"Panthea" et "Panthea Iris", blanc et blanc !
« Panthea représente la déesse perse de toutes choses. Un être pur qui a inspiré Stéphane Humbert Lucas pour créer un parfum blanc à base de matières premières blanches ». « Panthea » et « Panthea Iris » créés respectivement en 2017 et 2019 par Stéphane Humbert Lucas pour sa collection 777 occupent une part un peu exceptionnelle dans la marque car nous sommes très loin de l’ambiance un peu orientale et de cette aura entourent la maison et cette série. Ce sont deux parfums un peu « translucides », je ne sais pas comment le dire autrement. Ils viennent de faire leur apparition à Lyon et je dois dire que je suis plutôt convaincu par leur qualité et l’élégance toute en douceur de la création. Je les ai essayés et j’avais envie de vous faire un retour même si je pense qu’ils plairont peut-être plus aux femmes qu’aux hommes… quoi que…
Avec un très joli départ, tout en légèreté, de bergamote, de baies roses mais surtout de thé blanc très ciselé, un coeur d’iris, de jasmin et de violette puis un fond de fève tonka et de santal enveloppés par des muscs blancs d’une très belle qualité, « Panthea » (l’original) est vraiment un floral poudré comme je les aime. Il est un peu lacté, pas trop, mais surtout le côté poudré à la fois de l’iris et des muscs blancs associé à la rondeur de la fève tonka m’a beaucoup séduit. « Tel un bain de lait Cléopâtre, le parfum est délicieusement crémeux et savonneux avec des notes de bois de santal, de musc blanc et d’iris. L'impression de blancheur est sublimée par un délicat Jasmin et un subtil Thé Blanc. Un parfum pour les anges et les déesses qui marchent parmi nous, ou ceux qui brillent simplement d'une aura de pureté ». Le côté vraiment très éthéré de la fragrance contrebalance très très finement les notes lactées voire crémeuses et l’équilibre se fait parfaitement sur ma peau. Jamais il n’est top rond pas plus qu’il ne m’écoeure comme un « Piano Santal » ou un « Blanche Bête ». Je trouve ce parfum, tel l’équilibriste, ne tombe jamais d’un côté ou de l’autre du fil. Clairement, je pourrais le porter. Il est séduisant, élégant et vraiment très agréable sur ma peau tout en gardant ce qu’il faut de singulier. Il me plait beaucoup et je suis content de l’avoir découvert.
Avec le même départ, de baies roses, de bergamote et de thé blanc associée au côté un peu confit de la tangerine, un coeur d’iris, de jasmin et de violette et un fond de fève tonka, de bois de santal et de muscs blancs « corsé » par le patchouli et poudré « en sus » par un superbe beurre d’iris, « Panthea Iris » revêt un caractère plus enveloppant, plus dense et finalement plus poudré. « Patience, qualité, raffinement… Panthea Iris ne décevra pas les amoureux absolus d’Iris. Ce parfum s'élève au niveau du divin. Une élégance rare au caractère distingué. Un départ pétillant aux notes de Bergamote et de Mandarine d'Italie, accompagne un Thé blanc rafraîchissant et immaculé. Un voile de soie bleu et blanc habille la fragrance. L'absolu Tonka sublime les subtils Santal et Patchouli pour sublimer les facettes poudrées et sophistiquées de l'Iris intense. Puissant avec son sillage, c'est avec douceur et sensualité que le parfum évolue sur la peau ». Peut-être plus androgyne (encore que je n’en sois pas sûr), cette variante de « Panthea » est indubitablement plus puissante, plus irisée et plus poudrée. Il me plait beaucoup également. Cependant, je ne vais pas mentir, sur ma peau, son sillage est plus celui d’un iris solinote et musqué que d’une réelle composition thé et fleurs. C’est un parti p pris que je comprends mais, de ce fait, je le trouve plus « classique » que l’original, ce qui ne l’empêche pas d’être joli, bien construit et agréable. Franchement, j’ai bien aimé ce parfum. Il est très intéressant et je pourrais le porter sans problème même si, je le reconnais, je possède d’autres créations qui s’en rapprochent.
Globalement, j’ai beaucoup aimé « Panthea » et « Panthea Iris ». Je les trouve un peu décalé face aux créations puissantes et très orientales de la collection 777. Très franchement, je m’y retrouve plus parce que j’aime ce genre de compositions qui cadrent parfaitement avec mes goûts. Je continue donc avec un certain plaisir à explorer cette très intéressante collection qui n’est, et je m’en rends compte de plus en plus, explore des univers différents. J’ai aimé ce duo et j’ai beaucoup de plaisir à partager mes impressions avec vous.
Exquise trouvaille : "Néroli Outrenoir"
Je ne suis pas très attiré en général par la collection L’Art et la Matière de Guerlain. Je la trouve très « fourre-tout », et il faut bien le dire, dans le cas de certains parfums, elle correspond seulement à un changement de nom et à une envolée des prix. C’est un peu la technique de faire du neuf avec du vieux et cela ne me parait pas très honnête de la part du groupe qui détient la marque. Pourtant, ponctuellement, j’ai certaines attirances pour des parfums que je trouve exceptionnellement bien réalisés. C’est le cas, par exemple de « Angélique Noire » et, plus récemment de « Patchouli Paris ». J’échange beaucoup avec Jérémie, le responsable du stand du Printemps de Lyon. Je le connais depuis longtemps, lorsqu’il exerçait d’autres fonctions aux Galeries Lafayette de Bron et il est de très bon conseil. Il m’a proposé, en discutant, d’essayer « Néroli Outrenoir » qu’il pensait entrer un peu dans mes goûts (curieusement car je ne suis pas un fan de cette note) et il a eu raison car j’ai vraiment aimé ce parfum. Je le trouve absolument équilibré et il matche super bien bien avec ma peau ce qui n’est pas évident chez Guerlain. Créé par Thierry Wasser et Delphine Jelk en 2016, c’est une vraie réussite. En tout cas, il me plait beaucoup.

Thierry Wasser
Delphine Jelk
« Néroli ou la blancheur fusante et Outrenoir, son opposé. Tel un éclat dans l'obscurité, l'essence de néroli, éclairée par la bergamote et le petit grain, affronte des notes plus ténébreuses et énigmatiques de thé fumé. De cette collision des matières naît un clair-obscur magnétique qui nous plonge dans une fascinante perte de repère. Un néroli lumineux plongé dans la profonde obscurité d’un thé fumé. Si c'était un tableau, un monochrome au noir de Pierre Soulages. Néroli Outrenoir propose une nouvelle blancheur au noir, à la manière d'une œuvre de Pierre Soulages. Les Parfumeurs Guerlain se sont inspirés des chefs d’œuvre de ce peintre qui a su donner des reflets insoupçonnés au noir ». Je trouve l’idée de conjuguer le côté vert et floral du néroli avec le thé fumé très original. En effet, les notes fumée d’un lapsang souchong très sombre, parsemé d’épices se marie avec le côté ultra lumineux de cette fleur de bigaradier. Le résultat est un parfum doux-amer, presque gourmand sur la peau mais toujours chic comme la nuit. Je trouve la réalisation parfaite mais, il faut le dire, je ne suis pas prêt dans l’immédiat à franchir le pas car c’est une eau de parfum très onéreuse et il faudrait vraiment que je sois certain de mon choix. Je le réessayerai prochainement pour évaluer s’il me plaira toujours autant. En tout cas, c’est une belle trouvaille que j’avais envie de partager avec vous.
Exquise trouvaille : "Fleur Nocturne"
« La note de tête constituée de Mandarine, mélangée avec la Fleur d’Abricotier et la Pêche Blanche, donne immédiatement ce sentiment jubilatoire d’avoir entre ses mains un parfum exceptionnel aux composants nobles et précieux. La note plonge dans un cœur de Jasmin, de Magnolia et de Gardénia comme il en existe rarement de cette qualité. La note de fond laissera un puissant sillage, d’une élégance et d’une sensualité intense, fruit d’un accord parfait entre notes Solaires, Vanille et Patchouli », tels sont les mots de son créateur, Jean Jacques, pour décrire ce parfum envoûtant. Lancé en 2009, « Fleur Nocturne » surfe sur la même vague que la plupart des parfums de la maison Isabey. C’est un bouquet floral absolument inédit et on retrouve le gardénia si cher à Isabey au coeur d’une composition plus sombre, plus singulière, plus mystérieuse. Je l’imagine bien, porté lors d’une soirée d’été, dans un jardin. « Inspiré par l'univers de cristal peint, de fleurs et d’améthyste nocturne de 1925, le parfumeur Jean Jacques a créé un bouquet floral extraordinairement riche: Jasmin, Magnolia et Gardénia. Les notes fruitées qui reposent sur un fond puissant créant ainsi un sillage d'une élégance et d’une sensualité intense ».
Jean Jacques
Avec des notes de tête vraiment très fruités et douces de mandarine, de pêche et d’abricot vient un coeur de gardénia, si cher à la marque rendu un peu sombre et animal par le jasmin. Enfin le parfum se pose sur un fond de patchouli et de vanille. « Fleur Nocturne » est un parfum un peu en clair obscur et presque néo-chypré. Il reste, néanmoins floral, presque solaire par moment et tout à fait fascinant. J’ai un ami qui dit toujours qu’il lui évoque une espionne de roman. Pour moi, « Fleurs Nocturnes » est une trompe-l’oeil olfactif. Il est tout en clair obscur, tout en finesse et son côté « dark » nous entraîne dans un océan de fleurs rêvées. Il mêle avec adresse notes florales et accents fruités. En tête, on retrouve la mandarine, la fleur d’abricotier et la pêche blanche qui évolue sur un coeur de jasmin et de magnolia construit autour du magnolia puis, en fond le patchouli et la vanille rendent le parfum très dense, très capiteux, avec des accents orientaux que je trouve assez uniques dans ce genre de composition. J’aime beaucoup « Fleur Nocturne », je trouve qu’il est complètement indémodable. Son élégance est presque un peu subversive et mystérieuse.
Promenade dans mes doses d'essai
En ce mois de novembre, je suis allé redécouvrir des parfums que j’avais aimé au « premier nez » pour me rendre compte si mes goûts avaient évolué. Deux des quatre parfums que j’ai choisis, me sont connus depuis plusieurs années et je dois dire que je les ai redécouverts avec beaucoup de plaisir. Alors, comme chaque mois, aurai-je un coup de coeur ? Vous le saurez, comme toujours, dans la conclusion. Ma sélection est particulièrement éclectique et je pense que je suis un peu partie dans tous les sens mais c’est aussi cela la parfumerie dite de niche. En tout cas, j’ai pris du plaisir à porter ces quatre parfums. Je vous emmène donc sur les traces de quatre créations très différentes.
Quand j’ai découvert la collection Serpent de Stéphane Humbert Lucas, c’est à dessein que je n’ai pas parlé de « Sand Dance » lancé en 2022. Je voulais le réessayer pour me faire une idée plus précise. « Sand Dance s'inspire des mouvements de danse les plus sensuels des danseurs Kalbelia, un peuple nomade du Rajahstan, terre des rois du nord de l'Inde et porte d'entrée de l’Orient. Les femmes, vêtues de sublimes robes noires et multicolores parées de bijoux, ondulent avec grâce et souplesse comme des serpents. Elles virevoltent au son des musiciens qui les suivent dans leur inspiration jusqu'à atteindre un état de transe qui provoque une grande émotion. Sand Dance est un spectacle sensationnel au cœur du désert, où le vent brûlant emporte dans son sillage un souffle d’épices. Un parfum captivant, composé de notes chaudes et sucrées de Cacao, avec une beauté et un charme hypnotiques ». Sur ma peau, « Sand Dance » revêt une facette vraiment gourmande. Il s’ouvre sur un accord crème de whisky, rendu plus acidulé par la mandarine et la coriandre puis vient ce coeur très « chocolat au lait » de cacao, de bois de santal et de cashmeran, puis le parfums se corse et évolue sur un fond très oriental et poudré de benjoin, de fève tonka et de cèdre qui est rendu plus profond grâce au styrax et au patchouli. L’évolution est assez belle alors que le départ me laisse un peu indifférent. C’est un chocolat, crémeux, gourmand dont il m’éloigne de mes goûts mais je dois admettre que je le trouve assez addictif. Reste le flacon… Il m’apparait comme peut-être encore plus hideux que ceux qui ont des couleurs différentes. On ne s’approprie un parfums pour son flacon mais quand même… Le bling-bling poussé à ce point-là; c’est dommage.
