BDK Parfums, chronique d'un succès
Article entièrement réécrit
Compte-tenu du succès absolument incroyable de BDK Parfums, j'ai décidé de réécrire entièrement mon article sur la marque après avoir réessayé presque toutes les créations. Je vous livre donc mon tout nouvel article, complètement modififé. La seule chose que j'ai gardé, ce sont les références que j'ai pu réessayer.
Créée en 2016, ce qui est relativement récent, par David Benedek jeune directeur artistique plein d'idées, « BDK Parfums » est une marque de passionné mais qui s’adresse bien souvent au plus grand nombre. Avec un grand talent et beaucoup de goût, elle revisite et réinvente les beaux classiques de la parfumerie pour leur donner un souffle de modernité. Un peu originales mais rassurantes, reprenant les codes traditionnels, les fragrances de cette maison sont toutes belles, relativement faciles à porter et très bien réalisées. Je trouve qu’avec la collaboration de parfumeurs aux univers aussi différents que Violaine Collas, Amelie Bourgeois, Mathilde Bijaoui, Marie Schnirer, Julien Rasquinet, Camille Leguay, Ralf Schwieger et Anne-Sophie Behaghel et aujourd'hui Dominique Ropion pour "Vanille Leather", David Benedek a su créer une marque intéressante et que chaque jus a sa spécificité tout en gardant un esprit cohérent. J’ai déjà pas mal parlé de « Rouge Smoking » que j’aime particulièrement et, très récemment, de « Crème de Cuir » mais il y a d’autres parfums qui m’ont « tapé dans le nez » et j’avais envie d’en faire une revue depuis déjà longtemps. Il m’a fallu remettre mon nez dans mes doses d’essai pour m’y mettre et je vais essayer d’être aussi précis que possible pour vous faire partager mes préférences.
"C’est une belle journée. Le ciel est bleu.Elle se dirige vers son dressing, choisi une robe légère. Elle enfile une paire d’escarpins et serre sa taille avec une ceinture. Comme chaque matin, elle se dirige vers sa terrasse fleurie, qui surplombe les sublimes jardins du Palais Royal. Elle est heureuse et pense à sa journée en souriant". Créé en 2016, « Bouquet de Hongrie » est un ambré floral comme je les aime. S’il était sorti en un autre temps et dans une marque du circuit sélectif avant que tout ne soit standardisé, nul doute qu’il serait devenu un grand classique. L’ouverture de bourgeon de cassis et de poire nous conduit sur un coeur de rose de Turquie et de jasmin soutenu par une note de lorenox, une molécule de synthèse et un fond de musc, d’ambre et de cèdre. J’ai tout de suite accroché. C’est un parfum qui m’emmène complètement dans mes souvenirs. La note de jasmin est particulièrement bien travaillée, très fine et subtile et je trouve qu’elle s’allie parfaitement avec le départ à la fois frais et suave. Le parfum, lorsqu’il évolue, s’enrichit de toutes ses notes de tête et de coeur pour se complexifier sur le fond. « Bouquet de Hongrie » est une vraie belle création et j’avoue que c’est uncoup de coeur pour moi. Peut-être même qu'il est, à ce jour, le parfum que je préfère dans la marque.
Créé également en 2016, « Pas Ce Soir » est un parfum à la fois fleuri et faussement chypré. La marque en décrit ainsi l'inspiration : "Comme tous les jeudis, elle aime se rendre dans ce cabaret de la place de la Concorde. Assise au bar, elle commande un whisky avec de la glace et allume une cigarette. Elle sourit, se lève et part danser seule. Mais vers les deux heures du matin, alors qu'un dandy à l’allure assurée et mystérieuse l’invite à danser... Elle finit par lui murmurer quelques mots au creux de l’oreille... « Pas ce soir »". L’ouverture épicée, entre poivre et gingembre, s’harmonique parfaitement avec une mandarine plus douce que la bergamote. Le coeur est très surprenant. Il est construit autour d’une note de coing que je trouve assez rare en parfumerie, c’est dommage d'ailleurs, et est adouci par un jasmin toujours aussi bien travaillé. Le fond de cashmeran, et de patchouli est très "dans l'air du temps". Pour écrire cet article, j’ai essayé « Pas Ce Soir » totalement. J’étais complètement passé à côté lorsque l’on me l’a fait découvrir et c’est bien dommage. Son développement est super beau et surprenant. Là, on est assez loin du classicisme élégant de certaines créations de la marque, c’est un vrai parti pris d’originalité et sans doute l’un des parfums les plus singuliers que je connaisse dans la marque. Il ne plaira pas à tout le monde mais, l’idée d’une création d’auteur (et non d’interprète d’un brief très étudié) c’est aussi cela. J'ai un peu moins accroché avec la version extrait sortie récemment mais c'est un ressenti tout personnel.
J’ai un faible pour les parfums épicés et lorsque j’ai lu le nom « Nuit de Sable » j’ai tout de suite voulu le découvrir. "Nuit de Sable est inspiré d'une nuit d'été dans les jardins du Palais Royal. Pour retranscrire ce moment et ce lieu magiques, j'ai souhaité un parfum onirique, très texturé. J'ai travaillé un accord sable chaud, composé de santal bio d'Australie, de fève tonka, et d'une touche de cumin d'Egypte, qui lui confèrent une chaleur sensuelle. Pour le complexifier, et lui apporter un caractère sophistiqué et élégant, j'ai ciselé un cocktail d'épices (cardamome du Guatemala, cannelle de Ceylan et noix de muscade d'Indonésie) sur un absolu de rose de Turquie". Créé par Marie Schnirer en 2019, c’est un jus pour le moins singulier puisqu’il s’ouvre directement sur une très belle variété de cardamome du Guatemala, de noix de muscade et d’un bois de santal très crémeux. Le coeur de rose et de notes de sables (il n’y a pas d’autre mot), est particulièrement surprenant. Le fond d’ambroxan et de fève tonka est soutenu par des muscs blancs et une overdose de noix de muscade. En fait, il est très éloigné de ce que je porte d’habitude et j’ai été un peu déstabilisé lorsque je l’ai essayé. Je m’attendais à un travail un peu autour de l’immortelle comme dans « Sables » d’Annick Goutal par exemple et je n’avais pas lu les notes. En fait, il est presque moins oriental et plus épicé. Je ne sais pas comment le décrire. Je l'avais bien aimé quand j'ai écrit la permière version de cet article mais je l'ai réessayé récemment et, franchement, je pourais tout à fait le porter. Il est un peu plus clivant que les précédents mais il reste facile à aborder et vraiment très joli sur ma peau.
"Un élixir dense et puissant pour rendre hommage à la plus célèbre des fleurs de la parfumerie : la rose. Un parfum qui parle de textures centrées autour d'une sensualité orientale et mystérieuse et imaginé comme des strates de teintes rose, pourpre et prune. L'addiction opulente du tabac, renforcée par la gourmandise de la prune et du chocolat, rencontre la majestueuse rose turque. Une douce volupté prolongée par les notes profondes et mystiques de patchouli et de labdanum". J'ai redécouvert « Tabac Rose » créé, en 2020, par Julien Rasquinet et je dois dire que, s'il me surprend moins que certaines créations de ce parfumeur dont j'aime beaucoup le travail, il est plein de charme et terriblement efficace. On y retrouve, en tête, une dualité entre la note de prune que j’aime décidément beaucoup et de poivre rose. Le coeur de cannelle, de chocolat et de rose est presque gourmand mais surtout très épicé et le fond de ciste et de patchouli est finement enveloppé de notes de tabac blond. Je pense que le patchouli utilisé doit être vraiment d’une grande qualité car j’en reconnais les effluves un peu terreuses. C’est un parfum de paradoxes, entre cette rose de Turquie, opulente, presque truffée, cette note de prune un peu liquoreuse et le fond tabac et patchouli, on ne sait plus vraiment où on en est au fur et à mesure que le parfum se développe. Sur ma peau, il passe par plusieurs stades. J’adore le départ. Je suis un peu dérouté ensuite mais je reconnais que la création est pour le moins intéressante. Je sais apprécier la qualité de la création mais ce n'est pas nécessairement un parfum pour moi car il se fait moins prune et plus corsé sur ma peau.
Il m’est quand même difficile d’écrire une revue sur BDK Parfums sans revenir sur « Rouge Smoking », créé par Amélie Bourgeois en 2018 car c’est vraiment un coup de coeur mâme s'il n'est pas vraiment pour moi. "À la tombée de la nuit le ciel devient brumeux et laisse entrevoir à travers la fenêtre la lumière rouge du moulin. Les klaxons retentissent et un esprit de fête s’invite dans la ville. Devant sa coiffeuse, elle se prépare et se maquille. C’est le temps de la mise en beauté.. Elle rejoint l’autre pièce et entre dans son dressing. Elle choisit son smoking qui l’inspire et qui souligne son corps. Le chic parisien, elle connait bien ! Et la mode aussi ! Son allure bohème chic et son énergie charnelle marquent son empreinte dans les rues. Si belle et mystérieuse..." Je l’ai aimé dès que je l’ai senti et j’ai été complètement emballé lorsque je l’ai essayé. Non seulement, son évolution est extraordinaire mais sur moi, sa tenue est un peu limitée ce qui n’est pas pour me déplaire. C’est un inclassable. Le départ de bergamote, de poivre rose et de cerise est très surprenant d’autant que la parfumeuse a plutôt exploité le côté amandé du noyau plutôt que la facette très suave du fruit. Cette impression est confortée par un coeur construit autour de la fleur « poudre d’amande » d’héliotrope renforcé par une vanille très élégante et aromatique. Le fond de cashmeran et de muscs blanc est enrichi par la fève tonka et poudré une nouvelle fois par une note de violette particulièrement bien vue. Je sais que « Rouge Smoking » rencontre un grand succès et je le comprends car j’ai vraiment tout de suite aimé dès que je l’ai essayé. Je l’ai même envisagé mais, et je n'aime pas dire cela, il est peut-être un rien trop féminin pour moi.
