Karine Chevallier, un univers tout en finesse
J’ai découvert le travail de Karine Chevallier, qui a été lancée par Arts et Parfums et Michel Roudnitska, par « Bois d’Enfant » qu’elle a créé pour Mohamed Rebatchi que je trouve vraiment très joli. Cela m’a donné envie de me pencher sur son parcours de parfumeure. J’ai découvert qu’elle avait composé plusieurs fragrances que je connais et que j’aime bien. Cela m’a donné envie de lui consacrer un portrait parfumé. J’ai donc redécouvert ces créations et je vais essayer de vous en parler de mon mieux. Comme d’habitude, j’en ai sélectionné quatre qui sont, je pense, très différents les uns des autres mais avec toujours la délicatesse pour credo. En tout cas, c’est une auteure de parfums à suivre car je trouve que sa signature est très agréable, originale et pleine de finesse.
Le tout premier parfum dont je vais parler est bien évidemment « Bois d’Enfants » que Karine Chevallier a créé en 2018 pour Maison Rebatchi et qui est, je crois, la création que porte son fondateur. « Inspiré d’un souvenir d’enfance de Mohamed Rebatchi, ce parfum dessine dans l’esprit de celui ou celle qui le découvre une image impressionniste. L’évocation d’une promenade en Vendée, dans la forêt de Saint-Hilaire de Riez, où Mohamed Rebatchi, enfant, passait tous ses étés. À l’ombre de la forêt, la fraîcheur salée épicée de l’essence de baies roses, est soulevée par une touche d’essence de rose qui finit par se confondre avec le sombre absolue de rose de mai. Dans un coup de vent, la clarté revient portée par une note de freesia qui répond à la bergamote en tête. L’iris trace une verticale florale boisée vers la note des pins maritimes, balayés par la brise, gorgés de sève chauffée par le soleil prenant tour à tour des accents d’encens et de fir balsam ». Le parfum est une succession de petites facettes qui se mêlent et s’entremêlent tout au long de son évolution. Il s’ouvre sur un départ de bergamote, de poivre rose et d’essence de rose qui se renforce avec un coeur de rose centifolia, de freesia, d’iris, d’encens et de pin puis se pose sur un fond de santal, de sapin baumier, de vanille, de muscs et même de framboise. Il en résulte un parfum très délicat et addictif que je n’ai vraiment découvert qu’en le posant sur ma peau. En tout cas, il est vraiment réussi et singulier. Il m’a donné envie d’en sentir plus…
Dans la collection Nuit à Bali de Une Nuit Nomade, mon parfum préféré est « Fleur des Fleurs » créé par Karine Chevallier en 2015. « Hommage aux fleurs exotiques, Fleur des Fleurs est un parfum solaire et féminin à l'extrême. Il s'envole sur une note de safran tout en finesse, qui vient sublimer les accents fruités du jasmin. L'ylang-ylang déploie ses facettes plus suaves, soutenues par le charme lacté de la tubéreuse. Le fond joue de la vanille et du santal, mais se fait surtout poudré. Une composition qui marie l'élégance avec la sensualité ». Bon, cela ne surprendra personne car je suis en plein dans les notes que j’aime. Après un départ très fugace de bergamote et de pamplemousse avec une pointe de safran, vient ce très beau coeur floral de jasmin, d’ylang-ylang, de tubéreuse et de glycine qui se pose sur un socle baumé de benjoin arrondi par des notes ambrées et vanillées ainsi que par des touches de bois de santal et renforcé par un versant oud tout en finesse. Voilà une création tout à fait réjouissante et voire même jubilatoire pour moi. C’est un floral solaire et ambré très lumineux, un peu exotique et je le trouve comme une invitation au voyage vers des îles lointaines et paradisiaques. Il s’agit plutôt d’un féminin mais, finalement, je pourrais tout à fait le porter. Je le trouve vraiment agréable et facile à s’approprier.
Je n’avais pas tellement accroché avec Gallivant lorsque j’ai découvert la marque mais j’avais quand même bien aimé « London » créé par Karine Chevallier en 2017. « Pluie, brillance, une touche de courage, une touche de glamour. C’est un parfum de cuir floral. Avec une tête verte aqueuse, de feuilles de concombre et de violette. Un cœur floral, avec de l'absolue de Rose de Mai, de l'huile de rose et de la racine d'iris. Et des notes de fond de daim, de cuir, de bois de santal, de patchouli et de bois de cèdre ». C’est un cuir doux, très londonien avec plein d’accents à la fois très désuets et ultra modernes. Après une envolée de concombre très fraîche et un peu « humide » avec un côté aquatique et poudré à la fois grâce à la feuille de violette et à la racine d’iris vient un coeur construit sur un absolu de rose de main renforcé par un accord suède puis un fond plus sombre de cuir de Russie. Je trouve « London » un peu clair obscur. Il se loge sur la peau et tient très bien. Je dois dire que, là encore, c’est le parfum de la marque que j’ai préféré et de loin. Il est le seul que je pourrais porter. Je le réessayerai bien car j’en garde un excellent souvenir. En tout cas, pour moi, c’est une réussite. Il exhale une élégance à la fois très contemporaine et dans la plus pure tradition de la parfumerie comme la ville dont il est inspiré.
« J.R - J'ai l'air de ce que je suis, être soi-même sans artifice, en dehors de la norme de notre époque. Si l'on ose s'approcher de lui, ce parfum dévoilera, seulement au cours d'un aparté à l'abri des regards, son puissant sillage boisé et musqué. Il nous confiera à la fois son énergie et sa fraîcheur, révélée par le pamplemousse, mais aussi ce qu'il cache en son cœur, aux effluves florales de l'iris et du lilas. Le tout sur un fond dévoilant sa retenue légèrement poudrée, aux notes de cèdre et de musc ». Créé en 2020 par Karine Chevallier pour D’Orsay, « J.R. J’ai L’Air De Ce Que Je Suis » est, encore une fois le parfum qui me plait le plus dans la marque et pour cause. C’est un floral très musqué et délicat comme j’aime. Il s’ouvre sur des notes de bergamote, de clémentine, de pamplemousse adoucies par la cardamome qui cède très vite sa place à un coeur très floral et légèrement poudré de lilas et d’iris avant de s’enrichir des notes de cèdre, d’héliotrope, de narcisse, de muscs et de santal. C’est un parfum à la fois frais et tout en nuances. Je le trouve tout à fait idéal pour l’été et je pourrais tout à fait me l’approprier. En tout cas, c’est une délicieuse création qui, je trouve, est trop peu connue. En tout cas, pour moi, il coche toutes les cases pour me plaire.
Le travail de Karine Chevallier me plait. Il n’est ni tapageur ni trop difficile d’accès et pourtant il garde une belle identité. J’ai hâte de connaitre d’autres créations mais je me dis qua chacune de ces quatre-là me plaisent ce qui est quand même assez rare. Je pourrais tous les porter et il n’est pas dit que je n’en choisisse pas un ou deux dans les mois à venir notamment pour l’été prochain.
La Petite Madeleine, une très jolie découverte
Article complètement réécrit
Lorsque je découvre une nouvelle maison dont j’apprécie à la fois la démarche éthique et artistique, dont les fragrances m’interpellent, en bon passionné, je suis très content. En week-end à Dijon, j’avais, comme à chaque fois que je suis dans cette ville, envie d’aller saluer Nathalie des Ateliers du Parfumeur, une fort belle boutique toute proche du centre historique et qui vit, depuis quelques mois, un renouveau. Je dois dire que j’y fais toujours des trouvailles et cette fois encore, je n’ai pas été déçu. Non seulement, l’accueil est top mais en plus, cette boutique, un peu figée dans le temps, se modernise, s’ouvre à d’autres marques. C’est le cas de La Petite Madeleine, la toute récente maison fondée par Guillaume Dufay. C’est une volonté à la fois créative et éthique qui l’a animé et je ne peux que souscrire. Il décrit ainsi sa démarche : « C’est l’histoire d’un profond désir de créer et de le faire différemment. C’est une création optimiste rassemblant parfumeurs et parfumeuses de renom, matières premières d’exception, innovation et respect du vivant. C’est un poème de matières vertueuses. Liège, verre allégé, poudre de coquillages, alcool de betteraves biologiques, fibres de papiers issues de forêts durables et encres végétales composent cette histoire inédite. C’est une odyssée des petits pas, où l’essentiel des protagonistes évoluent à quelques dizaines de kilomètres les uns des autres. La Petite Madeleine, c’est tout ça à la fois et bien plus encore. Humblement, ma volonté était de valoriser les différents métiers et savoir-faire de notre territoire. Chacun apportant son expertise et une pierre à l’édifice de nos histoires olfactives. C’est un développement authentique que nous souhaitons remettre au gout du jour. En portant au quotidien nos eaux de parfum, vous contribuez à tout cela ». Dès que j’ai senti le premier parfum, je me suis dit que j’allais aimer et je me suis laissé embarqué.
Tout d’abord, je veux dire que j’aime l’idée d’une maison éco-responsable, généreuse et qui remet les créateurs au centre de leur travail en citant leur nom sur le packaging et sur le site internet. Je trouve que les artistes doivent être nommés et je suis toujours très content quand je sais qui a inventé un jus que j’aime. Ensuite, j’ai trouvé le packaging très épuré et, en fin de compte, vraiment attractif et doté d’une belle esthétique. Ensuite, il y a eu les parfums. Ils sont à l’image de la marque, une belle matière première mise en avant, mise même en valeur au coeur d’une composition élégantissime ! Je suis assez dithyrambique mais il est vrai que j’ai un coup de coeur global pour cette très jolie maison qui, je trouve, apporte vraiment quelque chose de nouveau dans le paysage parfumé. J’ai eu tout de suite envie d’en parler. Je vous emmène donc au coeur de mon ressenti après avoir senti les cinq eaux de parfum toutes déclinées en savons.
Philippine Courtière s’y entend en rose puisqu’elle a créé, en binôme avec Camille Goutal, le « successfull » et terriblement chic Rose Pompon pour Goutal Paris et il m’a semblé évident qu’elle ait traité le sujet avec « sous le Silence de la Rose », un parfum complètement inédit pour moi. En effet, je ne suis pas toujours très attiré par les solinotes mettant la reine des fleurs en avant mais là, dès l’ouverture « croquante » et cassis, je me suis laissé porter et j’ai adoré la fraîcheur et la délicatesse qui qui s’est complètement confirmée avec un coeur de rose tout en transparence et en légèreté et un fond discrètement boisé. L’inspiration en est ainsi décrite : « Une silhouette élégante, simple et généreuse, rappelant les traits du savon parfumé. Une fragrance fraîche, florale, aux accents rosés délicats où le vert épineux sait garder le secret. Une fragrance ne demandant qu’à voyager » et je trouve que tout est dit, car il s’agit-là d’une vraie rose chic et facile à aborder, parfaitement portable par un homme comme par une femme. En résumé, cette première découverte est un plaisir à respirer.