Le second parfum de ma sélection est très « romantique » mais il demeure résolument moderne. Il s’agit de « Duo des Fleurs » créé pr Euan McCall pour la marque franco-japonaise Senyokô en 2019. Je dois dire qu’il est, pour moi, un vrai coup de coeur et il m’a permis de mettre le nez sur le travail de ce parfumeur écossais dont le talent n’est pas à démontrer. Je remercie chaleureusement Fabien de Yuuminoki de me l’avoir fait découvrir car, je n’ai pas peur de le dire, c’est un chef-d’oeuvre sur lequel je n’aurais pas forcément mis mon nez de moi-même. « «Sous la danse canopée où le jasmin blanc se mêle à la rose rouge… Échappez-vous avec moi, j’entends Sarasvatī apostropher au loin !» Une chaotique aventure de fin de siècle au terme du XIXème: deux amants s’échappent de l'Empire britannique des Indes. Le Duo des Fleurs, qui représentait la genèse de la tragédie, devient la source de félicité » et je dois dire que j’entends, lorsque je le sens, les voix de Lakmé et Malika dans l’opéra français de Léo Delibes qui est sans doute l’une des oeuvres que je préfère. Il s’ouvre sur des notes de rose centifolia associées à un absolu de jasmin sambac, ainsi qu’à des notes de davana et de feuilles de datura. Le coeur, construit autour d’huile et de pétales de rose ainsi que de bourgeons de jasmin nous conduit sur un fond de santal et de muscs divers. Ce parfum est très opulent, presque trop pour moi, mais il est comme une invitation à une promenade au milieu des fleurs exotiques dont l’agencement est diablement agréable. Je pourrais le porter sans problème et je ne le trouve pas aussi féminin que ça.
Lancé en 2022, « Eternal Lily Amber » est peut-être le plus consensuel de mes choix. En effet, il revêt quelque chose de plus classique. Il est peut-être celui sur lequel j’ai le plus hésité car je le trouve beaucoup moins moderne et pas tellement représentatif de l’esprit Bohoboco. La marque le décrit ainsi : « Eternal Lily Amber est le symbole de l’abondance, de la fertilité et de la croissance. Souvent utilisé lors des cérémonies funéraires, le lys est pour le fondateur de Bohoboco, Michał Gilbert Lach, un symbole d’adieu à son pays natal, la Pologne. Comme une expression de la solitude de l’artiste, cette fragrance représente « la volonté métaphysique de s’épanouir ». Alors que la richesse de la pomme Granny Smith et la fraîcheur de la mandarine se mêlent au lys, celui-ci réapparaît en cœur, comme un signe de prospérité. En fond, l’abondance est exprimée par la vanille gourmande, l’ambre réconfortant et le patchouli profond. Un jus qui offre un bonheur saisissant nous laissant désireux d’explorer l’existence ». Déjà, il s’avère plus naturaliste avec un départ de mandarine italienne et de lys et malgré un accord pomme verte puis, le coeur est franchement floral puisque s’ajoutent des notes de jasmin et de rose de Turquie et enfin, le fond très patchouli ambré garde un côté un peu gourmand contrebalancé par la facette aromatique de la vanille de Madagascar. Je l’ai bien aimé mais il est, il faut bien l’admettre, un peu moins original que les deux premier et que le quatrième à venir. Il n’en demeure pas moins que c’est un joli floral qui tire un peu vers le chypre et qui sera, sans doute, l’un des plus faciles à porter.
J’ai déjà parlé de « Aleksandr » à plusieurs reprises mais je ne me voyais pas faire une revue de la marque sans attaquer avec le parfum que j’ai préféré dès que je l’ai découvert. Créé, en 2012, par Yann Vasnier et Rodrigo Flores-Roux, c’est un cuir de Russie (bois de bouleau et mousse de chêne) comme je les aime. Il est à la fois sombre et goudronné avec une belle facette violette fraîche et poudrée. Je le trouve absolument irrésistible. La marque le décrit ainsi : « Janvier 1837, Saint Petersbourg, Russie Aleksandr, sous son épais manteau de fourrure qui laisse échapper la fraîcheur de sa peau aux notes de néroli et de violette, s'élance à travers les allées de bouleaux, transperçant l'air glacé de l'hiver. D'un pas décidé, il s'apprête à affronter son destin dans un duel fatal avec d’Anthès ». Je trouve que les parfumeurs ont vraiment su recréer les cuirés que les parfumeurs tentaient de créer depuis la fin du XIXème siècle avec un twist moderne. Il s’ouvre sur une envolée de néroli aldéhydée assez fugace, le parfum se pose sur un coeur feuille de bouleau, feuille de violette, iris poudré, cognac et déjà une note de cuir pour se poser sur un fond de fir balsam, de résine de bouleau et de mousse de chêne. C’est un parfum d’une grande élégance, un peu suranné mais tout de même moderne avec la légère touche de cognac. J’ai adoré ce parfum. Pour moi, il est celui que je pourrais porter si je franchissais le pas d’une référence de la marque/
Si j’aime bien les quatre parfums que j’ai choisi pour cette chronique, celui qui me plait vraiment est « Duo des Fleurs » de Senyoko. Je l’avais vraiment apprécié quand je l’ai découvert et je remercie Fabien de Yuuminoki pour m’avoir fait découvrir cette maison peu distribuée. Une fois de plus, je trouve que Euan McCall sort des sentiers battus et c’est souvent ce que je recherche dans un parfum.
La graine de carotte, fruitée ou terreuse
Après avoir redécouvert « I Love Les Carottes » créé par Olivia Giacobetti pour Honoré des Prés, je me suis rendu compte que la graine de carotte est très utilisée en parfumerie. Elle apporte un côté terreux qui peut souvent rehausser de floraux ou de poudrés. On se souvient de « Violaceum 2 » créé par Daphné Bugey pour L’Artisan Parfumeur qui a, hélas, disparu, ou encore « Iris Silver Mist » composé par Maurice Roucel pour Serge Lutens. J’ai choisi quatre parfums qui mettent en avant cette note racinaire et très étonnante même si elle n’est qu’une composante qui modifie les autres. L’idée a alors été d’aller chercher quatre parfums dans lesquels j’identifie clairement la graine de carotte. C’était un exercice intéressant et j’espère vous donner envie d’aller les sentir.
J’ai commencé par un parfum « dans l’esprit » de l’iris travaillé en majeur et soutenu par la graine de violette. Il s’agit, bien évidemment, de « Iris de Nuit » créé par James Heeley pour sa marque éponyme et que j’ai énormément porté. « Rare et raffiné, sensuel et discret, le parfum Iris de Nuit est à l’image de l’absolu d’Iris de Toscane, soutenu ici par de la violette, des graines de carottes, de l’angélique, du cèdre et de l’ambre gris, pour dévoiler un thème floral exquis ». Après un départ d’angélique et d’ambrette vient ce coeur d’iris, de violette de graine de carotte presque aérien et pourtant tenace grâce à la « solidité » d’un fond de cèdre et d’ambre gris. La graine de carotte, bien présente, permet de faire ressortir le côté à la fois floral et terreux de l’iris et de la violette et lui assure une stabilité tout au long de l’évolution. « Iris de Nuit » est une création très chic, très contemporaine et pourtant, il se veut dans la plus pure tradition de la parfumerie fine à la française vu par un parfumeur britannique. Pour moi, c’est une merveille absolue. J’aime beaucoup la graine de carotte associée à l’iris et à la violette. « Violaceum 2 », sorti donc chez L’Artisan Parfumeur et « Violette Fumée » de Mona di Orio me manquent. Leur « héritier » ne peut être que « Iris de Nuit ».
« Entre Charles Perrault et Jacques Demy se joue l'exercice d'interprétation et la magie qui perdure. Entre l'éclat des parures et le charme souillon se glisse l'inspiration d'un parfum qui m'enchante particulièrement ». Créé par Anaïs Biguine en 2022 pour sa marque Jardins d’Écrivains, « Peau d’Âne » met en scène très différemment la graine de carotte dans une composition qui, comme toujours, casse tous les codes. Après une envolée de pin, d’iris et de citron vert, le parfum évolue vers un coeur terreux de graine de carotte et de labdanum enveloppé d’un accord blé, voire même farine puis le parfum s’enrichit d’un fond de patchouli, de cèdre poudré et cuiré. « Peau d’Âne » ne ressemble à rien d’autre et, comme à son habitude, Anaïs Biguine nous emmène là où nous ne serions pas allés. La graine de carotte permet de donner un côté un peu plus rond au parfum tout en lui conservant son côté terreux. J’aime beaucoup ce parfum facetté, étonnant voire même détonnant. Il ne ressemble à rien d’autre et j’ai eu beaucoup de plaisir à le réessayer même si, et je l’admets volontiers, il n’est pas du tout pour moi. C’est ainsi mais je le regrette car il est bigrement réussi.
Pour Atelier des Ors, Marie Salamagne utilise également la graine de carotte dans « Choeur des Anges » qui est un parfum qui m’a beaucoup plu lorsque je l’ai découvert et encore plus maintenant que je le réessaye. « Choeur des Anges est une célébration poétique de la couleur, du parfum et de la joie de vivre mêlée d'Orange sanguine, de Graines de Carotte, de fruits et de fleurs rayonnants. Une création symphonique inspirée par les voix harmonieuses des anges ». Dès le départ d’orange sanguine, de cassis et de poire, je me sens séduit mais c’est surtout avec ce coeur improbable de gaine de carotte vraiment très tranchée et associée au côté abricoté de l’osmanthus à légèrement vert de la fleur d’oranger est d’une grande beauté surtout quand il s’adoucis d’un très joli fond boisé, ambré et miellé. C’est vrai que « Choeur des Anges » est un parfum que je trouve vraiment original mais aussi très équilibré et facile à porter. Il est l’un des mes trois préférés dans la marque. J’avais tout de suite identifié la graine de carotte. C’est le petit truc en plus qui fait qu’il retient mon attention.
« Misfit » a été créé par Rodrigo Flores-Roux pour Arquiste en 2019. J’avais du le sentir à sa sortie mais vraiment c’est en le posant sur ma peau que j’ai découvert l’élégance et la force de ce travail incroyable autour du patchouli : « Septembre 1877, port de Marseille, France. Dans une chambre à coucher, un châle de Cachemire était posé sur le lit défait. Autrefois très convoités, ces châles sont maintenant délaissés par les bourgeois, tout comme l’odeur de patchouli qui leur est associée. Pourtant, dans leur quête d'une nouvelle volupté, les bohémiens et les demi-mondaines l'adopteront comme emblème. Demi jour, dans cette pièce, l'essence charnelle de patchouli s'allie aux nuances musquées et ambrées des baumes exotiques touchées par la fraîcheur de la lavande. On redécouvre ainsi ce parfum chargé d’histoire, l’indésirable devenant à nouveau une source infinie de désir. Un patchouli moderne, voluptueux et élégant pour tous ». « Misfit » est un parfum un peu décalé, on peut même dire « désaxé » si l’on veut traduire. Il est à la fois subversif, moderne et chic. C’est un tour de force d’avoir réussi cela. J’ai beaucoup aimé l’idée d’un patchouli travaillé tellement qu’il nous fait perdre un peu nos repère même à nous, les amateurs de cette matière première. Pour moi, il est vraiment terriblement addictif. Bien sûr, il est complexe avec des notes de bergamote de Calabre, de graine de carotte, de racine d’angélique pour le côté vert et presque âpre rendue presque aromatique par la présence d’une très belle lavande française. Puis arrive le coeur de rose de Bulgarie, d’ambrette, de bois d’akigala et de styrax qui assure au parfum une profondeur à la fois sèche et presque inédite avec un joli versant cuiré. Enfin le parfum se pose sur un fond de patchouli cuiré par une variété de ciste espagnol et adouci par la fève tonka et le baume de tolu. Je trouve ce parfum vraiment incroyable et, sur ma peau, il est tellement beau que la construction presque chyprée prend un tournant faussement solinote. J’emploie ce qualificatif à dessein car il est d’une rare complexité imaginé par l’esprit remarquablement créatif de Rodrigo Flores-Roux qui a su associer des notes qui ne sont pas forcément évidentes ensemble pour donner un parfum à la fois magnifique et cohérent. En tout cas, vous l’aurez compris, je suis complètement séduit et j’espère pouvoir le réessayer encore et encore prochainement pour… qui sait… un jour d’hiver le porter.
J’aurais pu aussi évoquer d’autres parfums mais je voulais circonscrire ma recherche à des parfums que je connais bien pour illustrer mon propos. J’aime bien cette note en soutien d’autres matières et même, comme dans « Choeur des Anges » quand elle est travaillée quasi en majeur. J’aurais aimé pouvoir évoquer un peu plus « Violaceum 2 » que j’aime particulièrement. En effet, c’est un parfum que j’ai énormément porté même s’il n’a pas été longtemps sur le marché et je l’ai vraiment beaucoup aidé. L’exercice a été un peu compliqué car j’aurais aussi voulu re-sentir « Iris Silver Mist » mais cela n’a pas été possible. Enfin voilà, j’ai réalisé cet article avec les éléments que j’avais et j’espère surtout vous donner envie d’aller identifier cette note.