Globalement, j'aime bien les créations de la marque et je pense que David Benedek a bien su trouver sa place, entre classicisme et élégance avec quelques petits twists originaux de temps à autres. Je pense que, à l'instar de plusieurs marques, BDK Parfums pourrait constituer un permier pas vers une parfumerie plus clivante, plus singulière. C'est un peu une modernisation, flacon par flacon, des grands thèmes de la parfumerie. Quand je pense à cette maison, les mots qui me viennent sont "efficace et élégant". Parfois, je n'en demande pas plus.
Sortir de février
Vert, fougère, aromatique, floral, chypré, cuir ou oriental, quel seront vos parfums de printemps. Les jours agrandissent et me donnent envie de regarder vers le soleil pour vous suggérer quelques parfums qui m’ont beaucoup plu et qui tendent vers des jours plus cléments et plus ensoleillés. J’ai choisi de vous parler (à nouveau sans doute) de quatre coups de coeur, récents ou plus anciens, qui m’évoquent la sortie de l’hiver et des journées plus ensoleillées sans pour autant m’emmener vers l’été. J’ai opté pour quatre créations dont les univers sont très différents afin qu’il y en ait un peu pour tous les goûts. Il y a un petit jeu : dans ma sélection, il y a un parfum que j’ai envie de porter et qui est un peu plus qu’un coup de coeur. Le devinerez-vous ?
« Une explosion de baumes raffinés apportent une opulence dorée au sillage gourmand de cette fragrance ». J’ai redécouvert « Pain en Châtaignier » créé pour Scents of Wood par Meabh McCurtin à qui l’on doit également le très beau « Bonne Chauffe » pour Frapin et je dois dire qu’il est à la fois chaud et froid, clair et obscur. Il pourrait tout à fait nous faire sortir d’un hiver dont on a un peu assez avec élégance. Bien sûr, il s’ouvre avec la note hivernale de châtaigne mais elle est rehaussé de la douce cardamome et du romarin puis vient un coeur de benjoin et d’encens et enfin un fond de patchouli, de tonka et de santal. Quand on lit la description, on pourrait se dire qu’il s’agit uniquement d’un parfum d’hiver mais les notes épicées et aromatiques lui donnent un petit côté plus frais qui, sur ma peau, me fait penser à une transition de saison. C’est un parfum onéreux, pas forcément facile et il faut vraiment l’essayer. Il s’avèrera un peu clivant. Sur touche, il ne m’avait pas vraiment séduit mais sur la peau, je l’ai trouvé vraiment très intéressant. Pour moi, c’est une création pleine de contraste. En tout cas, surtout ne l’achetez pas à l’aveugle, allez l’essayer !
Il fait encore froid alors peut-être qu’un fruité aromatique un peu opulent pourrait être de mise. Il y a quelques mois, j’ai découvert « Olé » créé par Ramon Monegal pour sa collection classique en 2019 et, alors que sur le papier il a tout pour me déplaire, je suis tombé sous le charme. Comme quoi, on ne le dira jamais assez, en parfumerie, il ne faut jamais dire jamais. Le parfumeur le décrit ainsi : « Olé ! Mon exclamation préférée ! Un mélange de folklore et de culture espagnole. Une passionnante exploration de la capacité de s'émerveiller face à l'art. Un court instant d'épanouissement et d'émotions intenses ! Olé à l'art ! Liberté, passion, provocation, imagination, originalité, émotion, joie et vie ! ». Ça donne envie ! L’envolée n’est pas ce que je préfère puisque la parfum s’ouvre avec cette note synthétique de framboise chère à Ramon Monegal mais qui n’est vraiment pas ce que j’aime. Heureusement, elle est arrondie par des accords de datte et d’ananas puis vient un coeur surprenant de cèdre, d’orchidée et de jasmin qui nous conduit sur un fond de vanille, de muscs et de sapin baumier. Aromatique, boisé mais tout de même fruité, « Olé » est un parfum complètement atypique, en tout cas pour moi. Sur ma peau, il matche très bien et m’éloigne de mes goûts habituels. Il ne ressemble en rien à ce que j’aurais pensé porter et pourtant, il m’évoque une sortie d’hiver toute en douceur et en délicatesse.
Et si on optait pour un parfum un peu plus frais mais très sophistiqué. Je pense, par exemple, à « 1979 New Wave » créé par Dominique Ropion en 2020 par Dominique Ropion pour Les Bains Guerbois. « Un soir aux Bains Douches. Sur scène, encore un nouveau groupe anglais. Un jeune chanteur au charisme magnétique. Un concert légendaire. Un public enthousiaste, mixte, surfant sur une vague d’émotions, de musique, de parfums où se mêlent menthe fraîche, menthe poivrée, iris, cèdre et santal. Nouveaux Romantiques. Sombre ou joyeuse vision de la vie ? Les deux sans doute ». Après un départ étrange de menthe et d’aldéhydes, un coeur poudré de cèdre et d’iris prend toute sa place et se pose sur un fond ambré et musqué, adouci par le bois de santal. Un parfum qui mêle fraîcheur et douceur et qui m’évoque, c’est vrai, des années 80 bigarrées et particulièrement libres. Dominique Ropion s’est éclaté avec une création qui ne ressemble à rien d’autre. En tout cas, il a inventé un parfum à la fois lié à cette époque festive et à notre temps, plus politiquement correct, moins étonnant. Sur ma peau, il a une durée de vie qui n’est pas exceptionnelle mais je dois dire que je le trouve tellement réussi que j’ai adoré le réessayer pour vous en proposer une impression, si fugace soit-elle.
« En tête, un festival de verdure : une fraîcheur menthe poivrée, galbanum vert, lentisque et feuilles de violette. Un cœur floral de rose, muguet et des notes végétales vertes, sauge et absinthe. Un fond multi facettes : foin, patchouli, accord ambre gris et musc. Un floral qui se pique de vert ». C’est un hasard mais le parfum le plus frais et le plus vert de ma sélection est également signé par Dominique Ropion. Il s’agit de « Malamata » qu’il a créé en 2022 pour la collection Les Simples de Roos & Roos et qui a obtenu le FIFI Award du meilleur parfum d’une marque de niche indépendante en 2023. Je dois dire que c’est un coup de coeur également. Il ne ressemble à rien d’autre et mon impression est assez similaire à ce que j’ai ressenti en découvrant « Synthetic Jungle » créé par Anne Flipo en 2021 pour Les Éditions de Parfums Frédéric Malle. Ce sont deux bijoux du genre qui sont à la fois parfaitement réussis et quand même assez clivants. « Malamata » s’ouvre avec une envolée de menthe poudrée par la feuille de violette et qui nous emmène sur un coeur de rose, de muguet et de sauge sclarée très improbable dans cette composition. Le fond de patchouli et d’ambre gris ne nuit absolument pas à la fraîcheur de ce parfum printanier tout en finesse et ciselé comme une feuille de lierre. J’aime beaucoup ce parfum. Il a fait partie de mes engouements l’an dernier. Je le réessaye avec énormément de plaisir.
Voilà, du plus corsé au plus frais, quelques créations qui me paraissent logiques pour aller vers les beaux jours. Je les aime toutes mais j’ai vraiment un engouement pour l’une d’entre-elle qui dépasse un peu celui que je peux éprouver pour les autres; Peut-être devinerez-vous… Je n’en dis pas plus, je vous laisse sentir.
Nouveautés février 2024
Comme chaque mois, je voudrais vous présenter les nouveautés que j’ai pu découvrir au fil de mes pérégrinations parfumées. Je dois dire que, si janvier a été un peu décevant, il n’en n’est pas de même pour février. En effet, entre sorties attendues et surprises, je dois dire que je me suis beaucoup plus amusé à faire des découvertes. J’ai d’ailleurs commencé à élaborer mon top 20 qui sortira en décembre. Je n’en suis, pour l’instant, qu’aux premiers balbutiements mais c’est assez encourageant car la créativité commence à être de mise. J’espère que cet article vous donnera envie de faire des découvertes également et, tout au moins d’aller sentir et peut-être vous faire des envies. Comme toujours, nous essayerons d’échanger sur le sujet. En attendant, voici mon ressenti sur ce que j’ai pu sentir ou essayer.
Je sais qu’il y aura un nouveau grand féminin chez Hermès dans la collection féminine et que c’est un chypre. En attendant ce lancement en septembre, je passe mon tour sur « H24 Herbes Vives » que j’ai déjà oublié mais j’ai découvert la nouvelle Hermessence créée par Christine Nagel. Il s’agit de « Oud Alezan », un accord de oud et de rose pas comme les autres dont l’idée est venue de la rencontre de la créatrice et d’un cheval. Je n’ai encore rien lu sur ce parfum mais je l’ai essayé et je dois bien dire qu’il m’a bluffé. Le oud est élégant, occidentalisé et il s’harmonise avec deux sortes de roses. La premières est très « pétale », florale et nette et la seconde, plus oxydée et vraiment très surprenante. Sur ma peau, il sen résulte un parfum qui dévoile une certaine originalité et presque une fraîcheur inattendue. La couleur alezane est un roux flamboyant qui peut même devenir plus foncé que l’acajou. On parle alors d’alezan brulé. Je la connais bien et je trouve que ce parfum l’illustre parfaitement. En général, je ne suis pas un fou de l’association oud et rose mais Christine Nagel me réconcilie avec ce type de créations car je la trouve d’un très grand chic. Je ne sais pas si je pourrais porter « Oud Alezan », il faut que je l’essaye un peu mieux mais, franchement, comme ça, je suis assez séduit.