Dire que j’aime le travail de Nicolas Bonneville est un euphémisme et d’ailleurs je lui consacrerai bientôt un article. Je suis un inconditionnel de « Bô Haras » qu’il a composé pour « La Manufacture » et je brûle de découvrir « Rose Griotte » lorsque je ferai ma revue de la maison Les Parfums de Rosine. Pour La Petite Madeleine, il s’est penché sur le vétiver : « Une silhouette élégante, simple et généreuse, rappelant les traits du savon parfumé. Une fragrance lumineuse, dense, aux vibrations chaudes. Un jus harmonieux que l’on raconte sur soi ». J’ai un peu tendance à trouver les parfums dans lesquels le vétiver est travaillé en majeur un peu classique, un peu « déjà senti » et ce n’est pas le cas avec « Frisson de Vétiver ». En effet, le départ doux amer de pamplemousse rose me séduit dès la vaporisation et le vétiver, d’une très belle qualité me semble-t’il, est présent dès les notes de coeur et la fragrance se pose sur un fond de cèdre qui lui garde une certaine fraîcheur. Je l’ai vraiment beaucoup aimé. Il est singulier tout en restant très facile à porter. J’aime beaucoup la dualité entre le côté racinaire du vétiver et celui, un peu amer, du pamplemousse. C’est un parfum qui plaira peut-être plus aux hommes mais je crois qu’il ne faut présumer de rien car il dégage un chic fou et vraiment il pourrait plaire à celles et ceux qui cherchent un vétiver un peu original.
On ne présente plus Fabrice Pellegrin qui a inventé tellement de jus que beaucoup d’entre-nous ont porté notamment pour Diptyque. Je citerai, bien évidemment, pour cette marque, « Florabellio » que j’ai tellement porté mais il y en a eu plein d’autres. Je me souviens d’un très beau chypré pour Penhaligon’s par exemple. Pour La Petite Madeleine, il s’est collé à créer un parfum autour du néroli et de la fleur d’oranger. « Néroli des Lunes » n’est pas vraiment ce que je préfère car il s’éloigne de mes goûts mais je reconnais que, dans le style, il est quand même un peu sur le dessus de panier : « Une silhouette élégante, simple et généreuse, rappelant les traits du savon parfumé. Une fragrance enveloppante, réjouissante, pleine de générosité . À la rencontre de la douce amertume de la fleur d’oranger et des notes ambrées ». Avec un départ de fleur d’oranger qui s’enrichit d’un néroli un peu doux au coeur et d’un fond ambré, il ravira les amateurs car il est particulièrement bien construit. J’ai beaucoup aimé sa fraîcheur et son style simple sans jamais être simpliste. Je dois dire que je commence peut-être à me rapprocher de la fleur d’oranger car il y en a eu plusieurs cette année qui m’ont attiré. Service à suivre !
Je ne connaissais pas la travail de Julien Plos mais j’ai un goût certain pour la bergamote et je trouve qu’il l’a vraiment imaginée de manière à la fois tendre et harmonieuse dans « Pluie de Bergamote » : « Une silhouette élégante, simple et généreuse, rappelant les traits du savon parfumé. Une fragrance fraîche où les facettes de la bergamote sont explorées. Un parfum dévoilant une peau agrume dans l’éveil marin. Une addiction au soleil sombre de l’hespéridé ». Avec un départ un peu singulier de maté et la bergamote qui n’arrive qu’en coeur avant de se poser sur le fond très doux de bois de santal, ce parfum m’a interpellé par son originalité et pourtant son apparente simplicité. Jamais convenu, « Pluie de Bergamote » s’éloigne tout de même, surtout grâce au côté lacté du bois de santal, de ce que je connais dans les autres solinotes et il m’a surpris voire même bien plu. Je pourrais tout à fait porter ce parfum car il garde la douceur de la bergamote sans être trop acidulé mais il dégage pourtant une grande fraîcheur. J’ai un coup de coeur peut-être encore plus tranché dans la marque mais j’ai quand même bien aimé celui-ci. Je pense qu’il plaira aux amateurs d’hespéridés qui sortent un peu des sentiers battus.
"Une silhouette élégante, simple et généreuse, rappelant les traits du savon parfumé. Une fragrance solaire, envoûtante où nous nous laissons bercer par le sillage de l’iris. Une fragrance fraîche, irisée qui emmène notre cœur dans un sous-bois de vétiver". Comme par hasard, « Nue d’Iris » a été créé par Marie Salamagne dont j’aime énormément le travail et notamment sa collaboration à « Rose Milano » pour la collection Armani Privé mais également, bien évidemment, « Tuberose Angelica » qu’elle a inventé pour Jo Malone London et que je porte beaucoup. Plus récemment, j’avais bien aimé aussi « Constantinople » sorti l’an dernier chez l’Artisan Parfumeur. Pour La Petite Madeleine, elle a développé avec brio un iris d’une très belle qualité avec un départ de mandarine et un fond de vétiver et c’est, sans trop de surprise, mon coup de coeur dans la marque. Un iris profond, intense, poudré mais pas trop, floral et racinaire à la fois, très brut, très « ethnique ». Une fois de plus, Marie Salamagne fait mouche et sa création me touche. Pour moi, c’est un parfum émotion, très singulier, très différent des iris que j’ai pu porter. Il m’a semblé plus enveloppant, plus dense et pourtant tout en transparence. Je ne sais pas si ma description est cohérente mais la dualité entre mes deux impressions est complètement réelle. Je devrai redécouvrir encore plus avant la marque mais, à ce jour, sur ma première intuition, « Nue d’Iris » est quand même un coup de coeur.
Confidentielle, élégante, plutôt dans une fourchette de prix raisonnable pour une marque de niche, La Petite Madeleine est à découvrir absolument. Je ne connais pas les autres points de vente mais, si vous passez par Dijon, n’hésitez pas à aller faire un tour aux Ateliers des Parfumeur. Entre sourires et belles découvertes, vous ne serez pas déçu de mettre votre nez sur La Petite Madeleine.
Nouveautés novembre 2023
Chaque mois, j’essaye de vous faire un petit compte-rendu de mes impressions face aux nouveautés que j’ai pu découvrir. En septembre et octobre, je dois dire que c’était foisonnant et que j’ai eu du mal à découvrir tout ce que je voulais sentir. Cela me prend pas mal de temps et j’essaye d’approfondir un peu chaque création pour en parler le mieux possible et, en tout cas, vous donner un avis qui ne reste d’ailleurs qu’un avis subjectif. Suite à vos petits mots, j’essaye d’être moins consensuel et de parler aussi de ce qui ne me plait pas. Ce n’est pas toujours facile car être négatif ne fait pas trop partie de ma vision du blog. Je préfère, en effet, partager mes coups de coeur mais, dans cette série d’articles, je vais essayer de vous parler de tout ce que j’ai senti.
« Un biscuit tout juste sorti du four. Gingembre épicé, muscade et cannelle, fondant comme un crumble au beurre et aux noisettes grillées. Réchauffé par la fève tonka et la vanille. Irrésistible » tels sont les mots de la marque Jo Malone London pour décrire l’édition limitée qui sera proposée en cette fin d’année avec le traditionnel « Orange Bitters ». En fait, il s’agit de la réédition d’une création de Christine Nagel qui date de 2013 et que, je l’avoue, je ne connaissais pas du tout. Voilà un parfum gourmand qui nous ramène à Noël, aux épices, aux gâteaux à peine sortis du four et peut-être même à un chocolat chaud aux épices au coin du feu mais j’extrapole. Le biscuit au gingembre est traditionnellement consommé par les britanniques et j’avoue que j’en étais assez friand quand je me trouvais outre-manche. Il m’arrive même parfois d’en trouver en France et j’en grignote bien un ou deux. Ceci dit, si j’adore leur odeur, je ne me vois pas me parfumer avec cette fragrance qui s’ouvre avec des notes de gingembre à la fois épicées et citronnées puis s’arrondit au coeur de noisettes torréfiées avant de se poudrer de fève tonka, de vanille et d’amande en fond. Je ne vais pas dire que je n’aime pas la création. Elle est régressive. Peut-être qu’elle me plairait en ambiance mais pas sur ma peau. En plus, j’ai un peu tendance à rendre les parfums encore plus suaves alors il n’est pas pour moi. Je me contenterai, comme chaque année, de « Orange Bitters ».
J’étais complètement passé à côté de « Flora Gorgeous Magnolia » créé par Daphné Bugey et Marie Salamagne pour Gucci et je dois dire que j’ai eu tort car il s’agit vraiment d’un très joli floral. J’ai l’habitude de penser qu’il y a un ou deux parfums qui sortent du lot dans les parfumeries grand public et je dois dire que, si je déteste les vêtements et la maroquinerie Gucci, je trouve que les parfums sont aux antipodes. Ils sont élégants et pas du tout bling bling. « Vous invitant à exprimer vos envies en toute confiance, l'Eau de Parfum pour femme Gucci Flora Gorgeous Magnolia est le troisième Parfum Gucci à rejoindre la collection #FloraFantasy. Les senteurs douces et sensuelles d'essence de magnolia, d'accord de mûre et d'essence de patchouli vous transportent dans un monde à l'aura florale rayonnante pour créer une Eau de Parfum pour femme puissante. Le flacon, orné d'un motif floral emblématique de la Maison Gucci et d'une teinte violette captivante, symbolise le potentiel illimité qui sommeille en vous ». Avec une envolée dominée par un accord mûre, un coeur floral et aquatique de magnolia et un fond de patchouli, cet opus est un peu plus dense que les deux précédents que j’avais aussi bien aimé. Indéniablement, il plaira plus aux femmes mais, vraiment, je pourrais le porter. Je trouve l’équilibre entre le côté très rond et acidulé de la mûre et celui, aquatique et floral du magnolia est particulièrement bien vu. Il en résulte un parfum très facile à porter, très joli et élégant même si je l’aurais préféré au printemps qu’à l’automne. « Flora Gorgeous Magnolia » est un des rares parfums du circuit sélectif que j’ai aimé cette année. Je me devais donc d’en parler.