Pascal Gaurin, des créations à travers le monde
* Article entièrement réécrit
C’est en découvrant, il y a déjà quelques temps, la maison franco-américaine Scents of Wood/L’Âme du Bois, que j’ai vraiment eu une approche du travail de Pascal Gaurin et surtout de sa signature que je finis par trouver vraiment reconnaissable. Je connaissais déjà un peu quelques unes de ses créations notamment pour Diana Vreeland car j’avais beaucoup aimé, lors d’une visite parisienne chez Dover Street Market, l’une de ses composition sur laquelle je vais revenir. Il a créé, à l’internationale, beaucoup de parfums pour diverses maisons dont beaucoup ne sont pas venues jusqu’à nous alors je vais me concentrer sur cinq parfums que je connais vraiment bien et dont j’avais envie de parler.
Je le disais en introduction, j’ai beaucoup aimé « Staggeringly Beautiful » créé par Pasca Gaurin en 2018 Diana Vreeland, une marque américaine qui tire son nom de celui d’une très célèbre journaliste née en 1903 et disparue en 1989, qui a fait autorité dans le milieu de la mode aux États Unis. Une marque de parfums très réussis et disponibles en France, au moins en partie, chez Dover Street Market tout au bout de la rue Elzevir dans le 3ème arrondissement. « Vibrant, pétillant et transportant, Staggeringly Beautiful capture parfaitement les brises fraîches, l'eau claire et scintillante et le feuillage riche et luxuriant des arômes d'été le long de la Méditerranée. L'aura étonnante de Staggeringly Beautiful vient de la feuille de figuier terreuse rarement combinée avec le délicieux fruit de la figue. Le magnifique bouquet est ensuite induit par des éléments d'agrumes de bergamote sicilienne et associé à la jonquille la plus rare, le cœur exsudant des caractéristiques riches, vertes et florales ». Je trouve que ce parfum est, effectivement, comme son nom l’indique « Étonnamment Beau ». Après une envolée de feuille de figuier, de néroli et de bergamote très classique, nous sommes emmenés sur un coeur de jonquille (un peu narcisse quand mêle), de fleur d’oranger et surtout d’ylang-ylang puis le socle de vétiver d’Haïti vient soutenir la composition qui se pare aussi de mystérieuses notes fruitées. J’avais un échantillon donc j’ai pu le re-tester pour écrire et je ne suis pas déçu. Il est vraiment ultra chic, pas trop aseptisé pour un parfum américain puis, il faut le dire, la tenue et le sillage sont très suffisant. Voilà un beau parfum, androgyne et parfaitement facile à porter. Pour moi, il est l’une des plus belles créations de Pascal Vaurin.
Il est le fleuron de la maison Sents of Wood et je crois qu’il mérite bien l’engouement de ses amateurs. « Prunier en Cognac » a été créé par Pascal Gaurin en 2020. « Ondulant entre le sucré et l'épicé, le moelleux et le sauvage, le sombre et le clair. Laissez le parfum Prune au Cognac vous surprendre à l'infini avec un mélange à la fois sensuel, nourrissant et provocateur. Un parfum iconique de la marque qui a remporté le prix du "Parfum Extraordinaire de l'année 2021" de la Fragrance Foundation ». Je ne vais pas expliquer son succès sinon qu’en disant qu’il est très qualitatif et que les réseaux sociaux en ont fait, je pense, le fleuron de cette marque assez confidentielle et pas forcément accessible. Je suis totalement accroché par le top note qui se compose de prune un peu confite, de cannelle et d’immortelle. Le coeur, quant à lui, se fait rond, plus rond, avec un accord rhum associé à l’osmanthus et au baume du Pérou. Là, où, pour moi, c’est un peu plus difficile c’est que je trouve que le fond de vanille, de ciste et de vétiver arrive sur ma peau un peu brutalement et s’y installe. J’aurais préféré continuer à sentir un peu sur ma peau, les notes de tête et de coeur qui me font vraiment envie. Hélas, je suis un peu moins fan de l’évolution même si je trouve qu’il s’agit-là d’une magnifique création.
C’est grâce à Fabien de Yuuminoki que j’ai pu découvrir et remettre mon nez dans « Musk Deer » , inspiré des muscs sécrétés par le cerf dans son habitat, créé en 2020 par Pascal Gaurin. Dès la vaporisation, on se sent enveloppé d’une effluve suave sur laquelle danse la cardamome qui s’entremêle avec l’huile de calamus et la rose avant de s’enrichir d’un coeur de jasmin puis, à la toute fin de son évolution, d’un oud délicat et d’un iris très poudré. C’est un parfum tout en subtilité et en nuances. Le parfumeur a interprété un musc animal fleur et légèrement cuiré. Il a été très inspiré car il va réjouir le nez de beaucoup même s’il garde la belle singularité qui est la marque de fabrique des créations de Zoologist. Il est fier le cerf, il a un port de tête que l’on reconnait avec son oeil vif et ses bois étonnants et Pascal Gaurin a su le rendre doux, tendre et agréable à porter. « Musk Deer » n’effrayera pas même les plus réfractaires au musc tonkin animal car sa recréation s’est faite toute en douceur et en harmonie. C’est un parfum réjouissant à découvrir de toute urgence. Il me plait et je pourrais parfaitement le porter.
Créé an 2020 par Pascal Gaurin pour Scents of Wood, « Cèdre en Acacia » est également un succès dans la marque et il est aussi, à mon sens, l’un des parfums les plus « faciles » proposés dans ma sélection. « Ressentez la chaleur d'une étreinte ensoleillée avec un parfum qui vous embarque dans un voyage d'épices, de fruits et d'ambre pour créer une exaltation captivante des sens. Un parfum indomptable avec son accord unique acacia / gingembre diffusant une étincelle veloutée qui parlera à votre cœur. La résine d'oliban arrondit ce parfum profondément boisé et fougueux, ajoutant une touche de sensualité provocante et addictive ». Je l’ai aimé dès que je l’ai senti même s’il ne supplante pas « Vétiver en Fleurs » qui est mon coup de coeur chez Scents of Wood. Il est un peu huileux au départ sur ma peau avec des notes de gingembre et de cannelle. Je suis peut-être un peu moins fan du coeur de cypriol et iris (quoi que…) et du fond Oliban et cèdre. Je ne suis pas très amateurs de ces notes froides et boisées et c’est ce qui me retiendra de le porter.
J’aime bien la collection Armani Privé et j’avais justement un échantillon de « Bleu Lazuli » que Pascal Gaurin a créé en 2020 pour la série des Terres Précieuses. « Bleu Lazuli est un voyage à travers le parfum : - au carrefour des frontières, il insuffle l’esprit de l’Inde à l’Italie, le cœur de la créativité de Giorgio Armani. Ses notes clés proviennent des odeurs de l’encens et des marchés aux épices indiens, évoquant l’imprégnation du spirituel dans chaque aspect de la vie indienne ». Le parfum s’ouvre sur une note de bergamote associée à la cardamome et au thé puis le coeur de jasmin se pare d’osmanthus et de prune. Il faut attendre tout au long d’une évolution assez longue pour parvenir à un fond de santal, de tabac miellé et de vanille. « Bleu Lazuli » est vraiment oriental, très rond, très opulent et j’aime beaucoup son développement sur ma peau. Je le porte pendant que j’écris et vraiment j’aime beaucoup le côté prune confite de ce parfum qui n’est jamais écoeurant, jamais too much même s’il est un peu gourmand, épicé et très opulent. Pour moi, « Bleu Lazuli » est l’un des parfums les plus réussi de la collection des Terres Précieuses. J’aime beaucoup ce parfum et je pourrais tout à fait le porter.
Parfumeur IFF à l’international, Pascal Gaurin a créé nombre de très beaux parfums. J’en ai choisi quatre mais je pourrais étendre ma sélection. Il faut absolument que je découvre beaucoup d’autres choses qu’il a inventé. En tout cas, c’est une très belle signature. Je suis content d’avoir remis mon nez là-dedans et de vous en faire un compte-rendu.
Nicolas de Barry, historien et parfumeur
*Article entièrement réécrit
Passionné d’histoire, Nicolas de Barry a lancé en 2003, sa maison de parfum éponyme. Le postulat en est simple, recréer des fragrances qui auraient pu être celles de personnages historiques célèbres. Il collabore pour cela avec le nez Eddy Blanchet et compte pas moins de 14 créations dont la dernière remonte à 2014. J’avoue humblement que je ne les connais pas toutes et j’ai décidé de me concentrer sur trois parfums que je connais et que je n’ai pas encore évoqué sur ce blog. En effet, je ne vais pas revenir sur « George Sand », d’abord sorti chez Maître Parfumeur et Gantier et qui fut, le premier parfum de la marque en 2003. Il est celui que je porte mais il y a d’autres belles créations dans la marque et il m’est agréable, alors que je les ai senties il y a peu, de revenir dessus.
Le premier parfum qui me vient à l’esprit est « Louis XV » sorti en 2003 et créé, comme toujours par Nicolas de Barry et Eddy Blanchet. C’est un fleuri et l’idée des parfumeurs était d’utiliser les fleurs qui devaient pousser dans les jardins de Versailles à l’époque du « bien aimé ». L’ouverture est une envolée de fleur d’oranger mais, très vite, c’est le coeur floral qui prend le dessus. C’est une explosion ! Tubéreuse, oeillet, narcisse, Jacinthe, gardénia et rose le composent. Nicolas de Barry y a ajouté une note jasminée que je trouve particulièrement envoutante. Le fond est ambré et boisé et permet au parfum de tenir, comme appuyé sur ces notes plus rondes et profondes. J’ai essayé « Louis XV » et j’ai un ami qui le porte. Il peut sembler extravagant dans l’idée pour un homme et pourtant, il est très élégant et, somme toute, relativement facile à porter. Un après-midi, je me trouvais à l’Atelier Parfumé à Lyon qui est, à ma connaissance, l’une des rares parfumeries à distribuer la marque, et il a séduit un tout jeune homme qui était là avec ses parents. Je pense qu’il garde une certaine modernité même si on retrouve l’ambiance très florale du Versailles du XVIIIème siècle. La même année, Nicolas de Barry et Eddy Blanchet ont d’ailleurs créé le « féminin » de « Louis XV » et c’est ainsi qu’est né « Marquise de Pompadour ». La formule est très proche sauf que le départ est un iris ultra poudré et qu'une note de tubéreuse omniprésente se développe. Je l’aime bien aussi. Je le trouve très agréable et élégant.
Dès 2003 Nicolas de Barry et Eddy Blanchet recherchent quel pouvait bien être le parfum ou tout du moins l'univers olfactif de l'impératrice Élisabeth d'Autriche. On le sait, dès son très jeune âge, ce personnage historique plus que populaire, faisait très attention à son physique et entretenait sa luxuriante chevelure à grands coups de baumes réalisés pour elle. "Sissi Impératrice" est vraiment un parfum qui allie la violette et la vanille d'un parfum qu'aurait pu porter l'impératrice avec des notes de brandy et d'iris qui lui confèrent une évolution plus que surprenante. En effet, lorsqu'il vient d'être vaporisé, le parfum a un côté "bonbon à la violette" sucré que je trouve assez désagréable et, petit à petit, il prend corps. Si la violette est toujours présente, le côté sucré s'estompe pour devenir poudré dans un premier temps puis, lorsque les notes de fond commencent à apparaitre, elle devient profonde, opulente, addictive.Je ne porterais peut-être pas "Sissi Impératrice" car il est un peu trop "violette" pour moi mais j'adore le sentir. Les parfums Nicolas de Barry sont assez peu diffusés mais nous avons la chance de les avoir à Lyon et je dois dire que, si j'ai opté il y a bien des années pour "George Sand", il y en a plusieurs que je trouve très réussis. "Sissi Impératrice" en fait partie.
« Eau du Cardinal » a été lancé en 2014. Eddy Blanchet et Nicolas de Barry ont voulu recréer ce qu’aurait pu porter un chef religieux comme Mazarin par exemple. C’est un hespéridé tout à fait explosif et dense car les parfumeurs ont utilisé des huiles essentielles très concentrées. Bergamote, citron, orange, orange amère et mandarine reposent sur une note de bois précieux et, il me semble, d’encens relativement discret. Ce n’est pas une cologne car, dans ce parfum, il n’y a aucune dimension aromatique. Je pense également que le départ est un néroli très dense, très intense qui ouvre le parfum vers ce cocktail d’agrumes rafraîchissant et énergisant. Il est vrai que « Eau du Cardinal » ne m’évoque pas forcément les velours rouges de Richelieu ou Mazarin. Je leur aurais plutôt vu un encens profond et seulement relevé par des notes citronnées mais c’est l’interprétation tout à fait classique et facile à s’approprier qu’en donnent les parfumeurs. Et pourquoi pas ? Attention tout de même à ne pas juger cette création sur ses notes de tête car, tout comme dans les autres, l’utilisation d’huiles essentielles très concentrées peuvent lui donner quelque chose de piquant et de presque désagréable. Il faut le laisser se développer, vivre avec pour en apprécier toutes les facettes. « Eau du Cardinal », n’est pas vraiment le parfum que j’aimerais porter dans la marque mais je reconnais qu’il est très réussi.