« 312 Saint-Honoré célèbre l’ouverture de la première boutique de la Maison à Paris. 2 - Une création au sillage délicat et envoûtant où se mêlent baie rose, muscs blancs et fleur d’oranger. 3 - Boisé, musqué et floral. 4 - Inspiré des matières premières emblématiques qui constituent le lieu; le verre, le béton et la pierre blanche de Bourgogne » tels sont les mots de la marque pour décrire l’inspiration de « 312 Saint-Honoré » qui coïncide opportunément avec la première boutique parisienne BDK et qui a été composé par Alexandra Carlin. Le départ est très fusant avec le côté vert la racine d’angélique et poivré de la feuille de baie rose mais aussi l’extrait de baie en lui-même. Après ce départ qui nous accroche, le parfum évolue vers un coeur de fleur d’oranger, de fève tonka et d’iris puis un fond d’ambroxan, de muscs et de oud que je ne sens pas tant que ça. Il en résulte un parfum hyper facetté avec des étapes d’évolution assez différentes les unes des autres. Pour moi, « 312 Saint-Honoré » est un peu en rupture avec le côté impeccable et foisonnant voulu, pour ses parfums, par David Benedek. Il est plus stylisé, plus abstrait et résolument contemporain. Je pense qu’il veut reprendre les codes de la boutique mais je ne l’ai pas encore visitée alors je m’avance peut-être. En tout cas, même s’il est un peu plus atypique, c’est un parfum efficace qui, j’en suis sûr, rencontrera son public.

Un oud dans la collection Signature de Tom Ford cela ne m’a pas surpris mais je dois dire que « Oud Minérale » n’est pas vraiment proche de ce à quoi je m’attendais. Il a du sortir il y a déjà quelques temps mais je ne l’ai senti que récemment. « La chaleur du bois de Oud est rehaussée par la vague rafraîchissante du Poivre Rose tandis que le Sapin Baumier et l'Ambre Gris apportent l'équilibre parfait à ces notes à la fois terrestres et marines. Une explosion de bois épicés embrasse les muscs sensuels saisissant la peau pour une fusion d'éléments forts en contrastes ». Au premier abord, j’ai été assez séduit par l’association en tête de notes marines que je crains pourtant la plupart du temps avec le poivre rose légèrement épicé qui s’enrichit d’un coeur avec des accords oud et ambre gris et un fond de styrax et de sapin baumier. Honnêtement, je ne peux pas dire que je suis complètement conquis au bout du compte. Je l’ai posé sur ma peau et je trouve que l’évolution est peu convaincante. C’est un parfum très synthétique, très linéaire qui n’a pas vraiment su retenir mon attention. Je ne suis pas toujours très attiré par les parfums Tom Ford et, une fois de plus, « Oud Minérale » me laisse assez indifférent. C’est ainsi et je n’y peux rien. En revanche, il est suffisamment consensuel pour trouver son public et tant mieux car il en faut pour tous les goûts.
« Le cœur est en effet un puissant symbole de vie et d’amour. Le cœur est associé à l'amour, à la passion, à l'émotion et à la romance depuis des siècles, la flèche de Cupidon perçant le cœur étant une image bien connue dans l'art et la littérature. Le cœur est la source de nos émotions et de nos désirs les plus profonds, il est le lieu où réside notre moi le plus authentique. Âme du Cœur est l'amour, l'âme du cœur. Précieuse comme un rubis, explosive comme une bombe et audacieuse comme une épice. Sa lumière est votre cœur intérieur »… Les mots de Liquides Imaginaires pour expliquer l’inspiration de « Âme du Coeur » Créé par Louise Turner sont tout en programme et je dois dire que je suis très emballé par ce parfum que j’ai essayé sur ma peau et que je trouve, il faut le dire, vraiment très réussi. Il s’ouvre avec une envolée très complexe de mandarine, de cardamome, de résine d’élémi, de pamplemousse que je sens beaucoup, de poivres rose et noir, de cyprès, de gingembre et d’orange sanguine qui nous emmène sur un coeur de cacao, de pomme et de bois de gaïac puis se pose sur un fond de fève tonka, de vétiver, de cèdre et de vanille. Tout comme « La Beauté du Diable », le premier opus des Eaux de l’Âme, « «Âme du coeur » est vraiment une très belle création et je dois dire qu’il surprend, déroute, séduit… Sur ma peau, l’évolution est vraiment élégante et, en même temps, pas convenue du tout. Je trouve ce parfum vraiment incroyable. Oui, je pense qu’il sera dans mon top 20 2024 car, vraiment, c’est un coup de coeur. Je n’en n’attendais rien mais, vraiment, il y a quelque chose de très addictif dans cette composition.
Je l’ai découvert un peu avant sa sortie et j’avoue que j’ai bien aimé « Magic Mushrooms », le tout nouveau parfum de la maison polonaise Bohoboco. C’est un néo-chypré vert et terreux très bien réalisé qui est supposé évoquer un champignon un peu rêvé voire hallucinogène, n’ayons pas peur des mots. Il s’ouvre avec une note amère de pamplemousse et verte de cyprès adouci par la cardamome puis, après une courte évolution, le coeur, très sophistiqué est composé de cassis, de notes vertes, de clou de girofle qui donne quelque chose de très vif à la création, de davana, d’immortelle, de chanvre, de lavande, de thym et d’ylang-ylang qui entourent un accord champignon. Le résultat est un peu insaisissable et passablement élégant puis le fond, classique, mousse de chêne, patchouli et vétiver est rehaussé de notes marines. Je suis assez emballé par ce parfum. Je le trouve très original et, pourtant, relativement facile à porter. La marque explique l’inspiration de ce chypre plus que moderne : « Le parfum incarne la transformation, la magie spirituelle et la dimensionnalité, débordant d'ingrédients non conventionnels et énergiquement extraordinaires. La composition, fusionnée avec des notes de cyprès apaisants, de pamplemousse vivace et de cardamome curative, regorge de vie, ouvrant les portes de la perception. Le cœur de la composition bat sur un rythme excentrique de champignons magiques et de cassis, enveloppé d'herbes et de l'énergie secrète du davana, de l'ylang-ylang et du cannabis qui élève la conscience. Chaque essence est une clé permettant une proximité avec soi-même, où, à travers l’incroyable pouvoir du thym, de la lavande, du clou de girofle et de l’immortelle, la magie s’entremêle au quotidien. C'est un chemin qui mène à l'âme, où, sous l'ombre des notes de liqueur, de patchouli, de vétiver et de mousse, se cache la promesse de dimensions plus profondes de l'existence. Cette composition magique dévoile le paysage inexploré de l'âme, où la magie n'est pas seulement une promesse, mais un espace où chaque « maintenant » devient une éternité »… tout un programme.
Céline Ellena offre une fois de plus une pépite à la très traditionnelle maison Houbigant avec un nouvel opus de la collection Les Matières. Un floral fruité aquatique appelé tout simplement « Pétales de Magnolia ». J’ai envie de dire : « enfin un beau floral fruité ! » qui tombe à pic. C’est un bijou qui, je l’espère, rencontrera le succès qu’il mérite. Franchement, sur le papier, je n’étais pas sûr d’aimer mais quand je l’ai posé sur ma peau, je me suis fait plaisir même si je le considère quand même comme la quintessence d’une certaine féminité, actuelle, moderne, presque « pirate » ! « Une composition multifacette et puissante Pétales de Magnolia rappelle un printemps ensoleillé. Chaque feuille et chaque fleur respire un pur bonheur et est une ode à la douce caresse du vent sur le corps engourdi par l’hiver. Le magnolia est un symbole de fidélité et nous rappelle la force et la pureté des sentiments. Cela annonce la fin de l’hiver et le début du printemps. Pétales de Magnolia est un parfum printanier qui enchante les sens. Un parfum qui dégage une pure joie et qui nous réveille ! Pétales de Magnolia s'ouvre sur des notes douces et fruitées de poire asiatique et d'agrumes frais. Les fleurs de magnolia créent une note de cœur crémeuse et légèrement sucrée qui se termine par des notes chaudes et sensuelles de bois et de musc ». L’envolée de poire asiatique aussi appelée nashi se pare d’une facette pamplemousse et d’une autre menthe poivrée en touches puis vient un coeur aquatique de magnolia arrondi par la fleur de cocotier dont je n’identifie pas vraiment l’odeur et un versant abricot très tendre. Le parfum est soutenu en fond par des notes de santal et de fève tonka enveloppés de muscs blancs. Avec « Pétales de Magnolia », Houbigant continue la modernisation de la collection Les Matières initiée par « Pivoine Souveraine » l’an dernier. Encore une fois, les ingrédients naturels sont de belle qualité et la composition se fait originale. Pour moi, c’est carton plein.
