdre m’ont fait l’effet d’un parfum vraiment daté. Il s’inscrit dans la lignée du « N¨5 » de Chanel comme un ersatz hors de prix et, franchement, je l’ai trouvé senti et re-senti. En plus, le côté très vintage finit par faire artificiel. Vraiment, je ne vois pas l’intérêt d’avoir sorti un énième floral aldéhydé. Il y en a plein le marché, que ce soit dans las marques grand public autant que dans des maisons plus confidentielles. Pour 290 les 100 ml, j’aurais pu m’attendre à quelque chose de plus singulier.

 

 

« Private Collection Legacy est un parfum contemporain... une signature forte » nous dit Frédéric Malle. « Private Collection Legacy » créé par Anne Flipo et qui n’a rien à voir avec l’original.. Quand je l’ai mis sur peau, j’ai été, comme on dit, en pays de connaissance car il est un peu tout ce que j’aime. La construction est nettement chyprée sans bergamote. L’envolée, très verte de basilic, d’estragon et de galbanum m’a séduit immédiatement. Le coeur est floral avec un très beau jasmin sambac et une rose légèrement fraîche puis le fond complète l’accord chypre vert avec le patchouli et la mousse de chêne adouci par les muscs et le patchouli. Dans la grande tradition de ce genre de parfums, cette création m’a, et vous comprendrez pourquoi il m’a plu, rappelé furieusement une autre composition d’Anne Flipo pour les Éditions de Parfums Frédéric Malle. Il s’agit bien sûr de « Synthetic Jungle » devenu « Synthétic Nature ». Je ne pouvais que tomber sous le charme. Il est indéniablement mon préféré. Je dois même dire que je l’aime vraiment beaucoup.

 

 

 

Globalement, je suis assez déçu par la collection Legacy d’Estée Lauder. Certes, le flacon est magnifique et il s’en dégage quelque chose d’hyper luxueux mais, vraiment, je trouve les parfums très convenus, certains même carrément datés. Le prix est très élevé et la marque n’a même pas prévu d’échantillons. C’est un peu un coup de gueule contre se groupe qui, décidément, à part faire grimper de manière exponentielle le prix du flacon des marques qu’il détient, n’offre pas un service très qualitatif à ses clients. J’ai beaucoup aimé « Private Collection Legacy » mais il ne m’a pas vraiment surpris. Je suis content d’avoir découvert la collection moins un parfum mais je n’y reviendrai peut-être pas.

Il y a déjà un certain temps que je connais Granado, cette sorte de Santa Maria Novella brésilienne qui propose des Cologne, des eaux de toilettes et des eau de parfums à des prix assez abordables. J’avais été, il y a deux ou trois ans, super bien reçu dans la boutique qui avait ouvert rue des Francs Bourgeois à Paris et, à chaque passage dans la capitale, je retrouve une partie de la collection au BHV Marais. J’ai souvent voulu en parler mais la collection est tellement importante que je ne sais pas tellement par où commencer. J’ai donc décidé, pour cette première approche, d’aller un peu dans tous les sens suivant ce qui m’a le plus séduit. Je dois dire d’ailleurs que je suis tout aussi séduit par la simplicité des créations qui vont droit au but que par les flacons des différentes collections que je trouve certes désuets mais tout à fait ravissants. Allez, essayons donc d’aborder Granado comme nous le pouvons. Il y a des pépites, je vais essayer d’en dénicher deux par catégorie.

J’ai choisi « Gardénia » créé par Christian Alori en 2023. Cette création fait partie des Cologne. « Inspiré par la beauté de ses délicats pétales blancs, le parfum Gardenia est un floral frais qui met en valeur le vert naturel et délicat de ses feuilles. La fraîcheur du bouquet floral est enveloppée par la note de thé, qui apporte de la légèreté et se traduit par une infusion de fleurs. Les notes de fond d'ambre et de musc harmonisent la création avec un confort élégant et équilibré ». Cette fragrance s’ouvre sur des notes de citron, de cardamome et de cassis puis vient un coeur construit autour d’un accord de gardénia, de thé et de rose. Après une courte évolution, apparait un fond d’ambre, de résine Oliban et de muscs blancs. J’aime bien la note de gardénia en parfumerie donc je me suis dirigé vers cette composition assez naturellement. Je l’ai trouvée très qualitative, un peu ambrée, très jolie. Sur la peau, elle s’avère plus florale mais ce n’est pas désagréable bien au contraire. Certes, le parfumeur s’est inspiré de l’esprit de la marque mais je trouve à « Gardénia » un esprit presque Cologne à l’anglaise comme on pourrait en trouver dans des marques telles que Yardley ou même Floris London. J’ai bien aimé cette réalisation élégante et toute en douceur. Je pourrais tout à fait la porter.