Parmi les premiers parfums créés en 2003 par Eddy Blanchet et Nicolas de Barry, « Mumtaz-i Mahal », dédié à l’épouse de l’empereur moghol Shâh Jahân qui régna sur la Perse au XVème siècle. C’est une variation autour de l’huile essentielle d’une rose de Turquie très profonde, presque « truffée » travaillée d’une manière délicate et orientale avec un fond boisé, ambré et légèrement vanillé. L’envolée de bois de rose au départ est un choc olfactif pour moi et j’ai toujours un peu de mal à l’apprivoisé mais le côté envoutant de ce parfum d’impératrice apparait très vite lorsqu’il se développe. « Mumtaz-i Mahal » est une véritable déclaration aux amateurs de rose… de belle rose capiteuse et envoutante. Il y a presque un côté animal lorsqu’il se mélange à la peau avec la note crémeuse et lactée du bois de santal. C’est un parfum très différents de ceux qui sont dédiés à des souverains ou personnalités européennes qui ont aussi leur place dans la collection. « Mumtaz-i Mahal » est un oriental mais sans bois d’oud et peu vanillé. J’aime beaucoup le sentir même si je ne me verrai absolument pas le porter. Il est très beau, envoûtant et c’est un parfum de séduction à n’en pas douter.
Lancé en 2014, « Casanova »l n’est pas forcément mon préféré. C’est un hespéridé très « esprit Cologne » avec un départ de citron, de bergamote et d’orange, un coeur de jasmin et de fleur d’oranger et un fond plutôt chaud et lacté d’ambre et de santal. Inspiré de ce qu’aurait pu porter le célèbre séducteur et aventurier vénitien, ce parfum laisse une impression à la fois de fraîcheur et de propreté et Nicolas de Barry imagine ce que pourrait porter Casanova s’il vivait au XXIème siècle tout en lui gardant les effluves de son époque. Je dois dire que je ne trouve pas forcément ce parfum très original mais il ravira bien évidemment les amateurs de cette Cologne « à l’italienne », entre notes d’agrumes et coeur floral. Le fond très ambré soutient la fragrance et lui assure une excellente tenue. Elle a tout pour devenir un classique et je trouve qu’elle est assez emblématique de la marque.

« Wu Zetian, fut la seule impératrice régnante de toute l’histoire de Chine. Elle fonda sa propre dynastie, la dynastie Zhou, dont elle fut la seule monarque, sous le nom d’« empereur saint et suprême » de 655 à 705 » et elle a inspiré Nicolas de Barry qui a voulu recréer un parfum raffiné et sophistiqué en hommage à ce personnage en utilisant de très belles matières naturelles telles une variété de oud du Vietnam, une rose chinoise du Yunnan, un jasmin et un osmanthus de Guilin, de musc de l’Himalaya et d’ambre gris, le tout associé à la tubéreuse, travaillée en majeur et à une poudre de racine d’iris qui était utilisée par l’impératrice pour blanchir son visage et son corps. J’ai beaucoup aimé la dualité entre le côté très floral et même un peu animal de la tubéreuse et la facette vraiment poudrée de l’iris. C’est un parfum d’une élégance un peu exotique voire vénéneuse, complexe et terriblement tendre. Pour moi, c’est un grand féminin qui pourrait tout à fait être porté par des hommes. Il fait partie de mes coups de coeur dans la collection.

" Née en 1804, George Sand a marqué le XIXe siècle et le romantisme européen de façon exceptionnelle : écrivain à succès, elle fut l’amie des intellectuels de son temps et la compagne de Musset et Chopin. Son château de Nohant était devenu un point de rencontre où tout le monde romantique européen se retrouvait. Elle recevait avec délicatesse à Nohant : cultivait son jardin et notamment un jardin parfumé qui servait à produire des pots-pourris et des savonnettes pour les invités. Sa passion pour les fleurs et les parfums ressort de son abondante correspondance. A Musset rentré à Paris en la laissant à Venise, elle écrit de façon pressante pour qu’il lui envoie le patchouli du parfumeur Leblanc. Elle donne de nombreuses indications à ses parfumeurs: au XIXe siècle, Paris compte 500 parfumeurs-créateurs qui tiennent boutique, et corrigent sans cesse leurs créations. George Sand restera toujours fascinée par le patchouli, par les notes orientales animales (ambre et musc) et par la fraîcheur de la bergamote et du citron, odeurs de l’Italie du sud qui est si caractéristique du romantisme". En partant de ces informations, Nicolas de Barry a pu sentir deux flacons du parfum de George Sand : les produits étaient évidemment oxydés mais suffisamment présents pour pouvoir identifier les principaux composants : patchouli, ambre, rose…". Il existe, à ma connaissance, quatre parfums inspirés de l’univers à la fois androgyne et un peu sulfureux de cette écrivaine hors norme. Le premier, celui que je porte depuis déjà pas mal d’année a été créé par Nicolas de Barry et Jean-François Laporte pour Maître Parfumeur et Gantier en 1988. Chypré, intense avec une ouverture fraîche de bergamote et de citron, il nous entraîne sur un coeur d’ambre et de rose puis se pose sur un fond musqué construit autour d’un patchouli précieux. En 2003, Nicolas de Barry récupèrera sa formule et la modifiera légèrement avec le concours d’Eddy Blanchet pour le ressortir dans sa propre marque. C’est cette version que je porte et que j’aime particulièrement. Je trouve que « George Sand » est l’un des plus beaux chypres du marché. Intense, envoûtant, il m’entraîne plutôt dans l’appartement d’Aurore Dupin, baronne Dudevant au coeur du Quartier Latin alors qu’elle écrivait des nuits entières avec Alfred de Musset en fumant des cigares où lorsqu’elle sortait, habillée en homme au bras de l’actrice Marie Dorval. Je trouve que « George Sand » est beau, sulfureux, à la fois moderne et tout à fait ancré dans le XIXème siècle tel que l’a voulu Nicolas de Barry. C’est une transposition de l’atmosphère du Paris de cette époque et il me l’évoque à chaque fois que je le porte. J’adore ce parfum. Il est unique et je trouve que c’est une vraie réussite. Il est mon préféré de ce que je connais de la collection des parfums historiques de Nicolas de Barry. Je pense que je le porterai aussi longtemps que je le pourrais.

Je ne suis pas très fan des Cologne à l’ancienne mais je dois bien dire que « L’Eau du Vizir » lancé en 2014 fait un peu exception à la règle. Le parfumeur la décrit ainsi : « Le XIXème siècle voit se répandre la mode des Eaux de Cologne, grâce à la clientèle assidue de Napoléon. Les officiers britanniques de l’Empire des Indes cherchent un peu de fraicheur et adoptent le Vétiver, une petite racine odorante prisée par les Maharajas qui l’utilisent pour rafraichir leurs palais. La mode des “Vétiver frais” commence ici avant d’envahir l’Europe…Sensible à l’univers olfactif des Vizirs, Nicolas de Barry a créé un parfum chaud aux notes vertes en dualité avec la fraîcheur du Citron, de la Bergamote et de l’Orange en notes de têtes. Le Santal et le Musc donnent de la puissance et de l’exotisme à cette Eau distinguée… ». Déroutante, originale entre notes vertes de galbanum et amères conférées par l’écorce d’orange, il ma complètement surpris. Sur la peau, il évolue sans arrêt pour se poser sur un fond musqué presque animal et un peu rond. Complètement atypique, « L’Eau du Vizir » est vraiment une réussite tant du point de vue de son originalité que de celui de sa réalisation. Nicolas de Barry propose une Cologne comme une invitation au voyage, étrange et très facile à porter à la fois. Vraiment, ce parfum m’a énormément plu.

La mythique « Eau de la Reine de Hongrie » se devait d’avoir son interprétation chez Nicolas de Barry et je dois dire que, là encore, j’ai été complètement dérouté par son évolution qui tend à recréer l’odeur de la fleur de lavande. « À l’origine, il s’agit d'un alcoolat de fleurs de romarin créé en 1370 pour l’épouse du roi Charles Robert de Hongrie, Élisabeth de Pologne. La reine de Hongrie en fit un usage intensif, interne et externe, tout au long de sa vie. La légende raconte que cette eau merveilleuse (reçue des mains d’un ange) lui permit de conserver sa beauté et que c’est grâce à elle qu’elle fut demandée en mariage par le prince de Pologne, alors qu’elle était âgée de 72 ans. Aucune confirmation historique ne vient appuyer cette belle histoire. Mais elle a contribué à en faire un produit mythique jusqu' au XVIIIème siècle... L’Eau restitue l'arôme si particulier de la fleur de romarin, sur une structure d'herbes médicinales (romarin, sauge, lavande, thym etc.) dans un objectif d'Eau de Santé, préfigurant déjà les futures Eaux de Cologne ». Pleine de charme, cette réalisation a un départ très aromatique qui tendrait à lui donner presque un côté fougère puis, contre toute attente, les fleurs blanches prennent toute leur place et rendent cette eau sophistiquée, profonde et terriblement addictive. Je l’ai essayée en dernier et j’ai bien fait car elle a pris le pas sur les autres créations. Oscillant sans arrêt entre herbes aromatiques et coeur floral, cette « Eau de la Reine de Hongrie » est un atout charme évident. C’est une interprétation intemporelle d’un parfum mythique et il est vrai que Nicolas de Barry excelle dans ce genre de création.

« Michel de Nostredame, dit Nostradamus était un apothicaire de formation. On dit qu' il aurait également été médecin. Pratiquant l'astrologie comme tous ses confrères à l'époque de la Renaissance, il est surtout connu pour ses prédictions sur la marche du monde. Moins connue est son activité de parfumeur: il produisait des baumes dans son atelier et il a même écrit un "Traité des Fardements" (1555) d'où nous avons tiré une recette assez précise de parfum: cette Eau avait comme originalité pour l'époque de comporter du zeste d'orange, un produit nouveau et très cher. Il donne de la légèreté à une composition autour d'un cœur fruité-épicé , de la rose et des incontournables ambre et musc, avec une touche intéressante de calamus ». C’est autour d’une rose ambrée, épicée, fruitée que tourne « L’Eau de Nostradamus » créée par Nicolas de Barry. Elle oscille sans arrêt entre la profondeur de la rose avec des accents ambrés et musqués et la légèrerté des épices. Je dois dire que je n’arrive pas vraiment à identifier l’huile essentielle de calamus mais je pense que c’est ce qui donne le relief de cette réalisation très belle et complètement différente des roses travaillées précédemment par le parfumeur. Je ne pourrais pas forcément porter « L’Eau de Nostradamus » mais je reconnais qu’elle est particulièrement intéressante.

Avec « L’Eau du Prince Igor », Nicolas de Barry ne pouvait pas plus me toucher car, il faut le dire, j’ai un faible pour l’accord cuir de Russie (bois de bouleau et mousse de chêne) et je trouve que celui-ci est complètement différent de ce que je connaissais déjà. C’est un parfum très goudronné mais qui évite d’être trop fumé. « Dans la tradition des "Cuirs de Russie", Nicolas de Barry a recomposé un très classique parfum des années 1920, qui avait fait fureur à Paris et en Europe à cette période: reprenant les odeurs très caractéristiques des selleries, avec une note entêtante de bois de bouleau brûlé (qui évoque le "Banya" russe...), ce parfum très "club" faisait écho à une mode russe à Paris. Sur le plan culturel, les Ballets de Serge Diaghilev sont alors l'attraction principale. Et la star: le danseur Nijinski qui s'illustre dans les danses polovtsiennes du Prince Igor… Cette eau princière propose un Cuir de Russie revisité: certes le bouleau et sa note fumée, les bois, les cuirs sont là, mais dans une ambiance rafraîchie par des notes de Bergamote d'hiver de Calabre… ». Le parfumeur a donné subitement un coup de jeune à cet accord emblématique du début du XXème siècle et « L’Eau du Prince Igor » se situe élégamment entre « Cuir de Russie » de L.T. Piver et la regrettée « Eau du Fier » d’Annick Goutal qui sont deux parfums que j’ai énormément porté. C’est un énorme coup de coeur je dois bien le dire. J’en attendais beaucoup et je n’ai pas été déçu. Vraiment « L’Eau du Prince Igor » correspond parfaitement à mes goûts et, là où j’aurais peut-être eu un peu de mal à porter « Corpus Equus » de Naomi Goodsir que je trouve vraiment très beau mais très fumé et très dense, je pourrais me plonger dans ce parfum, peut-être plus consensuel mais qui garde sa singularité et son originalité. Pour moi, c’est carton plein !