La fougère réinventé, c’est ce que Le Labo propose avec « Lavande 31 », la nouveauté de 2023. À cette plante à la fois florale et aromatique, le parfumeur (la marque ne communique pas sur son nom) a ajouté 31 matières premières naturelles ou synthétiques comme les muscs, un accord ambré et un fond de fève tonka « La lavande ? Peut-être imaginez-vous la salle de bain tapissée de votre grand-mère, une savonnette violette posée à côté du lavabo. Ou encore un salon de coiffure à l'ancienne, où flottent dans l'air des notes de lavande mêlées à de la mousse de chêne ». L’ensemble est joli, légèrement poudré et ambré, donc très élégant mais, je ne suis pas complètement convaincu. En effet, outre le fait que « Lavande 31 » est très efficace, qu’il plaira à un plus grand nombre, je le trouve peut-être un peu moins inédit que les fragrances de la marque que je préfère. C’est une jolie création, la tenue est impressionnante mais peut-être s’avère-t’elle un peu trop classique pour mon goût. Je lui préfèrerai des compositions plus inédites, originales et uniques de la marque. Le Labo est une maison vraiment qualitative et souvent originale. Il lui faut donc des classiques telles cette création mais j’avoue que, si je la trouve belle et agréable, je reste un peu sur ma faim.

« Une formule opulente comprenant de l'or 24 carats , vous transportant au sommet du château de Versailles. L’or de Louis évoque les moments où Louis XIV et sa Cour visitaient la Grande Orangerie pour se délecter des orangers en fleurs réchauffés par des feux de joie. Une fleur d'oranger éclatante avec un fond boisé chaleureux, comprenant des notes d'absolu de fleur d'oranger, de grenade, de miel et de fumée de bois de chauffage » tels sont les mots de la maison Arquiste pour décrire l’inspiration de « L’Heure de Louis », son dernier opus et je dois dire que j’ai été impressionné lorsque j’ai découvert ce parfum à la fois floral et vraiment opulent. Créé par Rodrigo Flores-Roux, cette composition est présentée dans un flacon qui contient aussi des copeaux d’or 24 carats. C’est un peu pour le fun mais je dois dire que le résultat est assez spectaculaire et donne une impression à la fois luxueuse et lumineuse. En tout cas, le jus en lui-même est quand même hyper sophistiquée avec une envolée d’absolu de fleur d’oranger, de grenade, de jasmin et de bergamote très riche qui nous emmène sur un coeur d’iris de Florence, de miel, de muscs et de bois de cèdre puis se pose sur un fond construit autour d’un accord de bois de chauffage avec des notes de bois de cade et un accord résineux dont la formule remonte au XVIIème siècle et porte le nom romanesque de oislet de Chypre. Je trouve le résultat riche, profond, facetté et un peu suranné. Le parfum est vraiment incroyable. Je ne sais pas s’il correspond vraiment à mes goûts mais il représente bien le côté flamboyant voulu par Louis XIV dans les jardins de Versailles.
J’avais trouvé que la maison de parfums française Headspace nous offrait la possibilité d’une mise en avant de belles matières premières de manière très originale. J’ai découvert ces création il y a quelques mois et j’avais beaucoup aimé en parler. Je ne m’attendais pas à ce que la marque propose déjà une nouveauté et elle vient pourtant de sortir. J’ai pu découvrir « Kirsch », un travail autour de la cerise : « Une cerise chic et dévorante, un cuir poudré fruité. La tension intrigante d’un premier rendez-vous Un parfum qui parle de temps en temps d'élégance, de saveurs généreuses et de passion dévorante, alternant délicatesse galante et animalité sous-entendue ». Je crois qu’il faut vraiment faire table rase de toutes les idées préconçues sur la note de cerise car, vraiment, dans ce parfum, elle est traitée de manière inédite. Le départ est très sec avec des notes de saké, de safran, de rhum puis le parfum, toujours construit autour de l’accord cerise évolue vers des accents d’iris, de cuir, d’absolu de mousse de chêne et d’ambroxan. Il en résulte un parfum sec, presque boisé et cuiré mais avec toujours le côté très fruité de la cerise. Je le trouve complètement inédit. Je l’ai essayé sur la peau et je ne retrouve ni le côté amandé du noyau de cerise ni le versant liquoreux qu’il m’est arrivé de croiser en parfumerie. C’est une cerise très sèche, droite, ambrée et boisée avec un côté cuir. Je trouve le parfum très élégant, en revanche, je ne sais pas si je pourrais le porter mais il m’intrigue suffisamment pour l’essayer encore plus. Gageons que je vous en reparlerai dans quelques mois.
« Un parfum festif et désinhibé qui respire les vacances : Caribe Kiss évoque les fiesta débridées, une pool party retentissante à l’hôtel Caribe Hilton, à San Juan, où fut inventée la Piña Colada. Un parfum d’enthousiasme, de métissage, de pride et de carnaval. Un ‘kiss’ de transgression par la fête, qui s’éternise jusqu’aux derniers rayons de soleil. Un cocktail de notes fruitées ouvre des festivités endiablées : chair juteuse d’ananas, pulpe succulente de mandarine, eau crémeuse de coco… Au milieu de cette déflagration de bonheur, la queen des fleurs fait son entrée : la tubéreuse. Flanquée de jasmin et de petitgrain, elle monte en puissance et à son paroxysme, se fond avec les notes crémeuses et fruitées dans un bouquet bariolé et ouvertement givré. Le maté apporte sa facette verte excitante, puis copine avec la fève tonka dans des effluves de foin gourmand, pour clôturer avec plaisir cette débauche de saveurs ». J’avais découvert la nouveauté d’Anatole Lebreton en avant-première lors de la rencontre organisée par la parfumerie Odorem à Lyon il y a quelques mois. Le parfum n’avait pas encore de nom et j’avais été vraiment très séduit. Le voilà sorti. Il s’appelle « Caribe Kiss » et c’est un beau floral fruité solaire. Vraiment, je dois dire que c’est un coup de coeur. Il s’ouvre avec des notes d’ananas, de mandarine verte et de noix de coco et cette envolée nous conduit très naturellement sur un coeur de jasmin et de tubéreuse rehaussé d’un absolu de petit grain puis se pose sur un socle de maté et de fève tonka. Cette composition, réjouissante, jubilatoire, ne ressemble à rien d’autre et je dois bien dire que je me suis fait très plaisir à la laisser évoluer sur ma peau. Certes, ce n’est pas un parfum de saison mais, il faut bien le dire, je pense qu’il fera mouche lorsque les beaux jours reviendront. Une fois de plus Anatole Lebreton surprend, il avait déjà travaillé une tubéreuse très animale et cuirée avec « L’Eau Scandaleuse » et, avec « Caribe Kiss », il en exploite la très belle facette lumineuse.
J’attendais beaucoup de "Smoky Soul", la création de Marc-Antoine Corticchiato pour la collection Sépia d’Olfactive Studio et je dois dire que je ne suis pas déçu. J’ai découvert ce parfum tout récemment et, vraiment, c’est une très belle réalisation. « Inspirant et charnel, Smoky Soul propose du thé noir fumé infusé d'absolu d'osmanthus aux accents fruités d’abricot. Le thé noir, extrait au CO2 supercritique, est fumé avec de l'essence de Vétiver de Java, qui fait ressortir les facettes du bois chaud brûlé. Le poivre noir rehausse les notes épicées et noires du thé tandis qu'une trace d'absolu d'algues accentue les notes moussues, salées et minérales de certains thés chinois ». Le départ est construit autour d’un absolu d’osmanthus chinois associé à un poivre noir indien qui donne quelque chose de vraiment singulier puis arrive un coeur de thé de Ceylan très sombre, presque fumé associé à des notes de rose de Turquie et de jasmin Sambac puis le parfum se pose sur un fond de vétiver de Java, de patchouli d’Indonésie et d’algues que le parfumeur utilise de manière très judicieuse depuis qu’il a créé « Acqua di Scandola » pour sa marque Parfum d’Empire. La concentration extrait de parfum donne quelque chose de très évolutif sur ma peau. Le côté sombre s’estompe pour donner un fond un peu frais et minéral. J’aime beaucoup cette création. C’est une très belle composition originale et signée. En tout cas, je me suis fait plaisir à le porter. Je voudrais d’ailleurs le réessayer prochainement. Il est probable que je vous en parle encore.
Je suis très content d’avoir découvert ces parfums car j’y ai rencontré plusieurs coups de coeur. Je pense à « Caribe Kiss » que j’avais eu la chance de découvrir il y a plusieurs mois et aussi « Smoky Soul » sur lequel je vais me pencher un peu plus dans les semaines à venir. J’ai vraiment beaucoup aimé. J’ai aussi un petit crush sur « Kirsch » de Headspace qui m’a vraiment impressionné par son évolution. Je pense qu’il n’y aura pas d’article nouveautés en décembre mais qu’il sera remplacé par le top 20. Les découvertes reprendront sans doute en janvier.
Deux nouvelles eaux de parfum pour Astier de Villatte
J’avais été très impressionné par « Tucson », la première eau de parfum éditée il y a quelques années par la maison Astier de Villatte qui s’éloignait un peu des Cologne qui ont fait sa réputation. Je pensais bien qu’il ouvrait sur une collection à venir mais, par la suite, sont sortis trois magnifiques parfums historiques. Aujourd’hui, la marque revient aux eaux de parfums qui font suite à « Tucson » avec deux créations absolument incroyables que j’ai pu découvrir. Je vais essayer de vous donner mes premières impressions mais attention, ces deux créations sont très différentes l’une de l’autre. Ce sont deux univers et deux promenades, l’une tout près, l’autre plus lointaine.
Ma première découverte a été « « Mantes-La-Jolie », un petit jeu de mot pour décrire un travail autour de la menthe poivrée créé par Sylvie. Fischer. « Par une chaude journée d’été, promenade matinale dans les ruelles chargées d’histoire de la ville. Des étals du marché s’échappe une délicieuse bouffée d’herbes aromatiques fraîchement cueillies : menthe, basilic, feuilles d’eucalyptus et bergamote aux accents franchement citronnés, auxquels se mêlent quelques suaves effluves de gingembre épicé, de jasmin sambac ensoleillé, de maté aux accents herbacés. Sur la peau la trace verte et vivifiante du parfum subsiste longtemps ». Je dois dire que je suis très impressionné par cet aromatique dans lequel la note de menthe, très réaliste, domine nettement et apparaît, dès la vaporisation, entourée de bergamote, de basilic, de citron, d’eucalyptus et de gingembre puis vient un coeur, très frais, de figue verte, de cassis et de jasmin sambac qui se pose sur une association de cèdre et de maté. C’est un parfum vert certes, il m’évoque un peu une terrasse, un soir d’été et, pourquoi pas, un mojito. J’aime bien ce parfum. Il me plait. Il a quelque chose de naturaliste et de réaliste comme je le disais précédemment. En tout cas, il ravira les amateurs de menthe qui ne nous entraîne pas sur un accord qui fait plutôt penser à un chewing-gum à la chlorophylle. Je pense qu’il est à découvrir et à essayer.