« Embarquez pour un voyage olfactif sans précédent avec East. L'oud envoûtant se mêle à la framboise, au cuir et à l'ambrox pour créer un parfum d'une allure inégalée. ». Créé par Olivier Cresp pour sa marque Akro, « East » était tout d’abord une exclusivité pour Harrod’s et, ça y est, le parfum débarque sur le continent. La maison en explique ainsi l’inspiration : « L'un des endroits préférés d'Olivier est les Émirats arabes unis, un lieu de pouvoir et d'intrigues profondes, qui s'accompagne d'un ensemble de senteurs distinctes. Cette partie du monde est à jamais liée à l'odeur de l'oud, l'huile boisée riche et mystérieuse que l'on brûle dans toute cette région. En hommage aux Émirats arabes unis et à sa propre passion pour les voyages, Olivier a créé un nouveau parfum : East, un parfum inspiré des marchés de rue de Dubaï et des maisons accueillantes des Emirats. Un parfum qui vous transportera à tout moment ». Depuis quelques semaines, je me suis complètement plongé dans l’univers de la marque et je dois dire que, si les premières créations étaient particulièrement clivantes, les récentes me paraissent un peu plus faciles à aborder. « East » est un cuir-oud plutôt classique avec un départ de framboise et de fruits rouges, un coeur basé sur un accord cuir et un fond de oud et d’ambroxan. Élégant, facile à porter, « East » est, pour moi, sans doute un oud très « à l’occidental », facile à porter, toujours de très bon goût et… allez, j’ose le dire… impeccable ! C’est un joli parfum, très sage, peut-être un peu trop pour la marque. Je ne peux pas dire qu’il soit pour moi mais je ne doute absolument pas qu’il trouve son public car toutes les notes se mêlent avec chic et aucune faute de goût n’est possible avec ce parfum. Je dois dire que je le trouve presque pas assez addictif pour être dans le thème. Il me laisse une impression de « déjà senti », peut-être en moins joli mais pas assez pour qu’il soit un coup de coeur… J’ai senti d’autres créations à sortir dans la maison Akro qui m’ont beaucoup plus convaincu.
« Une vanille boisée intoxicante et nostalgique à la fois. Une note à part, présente dans tous les esprits et pourtant si souvent mal comprise, dont la douceur emplit l'âme de confort et de douceur tout en dérangeant presque par sa sensualité en filigrane ». « Vanilla en Bourbon » est, pour l’Europe, une nouveauté de la maison Scent of Woods mais il est, en réalité, sorti outre-Atlantique en 2022. La marque ne communique pas sur le parfumeur qui l’a réalisé mais je dois dire que je le trouve très réussi même s’il est vraiment ultra éloigné de mes goûts. Il s’ouvre sur une note de citron fusante associée à la cannelle et à la cardamome et j’avoue que j’aime beaucoup l’envolée. Puis vient un coeur de myrrhe épicée elle aussi qui me surprend et le parfum, après un long temps, se pose sur un fond de vanille, de résine Oliban et de gaïac. Pour ma part, je suis très fan des notes de tête mais j’ai un peu plus de mal avec le côté liquoreux des accords de coeur et de fond. C’est une très belle création. Le résultat est beau, très fin et élégant mais, pour moi, ce n’est pas un coup de coeur. Je me suis un peu remis aux orientaux mais celui-ci n’est pas tout à fait dans mes goûts, ce qui ne m’empêche pas de reconnaitre qu’il est très bien réalisé et qu’il peut avoir, pour les amateurs, un côté complètement addictif. Je suis assez fan de plusieurs créations de la marque mais j’ai du mal à en trouver une qui soit vraiment pour moi (hormis peut-être « Vétiver en Fleurs ») et je change tout le temps d’avis. Je dois aussi reconnaitre que j’ai un peu de mal, une fois n’est pas coutume, avec le flaconnage. Question de goût… En tout cas, l’arrivée en France de « Vanilla en Bourbon » est une bonne nouvelle pour les amateurs de vanilles boisées.
Depuis que j’ai découvert Meo Fusciuni, la maison du parfumeur italien Giuseppe Imprezzabile, je suis impressionné pas son style vraiment personnel. Voilà une marque qui peut vraiment se réclamer de la parfumerie de niche ! J’étais donc très curieux de découvrir sa toute dernière création dont le nom énigmatique est « Last Season ». Pour en expliquer l’inspiration, le parfumeur résume sa démarche par ces mots : « Last Season capture l’essence d’une chaude matinée d’août sur l’île moussue de Suède. Les notes aromatiques racontent l'arrivée parmi les roches sombres de la Baltique, où la nature se manifeste dans toute sa beauté ancestrale. Ici, immergé dans le calme d'un paysage verdoyant et terreux, vous vous aventurez au cœur de la nature, à l'écoute de ses parfums et à la découverte de son essence. Fermez les yeux et laissez-vous transporter par la symphonie sensorielle de Last Season. Ressentez la chaleur du soleil sur l'écorce des arbres, respirez le parfum des animaux qui veillent depuis leurs tanières et laissez-vous envelopper par les notes boisées, vertes et marines qui composent ce parfum unique ». J’avoue que mon imaginaire m’éloigne un peu de son inspiration. La création est inclassable, très sophistiquée et complexe avec un départ d’immortelle, de camomille, d’armoise, de laurier, de pin canadien, de galbanum d’algues (que l’on retrouve tout au long de l’évolution, de maté, de foin et de ciste. Il y a quelque chose de très animal et déroutant lorsqu’on le vaporise puis vient un coeur où l’on retrouve les algues et le labdanum associés au bois de santal, au patchouli, à la mousse de chêne, au tabac, aux muscs et au bois de bouleau puis un fond de myrrrhe, d’encens, de cuir, d’oud et de castoréum. Très franchement, ce parfum m’a vraiment bluffé. Je dois dire que je le trouve insaisissable. Parfois, il est très profond et particulièrement animal, à d’autres moments, c’est un cuir de Russie très sombre et, pendant d’autres temps, il se fait résineux et froid. Vous l’aurez compris, je ne pourrais absolument pas le porter mais je le trouve complètement fascinant et j’en admire l’originalité. Nul doute qu’il se retrouvera dans mon top 20 en décembre avec une mention spéciale pour la créativité.
Voilà, je m’en tiendrai là pour février. Je trouve que les sorties sont diverses, variées, intéressantes et je commence à m’enthousiasmer et à construire un top 20 que je modifierai toute l’année. En tout cas, j’ai pris beaucoup de plaisir à découvrir toutes ces nouveautés. Les parfumeurs ont rivalisé d’imagination pour nous offrir des parfums inattendus ou attendus… Enfin je ne sais pas. Peut-être me direz-vous si vous avez aussi des coups de coeur dans cette sélection.
Exquise trouvaille : "Bloody Wood"
J’avais déjà évoqué « Bloody Wood » lorsque j’ai écrit une série d’article complète sur Liquides Imaginaires mais je voulais y revenir car je l’ai remis sur ma peau et vraiment, c’est un coup de coeur ! Issu de la trilogie Les Eaux Sanguines et sorti en 2013, il est, à mon sens, l’un des parfums les plus réussis de cette maison étonnante qui ne cesse de me surprendre et pourtant il y en a beaucoup. « Le vin, don des dieux, exalte les passions intellectuelles et sensuelles depuis la plus haute antiquité. Bloody Wood est un duel amoureux, silencieux, qui libère sa vérité dans son «jus». Construit comme un duel olfactif, les notes de tête froide et métallique sont celles de l’arme blanche, du sang. Le jus rouge de la cerise et de la framboise, les unis en notes de cœur, avant de laisser place à la chaleur du fond boisé du fût de chêne. Un parfum d’oppositions ». Utiliser le vin comme inspiration en parfumerie est quand même vraiment une idée risquée et pourtant, le parfumeur (la marque ne communique pas son nom) a vraiment réussi son pari. En effet, la composition s’ouvre sur des notes de lie de vin blanc, de violette enveloppées d’une rose oxydée très déroutante. Le coeur est tout aussi inédit avec un accord de vin rouge fruité associé à des accords cerise et framboise. L’évolution est relativement rapide sur ma peau et je retrouve un fond boisé enrichi du côté fruité et surtout d’une mousse de chêne absolument omniprésente et d’une très grande qualité qui contrebalance très bien les accords de bois rares et de santal.
« Construit comme un duel olfactif, les notes de tête froides et métalliques sont celles de l’arme blanche, du sang. Le jus rouge de la cerise et de la framboise, les unis en notes de coeur, avant de laisser place à la chaleur élégante du fût de chêne ». Utiliser la mousse de chêne, même reconstituée, dans une composition autre qu’un chypre ou un cuir de Russie n’est, finalement, pas très courant en parfumerie. Avec « Bloody Wood », Les Liquides Imaginaires nous entraînent dans un univers dense, boisé, floral et fruité à la fois avec cette note de fond absolument sublime. J’ai toujours un peu de mal à trouver « mon » parfum dans la marque mais je pense que je pourrais tout à fait m’approprier celui-ci, sur ma peau, la rose, la note un peu poudrée de violette et la mousse de chêne prennent le pas sur les accords des fruits et de bois pour donner un ensemble absolument harmonieux qui me surprend à nouveau. J’avais essayé ce parfum il y a quelques mois et je l’avais bien aimé mais peut-être pas autant qu’aujourd’hui. On évolue tout le temps et c’est vraiment très agréable. Ce parfum, qui a fêté ses dix ans l’an dernier, me plait beaucoup plus que lors de ma première approche. En tout cas, il faut absolument l’essayer. Un achat à l’aveugle est absolument proscrit.