Comme vous avez pu vous en douter en lisant cet article, je me suis vraiment fait plaisir en découvrant ces fragrances que je ne connaissais pas dans la collection historique de Nicolas de Barry. C’est un vrai plaisir de remettre mon nez dans les créations d’une véritable maison de niche artisanale comme je les aime. Il y a quelque chose de jubilatoire à marcher dans les pas du parfumeur et à s’approprier son talent pour en faire sa signature d’un moment ou du quotidien. Je sais, les parfums Nicolas de Barry ne sont pas facile à trouver mais vraiment ils valent le coup d’être découverts et surtout d’être portés.
La note de datte, addictive et réconfortante
Il y a un ou deux ans, je suis revenu à porter des parfums orientaux après un coup de coeur pour « Farah », composé par Emilie Bouge pour Brécourt et je me suis rendu compte que j’avais une certaine prédilection pour la note de datte. Je ne pense pas que l’on puisse en extraire une quelconque huile essentielle mais la recréation de la note par la chimie est tellement réaliste, tout comme la mangue par exemple, que je lui trouve une correspondance avec son goût riche et suave. Je me suis donc amusé à aller chercher des parfums dans lesquels cet accord est présent, hormis « Farah » dont j’ai abondamment parlé et « Velvet Date » de Rebatchi sur lequel je suis revenu à l’occasion du portrait de son créateur Vincent Ricord, et à les essayer afin de vous écrire un compte-rendu de mon ressenti et aussi pour me tester moi-même et me demander si c’était vraiment cette note qui me séduisait assez pour que je porte un parfum dans laquelle elle ressort sur ma peau. J’ai sélectionné cinq créations très différentes mais que j’ai pu essayer facilement afin d’écrire cet article. Je vous emmène donc sur les traces de cette odeur de datte, suave et un peu exotique, qui a su m’être si plaisante.
Il était évidemment logique de commencer par « Aziyadé » créé par Marc-Antoine Corticchiato en 2008 pour Parfum d’Empire car, d’une part, c’était le premier parfum ans lequel je sentais la note de datte après « Arabie » composé par Christopher Sheldrake pour Serge Lutens en 2000 mais qui n’existe plus, mais aussi pour la simple et bonne raison que je l’ai porté. « Un concentré des plaisirs charnels. Oriental, épicé et fruité, Aziyadé s’ouvre sur un accord grenade détonnant puis délivre les note liquoreuses des dattes confites, des oranges et des pruneaux. Ses épices aphrodisiaques nous plongent au cœur de nuits orientales où les larmes d’encens se mêlent aux muscs, au ciste et à la caroube. Création excessive et charnelle, Aziyadé ruisselle de sensualité ». L’originalité de cette composition pas toujours très facile à s’approprier est un mélange presque « culinaire » entre un départ de prune, de grenade, de datte, d’orange confite et d’amane avec un coeur composé essentiellement d’épices comme le cumin bien sûr, mais aussi la cannelle, la caramome et le gingembre qui rend le fond d’encens associé au patchouli, à la vanille, au ciste, aux muscs et au tabac presque anecdotique. Certes, la note de datte est un peu perdue au milieu de cette composition ultra complexe, cette formule relativement longue qui rend le parfum si insaisissable mais je la trouve présente tout au long de l’évolution. « Aziyadé » ne sera absolument pas le parfum de tout le monde et sa dimension à la fois épicée et gourmande peut déranger mais je ne peux m’empêcher de le trouver extrêmement intéressant.
Avec « Jardin de Misfah », créé pour Une Nuit Nomade en 2019 par Jérôme di Marino et qui rencontre un très grand succès, la présence de la note de datte est beaucoup plus évidente. Il en explique l’inspiration : « Jardins de Misfah s'est inspiré de la friandise orientale emblématique, "Omanis Sweet". Ce délicieux dessert, utilisé pour les célébrations telles que la naissance et le mariage, est composé de dattes, d'amandes, d'eau de rose et d'épices. J'ai réinterprété cette friandise et le plaisir qu'elle procure dans un parfum des plus raffinés et précieux ». Dans cette création, c’est le départ qui est très épicé et qui me séduit avec des note de cardamome et de noix de muscade puis vient un coeur ou la datte joue avec la rose dans une dualité sucrée et un peu « loukoum » puis le parfums prend un tour amandé et rehaussé de safran. Je comprends l’engouement pour ce parfum car il est, c’est vrai, très réussi et facile à porter mais, pour moi, il est un peu too much et je n’arriverais pas à le supporter une journée entière d’autant que, tant au niveau de la tenue que du sillage, il est, sur ma peau, extrêmement présent. C’est une vraie gourmandise orientale comme il y en a quelques unes sur le marché. Il est à la fois qualitatif et tout à fait emblématique de ce que peut donner la note de datte en parfumerie. Pour moi, il est, quand même un peu trop envahissant.
Avec « Olé » qu’il a créé en 2019, Ramon Monegal exploite le côté fruité de la date en l’associant, en tête avec un accord framboise et des notes d’ananas. Nous sommes tout de suite plongés dans un univers à la fois exotique et fruité. Les deux autres notes d’estompent lorsque vient le coeur d’orchidée, de jasmin et de cèdre puis le fond de vanille, de sapin baumier et de muscs blancs. La colonne vertébrale du parfum, si je peux m’exprimer ainsi est dons surtout la dualité entre le côté aromatique et boisé de la vanille naturelle et l’arôme, peut-être un peu artificiel de la datte. Sur le papier, ce parfum aurait tout pour me déplaire et pourtant, sur ma peau, je l’aime énormément. Il en décrit ainsi l’inspiration : « Olé ! Mon exclamation préférée ! Un mélange de folklore et de culture espagnole. Une passionnante exploration de la capacité de s'émerveiller face à l'art. Un court instant d'épanouissement et d'émotions intenses ! Olé à l'art ! Liberté, passion, provocation, imagination, originalité, émotion, joie et vie ! ». J’ai réessayé ce parfum pour écrire mon article et, vraiment, je l’aime. Je pourrais tout à fait le porter. Il n’est pas dit d’ailleurs que je ne le fasse pas un jour tant il me séduit, tant il m’emmène avec lui dans des effluves qui ne me sont pas habituels. J’aime beaucoup la note de datte dans ce parfum. Je la trouve excessivement réaliste. Pour moi, il est vraiment une parfaite réussite.
« Les baumes précieux et le patchouli se mêlent aux fleurs de frangipanier et aux senteurs de fruits confits ». Dans la très belle collection Aristia de maison Lubin, je me retrouve assez peu même si je sais apprécier le travail des parfumeurs. J’ai essayé toutes les créations il y a quelques années mais ce n’est que « Gajah Mada », créé par Delphine Thierry et Thomas Fontaine en 2019, qui me plait sur ma peau. Il faut dire qu’il réunit beaucoup de notes que j’aime puisqu’il s’ouvre sur ds notes d’orange sanguine arrondie de prune et de coing puis vient un coeur baumé et très suave de datte et de fleur de frangipanier qui se pose sur un délicat fond de patchouli, de benjoin et de bois de santal. Pour moi, « Gajah Mada » est l’archétype du parfum oriental réussi. Sur ma peau, il est tellement addictif que j’y reviens sans arrêt. Il matche parfaitement et me plait énormément. Je me sens un peu comme dans une oasis luxuriante au milieu du désert et c’est rare chez moi car je suis loin d’être un grand voyageur. Je ne l’ai encore jamais acheté pour deux raisons. Tout d’abord, son prix dépasse la limite que je me suis fixée, mais là, j’aurais pu transiger, mais aussi, sa tenue, sur ma peau, est un peu limité. Je le garde quelques heures certes, mais peut-être pas autant que « Farah » qui j’ai finalement choisi.
Pour finir, j’ai choisi « Désert Suave » créé Nisrine Bouazzaoui Grillié et Quentin Bisch en 2018 pour la trilogie des Eaux Imaginaires de Liquides Imaginaires. « Après Île Pourpre et Fleuve Tendre, le troisième opus de ces terres imaginaires est une Oasis. Terre fertile à la végétation luxuriante perdue au milieu d’espaces désertiques dont la présence précieuse doit tout à l’eau. Telle une pause invitant à la détente et au plaisir gustatif, ce parfum évoquera le fruit du palmier, la datte, mais aussi un panier de saveurs et d’épices empruntées aux caravanes des voyageurs et pèlerins. Laissant trainer après leur passage, un sillage tel un mirage délicieux se mêlant au vent chaud ». Je trouve que, dans ce parfum profondément oriental, la note de datte est particulièrement réaliste. Un départ de cardamome associée à la mandarine et au clou de girofle évolue vers un coeur de datte, de fleur d’oranger et de rose d’une rare délicatesse et le parfum est soutenu par un bois de cèdre qui lui confère une superbe tenue et un sillage assez imposant et qui compose avec des versants ciste et sésame. Comme ça, « Désert Suave » a tout pour me plaire et pourtant, sans que je sache vraiment pourquoi, il ne matche pas avec ma peau alors que sur l’une de mes connaissances, il est magnifique (c’était déjà le cas de « Arabie » de Serge Lutens dont j’ai parlé au début de cet article) et cela peut avoir un côté plus que frustrant. En tout cas, c’est un très très joli parfum et, à mon sens, une parfaite illustration de mon propos et de ce que peut donner la note de date
J’ai été un peu long mais le sujet m’a énormément passionné. Je crois vraiment que, si j’aime le goût de la datte, je suis attiré par l’odeur de son accord en parfumerie. Sa présence n’est peut-être pas déterminante mais je dois dire qu’elle a provoqué mon envie de porter des parfums dits orientaux après une pose de plusieurs années. J’ai choisi « Farah » de Brécourt et j’ai bien fait car il m’accompagne bien souvent. C’est un très très beau parfum mais il y en a d’autres et j’avais envie d’en parler.
Deux 777 que j'aime bien
J’ai pas mal exploré la collection 777 de Stéphane Humbert Lucas. Je lui ai d’ailleurs consacré une revue il y a peu. J’étais passé à côté de deuux parfums que j’ai trouvé parfaitement réussis et que j’ai pu essayer récemment. J’ai longtemps eu un peu de réticence face à cette maison française et à l’univers un peu clinquant des flacons mais j’ai décidé de passer outre et de faire des essais. Je dois dire que cela va plus loin en deuxième analyse. En tout cas, je me suis fait très plaisir à sentir, porter et vraiment rentrer dans cet univers certes empreint de voyages que je ne ferai sans doute pas mais également plein de diversité et de richesse. Je vous emmène donc avec moi dans cet univers que je découvre petit à petit.
Je ne suis pas très fan des roses ambrées et fruitées et pourtant j’ai bien accroché sur « Rose de Petra », lancé en 2013. Je lui trouve beaucoup d’équilibre et une certaine élégance addictive. « Rose de Petra évoque la ville de Petra en Jordanie également appelée la Ville Rose en raison de la couleur de la pierre dans laquelle elle est taillée. Ce site classé au patrimoine mondial de l'UNESCO a inspiré Stéphane Humbert Lucas pour réaliser un philtre de Rose Bulgare. Généreux, soyeux et mystique, ce parfum est fruité, avec un contraste épicé. Une rose androgyne, différente des essences de roses traditionnelles ». Dès le départ, une rose oxydée, épicée, se charge des notes fruitées de grenade et de litchi pour exprimer une puissance vraiment intense puis, au coeur, une autre fleur, bulgare celle-ci, calme le jeu et se fait plus veloutée mais cela ne dure pas, le fond de poivre piquant, de cardamome fraîche et de cumin très « seconde peau », vient apporter toute sa singularité à ce parfum qui est tout sauf un solinote. J’aime beaucoup ce parfum. Il est vraiment plein de surprises. Le départ m’a un peu fait l’effet de « déjà senti » mais, au fur et à mesure qu’il se développe sur ma peau, il se charge des épices extrêmement pertinentes, plus froides que chaudes, un peu fraîches même. L’ensemble est d’une grande cohérence et d’une élégance un peu singulière qui confine à l’addiction. « Rose de Petra », pour moi, est assez éloigné de ces parfums très orientaux, un peu oud et, finalement devenus des classiques.