« Plongée mystique et épicée dans les ruelles sinueuses et chaotiques de la vieille ville. Entre le concert des klaxons, les rickshaws, les mobylettes, le maelström d’odeurs des bazars, les fumées d’encens des lieux sacrés, l’ambiance est surchauffée, l’effervescence règne. Soudain un parfum divin envahit tout l’espace : une rafale d’effluves solaires et capiteuses de champaca, de myrrhe chaude et sensuelle, de patchouli et de vétiver aux accents boisés, fumés, terreux. S’y mêle la saveur suave de pétales de rose, de cardamome poivrée, de bergamote verte et fruitée ». Il faut le dire, c’est un peu un coup de coeur ! « Delhi » est vraiment un oriental original très éloigné des ambrés fleuris ou des oud que nous n’arrêtons pas de sentir. Il s’ouvre sur une envolée de champaca et de fleur d’oranger, puis suit un coeur de myrrhe, de rose et de cardamome puis un fond de cèdre, de patchouli et de vétiver. Il y a vraiment quelque chose de très élégant et de très « invitation au voyage » au coeur d’une Inde presque rêvée. C’est comme une ambiance de saris et d’épices. Je trouve, en outre, que ce parfum, sophistiqué et pourtant presque « ethnique » est facile à porter. La tenue est excellente et je trouve que le développement est absolument formidable. « Dehli » me plait, je pourrais tout à fait me l’approprier même s’il m’emmène assez loin de mes goûts habituels.
Avec « Mantes-La-Jolie », on est plutôt, non pas en région parisienne, mais plutôt dans le sud de la France et avec « Delhi », on s’envole pour l’Inde. Deux création et deux univers bien distincts qui viennent rejoindre l’immortelle séchée au soleil de « Tucson ».
Séquence Nostalgie : "Bois de Paradis"
Au rayon des parfums que j’ai beaucoup porté et qui n’existent plus, il y a une création réalisée en 2002 par Michel Roudnitska pour la marque américaine DelRae qui, hélas, aujourd’hui, n’existe plus du tout. Le parfumeur avait composé tous les premiers parfums de la marque, « Amoureuse », « Début, », « Eau Illuminée » et « Emotionnelle » mais celui qui vraiment me manque est « Bois de Paradis ». J’en ai encore quelques gouttes et je peux, de ce fait, en parler assez facilement. Il s’agissait d’un floral fruité absolument magnifique dans la lignée peut-être de « Féminité du Bois ». Il s’ouvrait avec des notes de bergamote puis je retrouve un coeur de pêche, de mûre, de figue et de rose enveloppé d’épices froides et chaudes. Sur ma main, le parfum se pose, au bout d’un certain temps, sur un fond baumé et boisé avec des notes ambrées. Pour moi, il s’agissait d’un équilibre parfait entre des notes florales, poudrées et un côté très fruits confits. Il était parfaitement atypique et, s’il s’agissait au départ d’un féminin, il plaisait autant aux hommes qu’aux femmes.
« Un parfum sensuel et mystérieux. Après des notes de tête de bergamote, le cœur révèle un mélange des meilleures roses françaises, cannelle et mûre. Le fond oriental fait fondre les bois et l’ambre. Un élixir chaleureux et mystérieux. Parfums DelRae a été créé par le directeur créatif de San Francisco, DelRae Roth. DelRae a collaboré avec le célèbre parfumeur français Michel Roudnitska. Bois de Paradis est décrit comme « chaleureux et irrésistible, mystérieux et discrètement sensuel ». C'est un subtil mélange de bois, d'ambre et de rose de France, pour les connaisseurs et amateurs de parfums ». Comme toujours, Michel Roudnitska a su, avec la délicatesse et le talent qu’on lui connait, créer un parfum qui ne ressemble ni à ce que faisait son célèbre père, Edmond Roudnitska, l’un des pères de la parfumerie moderne, ni à aucune autre fragrance du marché. « Bois de Paradis » est inclassable. Il s’avère tour à tour floral, fruité, gourmand et boisé mais toujours tout en finesse. Pour moi, il était l’une des plus grandes réussite de la parfumerie d’auteurs. Je regrette que Madame DelRae Roth n’ait pas trouvé preneur lorsqu’elle a voulu vendre sa marque car les parfums que Michel Roudnitska avait créé pour elle me fascinaient. Lorsqu’il nous les avaient fait redécouvrir en conférence, j’avais eu plusieurs coups de coeur mais mon préféré demeure, « Bois de Paradis » car je me l’étais vraiment approprié.
Aesop, du soin au parfum
Aesop est une marque de soin qui existe depuis 2005 et qui propose une gamme de 10 eaux de parfum composés par Barnabé Fillion, à qui Le Labo doit « Géranium 30 » dont j’ai parlé il me semble, et constitués de matières premières naturelles. J’avoue que je n’avais jamais vraiment eu l’envie de les découvrir même si je connaissais leur existence. Il aura fallu l’ouverture de la très belle boutique lyonnaise pour que je me décide vraiment à les explorer à fond. Je remercie d’ailleurs l’équipe qui m’a super bien reçu et a fait preuve à la fois d’échange et de patience. En tout cas, j’étais intrigué et je ne regrette absolument pas d’avoir fait la démarche. Sur les dix créations, j’en ai retenu quatre comme d’habitude, de la reformulation de l’iconique « Marrakech » devenu en eau de parfum et en extrait « Marrakech intense » à la nouveauté, « Ouranon » sorti en cette année 2003. J’espère que je vous donnerai envie d’aller chez Aesop pour les parfums autant que pour le soin car les fragrances, simples, faciles à associer et, en même temps, très travaillées sont vraiment intéressantes à découvrir.
« Un parfum brut et iconoclaste, caractérisé par des notes boisées et épicées, des accords frais et floraux—un hommage profond, riche et envoûtant à la ville du même nom ». « Marrakech Intense » existe en eau de parfum et en extrait et il a été reformulé par Barnabé Fillion en 2014. En le découvrant et en suivant l’évolution, je me suis retrouvé face à un oriental épicé très élégant et facile à porter avec une très belle tenue. Il s’articule autour de trois notes principales, le clou de girofle, très présent en tête, la cardamome qui accompagne tout le développement et le bois de santal travaillé de manière presque un peu ambré et pas du tout lacté. J’avais un peu peur de ne pas accrocher avec ce parfum qui, sur le papier, n’est pas forcément pour moi, mais, finalement, je le trouve à la fois très facile à porter et assez peu consensuel. C’est un parfum que je qualifierai, si je veux un peu extrapoler, de « translucide ». Il n’est ni trop présent ni pas assez (en tout cas en eau de parfum) et je trouve qu’il garde quelque chose de simple sans jamais être linéaire. En tout cas, il me plait bien. Je pense qu’il peut facilement se superposer avec d’autres créations de la marque afin de prendre un peu plus de fraîcheur selon les goûts. La composition, à base d’huiles essentielles pour la majorité des ingrédients, prend malgré tout la forme d’un vrai parfum travaillé et ciselé. Il m’a bien plu même si je ne le crois pas vraiment pour moi.
J’ai été assez dérouté par « Hwyl » qui est l’un des bests de la collection. « Une Eau de Parfum intrigante, avec un soupçon d’excentricité. Comme dans une forêt de cyprès du Japon, des notes fumées se fondent progressivement en des accords de sous-bois d’un vert profond, subtilement épicés ». J’ai trouvé le parfum très vert à la vaporisation puis, curieusement, les notes aromatiques se font minérales, salines, presque marines. Je savais que c’était un résultat possible grâce à ce que j’avais appris de Michel Roudnitska que son père avait réalisé pour Mario Valentino un parfum, en 1990, baptisé « Ocean Rain » qui reproduisait des effluves d’embruns uniquement grâce à des composantes aromatiques. Je ne l’ai jamais senti car il n’existe plus depuis très longtemps mais je comprends ce qu’il voulait dire après avoir senti « Hwyl ». Le mariage de l’encens avec le cyprès et le vétiver lui confère plein de facettes, aquatiques mais aussi minérales et résineuses. Je trouve ce parfum très élégant et, finalement, d’une grande fraîcheur qui le rend facile à porter mais je ne sais pas si je pourrais me l’approprier. Il est très « aquarelle » et pourtant, force m’est de constater que sa tenue est très correcte. Je ne sais pas si je pourrais le porter mais j’ai trouvé qu’il s’agissait d’une très belle composition.
« Eidesis », lancé en 2022 est ce que je pourrais appeler un boisé vert. La marque le décrit ainsi : « Un parfum envoûtant avec des notes de tête fraîches qui évoluent vers des épices profondes, de la terre humide et des bois secs ». Très étonnant, avec une note qui rappelle un peu l’herbe coupée, une autre la figue, il s’agit d’un travail autour du poivre noir, de l’encens et du bois de santal. C’est un parfum atypique, presque baroque. Sans doute le plus abouti des dix que j’ai pu découvrir. Je l’ai même mis sur ma peau et j’ai trouvé son évolution très intéressante. Il est complètement dans mes goûts avec ce départ frais et ce fond un peu boisé et presque un peu mousse. Je le trouve vraiment très bien construit. L’évolution me rappelle plusieurs parfums que j’aime et que je ne citerai pas forcément pour vous donner envie de vous faire votre propre impression. En tout cas, « Eidesis » est sans doute la création qui me plait le plus dans la marque pour l’instant. Je pourrais tout à fait porter ce parfum frais et épicé, profond et vert à la fois. Il est très réussi et son côté un peu abrupte.
Le dernier parfum que j’ai choisi est la nouveauté de cette année et elle est signée toujours par Barnabé Fillion. « Ouranon évoque la stature intemporelle d'un monolithe. Il offre un délicat équilibre entre notes herbacées aromatiques, notes boisées et accords minéraux. Un clin d'œil au dialogue entre le monde des vivants et les ombres projetées par un cercle de pierres sous le clair de lune. Un parfum avec des notes d'ouverture d'agrumes pétillants et un cœur herbacé aromatique, adoucis par des accords résineux chauds et un caractère minéral ancré dans la terre ». Je dois dire que je n’ai pas vraiment accroché avec et travail organisé autour des notes de foin, d’encens et surtout de myrrhe qui prend énormément de place. Il est très déroutant, résineux, très profond et vraiment singulier. Il plaira quand même plus à certains perfumistas qu’à une personne cherchant un nouveau parfum. Le moins que l’on puisse dire est qu’il s’avère original et très « spirituel ». Il s’éloigne vraiment trop de mes goûts pour me convenir mais je suis très content de l’avoir senti car, il faut bien le dire, il sort des sentier battus et est peut-être le parfum le plus « niche » de la collection. Peut-être marquera-t’il un tournant dans l’esprit de la marque.