Trois floraux incontournables pour moi
Je suis né au printemps… Peut-être que j’ai toujours été bercé par l’odeur des fleurs… Je ne sais pas. En tout cas, les parfums floraux ont eu souvent ma préférence et je me dis qu’il n’y a peut-être jamais de hasard. Pour répondre à la question de Diane, fidèle lectrice de ce blog depuis déjà longtemps, si je porte surtout des chypres, je n’en n’oublie pas pour autant les vrais compositions fleuries et il y en a qui me touchent toujours autant et qui font partie de mes signatures. J’ai porté beaucoup ces derniers temps « Le Grand Jeu » de Camille Goutal et Isabelle Doyen pour Voyages Imaginaires, « Carnation » de Mona di Orio ou encore « Ylang Ylang » Nosy Be de Perris Monte Carlo et j’ai pris beaucoup de plaisir. Je vais donc répondre à travers cet article à ce petit défi que m’a lancé Diane : développer mes impressions de trois floraux qui ont vraiment beaucoup marqué ma vie.
Le premier parfum qui me vient à l’esprit a été composé par Christopher Sheldrake pour Serge Lutens en 2001 et, après avoir été supprimé un temps, il vient de ressortir en flacon de table. Vous l’aurez deviné, il s’agit de « Datura Noir » qui, pour moi, marque le début de mon goût pour les floraux. La tubéreuse associée à des notes d’amande et de vanille se fait onirique et pourtant concrète. Le parfum, même s’il n’a plus la tenue d’autrefois, m’enveloppe toujours pareil à un foulard de soie. Comme toujours, Serge Lutens ne communique pas sur une éventuelle pyramide olfactive mais, pour moi, cette datura vénéneuse et envoûtante est là, présente sur la peau. « Datura noir, un parfum persistant, narcotique et hypnotique »… nous dit la marque et je crois qu’en une phrase, tout l’univers de ce parfum incontournable pour moi est résumé. J’ai commencé à le porter je pense, dans les années 2005 ou 2006. À l’époque, la marque était très exclusive et on ne le trouvait pas facilement. Il m’a suivi pendant des années et j’en avais abandonné les autres pour ne porter quasiment que ça pendant au moins un an. C’est un faux solaire en clair obscur qui, lorsque je remets mon nez dedans, me séduit toujours autant. Bien sûr, aujourd’hui, dans la collection noire « Datura Noir » a été remplacée par « La Dompteuse Encagée », plus lumineux et plus moderne (et que j’aime beaucoup) mais, pour moi, il restera mon premier parfum de Serge Lutens.
Le second floral qui me vient à l’esprit est, bien évidemment un Goutal. J’ai hésité à vous parler à nouveau de « Songes » que vraiment j’adore, mais finalement, je vais opter pour un tout autre voyage avec « Un Matin d’Orage » qui m’accompagne chaque été. Créé en 2008 dans sa version eau de toilette par Camille Goutal et Isabelle Doyen, ce floral aquatique est assez différent de l’eau de parfum sortie en 2014. J’aime les deux mais je préfère l’original, plus aquatique et moins tubéreuse. « L'air, encore lourd il y a quelques minutes, est devenu presque frais. On peut sentir la pluie qui vient tout juste de s'arrêter ainsi que le parfum des fleurs de magnolia et de gardénia que la terre mouillée exalte : un véritable moment de grâce. Pour Camille Goutal et Isabelle Doyen, c'est un matin d'orage dans un luxuriant jardin japonais ». Avec son départ de citron, de shiso et de gingembre, « Un Matin d’Orage » EDT m’emmène déjà au point du jour, lorsque le soleil sort après un jour d’été de pluie et mon impression se confirme avec un coeur très aquatique de magnolia rendu plus dense avec le jasmin Sambac. Le fond d’ylang ylang et de bois de gaïac faussement gourmand donne une certaine rondeur à la fragrance. Pour moi et, définitivement, « Un Matin d’Orage » EDT est vraiment un must et j’aurais bien du mal à m’en passer. Il est vrai que le duo Camille Goutal et Isabelle Doyen travaille les fleurs comme personne.
Le troisième parfum qui m’est venu à l’esprit, je l’ai découvert à Dijon dans une boutique qui, hélas n’existe plus, et il s’agit de « Ceci N’Est Pas Un Flacon Bleu 1.2 » créé par Luca Maffei pour Histoires de Parfums en 2017. « Ceci est une explosion, une diffraction de la lumière révélant ses couleurs. Des éclats de Lierre, Lilas et Muguet illuminent gaiement une voie lactée de Santal et Musc Blanc. Ceci est le parfum de la Lumière ». Je crois qu’il fait vraiment l’unanimité. Je l’ai déjà évoqué plusieurs fois et toutes les personnes auxquelles je l’ai fait découvrir l’ont aimé. C’est un bouquet de printemps comme une déflagration de fleurs artistiquement agencées. Il s’ouvre avec des notes vertes de lierre rehaussées de poivre rose. Après une courte évolution, le coeur de lilas, de muguet et d’ylang ylang vient réjouir le mien et le socle de santal, de vanille et de muscs blancs vient lui assurer une tenue absolument démente. Cette oeuvre impressionniste olfactive me fait penser à un tableau de Monet. C’est comme une promenade dans un jardin luxuriant, presque un peu entêtant (il faut y aller doucement) mais qui garde quand même la fraîcheur de la rosée. Je le sens en écrivant et je ne m’en lasse absolument pas. Pour moi, c’est une merveille absolue.
L’exercice n’était pas facile mais j’espère m’en être tiré. Il y a tant de beaux parfums floraux que j’aime chez Isabey ou encore Mona di Orio, que je ne savais que choisir mais j’ai eu envie de vous emmener dans trois univers très distincts. En tout cas, j’espère avoir bien relevé le défi… J’ai fait de mon mieux.
Mes parfums préférés : "Ambre Russe"
Article modifié
J’ai porté, au fil des années, plusieurs créations de Marc-Antoine Corticchiato pour sa marque, Parfum d’Empire, ainsi que « Désarmant » qu’il a créé pour La Parfumerie Moderne. J’ai commencé avec « Cuir Ottoman » et « Ambre Russe » que j’avais beaucoup aimé puis il y a eu « Eau Suave », « Azémour les Orangers », « Aziyadé » et, beaucoup plus récemment « Tabac Tabou » qui est, pour moi, l’un des plus beaux parfums sur le marché. Mais j’avais envie de revenir sur « Ambre Russe » qui est, en quelque sorte, mon parfum bonne humeur. C’était en 2016, à la fin de l’hiver que je me le suis fait conseiller. Je passais une période un peu difficile et j’avais besoin de quelque chose de réconfortant mais pas dans le style cocon. Il me fallait un parfum qui me booste un peu le matin. « Ambre Russe » s’est révélé parfait avec son départ de champagne et de vodka, comme une effluve d’une fête de la cour des tsars.
Marc-Antoine Corticchiato parle de « Ambre Russe » en ces termes : « Ambre Russe est l’élixir de la Russie des derniers Tsars, que symbolise l’opulence de l’ambre gris naturel. Un monde baroque et fastueux, constellé de bulles d’or qui capturent la lumière même quand elle a disparu, où rutilent broderies, pelisses et mirifiques tenues militaires. Un univers de la démesure, à l’image des fêtes russes, enivrantes et pétillantes comme le champagne, incontournable de la Russie Impériale, elles peuvent aussi finir avec la brutalité blanche et glacée d’une vodka. Ambre Russe, c’est aussi l’intimité des datchas où toute la journée, le samovar tient prêt le « thé à la russe » relevé de cannelle et de coriandre. Son arôme légèrement fumé se fond dans celui du bouleau et du bois de cade que dégage le mythique cuir de Russie… C’est dans les fumerolles d’encens de l’église orthodoxe que les ors d’Ambre Russe s’assombrissent sur un fond de musc… Et la fête cède à l’ivresse mystique. Fatal comme l’âme slave, Ambre Russe ignore la demi-mesure : un sillage de passionné ».
Le parfumeur Marc-Antoine Corticchiato
Dès le départ, on emporté par le départ très moderne de champagne pétillant rehaussé d’une note de vodka. Le coeur de cuir de Russie (bouleau et mousse de chêne) est épicé par la cannelle et les baies de genièvre. Son côté un peu sombre sublimé par une note de thé noir très profonde. Le fond est ambré et musqué. J’avais déjà porté « Ambre Sultan » de Serge Lutens qui était plus boisé et, finalement moins moderne, et j’ai trouvé que tous les parfums qui mettaient cette note en avant et que je connaissais à l’époque avaient, en comparaison de « Ambre Russe », quelque chose de daté. C’est une ambre moderne, contemporaine, chaude et réconfortante bien sûr mais également terriblement et délicieusement épicée et pétillante. Je trouve que c’est le parfum de soirée par excellence. Je l’ai porté et porté et porté. Je m’en était presque un peu lassé et, il y a quelques semaines, un de mes amis me l’a offert. Je l’ai redécouvert et qu’est-ce que j’ai aimé le sentir autour de moi à nouveau. En fait, je pense qu’il est sans doute « mon Parfum d’Empire ». J’ai exploré plusieurs autres créations de Marc-Antoine Corticchiato, j’en ai porté certaines mais je suis revenu à celui-ci. Il me convient merveilleusement.
Pour résumer, je me devais de faire figurer « Ambre Russe » dans la liste de mes parfums préférés car je l’aime depuis longtemps et, si je l’abandonne parfois, j’y reviens toujours. Il est peut-être, pour moi, une petite madeleine dans l’incroyable créativité de Marc-Antoine Corticchiato. Je suis très heureux de l’avoir retrouvé non pas que je l’avais oublié car il était dans un petit coin de ma mémoire olfactive mais parce qu’il faut savoir éloigner certains parfums pour mieux les apprécier à nouveau. En tout cas, quel bonheur de le porter à nouveau.