 

 

 

Parmi les Cologne, j’ai aussi bien aimé « Lirio » créé par Léandro Petit en 2021. Je lui trouve quelque chose de plus original et une tenue correcte. « Lírio est un parfum qui propose une délicatesse contemporaine à travers l'interprétation la plus naturelle et la plus fraîche des notes olfactives classiques de la parfumerie, telles que la pivoine, le citron et le poivre noir. La richesse olfactive du lys permet la création d'un concept nouveau et surprenant de fleurs blanches, qui sont présentées dans l'eau de Cologne de manière plus légère et plus délicate, idéales pour ceux qui veulent se sentir parfumés, mais sans exagération ». Toute en transparence, « Lirio » s’ouvre sur des notes de citron et de poivre noir assez vives mais adoucies par une pêche toute douce et duveteuse. Puis vient un coeur très floral de lys, d’acacia et de pivoine qui se pose sur un fond de cèdre, de muscs blancs et de santal. J’aime bien le côté à la fois doux et floral mais aussi légèrement épicé de cette composition. Il y a un petit côté addictif à la porter. Pour moi, « Lirio » est assez emblématique du style Ganado, tout en fraîcheur et en finesse.

 

 

« Tuberosa est une fragrance lumineuse et sophistiquée, qui célèbre l'élégance des fleurs blanches. Les notes florales enveloppantes sont sublimées par un fond chaud et réconfortant de cèdre et d'ambre. Le musc ajoute une touche veloutée et, associé au jasmin, apporte une sensation crémeuse et apaisante sur la peau ». Parmi les concentrations eau de toilette, j’ai particulièrement aimé, et ça ne surprendra personne, « Tuberosa », une nouveauté lancée en 2024. Je l’aime bien dès l’envolée de violette de muguet et de styrax que je trouve très originale. Ensuite vient un coeur auto de la tubéreuse avec des notes de jasmin et de fleur d’oranger. Le fond très classique, de cèdre accompagné d’un accord ambré et musqué est du plus bel effet. « Tuberosa est une fragrance lumineuse et sophistiquée, qui célèbre l'élégance des fleurs blanches. Les notes florales enveloppantes sont sublimées par un fond chaud et réconfortant de cèdre et d'ambre. Le musc ajoute une touche veloutée et, associé au jasmin, apporte une sensation crémeuse et apaisante sur la peau ». Le côté très chic de cette composition florale et la note fine et presque fraîche de tubéreuse me plait bien. Je pourrais porter cette composition l’été, pendant les vacances, avec un plaisir non dissimulé. C’est une évocation d’un jardin un peu sauvage.

 

 

Je ne suis pas très fan des notes marines et de la calone mais, dans la collection des eaux de toilette, j’ai bien aimé « Bossa » dont j’avais déjà entendu parler et qui a été créé par Cécile Zarokian en 2020. « Inspirée des beautés de la ville de Rio de Janeiro, l’Eau de Toilette Bossa équilibre délicatement la chaleur du soleil avec la fraîcheur de la mer, nous transportant dans une journée parfaite dans la Ville Merveilleuse. Dans son parfum saisissant, les notes citriques et marines font référence à la fraîcheur et à la brise marine, tandis que le bouquet de fleurs solaires et la note de noix de coco favorisent une sensation crémeuse et délicate. Avec 90% d'ingrédients d'origine naturelle, le parfum est enveloppé par le confort et l'élégance du musc et du bois de cachemire, résultant en une création florale, solaire, fraîche et confortable ». Très originale, cette composition s’ouvre sur des notes de citron, de mandarine et de petitgrain. Le coeur allie notes marines qui pourraient me déranger avec la fleur de frangipanier et la noix de coco. De ce fait, il se fait à la fois marin et solaire, ce qui est assez agréable. Le fond de tiaré, de muscs et de bois de cachemire me plait encore plus. Je comprends l’engouement pour « Bossa ». C’est une très belle création en solaire et salé. J’ai bien aimé et je reconnais la signature très étonnante de Cécile Zarokian.

 

 

 

« Jardim Real exalte la fraîcheur des fleurs et nous transporte dans les parcs et jardins luxuriants de Rio de Janeiro au XIXe siècle. Une union entre l'agrume et son côté naturel effervescent de ses notes de bergamote et de mandarine, et la délicatesse romantique des fleurs. Cette fragrance met également l'accent sur la fleur d'oranger en tant que protagoniste de la création. La base classique de bois de santal et de patchouli ajoute la touche finale de sophistication et de polyvalence ! ». Créée par Lisa Montes en 2022, « Jardim Real » est l’eau de parfum que j’ai préférée. Vraiment, elle me plait beaucoup avec son envolée de mandarine, de bergamote et de poivre rose, son coeur de fleur d’oranger, de jasmin sambac et surtout de magnolia qui lui donne des facettes à la fois poire et aquatique, comme baignées d’eau douce.Le fond de santal, de musc et surtout de patchouli confère à la réalisation quelque chose de presque chypré. J’ai vraiment aimé. Je m’en souviens très bien. Je pourrais tout à fait porter cette eau de parfum. Il est particulièrement original surtout dans son évolution sur ma peau. Je le réessayerai lors de mon prochain passage à Paris.