Pour résumer, je dirai qu’il faut découvrir vraiment les parfums Aesop car ils sont vraiment dans l’esprit minimaliste et naturaliste de la marque et collent complètement à cette réalité. Pour moi, ils sont très intéressant mais je ne sais pas si j’ai eu un coup de coeur suffisant pour que je franchisse le pas. En tout cas, une fois encore, je remercie l’équipe de la toute nouvelle équipe lyonnaise car la collaboration que j’ai pu recevoir a été au top. En plus, la boutique, urbaine et épurée est vraiment à découvrir. J’avais très envie de faire cette expérience depuis longtemps et je la renouvellerai.
Denis Durand, maison de couture et de parfums
La découverte des quatre extraits de parfum lancés cette année par le couturier cannois Denis Durand a été, pour moi, une vraie surprise. Je ne connaissais pas son travail en tant que créateur (j’ai regardé les photos que j’ai pu trouver depuis et je trouve qu’il a beaucoup de talent même si je ne connais rien à la mode car, visuellement, c’est très beau) et j’ai été d’autant plus surpris lorsque je suis entré dans la parfumerie Odorem de Lyon, par l’esthétique absolument magnifique non seulement des flacons mais aussi des boites qui les contiennent. Denis Durand a confié à un parfumeur grassois, dont il ne communique pas le nom hélas, la création de quatre extraits de parfums contenus dans des flacons dont les cabochons et les plaques d’identifications ont étés commandés à un orfèvre eux même présentés dans des coffrets ornés du cygne, emblème de cette nouvelle marque, créant une esthétique un peu générale de la maison que je décrirai comme historique, mythologique et sophistiqué. Il en décrit ainsi l’univers : « Les parfums Denis Durand privilégient essentiellement des matières naturelles, nous utilisons un alcool français de qualité bio, gage d’une promesse olfactive sur votre peau. Dés la première vaporisation les notes fusionnent et évoluent afin de révéler toute la complexité olfactive de nos fragrances. Nous apportons un soin tout particulier à nos flacons vaporisateurs, élixirs de parfum. Créé par un maitre orfèvre, le capo et son étiquette médaillon en metal évoquent le bronze doré, protégés par un précieux coffret aux fresques antiques imaginaires rehaussées d’or ». Tout un programme ! J’ai donc pu découvrir ces quatre extraits qui réunissent toutes les qualités pour devenir de très beaux classiques de la parfumerie tant ils sont bien imaginés et qualitatifs.
« La légende raconte : Iris, messagère de l’Olympe venue du ciel, crée un arc en ciel illuminant la fleur la plus précieuse de la parfumerie, l’Iris. Cet élixir vous invite à la rêverie d’un champ d’iris en Toscane un jour de printemps. Un jeu de contraste entre chaleur et fraicheur, la sensualité à fleur de peau… » tels sont les mots de Denis Durand pour décrire l’inspiration du premier parfum que j’ai découvert et qui a pour nom évocateur « L’Âme d’Iris ». Le ton est donné, il s’agit d’un floral boisé et plein de charme qui est une ode à cette matière première précieuse, recherchée et présente à tous les étages de la pyramide olfactive. À l’envolée, elle se pare de la fraîcheur et de la douceur de la mandarine et d’un accord de muguet très réaliste qui appuie un côté floral qui s’enrichira, au coeur de néroli et de violette puis se posera sur un fond dans lequel l’iris est la vedette mais se renforce du côté très facetté de l’ambre gris et, plus rare, du côté très pétillant du cédrat qui est, généralement, plutôt utilisé en note de tête. Il en résulte un parfum extrêmement qualitatif, pas forcément poudré comme je m’y attendais mais plutôt en transparence et en fraîcheur comme un interprétation à la fois très contemporaine de l’iris et une vraie volonté de ne pas nous emmener là où nous pensions aller. Personnellement, j’ai beaucoup aimé « L’Âme d’Iris » même s’il n’est pas mon premier coup de coeur. Je pense qu’il ravira autant les femmes que les hommes et qu’il est, comme beaucoup de grands parfums, à la fois singulier et très facile à porter.
« La légende raconte : Apollon, maître de la musique et de la poésie, joueur de lyre et compagnon des muses, symbolise la beauté masculine. Comme un vent chaud et boisé du mont Olympe qui souffle sur Apollon, dandy viril moderne, ce jus est un élixir de sensualité ». Sans surprise, « N¨11 Jus d’Apollon » est mon coup de coeur. C’est un chypre oscillant entre une modernité évidente et aussi l’univers complètement débridé des années folles. Je m’explique. Il s’agit-là d’un beau travail construit, qui représente, pour moi, la dualité parfaite entre les anciens parfums de Coty ou de Guerlain que l’on ne peut plus sentir aujourd’hui, et le néo-chypré contemporain qui casse les codes. Le départ de bergamote, de bois de rose et de mandarine est déjà vraiment surprenant car le côté un peu suranné est contrebalancé par une certaine force qui va préfigurer un coeur de cèdre, de vétiver et de lavande très puissant mais sans jamais manquer de subtilité puis le parfum se pose sur un fond de patchouli, de fève tonka et de musc. Attention, il évolue énormément et il faut vraiment le poser sur peau pour en saisir tous les univers. Je l’ai fait et j’ai pu constater une chose : ce n’est pas un seulement un beau parfum, c’est un grand parfum ! Quand je parle de coup de coeur, je pèse mes mots. Je ne suis pas toujours très amateur d’extraits de parfums car, parfois, je trouve que la dilution apporte beaucoup de facettes à la création mais là, le parfumeur réussit le tour de force, malgré une concentration très élevée, d’avoir inventé un parfum qui n’est du tout d’un bloc mais qui va se délier, se construire et se déconstruire sur la peau pour donner ce côté complètement fou que nous recherchons toujours lorsque nous nous tournons vers ce qui peut-être appelé un peu abusivement la parfumerie de niche. « N°11 Jus d’Apollon » est aux antipodes de cela. C’est un parfum faussement classique, très identifiable et surtout très singulier. Pour moi, c’est un réel coup de coeur.
« La légende raconte : Sur les berges d’une rivière, Narcisse découvre son reflet dans l’eau et en tombe amoureux. Le recherchant vainement jour après jour, il s’incarne en fleur de narcisse ». Ce n’est pas un secret, j’aime la note de narcisse en parfumerie et, souvent, je la trouve vraiment très poudrée et cuirée à la fois. Avec « Narcisse au Miroir », une fois encore, le parfumeur casse les codes et propose un parfum qui est, cette fois, résolument contemporain et d’une très grande originalité car, cette fois, le narcisse ne se trouve pas au coeur mais dans les notes de tête, avec le poivre rose et la noix de coco et au fond associé au patchouli, à un accord d’ambre ainsi qu’au musc. Avant d’en arriver là, les notes de tête nous emmènent sur un coeur de guimauve, de fleur d’oranger et de tubéreuse pour le moins étonnant. Ce parfum m’a dérouté. Il est opulent et délicat à la fois, moderne et pourtant on sent qu’il peut devenir un classique. Son originalité est frappante et je pense, qu’une fois encore, il plaira autant aux femmes qu’aux hommes. Son esthétique et son androgynie se rejoignent pour donner un jus précieux, particulièrement qualitatif et brillant. Pour moi, il s’agit-là d’un parfum vraiment hors du commun qu’il faut découvrir. Il est clairement le plus clivant des quatre. Personnellement, j’ai bien aimé mais je comprends qu’il puisse être un peu trop « en dehors des clous » pour déplaire. C’est aussi l’une des caractéristiques de la parfumerie d’auteurs. En tout cas, je le trouve vraiment très intéressant et il faut le découvrir.
« La légende raconte : Née de l’écume, Vénus sublime par sa beauté et sa séduction, inspire les Arts. Avec ses notes de rose de Bulgarie, de cannelle et miel, son sillage épicé et floral, Vénus Céleste est un élixir sensuel, puissant et addictif ». « Vénus Céleste » est une ode totale à la beauté et à la féminité. Il s’agit d’un travail autour de belles roses de Bulgarie mises en valeur avec un départ de cannelle de Ceylan, de mandarine d’Italie et fleur d’oranger, un coeur de rose et de miel et un fond de vanille, d’ambre gris, de patchouli et de muscs blancs. C’est peut-être le parfum le plus consensuel de la collection ce qui ne veut pas dire qu’il est moins qualitatif. C’est un ambré fleuri très oriental « à la manière » de ceux que pouvaient produire les grandes maisons de parfums du début du XXème siècle. Pour moi, il évoque deux choses : tout d’abord l’élégance orientale d’une rose absolument qualitative et, ensuite, la profondeur et la beauté qui va mettre tout le monde d’accord. Il est difficile de faire une rose qui va mettre tout le monde d’accord et je pense que ce sera le cas de « Venus Céleste » tant il est réussi. Ce qu’il m’évoque, c’est immanquablement l’immensité d’une Olympe rêvée et parfumée comme une ambiance d’élégance et de pureté à la fois. La composition me correspond peut-être un peu moins mais vraiment, il ne faut pas que les amateurs de rose orientale passent à côté. Pour moi, cet extrait de parfum, évoque la même qualité que certains parfums créés au début du XXème siècle par Ernest Daltroff pour Caron avec, en plus, un versant moderne. C’est, à mon sens, une très belle réussite.
En découvrant les parfums de Denis Durand, la première chose que je me suis dit est qu’il a voulu revenir aux fondamentaux. Il est rare qu’un couturier se lance aujourd’hui dans la création de parfums mais, à l’instar de Marc-Antoine Barrois, il y a une soif du public pour la correspondance entre les arts. Quand j’ai découvert ces quatre parfums, je me suis posé une question : Et si la renaissance de la belle parfumerie était là, dans cette petite marque confidentielle ? Je n’ai pas la réponse mais je vous engage vraiment à sentir ces parfums. Ils pourraient vous surprendre et vous séduire. Je vous indique, sous cet article, les deux uniques liens des points de vente de la marque.
Mes parfums préférés : "Jardin du Nil"
Article modifié
Il a été un coup de coeur immédiat dès que je l’ai senti durant un mois d'octobre même s’il n’était pas vraiment de saison. Je ne l’ai pas encore beaucoup porté mais je suis complètement sous le charme de « Jardin du Nil » créé en 1988 par Jean-Paul Millet-Lage pour Maître Parfumeur et Gantier (à une pas confondre avec « Un Jardin sur le Nil » signé Jean-Claude Ellena pour Hermès que j’aime bien aussi mais qui n’a rien à voir) et je suis content de voir revenir les beaux jours pour en profiter enfin. C’est un aromatique, un peu hespéridé, pas mal fleuri et d’une originalité extrême. J’ai remis mon nez dedans récemment et vraiment je l’adore.