Fragonard et le temps du lilas
« Il est revenu le temps du lilas ». J’ai été très agréablement surpris lorsque j’ai découvert que la fleur de l’année chez Fragonard était sans doute celle que je préfère. « En 2024, Fragonard célèbre le lilas ! Ses grappes délicates ornées de clochettes arborent une variété de couleurs, allant du blanc immaculé au mauve pourpré. Telle une fleur délicatement perlée, elle émet un parfum à la fois frais, vert et poudré ». Chaque année, la célèbre marque grassoise met à l’honneur une fleur en faisant réaliser un parfum par un parfumeur reconnu. Cette année, c’est Aurélien Guichard qui a inventé « Lilas ». Je dois dire que j’étais très impatient de le découvrir car, tant dans la nature qu’en parfumerie, je suis assez fan de cette note florale qui m’évoque un printemps de l’enfance. Le lilas se décline donc également en savon et en diffuseur à bâtonnets d’ambiance. Je dois dire que j’aime bien l’idée et que je vais certainement franchir le pas un jour ou l’autre car j’ai beaucoup aimé la composition et que, il faut bien le dire, même l’eau de toilette reste un petit plaisir vraiment peu onéreux puisque le flacon de 50 ml est vendu 22 euros.
« Symbole de la fraîcheur printanière, Fragonard célèbre le Lilas. Un parfum vert, frais et délicatement poudré, dont le coeur fleuri se mêle aux épices. Les notes de fond vanillées et musquées rendent hommage au côté sensuel et chaleureux de cette fleur opulente ». Le lilas est une fleur muette donc Aurélien Guichard s’est attelé à recomposer son odeur à la fois florale et un peu aquatique avec un départ de citron, de cassis et de tilleul, un coeur d’aubépine, de clou de girofle et d’héliotrope puis un fond de violette, de vanille et de muscs. Sur ma peau, « Lilas » tient très bien contre toute attente et je dois dire que le côté naturaliste me plait beaucoup. Je comprends parfaitement l’inspiration et j’aime sentir ce parfum autour de moi. Je pense que je complèterai cela par l’achat d’un pain de savon comme je l’avais fait pour « Magnolia » créé, il y a quelques années par Céline Ellena. J’en avais d’ailleurs parlé au début de ce blog. Je me réjouis de cette année du lilas et j’espère vous donner envie de le découvrir.
Quelques parfums régressifs
Je ne sais pas si c’est le cas pour vous mais parfois, lorsque je découvre un parfum, il me rappelle une ambiance d’enfance. Ça peut-être le lilas bien évidemment, qui m’évoque immanquablement le mois de mai et, je ne sais pas pourquoi, l’époque où je suivais assidûment le Festival du Film de Cannes sur Canal+ en rentrant du collège, plus ancien encore, la poudre de riz de l’une de mes grand-mère dont l’odeur se confonds parfois un peu avec celle de son rouge à lèvres, mais aussi les effluves du Papier d’Arménie qui brûle chez mes parents après que l’un d’entre-nous sorte d’une grippe car on lui prêtait des vertus désinfectantes. Je me rends compte que j’ai assez peu d’images précises de l’enfance, d’ailleurs elle se rejoignent souvent d’une manière pas toujours réaliste, mais ma mémoire olfactive et auditive sont intactes. C’est curieux. Je me souviens des musiques que l’on écorchait sur le piano, surtout un Impromptu de Schubert que je fredonnais tout à l’heure, mais aussi du « Shalimar » ou du « Fidji » de ma mère, du tabac de la pipe de mon père que je détestais quand il était en train de se consumer mais que j’aimais lorsqu’il sortait du paquet avec ses notes miellées. Peut-être que ma passion du parfum n’est que la continuité de cela. Sans doute que ce que je sens, ce que j’écris aujourd’hui a quelque chose à voir avec la nostalgie même si je crois que je me sens mieux à mon âge que durant l’enfance ou l’adolescence. En tout cas, c’est sans doute en redécouvrant Akro, la marque d’Olivier Cresp et de sa fille Anaïs que je me suis rappelé que l’odorat, qu’il soit fidèle ou infidèle à nos souvenirs, possède peut-être une bibliothèque olfactive riche qui nous fait qu’une odeur ou une autre nous paraît familière. J’ai commencé par cette longue introduction et vous vous demandez sans doute où je veux en venir. Et bien, j’ai sélectionné quatre parfums d’aujourd’hui qui m’emmènent.
Alors si on commençait par la poudre de riz. Aujourd’hui, les cosmétiques sont parfumés peut-être un peu plus discrètement mais, lorsque j’étais enfant, il y avait ces notes irisées presque pulvérulentes et surtout hyper caractéristiques qui pouvaient prendre des accents de violette et de rose. On le retrouve encore un peu dans les poudres de Caron mais ce n’est pas tout à fait ça. Ce qui, pour moi, s’en rapproche le plus, est peut-être l’original de « Ombre Rose » créé en 1981 par Françoise Caron pour Jean-Charles Brosseau. Je ne pourrais pas le porter mais j’adore le sentir. Je le trouve parfaitement régressif. Il est assez proche de mes souvenirs de poudre de riz. « Ombre Rose est une fragrance simple, raffinée et intemporelle qui traverse le temps sans jamais se démoder. 2 générations l’ont déjà adopté depuis 30 ans. Ses notes initiales douces et fleuries, avec l’iris, le muguet, l’ylang-ylang et le miel, sont suivies par la chaleur suave de la pêche, du bois de santal et du musc. A la première vaporisation de cette formule poudrée et sensuelle, on est immédiatement séduit par sa présence subtile et originale. Ombre Rose plaira à toutes les femmes qui souscrivent à un style de vie dont le raffinement et l’élégance classiques rivalisent avec un type de charme très personnel ». Il s’ouvre sur des notes très identifiables de bois de rose et de pèche, en revanche, je ne sens ni l’ylang-ylang ni le miel. Le coeur est poudré avec l’iris et la rose et rafraichi par des traces d’un accord muguet puis vient un fond de vanille, de muscs, de coumarine et de santal. Vraiment, c’est un très joli parfum, très désuet mais dans le bon sens du terme. Pour moi, il évoque l’enfance, le côté très floral et chic de ce que pouvais porter ma grand-mère comme parfum associé au côté très poudré de l’iris, de la rose et des muscs. Vraiment, il me semble le plus régressif des poudrés du marché.
Je l’ai dit très souvent : j’adore l’odeur du lilas. J’ai la chance d’en avoir chez moi facilement lorsqu’il est en fleur, et en plus, des trois couleurs. Je ne sais pas mais c’est comme la fleur d’acacia, cela m’évoque l’époque où le très jeune cinéphile que j’étais ne manquait aucune chronique sur le festival de Cannes à la télévision, à l’affut des films qui allaient sortir dans les mois à venir. C’est une odeur parfaitement réconfortante pour moi. J’ai porté plein de parfums dans lequel le lilas, fleur muette, était reconstituée. Je suis un peu en peine de trouver le plus réaliste car il me semble bien qu’ils ont tous un côté qui me rappelle la fleur en branches coupées mais pas complètement. Finalement, je pense que celui qui est, peut-être, le moins sophistiqué et le plus proche de mes souvenirs d’adolescence est « Rue des Lilas » créé en 2011 par Pierre Guillaume pour Phaedon et ainsi décrit par la marque : « Un lilas au vent… Mêlant les discrètes facettes amandées du lilas blanc à la verdeur du lilas pourpre après une averse, Rue des Lilas est un soliflore sophistiqué. Il capture le parfum des grappes de lilas dépassant d’un jardin, saisi dans le vent printanier… Une infusion d’opopanax et de muscs soyeux vient connecter à la peau ce poème végétal impressionniste ». Autour de la reconstitution très soliflore du lilas, on retrouve des notes un peu musquées et boisées avec une facette poudrée. J’ai adoré ce parfum. Je l’ai terminé mais je le reprendrai. Il est non seulement régressif mais facile et même très agréable à porter. Il m’emmène le matin, dans un jardin, avec le soleil et la rosée qui jouent avec les grappes de lilas très en fleurs. Je trouve que Pierre Guillaume a très bien su reproduire cette impression. Pour moi, c’est peut-être l’une de ses créations qui me provoque le plus d’émotions comme quoi, il n’y a rien à dire, la simplicité en parfumerie n’est pas forcément l’ennemi des amateurs. J’aime vraiment beaucoup « Rue des Lilas ».
Pour finir, je vais évoquer le tabac blond mais pas n’importe lequel. En effet, ce n’est certainement pas celui des cigarettes de ma mère ou des miennes quand je fumais mais celui qui sortait du paquet et avec lequel mon père bourrait sa pipe. Je ne me souviens plus de la marque mais il sentait un peu une odeur de miel et d’immortelle. Il y a plein de représentations de cette odeur en parfumerie mais peut-être que celle qui s’en rapproche le plus est « Tabac Tabou » créé en 2015 par Marc-Antoine Corticchiato et lancé en extrait par Parfum d’Empire. « Embrasé par l’immortelle, le tabac déroule ses volutes fauves autour d’une fougueuse brassée de narcisses. Miel, herbes folles, peau brûlante… Un sillage de savane, en hommage à cette essence jadis sacrée pour tous les peuples indiens d’Amérique. Chamanique et pénétrant ». Après un départ à la fois vert et cuiré de narcisse et de foin, le coeur de tabac prend toute la place et se renforce d’un superbe fond d’immortelle et de miel. Ce parfum n’est pas tout à fait conforme à mes souvenirs d’enfance mais il y a tellement longtemps que mon père a arrêté de fumer que mes impressions se sont peut-être un peu estompées. Ceci dit, je trouve ce parfum tellement réussi, tellement exceptionnel, que je me devais de le citer encore une fois pour son pouvoir régressif mais aussi pour la beauté incroyable de la création. J’aurais aussi pu parler de « Volutes » de Diptyque qui est une autre facette de ce tabac blond sortant du paquet mais je préfère, et de loin, « Tabac Tabou ».