Un départ de bergamote et de mandarine assez classique, un coeur de tubéreuse et de jasmin amandé par l’héliotrope qui lui donne presque un côté guimauve, et un fond hyper équilibré, de santal, d’ambre gris et de oud du Laos un peu animal composent « Whish Come True » et le voeux devient vrai. Sur le papier, ce parfum lancé en 2017 semble un peu brouillon voire même incohérent et pourtant il n’en n’est rien. « Telle une potion magique taillée sur mesure, Wish Come True a été préparée pour que vous puissiez vivre vos plus beaux rêves et aspirations. Un philtre surnaturel pensé comme un porte-bonheur. Mariage d'une tubéreuse surnaturelle, à la fois fraîche et voluptueuse, à une subtile infusion d'ambre gris. Quand la féminité rencontre l'enchantement ». C’est une création singulière, sans doute la plus originale de la collection et même de la marque mais elle est tout à fait harmonieuse. Je l’ai posée sur ma peau et je dois dire que j’ai été bluffé par le côté très différent de ce parfum qui est « très niche » comme on dit maintenant un peu abusivement. En plus, sur moi, il matche très bien. La tenue et le sillage sont relativement importants et, vraiment, l’achat à l’aveugle est totalement proscrit. J’ai beaucoup aimé « Wish Come True ». Je pourrais tout à fait le porter même s’il est peut-être un peu « corsé » pour moi. En tout cas, il m’a surpris bien plus que je ne l’aurai cru. J’étais un peu passé à côté et cela aurait été dommage car c’est un parfum très intéressant.
J’avais une image assez négative de la marque et, plus je découvre les créations de Stéphane Humbert Lucas, plus je me rends compte que la marque recèle des parfums plus singuliers qu’il n’y parait. J’ai finalement beaucoup de plaisir à approfondir mes essais de la collection 777 qui est beaucoup plus éclectique que ce à quoi je pouvais m’attendre. Je crois que je vais tenter de porter ceux que je ne connais pas encore.
Séquence nostalgie : "Cornubia"
À l’instar de « English Fern » que j’aimais beaucoup et qui a disparu il y a déjà plusieurs années, Penhaligon’s supprime malheureusement plusieurs parfums historiques que j’aimais beaucoup. Exit donc « Zinzonia », « Hammam Bouquet » (dont la reformulation soit dit en passant était loin d’être la plus belle réussite de la marque), c’est avec déception que j’ai appris que « Cornubia » que j’aimais beaucoup allait être supprimé. Nous avons la chance d’y avoir encore accès et j’ai pu le redécouvrir récemment alors, avant qu’il ne s’en aille, j’ai décidé d’en parler dans la rubrique Exquises Trouvailles car c’est un très beau parfum et je pense que plusieurs points de ventes doivent en avoir encore des flacons car c’est un parfum un peu hors du temps, créé en 1910 qui a du être assez peu réinterprété. Je le trouve splendide, intemporel et particulièrement bien réussi. Je dois dire que je regretterai de ne plus voir son étiquette et son ruban violet. Réédité en 1991 après avoir disparu une première fois, « Cornubia » est un parfum oriental et son fond faussement cuiré est une véritable finesse olfactive. Il s’ouvre sur un accord de mandarine et de freesia avec une touche de néroli, le coeur est jasminé et associé, je pense au mimosa et à d’autres notes florales puis le fond est boisé, musqué et vanillé. Sophistiqué, il laisse un sillage absolument magnifique et sa tenue est impeccable.
Malgré une concentration en eau de toilette, c’est une création vraiment dense et profonde qui va diffuser un sillage d’une élégance rare. Parfois opulent, parfois sec, « Cornubia » est particulièrement facetté et je trouve que c’est une vraie réussite. Plutôt estampillé féminin, je pourrais le porter sans aucun problème. Je l’ai d’ailleurs essayé plusieurs fois. C’est un merveilleux oriental floral qui ouvrira la voix à des chefs-d’oeuvre aussi différents que « L’Heure Bleue » de Guerlain ou « Cuir de Russie » de Chanel. Pour moi, il devait être un peu précurseur de la dinguerie des créations des Années Folles. « Cornubia » a su traverser les époques, se faire non seulement intemporel mais aussi dans l’air du temps. Son opulence et son élégance en font l’un des parfums phares de la collection classique de Penhaligon’s et je trouve très dommage que le groupe espagnol qui a racheté la marque ait pris le parti de le supprimer. Je trouve qu’il va manquer sur le marché.
« Cornubia », qui est le nom latinisé de Cornouailles » est vraiment un parfum exceptionnel. Il s’ouvre avec une envolée de mandarine qui nous entraine sur un coeur de jasmin, d’héliotrope, de fleur d’oranger, de néroli et de freesia puis se pose sur un socle construit autour d’un accord ambré, musqué, boisé et vanillé à la fois. Il n’est jamais entêtant même si je le trouve vraiment opulent. Dans sa reformulation de 1991, il me semble assez conforme à l’original. Je regrette vraiment qu’il soit supprimé car il me semble que j’aurais tout à fait pu le porter.
L'édition de Noël Jo Malone 2024
Chaque année, Jo Malone London sort, pour les fête, de nombreux produits dont deux Cologne en éditions limitée. Traditionnellement, on retrouve, depuis 2016, nous pouvons retrouver « Orange Bitters » que j’ai beaucoup porté et qui rencontre un succès qui ne s’est jamais démenti et ce parfum est associé à un autre qui change chaque hiver. Cette année, j’ai découvert « Fir & Artemisia » qui avait du déjà être édité il y a une dizaine d’années mais dont je n’ai gardé aucun souvenir. Je me suis donc rendu à la boutique lyonnaise pour le découvrir et je vais essayer de vous rappeler un peu ce qu’est « Orange Bitters » pour celles et ceux qui ne le connaissent pas et vous présenter cette autre fragrance qui, si elle évoque les fêtes de fin d’année, est tout de même très différente et nous entraine dans un autre univers. Un peu avant le mois de décembre, je vous emmène dans deux univers parfumés festifs et réconfortants.
Avec son départ d’orange douce, un peu écorces et son coeur d’orange plus amère, presque confite par la prune puis son fond de santal qui lui assure une belle tenue, « Orange Bitters » m’a moins rappelé le cocktail auquel il fait référence que les senteurs des fêtes de fin d’année de mon enfance car je sens aussi de petites touches d’épices. « Un délicieux cocktail hivernal. Des notes fruitées : l'orange sucrée et la mandarine fraîche. Une touche vive d'orange amère révèle des accents de prune succulente, le tout reposant sur une base sensuelle de bois de santal et d’ambre ». Très honnêtement, j’ai plus facilement porté ce parfum, qui m’a réconcilié avec les hespéridés, l’été que l’hiver. Pour moi, il représente une certaine fraîcheur des agrumes qui, au cours de son développement, se charge d’une certaine complexité olfactive sans excès. En tout cas, il a fait mes beaux jours et, même si je m’en suis un peu lassé pour le moment, il est bien probable que je retrouverai l’envie de le porter. Je comprends son succès et il est la preuve que la marque est vraiment très forte avec les notes d’agrumes.
Le flacon original de 2016
Je ne me souviens pas du tout d’avoir senti la version originale de « Fir & Artemisia » mais j’ai bien aimé découvrir ce parfum. « Confort et joie. Ce parfum festif, imprégné de l’esprit de la saison, mêle la douceur du bois de sapin et l’aromatique artemisia au cuir raffiné ». Rond, un peu ambré, épicé, baumé et résineux, ce parfum est parfait pour l’hiver car je le trouve à la fois original et réconfortant. La construction chyprée ne pouvait que me plaire. Il s’ouvre avec les notes à la fois racinaires, amères et cuirées de l’armoise qui n’est jamais agressive car e sens, dès le coeur, un accord ambré qui entoure un patchouli d’excellente qualité qui se pose sur une mousse de chêne à la fois verte et un peu terreuse. C’est une note que j’adore et qui se mêle au sapin baumier. Vraiment, ce parfum m’a séduit beaucoup plus que ce que j’avais pensé au départ. Je me suis fait très plaisir à le porter pour l’essayer et je pourrais tout à fait me l’approprier. Il est à la fois super bien construit et original.
Globalement l’édition hiver 2024 de Jo Malone me plait mais j’ai quand même quelques bémols à la clef. En effet, je trouve dommage que les prix aient autant grimpé. Vraiment le groupe Estée Lauder qui détient la marque a fait flamber le coût d’un flacon notamment, en ce qui concerne Jo Malone, du 30 ml et c’est bien dommage. Ensuite, je trouve toujours un peu triste qu’une marque ne communique pas sur le nom du parfumeur. Je suis toujours content de connaitre les artistes qui ont réalisé des parfums qui me plaisent. Reste que « Orange Bitters » et « Fir & Artemisia » sont une jolie réussite. Il faut aller redécouvrir le premier et vraiment sentir le second. Franchement, c’est un plaisir.
Mes parfums préférés : "Ninfeo Mio"
*Article modifié
Je suis le premier à râler lorsque je vois qu’Annick Goutal est devenu Goutal Paris et que le flaconnage qui faisait l’identité de cette belle maison a été abandonné au profit de celui qui est vendu maintenant et que je trouve plutôt laid. Ceci dit, j’avais peur que les jus aient étés très reformulés et, finalement, en les redécouvrant, je me suis rendu compte que si certains avaient étés très modifiés, d’autres très allégés, la plupart restaient relativement conforme à mes souvenirs, tels « Sables ou encore « Mandragorore Pourpre ». Je n’avais pas senti « Ninfeo Mio » depuis des années aussi ai-je été vraiment agréablement surpris de le redécouvrir au cours de mes pérégrinations parfumées. La marque l’a vraiment préservé et a conservé sa concentration eau de toilette qui lui permet d’être plein de délicatesse et de finesse. Je n’avais pas remis mon nez dedans depuis sil longtemps et c’est presque comme si j’avais fait une nouvelle trouvaille. Il n’existe désormais plus que dans le flacon masculin mais « Ninfeo Mio » peut être porté par toutes et tous, il est intemporel et tout à fait mixte. D’ailleurs il était sorti dans deux flacons différents lorsque Camille Goutal et Isabelle Doyen l’ont lancé en 2010.
Isabelle Doyen et Camille Goutal
« En juin, la nature autour de Rome est splendide. Dans le merveilleux jardin de Ninfa, les allées plantées de cyprès et de lavande longent la rivière Ninfeo. Un grand figuier masque l’accès au pont, le vent chahutant au passage ses branches et leurs figues encore vertes » tels sont les mots de la marque pour décrire ce parfum à la fois hespéridé, un peu boisé et un peu aromatique. Après une envolée de citron Sicile et de Cédrat, l’orange amère, presque confite et la feuille de figuier s’enrichit au coeur d’un extrait de galbanum avant de se poser sur un fond de bois de citronnier. J’aime beaucoup la dualité entre les agrumes en très grande quantité et la feuille de figuier qui, finalement, ne me plait pas beaucoup en général. Ici, elle est comme rafraichie par le citron et « relevée » par l’orange amère. La fraîcheur de « Ninfeo Mio » en fait un peu le pendant boisé et hespéridé de « Un Matin d’Orage » qui est plus fleuri mais dans cet esprit très naturaliste. Je trouve que, même composé bien après le départ de Madame Goutal, il a tout à fait l’ADN de la marque et je suis vraiment heureux qu’il n’ait pas été supprimé du catalogue. L’une de ses facettes est en effet singulière et aurait pu détourner la clientèle de cette création qui est vraiment un bijou.
S’il est, désormais estampillé masculin étant donné que l’univers de la marque reste malgré tout un peu genré, je trouve qu’il est complètement portable par une femme. Il fait partie de la collection classique et n’existe plus, je pense qu’en 100 ml. Il n’est sans doute pas le parfum le plus vendu ni le plus conseillé de Goutal Paris mais je trouve qu’il mérite vraiment d’être redécouvert. C’est une pépite, une de plus. Il est très facile à porter, facile à offrir et en même temps, il a une vraie identité. Je suis un très ancien client de la maison qui s’appelait alors encore Annick Goutal et je le trouve tout à fait dans cet esprit à contre-courant si cher à sa fondatrice. « Ninfeo Mio » défie les modes et reste chic à toutes les époques.
Les deux premiers flacons de "Ninfeo Mio"
Nouveautés Octobre
Il y avait beaucoup de sorties attendues en ce mois d’octobre et je dois dire que, une fois encore, je me suis fait plaisir à faire des essais et à tenter de vous rendre compte de mes découvertes. Je ne m’attendais pas à certains coups de coeur tels « Comme Un Gant » créé par Isabelle Doyen et Camille Goutal pour Voyages Imaginaires, dont je vous ai déjà parlé, car, même si je suis très fan de la marque, sur le papier, il n’était pas fait pour me plaire. Il y a eu aussi des surprises, bonnes ou moins bonnes et des déceptions. Bien sûr, j’ai exploré moins de nouveautés qu’en septembre mais il est de même chaque année. Ceci dit, il y a eu, en ce mois d’octobre, du grain à moudre comme on dit alors je vous emmène sur les traces des lancements grand public ou plus confidentiels.