 

 

 

Je l’ai survolée mais je voulais parler de "Tropicalia" , composée par Alex Lee qui est l’une des nouveautés de cette année. Le départ très vif de poivres noir et rose adouci par la mandarine cède vite la place à la pistache, l’iris et la graine de carotte en coeur puis le parfum se pose sur un fond très construit d’oliban, de tonka et d’ambre. C’est un peu moins vendeur que les autres mais je suis assez séduit. « Tropicália est une fusion audacieuse de textures, de couleurs et de notes qui rompt avec la tradition et éveille pleinement les sens. Avec des nuances de pistache, une touche terreuse de carotte, un mélange d’épices et la complexité florale de l'iris enveloppée de bois ambré, Tropicália incarne le maximalisme et l’élégance en parfaite harmonie. Une création vibrante, multifacettée et pleine de personnalité ». J’ai bien aimé l’idée de ce parfum mais il faut que je remette mon nez dessus en réexplorant la collection.. Je vous tiendrai au courant quand je l’aurai essayer un peu plus mais, au premier nez, je l’ai trouvé très intéressant.

 

 

J’ai encore du chemin à parcourir pour explorer Granado mais c’est une première approche. J’espère qu’elle vous incitera à aller vous rendre compte par vous-même. Nous verrons bien si nous arrivons à échanger sur cette maison venue du Brésil. En tout cas, l’univers est vaste et j’ai très envie de m’y replonger.

J’avais assez aimé les premiers parfums de la collection Dries Van Notten et, c’est vrai, je suis tombé sous le charme des flacons. J’avais donc envie de découvrir les quatre nouvelles créations et j’ai profité d’un séjour à Paris pour un détour par le Bon Marché où je me suis rendu au stand où j’ai été, comme toujours, très bien accueilli. J’ai donc pu découvrir ces nouvelles créations. Je dois dire que je les ai bien aimées. Je vous emmène donc dans l’univers élégant de ce couturier que je ne connaissais pas, je l’avoue, avant sa collaboration avec les Éditions de Parfums Frédéric Malle. Il y a du grain à moudre et de quoi sentir.

Le premier parfum que l’on m’a fait découvrir est « Bitter Splash » créé par Suzy Le Helley dont elle décrit l’inspiration par ses mots : « J'ai choisi d'explorer un jeu paradoxal mais équilibré de lumière et de texture : l'éclat pétillant du pamplemousse voilé par la douceur mate du cuir ». Je crois que beaucoup de ce que j’ai ressenti est dit. L’amertume du pamplemousse, associée au côté presque résineux du cyprès donne une envolée très pétillante qui se calme un peu avec un coeur construit autour de l’iris et de la graine de carotte conjugués avec le côté rose mentholée du géranium. Le fond, un accord cuir soutenu par le vétiver et de bois de cèdre est également très finement travaillé. J’ai bien aimé « Bitter Splash ». Je trouve l’association du pamplemousse, très présent, avec le cuir, assez originale. En revanche, je suis un peu dubitatif sur le sillage et la tenue. En effet, je ne l’ai pas essayé sur peau mais, sur la touche, le parfum s’est estompé assez vite et je me suis laissé dire que les tenues n’étaient pas folles. Je trouve le prix élevé alors, je souhaiterai quand même profiter un peu du parfum si je décidais de le porter.

 

 

« L'addiction extrême de la gousse de vanille, colorée par le charme bucolique de la camomille ». Composé par Julien Rasquinet et Paul Guerlain, « Camomille Satin » est tout en nuances. Il m’a bien plu aussi pour sa délicatesse. Le départ de camomille est assez atypique et, avec la fraîcheur du petitgrain de bigarade, il prend un côté un peu amer. Le coeur est franchement aromatique et floral à la fois, ce qui est assez rare. On y retrouve un absolu de lavande associé à de la fleur d’oranger et de la rose de Turquie. Le fond de gousse de vanille, de musc et de galbanum, s’il arrondit la fragrance, lui assure une certaine rondeur, ce qui n’est pas désagréable du tout. J’ai eu l’impression d’un jardin qui s’éveille au début du printemps. Vraiment, « Camomille Satin » est « confortable » et original à la fois. Il m’a bien plu mais j’avoue que ce n’est pas un coup de coeur. Il m’évoque beaucoup les couleurs jaunes, orange, or et argent du flacon. Le contenant et le contenu vont très bien ensemble. Ce n’est pas toujours le cas d’ailleurs.