Voilà, je pourrais trouver d’autres idées, mais ces trois souvenirs me sont venus très naturellement et ça m’a peut-être un peu rendu nostalgique. J’aimerais bien avoir vos impressions et connaitre vos expérience avec le versant régressif du parfum. J’aime énormément l’idée de me replonger en enfance en utilisant des parfums nés alors que j’étais déjà adulte.
Mes parfums préférés : "L'Échappée Sauvage"
Une envolée atypique de poivre rose, de bergamote, de citron et de figue, un coeur amandé et cuiré de narcisse et un fond de cèdre, de bois de gaïac presque gourmand, de sauge sclarée et de fève tonka poudrée, tel est « L’Échappée Sauvage » créé en 2020 par Camille Goutal et Isabelle Doyen pour leur marque 100% naturelle Voyages Imaginaires. Je dois dire que j’ai toujours aimé ce parfum insaisissable, qui démarre presque comme « Ninfeo Mio » de Goutal Paris et finalement le parfum change, évolue, se forge une vraie personnalité et finalement de notes vertes en cuir, il s’avère d’une rare cohérence. La marque le décrit ainsi : « Quelque part en Méditerranée... Le soleil au zénith éblouit l’Ile, côté sud. Il porte une chaleur exaltante et balaye tout d’un vent délicieux. Air et température cuisante font craquer les bois, du pin parasol aux figuiers sauvages, avant de s'étourdir au sol, dans le joyeux désordre des rameaux anarchiques. Les aiguilles de pins collent aux pieds nus, les parfumant en douce dans un crissement sensuel ». Sur ma peau, « L’Échappée Sauvage » matche vraiment bien. J’étais un peu passé à côté lorsque j’ai découvert la marque mais vraiment, il me convient parfaitement je dois bien l’admettre. Avec une palette très réduite, Isabelle Doyen et Camille Goutal ont, une nouvelle fois, réussi un parfum complexe, sophistiqué, clair obscur, un peu poudré, un peu aromatique, très boisé et presque gourmand par moment. Je le trouve absolument abouti.
« L’Échappée Sauvage » est, pour moi, une nouvelle addiction. Je ne peux pas m’empêcher d’y revenir. Il m’enveloppe, se fait oublier, revient… Célébré par la Fragrance Foundation France en 2021, il a reçu le FIFI Award du meilleur parfum d’une marque de niche indépendante et je dois dire que ça me ravit car je l’aime énormément. C’est une vraie création artistique qui sait aussi être facile à porter et ce n’est pas toujours le cas. Je trouve que, dans la collection, il est peut-être celui dans lequel la double signature des parfumeuses est la plus identifiable pour celles et ceux qui, comme moi, apprécient leur travail depuis longtemps. J’aime vraiment beaucoup « L’Échappée Sauvage » et je me rends compte qu’on peut le porter du 1er janvier au 31 décembre. Assez tenace pour l’hiver et jamais entêtant durant la chaleur de l’été. J’ai redécouvert récemment ce parfum et c’est un énorme coup de coeur, peut-être encore plus que ce que j’avais pu constater lorsque je l’ai senti et essayé pour la première fois. En tout cas, il mérite qu’on en parle et j’espère l’avoir fait avec tout mon enthousiasme.
Camille Goutal et Isabelle Doyen
Exquise trouvaille : "Vra Vra Vroom"
« Foncez et dépêchez-vous ! Une explosion énergique de mandarine et de magnolia, et de bonnes cuillerées d'absolu d'osmanthus. Un chemin parfumé vers le succès. Rien ne pourra plus vous arrêter » tels sont les mots de Penhaligon’s pour évoquer l’inspiration de « Vra Vra Vroom » créé par Quentin Bisch pour Potions & Remedies, la toute dernière collection de la marque et je dois dire que, si « A Kiss of Bliss » est mon préféré, cette « infusion vivifiante de magnolia et de sauge pou libérer son imagination » me séduit tout à fait. « Les notes florales aux accents de cuir revitalisent et rafraîchissent ». Avec une note de tête d’abricot très franche et nette, un coeur d’osmanthus et un fond de cuir, cette composition est une exquise trouvaille, c’est le moins que l’on puisse dire. Je la trouve tout à fait dans la lignée des belles émotions de la marque. Il y a ce qu’il faut de classicisme et la touche d’extravagance que j’attendais en découvrant la collection. « Vra Vra Vroom » est un mouvement en avant absolument réussi et profondément élégant.
Ce que m’évoque « Vra Vra Vroom » est surtout une promenade le matin dans un jardin anglais, un jogging peut-être mais je ne suis pas très sportif. C’est un vrai grand floral fruité d’auteur qui évite tous les écueils du genre. La note de cuir en fond, très discrète, n’est là que pour soutenir ce bouquet de fleur et d’abricots. Je suis vraiment impressionné par le côté très fin et facetté de ce parfum. Je trouve que, dans des univers où tout devient de plus en plus formaté, ce genre de création fait du bien. On peut, dans cette collection, parler vraiment de parfumerie de niche sans que ce soit galvaudé. Franchement, je pourrais tout à fait m’approprier cette création. Quentin Bisch a délaissé l’akigalawood et les notes très boisées qui font souvent son succès pour explorer un vrai floral fruité original et qui donne envie. Je l’ai redécouvert avec vraiment un plaisir non dissimulé et j’ai été content de partager. Je remercie Léa, responsable du stand au Printemps de Lyon de m’avoir proposé d’y remettre mon nez… Me serais-je fait une envie ?
Promenade dans mes doses d'essai
Comme chaque mois, j’ai essayé ou réessayé quatre parfums dont je possédais une dose d’essai et je vais essayer de vous donner mes impressions alors aurai-je un coup de coeur ? J’ai choisi des univers très distincts les uns des autres et, de ce fait, peut-être me serais-je fait une nouvelle envie mais il est aussi tout à fait possible que je ne sois convaincu par aucun de ces tentatives. Alors il vous faudra lire l’article jusqu’à la conclusion pour le savoir. Allez, je vous emmène dans l’art olfactif de plusieurs parfumeurs.
J’avais vaguement senti « Cherry Musk » créé en 2011 par Ramon Monegal pour sa marque éponyme mais je ne l’avais pas vraiment essayé. « Gai, audacieux et sexy. Un clin d'œil audacieux de provocation ». J’ai découvert une composition plus complexe que ce à quoi je m’attendais et je dirais que cette composition a presque un côté néo-chypré avec une envolée de cerise bien évidemment, mais aussi de fraise, de pêche, de cassis, de framboise et d’abricot, un coeur de rose, de cèdre et de jasmin et un fond de muscs blancs et de mousse de chêne enveloppés par un accord ambré. Très honnêtement, je ne trouve pas ce parfum aussi « cerise » qu’il m’avait semblé en le découvrant. Il est beaucoup plus facetté et, sur ma peau, le côté mousse de chêne ressort beaucoup ce qui n’est pas, ceux qui suivent mon blog le savent, pour me déplaire. Côté tenue et sillage, il faut admettre que, sur moi, « Cherry Musk » est assez léger. Ceci dit, je trouve que c’est un parfum très finement travaillé, d’une jolie élégance, sans une trop grande prépondérance des notes fruitées synthétiques. J’aime bien le résultat et ça me donne envie d’en découvrir plus de la maison Monegal.
« Le parfum contient de l'encens hypnotique et des notes balsamiques enveloppantes qui nous protègent et nous transportent vers des moments uniques et excitants. Des notes de cuir intenses montrent le côté sombre du monde, tandis que le parfum magnétisant de la rose révèle son côté lumineux. Cette composition symbolise l'expérience et l'espoir que la transformation est inscrite dans nos vies, et qu'après elle, vous renaissez toujours comme un nouveau vous - un nouveau jour et une nouvelle année arrivent - le début de quelque chose d'inconnu et d'excitant - comme une hypnose tourbillonnante de la vie ». J’avais envie d’un nouveau parfum et, de ce fait, j’ai réessayé « Dark Vinyl Musk » créé en 2021 par Michal Gilbert Lach pour sa marque Bohoboco. Je l’avais bien aimé lorsque je l’ai découvert et il était resté dans un coin de ma tête. C’est un parfum assez mystérieux qui, il faut bien le dire, ne ressemble à rien d’autre avec une envolée de feuille de violette et de rose, un coeur de notes vertes synthétiques assumées et presque mousseuses et un fond de cuir, de labdanum et d’ambre. La concentration extrait de parfum lui donne, sur ma peau, une puissance peu commune. Je trouve le sillage assez imposant et la tenue correcte. J’ai conforté mon impression. Je pourrais tout à fait porter ce parfum atypique en y allant doucement sur la pulvérisation. En revanche, pour moi, il évoque l’hiver et je n’ai pas franchi le pas car nous sommes déjà le 9 février et les jours commencent à grandir. J’ai plus envie de quelque chose de plus frais.