La marque le décrit ainsi : « Créé au retour d’un périple en Egypte, ce parfum s'exprime comme un carnet de voyage sensoriel. Il nous plonge dans l’ambiance estivale de la récolte des géraniums. Son cœur est façonné par le géranium d’Egypte, la rose et le jasmin marocain. Il est rafraîchi par la menthe, les écorces de fruits et d'un soupçon de lavande avec, en notes de fond, du musc et de l’ambre ». Complètement atypique, pas suranné, pas forcément moderne non plus, ce jus est absolument étonnant. L’ouverture est un trio et s’organise autour d’une bergamote légèrement acidulée avec des accents aldéhydés et une lavande discrète. Le coeur est résolument fleuri avec un géranium légèrement mentholé, un absolu de rose et de jasmin et la rondeur d’un ylang ylang exotique. Le parfum se pose sur un fond musqué et ambré avec des accents de mousse d’arbre. Je suis sans doute influencé par le nom du parfum mais je l’imagine porté lors d’un voyage initiatique entre Égypte pharaonique, copte et musulmane. C’est un parfum exotique, qui mêle les écorces confites d’orange à une formule très fleurie et légèrement aromatique. Porté, il tient super bien et son sillage est pourtant discret. Je le trouve d’une grande subtilité.
Jean-Paul Millet-Lage
« Jardin du Nil » me renvoie une image de voyage un peu onirique dans un pays méditerranéen rêvé et il me ramène à des souvenirs d’enfance un peu imprécis d’odeurs de jardins en fleur. Je l’ai essayé dans la boutique parisienne de la rue des Capucines et j’ai eu la chance de le recevoir en cadeau. Il est un peu éloigné des orientaux qui font la réputation de Maître Parfumeur et Gantier mais, une fois de plus, Jean-Paul Millet-Lage fait mouche et nous entraîne dans un univers parfumé à la fois vraiment singulier, doté d’une vraie personnalité et totalement facile à porter. Je trouve que ce parfum qui est déjà ancien n’a pas pris une ride et qu’il est vraiment un magnifique parti pris et une option géniale pour des beaux jours qui arriveront dans le courant du printemps et que nous pouvons voir poindre un petit peu, légèrement, cette dernière semaine. Et si, dans les prochains jours, je ressortais « Jardin du Nil » ?
Mes parfums préférés : "Nuit Noire"
Les parfums de Mona di Orio sont, depuis que je les ai découverts, vraiment parmi mes préférés. Je pense que je les aime tous et que j’en ai déjà porté une grande partie. L’un d’entre-eux m’a vraiment impressionné aussitôt que je l’ai eu sur la peau. Il s’agit de « Nuit Noire » lancé en 2006. Pour moi, c’est un chef-d’oeuvre olfactif sans la moindre hésitation. « Un parfum oriental, nocturne, pour une séduction absolue. Epices et notes balsamiques se mêlent à la chaleur des bois, équilibrée par quelques fleurs. En fond, cuir et ambre se mêlent pour un sillage voluptueux. Parfumeur : Mona di Orio. Un parfum mystérieux et sombre. Dédié à Serge Lutens, Nuit Noire est un des trois premiers parfums de la parfumeuse Mona di Orio. Cet oriental voluptueux où se mêlent bois, baumes et épices a été conçu comme un hommage à l’audace et à l’esthétique du créateur Serge Lutens. En parfumeries sélectionnées ». Il y a de beaux parfums et de grands parfums. Celui-ci appartient à la seconde catégorie. En effet, « Nuit Noire », clair obscur, profond, animal et particulièrement sophistiqué est sans doute l’une des créations les plus personnelles de Nathalie alias Mona. J’ai toujours pensé qu’elle avait du génie et je dois dire que je le crois de plus en plus lorsque je remets mon nez dans ses compositions.
Après une envolée très dense de fleur d’oranger, de gingembre, de cardamome et d’orange amère, le coeur de tubéreuse, de cèdre, de santal et de résine oliban se pare de clou de girofle et de cannelle entre froid et chaud puis vient un fond très facetté de muscs blancs, de fève tonka, d’ambre et de cuir. Pour moi, ce parfum ne ressemble à rien d’autre. Je pense qu’il peut être aussi beau sur une peau masculine que féminine. À l’instar de « Noir Épices » créé par Michel Roudnitska pour les Éditions de Parfum Frédéric Malle, je pense qu’il avait été plutôt imaginé comme un féminin mais, finalement, son public est 50/50. Je lui trouve quelque chose de vraiment très envoûtant. Pour moi, c’est une addiction. Je le porte pas mal à l’intersaison et en hiver et, à chaque fois, je m’extasie sur sa beauté. Vraiment ce parfum ne ressemble à rien d’autre. C’est un bijou plus qu’une création olfactive. Il était dédié à Serge Lutens pour célébrer l’admiration que Mona di Orio portait à ses créations mais, pour moi, il s’agit vraiment d’un chef-d’oeuve à part entière. Il est, hélas, difficile à trouver aujourd’hui en France mais j’espère qu’un jour… enfin j’ai du stock et j’en profite !
Parfumerie 100% naturelle, un nouveau luxe
J’ai beaucoup hésité à écrire un article plus global sur les marques 100% naturelles que je connais car, je dois bien le dire, lorsque cette manière de se parfumer a commencé à poindre, j’étais assez peu convaincu par les possibilités des parfumeurs d’inventer des fragrances originales et complexes avec une palette très réduite. Je me souviens des premières compositions que j’ai pu découvrir et qui, souvent, étaient un peu simplistes, botaniques et pas vraiment agréables à porter. Il a, à mon sens, fallu attendre l’avènement de Parfumeurs du Monde pour que le postulat de départ et ce malgré les contraintes qu’il engendre puisse se traduire par de belles créations, agréables à porter. C’est lors d’une conférence donnée à Lyon par le parfumeur Michel Roudnitska que j’ai approché cette marque pour la première fois quelques mois après qu’elle ait été fondée. Nous étions en 2017 et je n’étais pas du tout familiarisé avec ces techniques.

Par la suite, j’ai été moins séduit par ce que j’ai pu découvrir. En essayant Ormaie ou Hiram Green, je suis toujours resté sur ma faim. Les parfums étaient, à mon sens, soit un peu simplistes soit assez incohérents. En tout cas, je ne m’y retrouvais pas vraiment. Il faut dire aussi que le 100% est basé sur des formules qui coûtent plus cher que celles de la parfumerie classique et que cela monte quand même le prix du parfum.
Il faut être quand même assez sûr pour franchir le pas. J’ai bien exploré les parfums Hiram Green et, si je les trouve relativement aboutis, je n’ai pas été séduit. En revanche, par rapport aux premiers que j’avais essayé, j’ai trouvé des parfums dotés d’une très bonne tenue et d’un sillage comparable avec ceux de la parfumerie classique. Ça a été aussi le cas avec Perfumer H, la marque de la parfumeuse anglaise Lyn Harris. Les parfums ont étés beaucoup plus à mon goût mais ils sont très onéreux et je n’ai peut-être pas encore trouvé le mien même si j’ai adoré les essayer. Pour ce qui est de Ormaie, je n’ai pas été sensible aux créations mais cela est vraiment personnel et ne remet en cause ni leur qualité ni leur originalité.
Il m’a fallu attendre 2020 et l’avènement de Voyages Imaginaires, fondée par Camille Goutal et Isabelle Doyen pour vraiment trouver « ma » maison de parfums 100% naturels. Sur les cinq parfums originels, j’ai eu un coup de coeur et je ne parle pas deL’Eau des Immortels » sorti cette année, en 2023, car je le porte vraiment énormément. Pour moi, c’est carton plein. À ce jour, la marque compte six parfums que je trouve vraiment réussi. Pour ma part, je pourrais absolument tous les porter même si « La Couleur de La Nuit » est celui qui est peut-être devenu l’une de mes signatures. Je suis épaté qu’Isabelle Doyen ait réussi, avec une palette aussi réduite, à créer des parfums aussi complexes et dotés d’une si belle tenue. J’aime beaucoup les évolution. Tout est chic et singulier. Moi qui ne suis pas un fan de la fleur d’oranger, j’ai adoré « Azahar » par exemple. Vraiment, avec ce type de maisons, la parfumerie 100% naturelle a de beaux jours devant elle. Je ne veux pas la mettre en opposition avec celle, classique, que je connais depuis toujours mais je pense que cela mérite de s’y pencher.
L'Art et La Matière : Les extraits
Delphine Jelk et Thierry Wasser lancent une nouvelle collection précieuse de L’Art et La Matière. Il s’agit de six extraits de parfums qui reprennent les composantes de la célèbre guerlinade : « Les Extraits Signature. Haute préciosité, haute concentration, la signature Guerlain se fait or. Revisitant l’art de la Guerlinade - la signature olfactive emblématique de la Maison – Les Extraits Signature mettent en lumière chacune des six matières premières qui la composent – la rose, l’iris, la bergamote, la vanille, le jasmin et la fève tonka – et en révèlent le nombre d’or ». Je les ai découverts sur le stand de la marque au Printemps de Lyon et je vais essayer de vous donner mon ressenti sur chacune de ces créations très onéreuses puisqu’il sont vendus 550 euros les 50 ml et sont présenté dans le flacon de L’Art et la Matière revisité.
« Iris Pallida Extrait 6 révèle l’iris dans son expression olfactive la plus parfaite chez Guerlain et en dévoile une signature des plus sophistiquées. Surdosé du précieux beurre d’iris au poudré exceptionnel, son enveloppante douceur se fait intense, dans une concentration ultime de 30%. Les Parfumeurs Guerlain enrichissent la facette poudrée caractéristique de l’iris de notes amandées et musquées. Cette douceur poudrée s’enveloppe ensuite du velouté d’une note cuirée façon daim blanc, renforcée en son cœur d’un bois de santal à la texture crémeuse ». « Iris Pallida » est la première création que j’ai pu sentir et je dois dire que j’ai été emballé par l’envolée que j’ai trouvée hyper qualitative et un peu originale. La marque ne communique pas sur les pyramides olfactives et je vais essayer de décrire uniquement ce que je sens sans aucune indication auxquelles me raccrocher. Le départ est très poudré, presque cosmétique puis des notes un peu torréfiées apparaissent, je pense qu’il y a un côté amande et un fond un peu suédine. Très honnêtement, je suis un peu déçu par le développement que je trouve, finalement, très convenu. La tenue et le sillage sont impeccables mais le parfum dans son ensemble, finalement, ne m’accroche pas du tout. Il y a même un moment dans l’évolution où je rencontre une note qui me dérange.