 

 

 

J’ai un peu moins aimé « Crazy Brazil » composé par Jean-Christopher Hérault. « Une note aromatique fidèle à la nature du basilic qui s'affole avec la vibration du bois de cèdre et de l’ambre ». Le départ est à la fois doux et très aromatique avec le basilic associé à la bergamote et à la mandarine. Le coeur continue vraiment ans cette voie avec le ôté très mentholé de géranium associé au lavandin et au romarin. Le fond est plus convenu avec le côté fruité du bois d’hinoki associé à la fraicheur sèche du cèdre. Jusque-là, je le trouvais intéressant mais je n’aime pas trop le côté « astringent » de l’accord boisé qui lui est adjoint. Globalement, ce parfum est un aromatique un peu plus élaboré que ceux que l’on a l’habitude de sentir mais il est vraiment très éloigné de mes goûts et, de ce fait, j’ai du mal à l’apprécier vraiment. Je pense que je ne pourrais absolument pas me l’approprier. Il n’en demeure pas à moins à découvrir

 

 

 

Le parfum que j’ai vraiment essayé est « Vanille Camouflage » créé par Alexandra Monet et qui demeure mon préféré parmi les nouveautés même si je reste vraiment attiré par « Rosa Carnivora » mais c’est une autre histoire. « C’est tellement insolite de voir une vanille dans sa forme très originale, et si verte ! C'est exactement ce que traduit le parfum ». Si je n’aime pas tellement le nom de ce parfum, je le trouve parfaitement évocateur car j’avais rarement senti une vanille aussi étonnante. L’envolée, tout d’abord, m’a accroché directement. On y retrouve des notes de galbanum et de cyprès associées à un accord figue puis vient ce coeur absolument magnifique de lentisque, d’ylang-ylang et de bois de santal puis, plus lentement, s’installe un fond de vanille bourbon très élégante et précieuse associée avec le côté floral de la vanille de Tahiti. Le tout est arrondi par la facette très baumée du benjoin. Le duo galbanum et vanille fonctionne à merveille. J’ai beaucoup aimé ce parfum. Je pourrais tout à fait le porter mais, je m’en suis rendu compte c’est vrai, la tenue est un peu limitée. C’est dommage car, vraiment, j’aime beaucoup la création.

 

 

Globalement, j’ai bien aimé les quatre nouvelles créations de la collection de Dries Van Notten. Je les trouve un peu légers mais, côté création, il y a vraiment de l’idée. J’aime bien cette série. Je la trouve fort agréable même si le manque de tenue peut-être un frein. Il n’en demeure pas moins que j’ai beaucoup aimé les découvrir.

Plus j’essaye des parfums, plus je me rends compte que j’aime beaucoup la maison anglaise Ormonde Jayne et je découvre que j’ai une certaine prédilection pour la collection La Route de la Soie aussi, lorsque j’ai vu qu’il y avait deux nouveautés, et après avoir redécouvert « Levant » que j’aime beaucoup, j’ai eu envie de mettre mon nez dessus. Je n’ai pas été déçu. Les deux créations sont très belles, élégantes et originales. Les deux nouvelles créations de Geza Shoen et Linda Pilkington m’ont séduit même si j’ai été dérouté par le changement de conditionnement puisque les parfums de cette série seront vendus uniquement dans des flacons de 88 ml. Étrange parti pris mais pourquoi pas ? Allez, rentrons dans le vif du sujet et partons en voyage avec ces deux nouveaux chemins vers la soie.

« Kashmir » a été le premier parfum de la collection et il s’agit d’un oriental fougère. Je sors donc complètement de mes goûts et de mon confort olfactif pour aller à sa rencontre : « À 4000 mètres au-dessus du niveau de la mer, avec ses glaciers enneigés et ses lacs immaculés, les rivières jaillissent à travers de profondes vallées himalayennes, densément boisées de majestueux déodars. À cette altitude élevée, la vallée du Cachemire présente un relief unique à couper le souffle. Abritant une grande diversité de plantes, les prairies sont recouvertes chaque été de coquelicots bleus sauvages et rares et de safran du Cachemire. Kashmir n'est pas dépourvu d'un attrait considérable. Ce parfum boisé hypnotique met l'accent sur le déodar, de la famille des cèdres, et sur un bois de santal doux et rêveur, souligné par l'iris, la rose, le jasmin, le cashmeran, la vanille et une caresse de musc pour fixer ce parfum omniprésent ». Le départ est ultra sophistiqué avec une envolée de safran, de poivre rose, de bergamote, de coriandre et de cardamome. Le coeur de pavot, de jasmin, de rose et d’iris aurait pu être floral mais il n’en n’est rien car les notes résineuses et aromatiques de sapin viennent bouleverser cet ordre établi. Le fond est tout aussi complexe. Il est soutenu par des notes de cèdre mais associées aux muscs, au patchouli, à la vanille, à l’encens, à la myrrhe, au santal, au benjoin ainsi qu’au cashmeran. Le résultat est un vrai voyage olfactif entre notes aromatiques, florales, boisées, baumées et épicées. Vraiment, ce parfum est difficile à décortiquer. Il est exotique, étonnant, un peu ethnique mais tout de même empreint de cette élégance à l’anglaise qui me plait autant.