Pour une fois, j’attendais beaucoup d’un parfum du circuit sélectif car j’avais lu pas mal de choses sur « Venus » créé par Alexandra Monet, Nathalie Lorson et Olivier Cresp pour Nina Ricci. En effet, un travail autour du magnolia m’inspirait beaucoup. « Un mythe est né… Avec Vénus de Nina Ricci, la Maison célèbre l’amour de soi et lance un message essentiel qui parle à toute une génération de femmes: une invitation à ne plus s’oublier, à penser à soi-même, à s’aimer vraiment. Et rayonner plus que jamais. L’eau de parfum Vénus de Nina Ricci est un grand Floral Chypré radiant, révélé par une fleur majestueuse : le Magnolia.Cette fleur rare en parfumerie donne toute sa luminosité et sa sensualité à cette création facettée tel un bijou, dont la signature est magnifiée par une vanille addictive et un patchouli blanc enveloppant ». Je suis donc allé le découvrir dès sa sortie. Il s’ouvre avec des notes de mandarines et de feuilles de magnolia qui nous emmènent sur un coeur de magnolia et de jasmin pour se poser sur un fond de patchouli et de vanille. D’emblée, j’ai pensé à un un néo-chypré dans l’esprit de « Barénia » d’Hermès mais c’est, il faut le dire, une déception. Je me suis retrouvé face à un parfum très sucré, peu évolutif. Je n’ai pas du tout accroché. En revanche, le flacon est vraiment magnifique et qualitatif. Je pense que c’est l’un des plus impressionnants que j’ai vu cette année. Cela, hélas, ne suffit pas. Je passe donc mon tour en ce qui concerne « Venus ».
Pour « Amow », son second parfum, Neil Jacquet a fait appel Margaux Le Paih-Guérin dont je connaissais quelques réalisations notamment pour Borntostandout. Il a également voulu un nouveau flacon que je trouve très joli et qualitatif. Tout comme le premier parfum de la marque, il s’agit d’une concentration extrait et le parfum s’ouvre avec des notes de pêche blanche juteuse, de cerise et de mandora, un agrume issu du croisement de la tangerine et d’un oranger doux. Puis, après une évolution assez longue, vient un coeur très torréfié de noix de pécan, de noisette et d’amande. Le fond, organisé autour d’un accord madeleine, avec des notes de fève tonka, de vanille, de rhum et de bois de gaiac est résolument gourmand. Margaux Le Paih-Guérin a travaillé une gourmandise évolutive et originale. « Dans les teintes mauves du crépuscule, la légende d’Andromède prend forme, une princesse condamnée à être dévorée par un monstre marin pour les fautes de sa mère. Persée, héros venu des étoiles, surgit tel un sauveur et, captivé par sa beauté, la libère de son funeste destin. Leur rencontre embrase le ciel d’une romance céleste aussi captivante que les étoiles elles-mêmes. Amow évoque ce mythe à travers des notes gourmandes de pêche et de cerise, enrichies par un crumble croustillant et des éclats de noix de pécan salée. En fond, les douceurs de madeleine se mêlent à la fève tonka, la vanille ainsi qu’un souffle de rhum, créant une fragrance à la fois addictive et intemporelle ». Avec son côté déroutant, sucré et salé à la fois, ce parfum m’a beaucoup plu et je me suis fait plaisir à le découvrir. Il ne sera peut-être pas pour moi mais force m’est de constater qu’il est redoutablement addictif et je suis content de l’avoir découvert.
Un nouveau parfum chez Liquides Imaginaires est toujours un évènement et j’avais très envie de découvrir « Lunatique », créé par Vincent Ricord dont j’entends, décidément, de plus en plus parler. Il fait partie de La Alchemical Trilogy et je crois qu’il représente le cuivre qui vient après l’argent et l’or. Le départ est franchement étonnant avec des notes de genièvre, de poivre de sichuan, de tagette, de baies roses et de néroli. Lorsque je l’ai vaporisé, j’ai été vraiment dérouté, presque même dérangé par le côté inédit de ce que je sentais. Puis vient un coeur d’encens, de cassis aciulé, d’iris et de cyclamen qui continue à donner quelque chose de métallique et un peu poussiéreux. Le fond de cuir, de bois de santal, de muscs, de oud, de vétiver, d’ambre gris et de fève tonka est quand même plus consensuel mais que de rebondissements pour en arriver là ! « Lunatique vous invite à embrasser vos aspects les plus sombres et cachés, révélant les profondeurs de votre personnalité. Ce parfum unique est un voyage de contrastes, des notes de tête lumineuses aux nuances profondes et mystérieuses. Il s'ouvre sur un mélange rafraîchissant de genièvre, de poire et du goût audacieux du poivre du Sichuan, qui élève vos sens et vous prépare à l'aventure à venir. Le cœur révèle des notes inattendues d'iris, de carotte et de néroli, mêlant une douce douceur florale à une chaleur terreuse. Au fur et à mesure que le parfum persiste, il se transforme en une base sensuelle de cuir, de oud et d'ambre gris, soulignée par un riche bois de santal et un murmure de vétiver. Le résultat est un parfum magnétique et énigmatique qui joue avec la lumière et le mystère, à l'image des aspects cachés de votre âme ». J’avoue qu’il m’a un peu laissé dubitatif. Il est inclassable, très évolutif et je ne sais pas quel sera son public. Ce n’est pas un parfum pour moi. Sa concentration a l’air de provoquer une très longue tenue et j’aurais peur d’en avoir un peu assez au cours de la journée. Il n’en demeure pas moins très étonnant et je ne peux pas dire qu’il me déplaise. Je dirais plutôt qu’il m’intrigue.
Avec « Glow », que l'on peut traduire par "briller", le premier extrait de parfum de Akro, Olivier Cresp me surprend quand même un peu moins. Je l’avais découvert au printemps mais j’étais tellement séduit par « Infuse » que je l’avais oublié. « Glow, le parfum « addiction à la fête » d'Akro. La lumière des flashs, la vibration des basses dans le corps, le brouhaha des voies qui s’envolent. La sensation d’être une star, admirée, désirée, adulée. L'opportunité de s’oublier le temps d’une nuit et de rayonner un court instant. Glow est un cri d’amour pour la fête et les soirées. C’est la capture d’un instant impalpable de confiance durant lequel tout est possible ». C’est un ambré néo-classique si j’ose m’exprimer ainsi car il est à la fois très conventionnel par certains aspects tout en gardant la signature très contemporaine du parfumeur. Après une envolée très fraîche de poivre rose, vient un coeur fleuri, élégant et profond de rose puis un fond composé de benjoin, d’encens et de vanille. Dit comme ça, il semble peut-être un peu convenu et pas forcément intéressant pourtant, il m’a bien plu. On manque un peu, maintenant, sur le marché, de ces ambrés fleuris qui seraient les héritiers d’un « Shalimar » ou d’un « Habit Rouge » et « Glow » est peut-être de ceux-ci car il n’a pas le côté vintage de « Ferveur » que j’avais beaucoup aimé chez Le Galion. Il est résolument moderne et très très bien construit. Olivier Cresp est un orfèvre et il sait ce qu’il fait. C’est le moins que l’on puisse dire.
Avec « Buio », qu’il a créé pour sa maison Meo Fusciuni, Giuseppe Imprezzabile me fait vraiment plaisir. J’aime beaucoup la note de bois de cade et elle est présente, en majeur dans ce parfum sombre, sec et fumé. Une concentration extrait pour un parfum à l’évolution longue, parfois un peu déroutante mais aux notes de fond absolument magnifiques, en tout cas dans mes goûts, entre un versant cuir, un autre bois sec et un troisième fumé. Le parfumeur en explique ainsi l’inspiration : « Buio Extrait de Parfum a été conçu, créé et assemblé en écoutant à chaque étape les albums Empty de Nils Frahm et Ende Neu d'Einstürzende Neubauten. Il y avait des jours où mon esprit vagabondait, flottant lentement à travers les pensées et les souvenirs, pour ensuite être englouti par le temps et devenir prisonnier des événements. Le premier accord de ce parfum est né de la rencontre de l'huile de cade, des graines de carotte, d'un encens enveloppant, de Cashmeran et de Suederal. Dans ce mélange est né le courage de transformer le cours de mes pensées, de mon existence, de ma vie. Pendant ce temps, alors que ce parfum prenait forme, je lisais des textes sur le Shinto et j'écoutais Nils Frahm. Chaque matière première a été pesée avec le soin nécessaire, comme s'il s'agissait de mots vitaux à choisir pour raconter quelque chose de significatif de ma vie à quelqu'un ; c'était mon histoire, mon chemin, enveloppé d'obscurité ». Le bois de cade est associé à la graine de carotte, à l’encens, à l’osmanthus pour le côté cuir, à la pivoine que je ne sens pas vraiment, au ciste, au vétiver, patchouli, au cèdre et au santal enveloppé par un accord ambre, muscs et cuir. Le cashmeran, en traces lui donne un côté vraiment addictif. Pour moi, il est du niveau, et je pèse mes mots, de « Cuir » de Mona di Orio que j’ai tant porté et tant aimé. Ce sombre parfum sera, c’est certain, dans mon top 20 de cette année.

Un départ de caramome et de pétales de rose, un coeur de graine de carotte, de cèdre et de santal qui évoluent vers un fond de papyrus, de vétiver et de silk musc, tel est « Desert Dawn », la nouvelle création de Jérôme Épinette pour Byredo. « Célébrant la puissance des contrastes naturels, l'intensité olfactive de Desert Dawn puise son équilibre dans la fraîcheur du renouveau. Le parfum s'ouvre sur la douceur épicée de la cardamome associée à des notes boisées évoquant l'aridité du désert. La chaleur envoûtante du bois de santal et de cèdre compose un cœur puissant. Le final séduisant, marqué par la richesse fumée du vétiver et du musc soyeux, est vivifié par la fraîcheur et la pureté du papyrus. Cette fragrance, à la fois sèche et enveloppante, incarne la chaleur du soleil levant ». J’avais beaucoup lu sur cette sortie car nous avons mis du temps à avoir accès à un testeur et je m’étais fait une idée du parfum. J’avoue que j’en attendais beaucoup car la pyramide me semblait originale. J’ai été un peu déçu je dois bien le dire. « Desert Dawn » m’a assez plu mais j’ai eu l’impression de l’avoir déjà senti des dizaines de fois. En tout cas, il n’y a pas vraiment de nouveau dans tout ça et j’ai du oublier l’idée d’un Byredo enfin inédit. C’est un peu comme si « Désert Dawn » était un composite des plusieurs autres créations de la marque. Pour résumer, je l’ai trouvé assez joli mais sans plus. Je pense que je l’aurai vite oublié.

J’attendais vraiment beaucoup de « Indian Leather », le nouveau parfum de la collection Cuirs Nomades de Memo créé par Juliette Karagueuzoglou dont j’aime énormément le travail. Le parfum s’ouvre avec de très très belles notes de cypriol qui nous emmènent sur un coeur magnifique de rose et de jasmin puis sur un fond de baie de vanille, d’essence de patchouli, de styrax, de oud et d’encens et là, j’adhère moins. « Ce parfum célèbre une terre majestueuse, à la fois extravagante et délicate, animée par la présence d'animaux sacrés, la tradition des offrandes et l'aura du Taj Mahal comme symbole de l'amour absolu ». Si j’aime l’inspiration indienne de ce cuir oriental et original, le développement jusqu’aux notes de coeur et un peu l’évolution vers le fond, la toute fin ne matche pas du tout avec ma peau. En effet, il y a quelque chose qui me dérange, presque un côté sueur. En tout cas, je ne suis pas client, je dois bien le dire ou alors sur les vêtements. Je ne vais pas tourner autour : « Indian Leather » est une déception non pas parce que je ne le trouve pas bien construit et bien réalisé mais, hélas, car il ne fonctionne pas du tout avec ma peau. J’avais vraiment envie de le découvrir et, en résumé, je dirais que c’est un très beau parfum mais qu’il n’est pas pour moi. Le côté styrax et oud se développe trop sur moi et cela m’entête.