« Vanille Planifolia Extrait 21 révèle la vanille dans son expression olfactive la plus parfaite chez Guerlain et en dévoile une signature des plus délicieuses. Poussée à son paroxysme, la surdose de vanille se teinte de ce je-ne-sais-quoi de Guerlain qui en fait un grand parfum, dans une concentration ultime de 30%. Les Parfumeurs Guerlain décuplent l’ivresse de la vanille en la ponctuant de notes épicées. En fond, elle s’enveloppe de notes musquées et de la fameuse opopanine, accord ambré mythique de Guerlain ». « Vanille Planifolia Extrait 21 » est sûrement le parfum de la collection que j’ai le moins aimé. Très honnêtement, je n’en vois pas l’intérêt. C’est une vanille sentie et re-sentie, très concentrée, très musquée, qui, et je suis désolé de le dire, « sonne » pour moi très synthétique. Le parfum, sur ma peau, est très linéaire, écoeurant et pas du tout agréable à porter. J’ai beau le sentir et le re-sentir, l’avoir posé sur ma peau, je ne lui trouve vraiment pas la moindre accroche. Je crois que je n’aime pas ce traitement de la vanille et je n’arrive absolument pas à discerner la qualité des matières premières qui pourtant, si on en croit la communication de la marque, doit être exceptionnelle. Sans doute que je passe à côté de quelque chose mais c’est ainsi.
« Tonka Sarrapia Extrait 75 révèle la fève tonka dans son expression olfactive la plus parfaite chez Guerlain et en dévoile une signature des plus addictives. Surdosée en tonka naturelle et d’un soupçon de coumarine, la gourmandise de la fève tonka se fait enivrante, dans une concentration ultime de 30%. Les Parfumeurs Guerlain subliment la facette amandée de la fève tonka en l’enrichissant d’essence d’amande amère et d’une microdose de coumarine. Poussant l’addiction à son paroxysme, la fève tonka devient brûlante au contact de la vanille, du cacao et des épices chaudes ». J’aime bien « Tonka Sarrapia ». Je lui trouve vraiment beaucoup de qualité et je trouve que Thierry Wasser et Delphine Jelk ont vraiment su retrouver le travail des anciens parfumeurs de la maison Guerlain. Il faut expliquer qu’Aimé Guerlain, au XIXème siècle, avait été le premier à utiliser la fève tonka en parfumerie et j’aime beaucoup le côté très profond et légèrement poudré et amandé de ce travail très fin. En revanche, sur ma peau, « Tonka Sarrapia » a un peu tendance à devenir très rond et vanillé tout en faisant ressortir le côté poudré du cacao. Je ne suis pas certain de pouvoir le supporter toute une journée d’autant que la tenue est « atomique ». Pourtant, il faut le dire, « Tonka Sarrapia » est l’un des trois parfums que je préfère dans cette collection d’extraits.
« Bergamote Fantastico Extrait 11 révèle la bergamote dans son expression olfactive la plus parfaite chez Guerlain et en dévoile une signature des plus intenses. Note de tête par essence, la bergamote exhale une fraîcheur intense et la puissance d’un sillage ambré, celle d’un grand parfum Guerlain, dans une concentration ultime de 30%. Les Parfumeurs Guerlain surdosent la bergamote et renforcent son amertume verte de petit grain, l’essence même de la feuille du bergamotier. Prolongeant cette intensité, un accord ambré signature de Guerlain – l’opopanine de Shalimar – dévoile un sillage aussi puissant qu’une note de fond, porté par les facettes boisées et fumées de l’essence de bois de Gaïac ». Résolument, j’aime la bergamote en parfumerie et j’attendais beaucoup de « Bergamote Fantastico ». Thierry Wasser et Delphine Jelk sortent un peu des sentiers battus avec cette bergamote ambrée et un peu amère qui évite, c’est vrai, l’écueil de l’agrume doux et légèrement poudré dont nous avons l’habitude. En tout cas, « Bergamote Fantastico » a au moins le mérite d’être très élégant et un peu original ce qui n’est pas toujours le cas avec les hespéridés même ambrés. Après l’avoir essayé et réessayé, je confirme ce que je pensais au départ. Il est mon préféré de la collection.
« Jasmin Grandiflorum Extrait 30 révèle le jasmin dans son expression olfactive la plus parfaite chez Guerlain et en dévoile une signature des plus rayonnantes. Poussée à son paroxysme, la floralité du jasmin éblouit de lumière et enivre de délice, dans une concentration ultime de 30%. Les Parfumeurs dévoilent un jasmin intensément Guerlain. Surdosée, la communelle de jasmin Grandiflorum se pare de notes confites de fraise, sublimées par l’onctuosité lactée du bois de santal. Pour la première fois chez Guerlain, ce cœur de jasmin met en lumière deux procédés innovants : l’extraction CO2 et l’extraction « micro liquide ». » tels sont les mots de Guerlain pour décrire cette interprétation du jasmin. Je vais être honnête, je n’ai pas aimé du tout ce parfum. C’est un jasmin très solinote, banal, pas forcément agréable à sentir. Je ne l’ai pas posé sur ma peau car, déjà sur la touche, il me dérangeait. J’aime beaucoup les différents jasmins utilisés en parfumerie mais vraiment je n’adhère pas avec cette lecture. C’est très personnel. Je trouve que « Jasmin Grandiflorum » est qualitatif mais je n’aime pas du tout le sentir. Je passe donc mon tour mais je ne doute pas qu’il rencontrera sa « clientèle ».
« Rose Centifolia révèle la rose dans son expression olfactive la plus parfaite chez Guerlain et en dévoile une signature des plus puissantes. Surdosée en précieux absolu de grasse, la rose transcende son pouvoir d’attraction, par-delà son extraordinaire floralité, dans une concentration ultime de 30%. Les Parfumeurs Guerlain mettent en lumière l’intensité de la reine des fleurs sublimant les facettes épicées et miellées propres à l’absolu de Rose, tout en les renforçant de volutes d’encens et d’un patchouli intense ». Je ne suis pas toujours fan de la rose mais je dois bien avouer que « Rose Centifolia » est le seul parfum de cette collection d’extrait que j’ai aimé sans aucune restriction. Tout est beau, le départ, le développement et les notes de fonds épicées. La qualité de rose est exceptionnelle et, très franchement l’oscillation entre une construction purement florale et chyprée est du plus bel effet. C’est un parfum poudré, profond, avec des notes de patchouli très délicates. Vraiment, je suis très séduit par cette rose complexe, facettée et d’une grande élégance.
Vous l’aurez compris, je suis très mitigé en ce qui concerne ces six extraits. Je trouve la collection très déséquilibrée. Si j’aime beaucoup « Bergamote Fantastico » et « Rose Centifolia », je n’adhère pas complètement avec les autres et je me rends compte que je ne mettrai jamais un prix pareil pour l’une de ces créations. Il existe en parfumerie, y compris dans des collections d’extraits, des parfums tout aussi bien voire même mieux travaillés, à des prix beaucoup plus raisonnables. 550 euros les 50 ml c’est une somme importante et ceux-de cette série ne correspondent pas à mon attente. Cet avis n’a pas valeur de critique, ce n’est que mon avis mais, honnêtement, je suis un peu déçu par une partie de collection.
Mes parfums préférés : "II"
« Laissez vous guider au coeur d'une forêt par la splendeur de la flore. Un brin d'humidité sous les pins, le parfum II s'accorde aux notes aromatiques de genévrier et de poivre. Un rayon de soleil se perçoit à travers la végétation accompagné d'une fine brume aux notes boisées ». Je voulais revenir sur « II » créé par Lyn Harris pour Maison Trudon en 2017. Je l’ai redécouvert il y a quelques semaines et vraiment c’est un coup de coeur. Il me fallait lui consacrer un article à part entière après en avoir reparlé dans un article consacré à mes derniers essais mais, depuis, j’ai eu l’occasion de le porter vraiment et vraiment il me plait énormément. C’est un boisé floral vraiment très original avec des notes épicées et très singulières. Je trouve qu’il pourrait m’emmener dans les forêts anglaises du Yorkshire peut-être avec ce côté à la fois frais et pourtant enveloppant. Ce parfum, c’est une promenade le dimanche matin avec mes chiens, au printemps ou à l’automne, cela peut être aussi une soirée d’été, un gin tonic, le soir qui tombe… Il m’évoque aussi parfois l’herbe coupée. Je retrouve parfaitement la signature de Lyn Harris présente dans beaucoup de ses créations. Vraiment, « II » est mon préféré de la collection Trudon et il le reste malgré les sorties successives.
Le départ d’orange amère un peu rond fait vite place à des notes de baies de genévrier, de pin, de poivre et de rose. Il y aurait presque un côté figue puis le fond se fait légèrement ambré mais surtout boisé avec du cashmeran et du bois de cèdre. Je ne sens pas du tout les notes d’encens mentionnées par la marque. J’aime énormément l’évolution de « II » sur ma peau. Je trouve que chaque phase est d’une rare élégance. Côté sillage et tenue, il est discret mais résiste plusieurs heures sur ma peau. En tout cas, il me plait, beaucoup et tout le temps, je pourrais le porter quasi quotidiennement. Le côté presque piquant des notes épicées. C’est comme un cocon frais et faussement léger. Il a quelque chose d’élégant mais aussi de très facile à aborder. En tout cas, il me plait. Il y a certaines créations comme ça. Je ne sais pas l’expliquer mais j’y reviens toujours et toujours. En tout cas, je suis content de l’avoir redécouvert et, comme je l’ai porté pas mal, mon avis s’est affiné. « II » est, sans doute, définitivement « mon » parfum Trudon.
Exquise trouvaille : "Black Steel"
Littéralement « Acier Noir », « Black Steel » créé en 2020 par Daphné Bugey est le premier parfum lancé par la marque Victorinox Swiss Army qui propose vêtements et objets fabriqués en Suisse. La seule boutique en France a ouvert à Lyon il y a presque deux ans et je n’avais pas eu la curiosité d’aller sentir les parfums qu’elle propose. C’est un peu par hasard que j’ai découvert celui-ci qui est mon préféré il faut bien le dire. C’est un masculin un peu gourmand et, si je n’ai pas trop accroché avec les autres, celui-ci m’a assez plu. La marque en décrit ainsi l’inspiration : « Captivant, convaincant, efficace et terriblement audacieux : voici Black Steel, un parfum puissant qui dégage séduction, chaleur et vitalité. Il puise son inspiration olfactive de la fusion de l’acier dans l’envoûtante lueur ambrée du feu, dont il incarne la chaleur et la profondeur magnétique. Audacieux dans sa structure, il superpose habilement des notes chaudes et épicées de poivre noir piquant à d’élégants accords de mélèze et de pin fumé pour repousser les limites du parfum. Si le parfum Steel vous accompagne au quotidien, avec Black Steel, la nuit aussi vous appartient. Le poivre noir piquant révèle instantanément le côté audacieux et fougueux inhérent au parfum Black Steel. Les notes de cœur boisées, élégantes et masculines du mélèze constituent sa charpente olfactive. À sa base profonde, des accents chauds de pin fumé soulignent davantage sa personnalité sensuelle et captivante ».