 

« Boukhara » entre, en revanche, pile dans mes goûts. C’est un floral un peu fruité, très élégant, un peu exotique aussi du reste. « Boukhara incarne un raffinement somptueux. La pêche succulente et le cassis ouvrent ce parfum, évoquant des images d'oasis séduisantes. En son cœur, Bukhara exhale un bouquet envoûtant de tubéreuse, d'absolu de jasmin et de fleur d'oranger, évoquant un attrait gracieux. La partie sèche se déploie sur une base sensuelle de bois de santal, de bois de cèdre, de vanille et d'Oudh, enveloppant le porteur d'une étreinte chaleureuse. Boukhara est un parfum exquis et indulgent, exceptionnellement bon pour ceux qui désirent le summum des expériences de la vie ». Nous partons donc en voyage avec une envolée de cassis, de bergamote et de pêche très fruitée et à la limite du « croquant ». Le coeur de tubéreuse, de fleur d’oranger et de jasmin est également de toute beauté. Il m’enveloppe tout de suite. Le fond de santal est équilibré par le cèdre, la vanille et l’ambre et il est parsemé de traces de oud. Franchement, sur ma peau, il matche parfaitement. Il me fait penser à ces grands films des années 50 en Technicolor, un rien démesurés. « Boukhara » est un floral un peu fruité mais surtout plein de subtilité. On a l’impression d’une promesse d’un très beau jour quand on le porte. « Boukhara » fait partie de mes coups de coeut de cet automne.

 

Vous l’aurez compris, j’ai vraiment adhéré à l’univers de ces deux parfums et je me fais plaisir à les essayer pour savoir lequel je préfère. « Boukhara » est sans doute celui qui me convient le mieux mais « Kashmir » est également pour le amateurs de boisés, résineux ou de fougères atypiques.

* Je réédite cet article de 2020 dans sa version originale avec toutes les maladresses qui étaient les miennes au début de mon blog. Presque 13 ans après la disparition tragique de Nathalie alias Mona, sa maison, gérée depuis les Pays Bas ferme ses portes. Je trouve cela vraiment très triste. Je voulais rendre un hommage appuyé à une créatrice de très grand talent dont les parfums m'accompagnent depuis de nombreuses années et dont les parents sont devenus des amis. C'est à eux que je pense car il est désespérant que les propriétaires de la marque n'aient pas su la faire perdurer. Conséquences de la pandémie ? Mauvaise gestion ? Je ne sais ni ne juge mais cela fait de la peine. Mona di Orio était une virtuose. J'espère qu'un jour quelqu'un trouvera le moyen de faire revivre son héritage.

C’est un peu sur le tard que j’ai découvert les parfums de Mona di Orio. Plus qu’une découverte, et, une fois la surprise provoquée par la singularité de ce que j’ai senti, je me suis dit que les deux collections qu’elle avait créé étaient plus que des parfums, elle avait construit une oeuvre artistique. Son univers ne ressemblait à rien d’autre et j’y ai adhéré immédiatement… Ça continue aujourd’hui à chaque fois que je porte l’une de ses fragrances. Nathalie di Orio, alias Mona a étudié la parfumerie avec Edmond Roudnitska (excusez du peu) et a su très vite imposer son propre style et sa personnalité dès sa première collection, celle des eaux de parfum dont, hélas, plusieurs ont disparu aujourd’hui. De « Nuit Noire », créé en hommage à Serge Lutens à « Oiro » en passant par « Lux », « Chamarré », « Jabu » ou encore « Amyitis », elle a su travaillé les matières premières avec une originalité et une signature qui lui était parfaitement propre. J’ai eu la chance de découvrir la totalité de ces parfums par une amie qui est propriétaire d’une parfumerie et qui possède encore les testeurs il y a un an ou deux et, vraiment, j’ai passé un moment extraordinaire.

 

 

Évidemment, j’ai eu un coup de coeur… C’était absolument inévitable ! Et ce fut « Carnation ». Dès lors, je me suis mis à la recherche d’un flacon comme le roi Arthur du Saint Graal et j’ai fini par trouver ! Il est si atypique que je ne serai pas capable de vous décrire les notes mais je peux vous donner mon impression. C’est indéniablement un fleuri mais il comporte tellement de facettes qu’il me déroute autant qu’il me séduit. Il est très enveloppant et ne ressemble à rien d’autre. Il a toujours le petit côté « cosmétiques » des parfums de Mona di Orio mais il est comme une seconde peau. Élégant mais atypiques, il me réjouit à chaque fois que je le porte. De part mon côté collectionneur, j’aurais tendance à ne pas trop le porter mais je ne le fais pas car j’éprouve beaucoup de plaisir à l’avoir autour de moi. Cet hiver, il m’a énormément accompagné.