« Staelios de Pierre Guillaume Paris est une interprétation fascinante de la puissance du soleil, capturée dans un chef-d'œuvre olfactif cuiré-boisé. Ce parfum unisexe d'exception vous emmène dans un voyage sensuel où la chaleur de la Méditerranée rencontre la sophistication des matières nobles. Imaginez-vous debout sur un yacht luxueux par une chaude journée d'été, entouré de bois précieux et de cuirs les plus fins. Staelios s'ouvre sur une subtile fraîcheur rappelant une douce brise marine. Cette fraîcheur est rapidement enveloppée par une note chaleureuse et cuirée qui évoque le cuir réchauffé par le soleil. Au cœur du parfum, un mélange harmonieux de notes boisées se dévoile. Le bois de cèdre noble se fusionne avec le bois de santal crémeux, donnant au parfum une texture veloutée. Une touche de patchouli ajoute une profondeur terreuse, rappelant la terre séchée au soleil du paysage méditerranéen. La base de Staelios est comme une chaleureuse étreinte du soleil méditerranéen. Ici, toute la puissance des notes cuirées se déploie, soutenues par une pointe d'ambre et de musc. Cette combinaison crée une chaleur sensuelle, presque animale, qui rappelle la chaleur intense d'une journée d’été » tels sont les mots que j’ai pu glaner et qui décrivent l’inspiration de « Staelios », le nouveau parfum créé par Pierre Guillaume à l’occasion des vingt ans de sa maison de parfums. Je l’ai découvert légèrement avant sa sortie car je crois qu’il sera lancé officiellement le 2 novembre. C’est pourquoi je le joins à ces nouveautés d’octobre. Il s’agit d’un cuir de Russie très moderne qui plaira peut-être plus aux hommes qu’aux femmes. Il s’ouvre sur des notes de cubède, un poivre originaire d’Asie du sud-est et de davana puis vient un coeur construit autour de la violette et de notes boisées. En fin d’évolution, le parfum se pose sur un accord reconstitué de cuir de Russie. J’avoue que ce parfum m’a laissé dubitatif. Tout d’abord, je le trouve vraiment très synthétique et une note métallique omniprésente m’agace un peu. Pierre Guillaume a voulu un parfum très masculin et chic qui pourrait aussi être porté par les femmes. Je vais être clair, il ne m’a pas vraiment plu. Je l’ai trouvé un peu quelconque et j’avais pensé qu’à l’occasion des vingt ans de sa maison, le parfumeur allait sortir comme un seul homme des sentiers battus. Je regrette qu’il n’ait pas été plus audacieux. En revanche, j’aime beaucoup le flacon, élégant, coloré et plein d’attraits.

Le nouveau parfum de Maison Violet réalisé par Nathalie Lorson s’éloigne un peu de l’esprit « héritage » des premiers opus. Il s’appelle « Pour Rêver » et ne pouvait que m’interpeller. Il s’agit d’un travail gourmand, réconfortant poudré et irisé de bien belle facture avec un départ de marron glacé, de noisette et de maté très très addictif, un coeur construit autour d’un absolu de cacao très poudré et renforcé par un superbe iris pallida, le tout enveloppé de notes de myrrhe. Le fond, dominé par un extrait de rhum, des notes à la fois gourmandes et fumée de bois de gaïac parsemé de traces d’encens est du plus bel effet. « Pour Rêver enveloppe d’un cocon de douceur et d’intensité. Son accord gourmand et addictif nous invite à nous perdre dans son sillage. Laissez vous séduire par son accord gourmand délicieux et addictive de noisette et de marron glacé. Ses accents riches et profonds de chocolat et de rhum ajoutant intensité et caractère aux facettes gourmandes. Son bois de Gaïac fumé et résineux, apportant profondeur boisée et mystérieuse à la composition. Et surtout, sa vanille crémeuse et douce qui enrobe le tout d’une chaleur ronde et apaisante. Pour Rêver est une véritable évasion olfactive, un parfum qui invite à la rêverie et au bien-être, parfait pour ceux qui cherchent à s'entourer d'un cocon de douceur et de sensualité ». C’est un parfum facile, très efficace, élégant et très agréable à porter avec, quand même une jolie pointe de singularité. Fidèle à l’esprit de la marque qui pourrait avoir comme devise « et du chic avant toute chose » . Il y a tout de même un petit bémol : j’avoue ne pas être fou du changement de flaconnage. Je comprends le parti pris de l’éco-responsabilité et du minimalisme mais je regrette un peu le côté désuet qui faisait l’identité de la marque.
Étant amateur de « Rouge Smoking » l’eau de parfum, j’attendais beaucoup de l’extrait travaillé pour BDK par Amélie Bourgeois qui avait signé l’original et Margaux Le Paih Guérin. Je l’ai senti dès sa sortie à l’occasion de l’ouverture des nouvelles Galeries Lafayette de Bron (69) et je l’ai même posé sur ma peau. « Rouge Smoking Extrait, parfum intensément sensuel et envoûtant, puise son inspiration dans l’effervescence du quartier de Pigalle à Paris. Concentré à 30%, il réinvente l'accord de cerise, d'ambre et de fève tonka avec profondeur et intensité. Cet Extrait incarne une passion vibrante, où audace et élégance se rencontrent ». La pyramide est complexe avecune envolée d’essence de mandarine rouge, de cerise Napoléon, d’amande, de baie rose d’Inde, de bergamote italienne et d’élémi, un coeur construit avec un accord lait que ne sens pas du tout, un absolu de fève tonka très qualitative et qui, associée au baume du Pérou et au labdanum, se fait cuiré. Le fond, tout aussi complexe, est dominé par le safran et une essence de oud de Thaïlande, de bois ambrés, de vanille noire absolue, de rhum de la Martinique, de patchouli d’Indonésie, de benjoin de Siam résinoïde, de cypriol indien et d’ambroxan. Avec tout cela, j’imaginais quelque chose de luxueux et complexe. Franchement, malgré la concentration et les complications de la pyramide, je dirais que je suis plutôt déçu. Le côté cerise disparait pour laisser apparaitre un cuir safran un peu « déjà senti ». Le parfum est joli mais, à mon sens, il n’est ni surprenant, ni novateur. Je ne pense d’ailleurs pas qu’il plaira aux amateurs de l’eau de parfum. C’est un parti pris que je respecte mais il m’a laissé sur ma faim malgré la beauté du flacon et l’élégance de l’envolée.
Ces dernières années, l’un des gros succès de la parfumerie indépendante est sans conteste « Bois Impérial » créé par Quentin Bisch pour Essential Parfums. La marque a décidé de demander au parfumeur de se remettre à travailler sur le sujet pour créer un extrait de parfum dérivé de cette fragrance. Décidément, c’est la tendance de cette rentrée ! « Explorez le côté nocturne de Bois Impérial. Travaillé comme une quintessence de la fragrance originelle, Bois Impérial Extrait vous emmène vers le côté nocturne du parfum. Plus sombre, plus riche, plus fort, il se révèle sous une nouvelle sensualité et une rare intensité avec le double de la concentration de l’Eau de Parfum. Un absolu de séduction ». Quentin Bisch a donc retravaillé les notes et la concentration pour lancer ce parfum qui est, c’est vrai, seulement un « Bois Impérial plus concentré. J’en retrouve chaque note. Autour du bois d’akigala, on retrouve donc des notes très poivrées, un coeur de rose et un fond de sapin baumier, de cèdre et de ciste. Le parfum est très puissant et agréable mais je ne comprenais pas vraiment le concept. « Bois Impérial » en eau de parfum avait déjà du sillage et une tenue atomique alors pourquoi forcer le trait ? Enfin, l’objet est joli, la fragrance aussi. Cela ne suffirait-il pas ? Il m’a fallu vraiment le mettre sur peau pour découvrir que le fond est différent, plus rond et plus cuiré. C’est une jolie variante. En tout cas, « Bois Impérial » l’extrait est sorti et je suis quand même content de l’avoir découvert.

Pour conclure, je dirais que le mois d’octobre, s’il n’a pas été aussi chargé en sorties que septembre, est quand même riche. Il y a eu de beaux lancements, d’autres que j’ai trouvé moins intéressants mais il est toujours passionnant de découvrir et d’essayer. En tout cas, cela vaut le coup de se rendre en parfumerie. Je ne sais pas ce que novembre et décembre nos réserveront mais je suis presque sûr de mon Top 20 qui paraitra début décembre.
"El" et "Ella", un duo de parfums d'exception chez Arquiste
Suite à la venue de Carlos Huber, fondateur de la marque Arquiste, à Lyon, nous avons appris la réédition de « El » et « Ella », deux créations de la marque, créées par Rodrigo Flores-Roux en 2016, qui avaient étés retirés du catalogue il y a quelques temps déjà pour une reformulation provoqué par l’interdiction de certaines molécules par l’IFRA. Elles avaient étés inspiré par l’amour éprouvé par les parents de Carlos Huber et, entre élégance, complémentarité et oppositions, ils s’éloignent, se rejoignent comme les humains qui se connaissent tellement qu’ils sont en osmose. Je ne les connaissaient pas donc je suis allé les découvrir sans aucun à-priori. J’ai donc eu envie de vous en parler et de décrypter un peu mes impressions. Je vous emmène donc au Mexique en 1978 dans les milieux festifs que je ne connais pas mais que je découvre oflactivement par le truchement de ces deux compositions.
J’ai commencé par « El » qui est, à mon sens, une fougère animale enfermée dans un flacon noir et supposée être la quintessence du raffinement masculin avec une pointe d’excentricité. . La marque en décrit ainsi l’inspiration : « Décembre 1978, Armando's Le Club, Acapulco, Mexique. Soirée branchée à Acapulco. La fête bat son plein sur la piste. Dans le feu de l'action, il lui sourit de manière appuyée, et du regard, l'invite à sortir sur la plage pour un bain de minuit. Il déboutonne sa chemise, découvrant ainsi sa peau bronzée émanant l'odeur virile de son Eau de Cologne. Chargée de patchouli, mousse de chêne et d'élégantes notes boisées, cet arôme révèle une forte présence masculine au soleil, intensifiée par l'excitation de la nuit ». L’envolée de laurier de Grèce qui se mêle au côté très aromatique de la sauge sclarée, du romarin du Maroc est soutenu par le géranium d’Égypte. Le coeur de cardamome, de feuille de cannelier, d’ea de brou et de miel de sarrasin est, il faut bien le dire, pas très facile, très animal et cela se confirme avec ce fond Chypré de patchouli associé à un magnifique absolu de mousse de chêne enveloppé de castoréum, de civette contrebalancé par une recréation de l’accord fougère. Personnellement, et même si je le trouve qualitatif et très réussi, je sais que « El » n’est absolument pas pour moi. C’est un parfum certes élégant mais segmentant et particulièrement original. Il faut impérativement l’essayer et l’achat à l’aveugle est plus que jamais à proscrire. Il est audacieux et s’adresse aux hommes et pourquoi pas aux femmes, qui transgressent les règles et les conventions. Ce n’est pas un masculin sage et il ne faut pas avoir que ce parfum. Il est assez hors norme.
Le versant féminin est déjà plus à mon goût. C’est un grand chypré enfermé dans un magnifique flacon en porcelaine blanche et je me retrouve tout à fait au coeur de tout ce que j’aime. « Décembre 1978, Armando's Le Club, Acapulco, Mexique. C'est une nuit de disco enivrante de champagne et décolletés plongeants. Les lumières scintillent et tout le monde s'embrasse, mais parmi la foule, c'est elle qui attire l’attention. Elle bouge et se déplace comme une panthère, sa peau miellée dégage un magnétisme voluptueux que seul un parfum chypré peut offrir. Elle trouve sa proie sur la piste, et grâce à son instinct animal, elle le suit, jusque dehors, sur la plage de sable doré, sous une lune argentée ». Le départ est parfaitement « ouah » avec la fleur de coroupita venue d’amazonie et dont je n’identifie que partiellement les notes, la racine d’angélique, à la fois suave, croquante et terreuse et l’essence de graine de carotte qui donne une profondeur dès la vaporisation. Le coeur est typique du chypre floral avec un duo de rose de Turquie et d’absolu de jasmin puis vient ce fond absolument magique d’ambre gris, de civette, de mousse de chêne, de vétiver et de patchouli avec des accents tabac. On ne va pas se mentir, c’est tout ce que j’aime. C’est un grand féminin mais je pourrais tout à fait le porter. Il est, pour moi, dans la tradition de « Mitsouko » de Guerlain, de « Bourrasque » du Galion ou d’autres grands parfums. Il est opulent, magnifique mais, là encore, il faut l’humeur. « Ella », c’est son nom, n’est pas un parfum facile à porter tous les jours. C’est une création d’exception. Très franchement, je suis sous le charme et je suis content qu’il soit revenu sur le marché.
« El » et « Ella » sont vraiment deux compositions très intéressantes, oscillant sans arrêt entre esprit rétro et twists contemporains. Carlos Huber les a inspirés et Rodrigo Flores-Roux les a réalisés avec tout le talent qu’on lui connait. Ce sont de grands parfums, de grands classiques. Il sont à découvrir absolument. Il faut aller y mettre votre nez si vous croisez la route de la maison Arquiste. Peut-être craquerez-vous pour l’un d’entre-eux.