Daphné Bugey
Il s’ouvre sur des notes très épicées de poivre noir et de gingembre et nous emmène sur un coeur construit autour d’un accord de mélèze très résineux et un peu gourmand avec des notes de cuir doux puis se pose sur un fond de pin, de notes fumées et d’amande. Toutes les matières naturelles sont produites en Suisse. Je dois dire que j’ai une impression assez mitigée en ce qui concerne ce parfum. Je sais qu’il est très bien construit et relativement original mais il ne me provoque pas forcément l’émotion que j’imaginais. Il faut tout de même le sentir car il est assez original et, en même temps, facile à porter. Il est vendu comme un masculin mais il plaira, je pense autant aux femmes qu’aux hommes. En tout cas, c’est tout de même une exquise trouvaille même si je ne le porterais pas forcément. En plus, il est vendu 85 euros les 100 ml, c’est un petit plaisir pas cher. J’ai été content de le découvrir. Je l’ai trouvé moins convenu que les autres parfums de la marque. Il vaut le coup d’être essayé. Il s’agit, dans l’absolu, d’un joli parfum même s’il n’est pas forcément pour moi.
Promenade dans mes doses d'essai
Comme chaque mois, j’ai exploré plusieurs univers parfumés. J’ai retenu quatre créations et je vais essayer de développer mes impressions après les avoir vraiment essayées. J’ai retenu des compositions issues de familles olfactives différentes et je dois dire que je me suis fait très plaisir à essayer, porter et prendre le temps d’apprécier (ou non) tout ce que j’ai pu essayer. Ensuite, j’ai fait l’entonnoir non pas en prenant mes goûts comme références mais surtout la diversité de ce que j’avais pu sentir et mettre sur ma peau. Alors ai-je eu un coup de coeur ? Suis-je complètement séduit ou rebuté ? Vous ne le saurez qu’en lisant l’article et sa conclusion.
Nous avons enfin accès aux testeurs de la très belle maison de Clara et John Molloy Hermetica au Printemps de Lyon qui distribue la marque et je dois dire que, comme je l’ai rappelé, globalement, j’aime bien cette marque sans alcool construite avec un procédé unique et breveté qui leur donne une dimension un peu hydratante. Je lui consacrerai une nouvelle revue (j’en avais déjà écrit une quand j’ai découvert la maison mais il convient d’y revenir car, depuis, elle a évolué) quand j’aurais vraiment réessayé les parfums dont je veux parler en particulier. En attendant, j’ai choisi de vous parler de « Macomba » qui est, il faut bien le dire, la création la plus clivante de toute la collection. J’ai autant été dérouté par son top note que par son évolution. J’ai pris des risques et l’ai mis sur ma peau. Il s’ouvre sur des notes de combava, un petit agrume qui s’apparente un peu au citron, de mandarine et de petit grain de citronnier pour nous emmener sur un coeur de cardamome, de néroli et d’angélique puis un fond de maté, de vétiver et de cèdre. Curieusement, dès la vaporisation, le maté prend toute sa place et gomme un peu les facettes du parfum créé en 2022 par Philippe Paparella-Paris. Je sens même une note un peu animale et je dois dire que le côté thé matcha très amer peut être vraiment dérangeant. En revanche, lorsqu’il évolue, le parfum se pare des notes vertes de l’angélique qui ressortent beaucoup sur ma peau et du côté légèrement terreux du vétiver contrebalancé par la fraîcheur des agrumes. La marque le décrit ainsi : « La dimension vivifiante de l'essence de Mate, associée à des notes vertes et à un combava, enveloppé d'essence de vétiver, font de l’eau de parfum Macomba une senteur vibrante, végétale et vivifiante. Comme une bouffée d'air et de nature. Un bon coup de pouce pour la journée ». Le moins que l’on puisse dire est que « Macomba » est déroutant, changeant et particulièrement difficile à conseiller tant son départ est difficile. Pour ma part, j’ai aimé son évolution sur ma peau. Je trouve qu’il se calme, s’adoucit tout en restant un peu frais même si l’amertume du maté demeure. Ce ne sera pas une fragrance pour tout le monde mais il vaut vraiment le coup d’être essayé sur la peau.
« Nuit de Sable est inspiré d'une nuit d'été dans les jardins du Palais Royal. Pour retranscrire ce moment et ce lieu magiques, j'ai souhaité un parfum onirique, très texturé. J'ai travaillé un accord sable chaud, composé de santal bio d'Australie, de fève tonka, et d'une touche de cumin d'Egypte, qui lui confèrent une chaleur sensuelle. Pour le complexifier, et lui apporter un caractère sophistiqué et élégant, j'ai ciselé un cocktail d'épices (cardamome du Guatemala, cannelle de Ceylan et noix de muscade d'Indonésie) sur un absolu de rose de Turquie. C’est un parfum haut en couleurs, chaleureux et envoûtant, qui révèle sur la peau l'ampleur de ses nuances » tels sont les mots de Marie Schnirer pour décrire « Nuit de Sable » qu’elle a créé pour BDK en 2019 et je dois dire que j’étais complètement passé à côté. Il s’agit-là, je m’en rends compte, de l’un des parfums les plus singuliers de la marque et, encore une fois je le trouve tout à fait clivant. Il ne plaira pas à tout le monde tant il est marquant. Après un départ très épicé chaud de cannelle, de cardamome, de noix de muscade et de cumin, arrive un coeur de rose qui est du plus bel effet et se fixe avec un fond d’ambroxan, adouci par des notes de santal, de musc et de fève tonka. « Nuit de Sable » porte tout à fait bien son nom. Il m’évoque le côté presque minéral mais chaud du sable chauffé au soleil et qui commence à se calmer. Je ne peux pas dire si je l’aime ou s’il me rebute. Je sais juste que je ne pourrais pas le porter alors que, sur le papier, il est absolument dans mes goûts. Il y a quelque chose de très addictif dans cette composition sophistiquée et « ethnique » à la fois. Pour moi, il pourrait être le parfum d’un aventurier, homme ou femme d’ailleurs tant il m’évoque le soleil et les grands espaces. C’est un parfum vraiment très original et pourtant j’en comprends parfaitement l’inspiration. Il n’est absolument pas pour moi mais je comprends celle et ceux qui l’aiment et le portent.
À sa sortie, j’avais évoqué « Hazy Rose » créé en 2022 par Ramon Monegal pour sa marque éponyme et ainsi décrit : « A l'aube, lorsque l'obscurité commence à s'estomper avec la lumière naissante et que la chaleur du soleil gagne en intensité, la silhouette de la rose sauvage se brouille à contre-jour. La rosée qui mouille ses pétales s'évapore dans la chaleur des rayons du soleil et crée autour d'elle une aura qui bouge capricieusement dans la brise matinale. La curiosité inhérente à mon métier me pousse à approcher et à savourer cette reine juste au réveil et son parfum est unique. Mon instinct me guide jusqu'au moment où le cœur de la reine se découvre pour entrer, entre rosée et ténèbres, lui voler sa raison d’être ». Je l’ai réessayé récemment et je dois dire que je suis assez impressionné par ce parfum très étonnant tournant autour de la rose. C’est un faux floral, puissant, inattendu et sophistiqué. Déjà l’envolée est étonnante avec des notes de pin, d’armoise mais aussi de fraise et de cassis puis vient un coeur d’oxyde de rose épicé de clou de girofle et de cannelle et enveloppé de jasmin et de bois de cèdre qui se pose sur un fond cuiré aux accents de oud et de mousse de chêne adouci par un accord ambré. Dit comme cela, le parfum peut sembler partir un peu dans tous les sens mais, sur la peau, il revêt une très belle cohérence. Je le trouve d’une grande élégance et il me plait beaucoup même s’il m’éloigne tout à fait de mes goûts habituels et si les molécules de synthèse et les accords sont parfois curieux. Je pourrais tout à fait porter ce parfum qui me semble original mais, curieusement, assez simple à aborder et pas aussi déroutant tant la composition est bien réalisée. J’aime décidément bien « Hazy Rose », il fait partie des parfums de la marque que je préfère. Il se situe entre cuir et chypre, floral et épicé… C’est un parfum inclassable.
Avec la sortie de « Shining Moon » dont je vous ai déjà parlé, j’ai eu envie de me replonger dans la Collection Or de Perris Monte Carlo qui est peut-être celle que je connais le moins alors que la marque est vraiment l’une de celles que je préfère et j’ai réessayé « Essence de Patchouli » qui est vraiment très différent de « Patchouli Nosy Be » dont je parle souvent et qui est issu de la Collection Noire. « Le patchouli pousse en Indonésie, Chine et Inde. L'huile essentielle a une forte odeur boisée, camphrée de mousse humide. La meilleure qualité a une odeur de chocolat amer. L’Essence de Patchouli, un parfum de luxe, une émotion terreuse et exotique qui stimulera vos sens en laissant derrière vous une belle aura nostalgique ». Créé en 2012 par Gian Luca Perris, c’est une interprétation très originale du patchouli avec un départ très épicé de clou de girofle rendu rond et poudré par l’amande et la rose mais aussi mentholé par une très belle note de géranium qui nous emmène sur un patchouli presque en transparence au coeur qui se corse avec un fond doux amer de santal et de labdanum rendu presque gourmand par des notes ambrées et vanillées ainsi que par la présence d’un bois de gaïac magnifiquement travaillé. J’ai posé le parfum sur peau et je l’ai beaucoup aimé. Il est moins franc et net que « Patchouli Nosy Be » mais je lui trouve quelque chose de très addictif. C’est un compromis parfait pour les amateurs de cette matière première qui cherchent un parfum à la fois rassurant et quand même original. Je pourrais tout à fait me l’approprier. Il me plait beaucoup. Il ne correspond pas forcément à mon envie du moment mais j’y reviendrai sans doute un jour.
Voilà, sans vraiment avoir eu de coup de coeur, j’ai aimé les quatre créations que j’ai choisi d’évoquer dans cet article. Je trouve qu’il y en a vraiment pour tous les goûts. Je me suis laissé guider par leur originalité qui est complètement le trait commun entre tous. J’espère vous avoir donné envie de les sentir et de les porter. En tout cas, ce sont trois belles découvertes ou redécouvertes à ne pas rater.