 

 

 

Un peu plus tard, sont apparus « les Nombres d’Or ». Ils sont au nombre de huit : « Tubéreuses », « Musc », « Ambre », « Cuir », « Vétyver », « Oud » et « Rose Étoile de Hollande ». Ceux-là, j’ai eu la chance de pouvoir en porter plusieurs. Et ce furent « Vétyver », « Ambre » et évidemment « Musc » qui est celui que je me suis approprié et qui, de l’avis de mon entourage, est l’un de mes parfums signature. Ne vous fiez pas à l’apparente simplicité de leurs noms car leur originalité et leur unicité est totale. Chaque fragrance sort de sentiers battus et constitue un choc olfactif en soi.

 

 

 

Attention, je ne prétends pas que les parfums de Mona di Orio vont plaire à tout le monde. Ils sont autant de singularité que de complexité et, je crois vraiment que, lorsque je les ai senti, je n’ai jamais aussi bien compris ce que pouvait être, dans les années 2000, la dénomination « Parfumerie de Niche » qui est, il faut le dire, aujourd’hui, un peu mis à mal par la cascade de nouvelles marques et de sorties qui nous noient dans une multitude d’informations olfactives. En ce qui concerne, ces créations, je préfère, et je trouve, lorsque je sens « Amyitis » ou encore « Musc » ou « Carnation » que le terme « Parfumerie d’Auteurs » est beaucoup plus adapté. Nathalie est partie, trop tôt, trop vite, trop tragiquement, en décembre 2011 et je n’ai, hélas, jamais pu la rencontrer et lui dire combien j’aimais son travail mais sa maman Bernadette écrit, publie des photos, nous fait mieux connaitre tous les aspects de la personnalité très attachante de sa fille et je regrette vraiment de n’avoir pas pu la connaitre car je suis certain qu’au-delà de la créatrice pour laquelle j’ai beaucoup d’admiration, j’aurais été heureux d’échanger avec la personne humaine. Il existe quelques vidéos où « Mona » explique comment elle a créé ses parfums, on peut encore, si on cherche bien, en trouver certains et, vraiment, si, au détour de vos recherches, vous croisez un flacon, surtout, n’hésitez pas à tenter de découvrir le jus. Peut-être qu’il vous séduira autant qu’il ma fasciné. Pépites parmi les pépites, les parfums de Mona di Orio ont bien contribué à mon goût pour ce qui pourrait être considéré comme un 8ème art.

 

 

« Pour créer cette fragrance, Jasmine Of Athens, Theodoros Kalotinis s'est laissé inspirer lors de ses déambulations dans les ruelles d'Athènes. Là, lors d'une journée ensoleillée, le jasmin a suscité une danse enjouée avec son cœur. En cueillant une fleur du buisson de jasmin, il s'est dirigé vers l'Acropole. Là-haut, une brise caressait délicatement ses émotions, et une sensation de liberté l'envahissait. Soudain, le besoin de graver dans son esprit ces notes uniques, celles qui invitent chaque personne à explorer ses rêves les plus profonds, s'est fait sentir. Une explosion authentique de fraîcheur et d'énergie s'exprime à travers des accords de vanille, conférant à la fragrance une délicate sensation poudrée, avec la présence affirmée de l'absolu de jasmin et de la fleur de tiaré. Jasmine Of Athens vient séduire chacun avec son parfum exceptionnel ! ». Mon coup de coeur parisien de cet automne est un parfum plutôt solaire qui évoque l’été. Il faut dire que j’avais découvert « Jasmin of Athens » de Theodoros Kalotinis cet été mais que j’avais plutôt fait le choix de « Gardénia ». Cette fois, j’ai franchi le pas et je suis, une nouvelle fois, épaté par le rapport qualité prix de cette marque. En tout cas, lorsque je l’ai porté pour la première fois et il m’a amené le soleil. « Jasmin of Athens » est une invitation au voyage. Il m’a rappelé la Grèce, certes, mais aussi la blancheur du soleil de Méditerranée dans son ensemble. Vraiment, j’aime beaucoup ce parfum.

Theodoros Kalotinis

L’association du jasmin très élégant avec la fleur de tiaré et la vanille fonctionne à merveille. En tout cas, je me suis vraiment fait plaisir à le porter même si, j’en suis sûr, je l’apprécierai encore plus l’été prochain. Vraiment, il faut découvrir Theodoros Kalotinis. Ses créations sont réjouissantes. « Jasmin of Athens » est complètement « dans mes notes » la fleur de tiaré, très solaire, associée à une vanille très fine et particulièrement bien travaillée viennent souvenir un jasmin très chic. Ce parfum est lumineux mais il ne fait pas tellement « vacances » comme on pourrait le penser en lisant les notes qui constituent sa « colonne vertébrale ». Il nous transporte certes un peu dans l’espace mais, pour moi, il est surtout un voile floral particulièrement bien imaginé. On retrouve, au cours de son évolution, une manière de travailler les notes qui est déjà présente dans « Gardénia ». Les deux créations ne se ressemblent pas vraiment mais j’aurais pu deviner qu’elles avaient été composées par le même parfumeur. J’aime tellement ce travail floral que je continuerai d’explorer la collection. Plus je porte « Jasmin of Athens », plus j’ai du plaisir et je me reconnais. Dans mon entourage, j’ai entendu « c’est tout ce que tu aimes », et c’est vrai.

Cette fois c’est malheureusement officiel, Jeroen Oude Sogtoen vient d’annoncer la fermeture de la maison Mona di Orio qu’il gérait depuis 2011, date de la disparition tragique de sa fondatrice. J’avoue que je m’attendais à cette triste nouvelle depuis la fermeture du site internet. Alors désastre occasionné par la pandémie ou mauvaise gestion ? Je ne saurai le dire mais j’avoue que je ne comprenais pas du tout la manière dont était administrée la marque depuis déjà bien longtemps. Apparemment, en discutant avec d’anciens revendeurs, il leur était très difficile de s’entendre avec sa direction et les partenariats se sont terminés les uns après les autres, en tout cas en France. J’étais déjà très déçu de cet état de fait. En effet, Nathalie di Orio, alias Mona avait construit, en deux magnifiques collections, une véritable oeuvre olfactive. Il y a eu tout d’abord la série signature des eaux de parfums puis les Nombres d’Or. Je ne compte plus les parfums que j’ai porté et que j’ai encore la chance de posséder. Pour moi, Mona di Orio était, et je pèse mes mots, l’une des plus belles maisons du marché qui méritait vraiment la dénomination de parfumerie de niche. Je citerai des chefs-d’oeuvre comme « Nuit Noire » ou « Carnation » dans la première collection et, bien évidemment « Cuir » et « Vanille » dans la seconde. Vraiment quelle déception de voir de telles composition disparaitre !

 

La direction de la marque a tenté de continuer en sortant des nouveautés en s’adjoignant la collaboration du parfumeur Fredrik Dalman mais elles n’ont manifestement pas rencontré leur public. Je le déplore car elles auraient peut-être permis à la maison Mona di Orio de subsister et peut-être même de se développer. Aujourd’hui, avec cette très triste annonce, mes pensées vont tout doit vers Bernadette et Jacques, les parents de Nathalie alias Mona qui voient ainsi disparaitre du marché les si belle créations de leur fille et leur héritage. Par cet article, je leur adresse toute mon amitié. Mona avait des Nombres d’Or dans les mains et dans la tête. Elle a su séduire les amateurs de parfums par son si bel univers et son si bel esprit. Je ne pouvais pas passer par dessus cette fermeture sans lui rendre l’hommage qu’elle mérite amplement. Elle restera, dans ma vision de le parfumerie, l’une des plus talentueuses créatrices dont j’ai pu croiser le travail. Je garde précieusement les parfums que je possède encore sans m’interdire de les porter de temps à autre. Une telle oeuvre n’aurait jamais du devoir s’éteindre.

Je ne m’étais pas du tout penché sur les extraits de parfums sortis cette année par Bon Parfumeur pour deux raisons. La première est que la marque a tellement grandi que je n’arrive pas à suivre et la seconde est que tout le monde sort ses extraits cet automne. Je ne sais pas si j’y trouve un réel intérêt. En effet, la concentration la plus forte est sans doute intéressante pour certaines compositions mais pas forcément pour d’autres. J’ai donc attendu de tomber sur ces sept créations au BHV Marais lors de mon dernier séjour à Paris. Je les ai sentis sans en attendre grand-chose et j’ai quand même eu de belles surprises. En effet, sur les sept, j’en ai retenu quatre que j’ai bien aimé. Je vais essayer de vous donner envie d’aller les découvrir à votre tour via cette petite revue sans aune prétention.

Le premier vers lequel je me suis dirigé est « Iris Cartagena 502 » créé par Clément Marx et qui met en avant de belles matières premières. « Un dîner à deux, l’été, sous les étoiles. Les conversations touchent à leur fin. La nappe est tâchée et froissée. Café, rhum et chocolats sont servis. Un vent calme et chaud, une danse gourmande des effluves. Une tête liquoreuse et chaleureuse avec le rhum et le cacao. Un cœur doux et poudré avec l’iris, le santal et la vanille. Le vétiver et le papyrus donnent au fond une touche lambrissée relevée par le corsé du café ». Au premier abord, le côté liquoreux de l’envolée m’a fait penser à une liqueur de cacao et de rhum à peine rafraîchi par des notes de petitgrain mais, après une évolution quand même assez longue, le coeur poudré d’iris et de cèdre s’associe avec la facette laiteuse du santal et la douceur de la vanille. Curieusement, le parfum s’équilibre et devient très joli. De plus, le fond de vétiver et de café qui entourent l’accord un peu vert du papyrus fonctionne très bien. Il en résulte un parfum assez agréable, un rien original, avec une tenue et un sillage d’une rare intensité pour une création avec, à son centre, la note d’iris. Pour moi, toutefois, il est un peu trop boisé et un peu trop gourmand. Il arrive un peu à me déranger mais c’est personnel. Le côté un peu crémeux ressort et ce n’est pas ce que je préfère. Il n’empêche que « Iris Cartagena » est une jolie création, réussie et équilibrée, qui plaira immanquablement aux amateurs du genre.

 

 

 

« Le galbanum croquant agrippe la jacinthe crémeuse. Galop dans la steppe mongole. Prairie infinie aux nuances de vert. Sillage du galop, effluves de fleurs, terre odorante. Liberté ». Créé par Corinne Cachen, « Terra Hedera 104 » se situe quand même un peu plus dans mes goûts avec son départ très vert de galbanum, épicé de cardamome et arrondi par une note de lentique et une autre d’orange amère. Ensuite vient un coeur floral frais et aquatique de jacinthe et de jasmin avec quelques traces d’encens. Le fond de patchouli, qui tarde à venir, se corse avec un accord d’ambre et du vétiver. Certes, le froid ne donne pas envie de ce parfum mais il est vraiment réussi. Attention, son évolution s’avère vraiment très longue. Je le trouve assez difficile à saisir. Je dirais qu’il s’agit d’un floral vert et très dense. La tenue est très longue mais je n’ai pas vraiment pu mesurer le sillage. Je ne l’ai senti, sur un temps long certes, que sur touche et je pense qu’il mériterait d’être posé sur la peau. Je me sens très attiré par ce parfum. Je le réessayerai quand j’en aurai l’occasion et je pense que je pourrais vous en reparler. Il est déroutant et demande une découverte plus approfondie.

Créé par Mylène Alran, « Cuir Sahib 603 » peut séduire ceux que cette famille olfactive repousse un peu tant il est doux, rond et enveloppant. « Fève tonka et cuir, émanations d’encens. Prisonniers des murs du Temple d’Or en Inde. Les effluves de fumée circulent, se croisent et s’entremêlent. Atmosphère magnétique, silence profond ». Le départ d’encens, de noix de muscade, de citron et de feuille de violette est n peu déroutant mais il s’estompe assez vite pour faire face à un coeur tout doux, légèrement poudré et vanillé de fève tonka, de ciste, de sauge et de cyprès puis s’impose l’accord cuir, cashmeran, patchouli et cypriol. Le résultat est vraiment un cuir doux, blanc, presque suédine. Dans la lignée de « Cuir Blanc » d’Evody que je regrette beaucoup mais aussi peut-être un peu de « Cuir Velours » de Naomi Goodsir, « Cuir Sahib » est une valeur sûre et un parfum plein d’élégance un peu moderne. J’ai bien aimé cette création qui fait partie des belles découvertes que j’ai pu faire à Paris. Hélas, trois fois hélas, je ne le trouve pas qu’il soit assez original pour intégrer mon top 20 de 2024.

Mon coup de coeur est vraiment « Marbre Rouge 303 » composé par Sidonie Lancesseur. « Nuit de pleine lune dans les jardins du Taj Mahal. Épices sur le marbre glacé ; benjoin enveloppant. Végétation brûlante, astres brillants, palais de marbre illuminé. Les fleurs traversent les murs du palais ». Voilà un épicé à la fois bien réalisé, original et chic. Le départ de baies roses et de cardamome me plait déjà à la vaporisation mais c’est le coeur, vraiment magnifique de piment, d’ylang-ylang, de baume du Pérou et de patchouli, vient vite me séduire et mon convaincre. Je suis un peu moins fan du fond très balsamique de benjoin, de muscs et de vétiver mais l’ensemble est quand même absolument réussi il faut le dire. Sur ma peau, le sillage est assez imposant mais surtout la tenue est très longue. L’évolution est plus rapide que pour les parfums précédent. Je trouve, en outre, que la concentration est très adapté à la fragrance. « Marbre Rouge 303 » est vraiment mon coup de coeur de cette collection. Je pense que je pourrais tout à fait le porter. En tout cas, il m’a impressionné.

Globalement, je suis assez séduit par les extraits de parfums Bon Parfumeur. L’ensemble est vraiment qualitatif et les compositions s’avèrent plus originale que ce à quoi je m’attendais. Je n’en dis pas plus. J’espère vous donner envie et j’attends vos retours avec impatience. En plus, le prix est assez raisonnable par rapport à la qualité. Alors que demander de plus.