J’avais vraiment beaucoup aimé « Fusion Sacrée Clair » créé par Bertrand Duchaufour en 2012 pour Majda Bekali. J’ai eu envie de le réessayer et je dois dire que j’ai été, comme les premières fois, vraiment très impressionné par la complexité de la création. Le parfum s’ouvre sur une note très âpre de café torréfié, adouci par la clémentine, la rhubarbe et la bergamote et acidulé par le cassis et la coriandre. Le coeur de tubéreuse dominant un bouquet de jasmin, de gardénia et de fleur d’oranger se pare de notes aussi incongrues que le clou de girofle et la figue ce qui nous emmène dans un univers dense et extrêmement étonnant. Le fond est un socle de benjoin et de baumes avec des traces de vanille, de muscs blancs, de cèdre, d’ambre gris et de patchouli avec une très belle note d’héliotrope. Dans ce parfum, je retrouve avec délice la créativité sans limite du parfumeur. J’aime beaucoup « Fusion Sacrée Clair », je trouve cette composition complètement addictive mais je ne pense pas que je pourrais la porter. J’aime la sentir mais sa présence un peu trop imposante sur ma peau pourrait peut-être me déranger à la longue comme cela a été le cas, dans un tout autre registre, de « Baraonda » de Nasomatto. Cela ne m’empêche pas d’aimer sentir ce parfum de manière plus fugace et d’en apprécier l’originalité et la complexité.
« Voyage dans la nuit d’émeraude. Un bois sacré aux accents d’épices brûle tel un Encens. L’atmosphère puissante et vibrante autour du chaman guide mes pensées au-delà des volutes de fumée. Je retrouve mon animal totem, je rejoins les esprits de la terre : les mille facettes du Palo-Santo et du Copal soutiennent mon voyage » tels sont les mots de Bertrand Duchaufour (encore lui !) pour évoquer « Petite Fumée » qu’il a créé en 2021 pour la marque 100% naturelle Parfumeurs du Monde. J’ai déjà évoqué ce parfum lorsque je l’ai découvert mais j’ai eu envie de le remettre sur ma peau pour confirmer ou infirmer mes premières impressions et je ne le regrette pas car je trouve que c’est un bijou. Il s’ouvre sur des notes de baies roses, de cardamome et de poivre noir qui nous interpellent dès la vaporisation puis arrive un coeur absolument magnifique de palo santo, d’amande et d’encens relevé par le clou de girofle qui se pose sur un fond constitué de différents baumes naturels, de vétiver et de styrax. Il en résulte un parfum très sophistiqué, élégant et, en même temps, il garde le côté un peu ethnique qui est la marque de fabrique, si l’on peut dire, de Parfumeurs du Monde. Dans cette maison, j’ai vraiment une prédilection pour « Agua Nativa » créé par Michel Roudnitska mais « Petite Fumée » arrive tout juste derrière et je dois dire que je l’aime vraiment beaucoup. Je pourrais tout à fait le porter et, sur ma peau, la haute concentration lui confère une tenue tout à fait correcte et un sillage plutôt modéré. En tout cas, c’est une très belle création et je me suis confirmée qu’elle me plaisait beaucoup.
Potentiellement, je pourrais sans doute porter chacun des parfums de ma sélection mais je ne pense pas qu’ils soient prioritaires sur d’autres. On ne peut pas porter tout ce qu’on aime. Une vie n’y suffirait pas. Ceci dit, j’aime beaucoup chacun de ces quatre compositions vraiment riches et originales. Je suis très content de pouvoir vous faire partager mon ressenti.
Séquence nostalgie : "Roaring Radcliff"
Quand j’ai commencé à écrire cette série d’articles très nostalgiques, je ne pensais pas qu’elle rencontrerait un tel succès alors je continue. Le parfum que j’ai décidé d’évoquer en janvier a eu une vie assez courte et il est à nouveau signé Daphné Bugey mais cette fois, il était sorti dans la collection des Portraits de Penhaligon’s. J’en ai encore un peu et j’avoue que je serai bien désolé lorsque mon flacon va disparaitre car c’est le seul parfum un peu liquoreux et gourmand que j’aime vraiment porter. Il s’agit évidemment de « Roaring Radcliff » sorti en 2016 dans son flacon à tête de lion. « Splendide garnement — certains diraient garnement en titre, mais ils se tromperaient — Radcliff, justement, n’a pas le fardeau d’un Titre. Doux Jésus, qu’est-ce qu’on s’amuse ! », tels étaient les mots de la marque pour décrire ce parfum tellement addictif. Pour moi, il était à l’image du personnage qu’il incarnait si j’ose dire. C’était une création pour un dandy, un peu décadent, très fêtard, très séducteur et c’est tout ce que je ne suis pas et ne serai jamais. Je me souviens de la tête de Noëlle quand, après le premier confinement qui m’avait vraiment perturbé, je suis allé à la Parfumerie Zola qui, hélas, n’existe plus à Lyon, car elle me connaissait très bien et était vraiment surprise que j’ai envie de le porter. Je crois que Radcliff était, dans la famille des portraits, « le fils illégitime de Lord George » mais je n’en suis plus vraiment certain. En tout cas, il était dépeint comme un jeune homme un peu frivole et dessiné sur la boite toujours par Kristjana Williams. À moi, il m’évoque un peu Oscar Wilde et sa réputation poétiquement sulfureuse. Je le vois très bien porté par le personnage de « L’importance d’être Constant », en redingote, bottes et canne à pommeau. C’était une composition vraiment très envoûtante qui a su me convaincre.
Pour ce qui est des notes, je sens un peu le rhum, le whisky et la vanille pour la rondeur, un accord d’ambre pour la profondeur. Le résultat a presque un côté un peu pain d’épices avec, je pense, de la cardamome, de la cannelle et peut-être même un peu de badiane. Sur moi, il a un sillage modéré mais une excellente tenue. Je ne saurais dire pourquoi j’ai eu un si gros coup de coeur pour ce parfum mais je le trouvais extraordinaire quand il est sorti et je le pense encore. Alors, bien évidemment, je pourrais en trouver un dont l’univers m’en rapprocherait. Je pense à « Changing Constance » dans la même collection des portraits de Penhaligon’s, créé par Juliette Karagueuzoglou ou encore, dans la série des flacons noirs de Pierre Guillaume, une création qui s’appelle « Animal Mondain » dont j’ai déjà parlé. Ceci dit, s’il y, sur le marché, des sortes d’équivalents, ils ne me sont pas aussi addictifs que « Roaring Radcliff ». J’ai, à peu près, utilisé la moitié du flacon et je dois quand même admettre que je le porte plus rarement, pour des occasions particulières ou quand j’ai envie d’un certain réconfort. Pour résumer, ce parfum avait tout pour pas me plaire et pourtant, même si j’en possède encore une bonne partie de flacon, je le regrette presque déjà. Je le trouvais idéal pour cette Séquence Nostalgie du mois de février.
"Queen of Silk", impressions en avant-première
Même s’il n’est pas encore sorti mais j’ai découvert en avant-première « Queen of Silk » le nouveau parfum de Creed contenu dans un très beau flacon bleu violet. C’est indéniablement un féminin qui pourra aussi plaire aux hommes. L’avantage de vivre dans une grande ville est que, parfois, j’ai accès grâce à la collaboration des parfumeries indépendantes et des responsables de boutiques en nom propre et de stands de grands magasins, à des exclusivités en avant-première. Je profite de cet article pour remercier, une nouvelle fois, toutes celles et ceux, professionnels ou amateurs, qui me permettent de tenir ce blog. Sans ces collaborations, je ne pourrais vraisemblablement pas vous proposer des articles aussi régulièrement et aussi complets. Pour revenir à « Queen of Silk », qui devrait, je crois, être lancé en avril, c’est une vraie nouveauté. J’ai l’impression que, depuis le changement de flaconnage et la sortie du précédent parfum, « Carmina », il y a quelques mois, la nouvelle direction de la maison a décidé de moderniser à tout crins la collection féminine comme cela avait été fait, depuis le lancement d’ « Aventus », pour les masculins. Trois nouvelles fragrances en trois ou quatre ans est assez énorme pour la marque et je pense que, s’il reste directeur artistique de la marque, Olivier Creed s’est adjoint d’autres parfumeurs car, vraiment, il y a quelque chose de vraiment différent dans les nouvelles créations par rapport aux historiques que nous connaissions et aimons. Je vais donc vous donner mon avis sur « Queen of Silk » que j’ai pu porter pendant une journée entière.
J’avoue que je ne suis pas forcément emballé par son évolution mais j’adore le départ d’osmanthus, de magnolia et de safran, le coeur complexe de tubéreuse, de fruit de la passion, de oud et de patchouli mais je suis plutôt déçu par le fond car la vanille, l’encens, la myrrhe, les muscs et le bois de cèdre sont un peu « dévorés » par l’ambroxan. Reste un parfum élégant et facile à porter mais dont l’originalité n’est pas vraiment en rapport avec le prix. Le sillage et la tenue sont très biens mais, pour moi ça ne suffit pas. Creed rajeunit son image avec cette nouvelle série de féminins qui est plus en regard des masculins mais je ne suis pas complètement convaincu. « La prestigieuse maison Creed a annoncé ses premières sorties pour 2024 avec un nouveau parfum royal destiné à sa clientèle féminine, nommé Queen of Silk. Inspiré par le fait que la maison était à l'origine une célèbre maison de couture à Londres au XVIIIe siècle, traitant de tissus luxueux et précieux comme la soie, l'utilisation par Creed de ce nom particulier fait évoquer à ses fidèles fans l'image d'une dame affichant sa robe en soie, portant une délicate parfum qui est tissé dans chaque fibre de son être. La maison royale a obtenu son rang prestigieux et bien mérité parmi les autres maisons de parfum de niche, car elle est l'une des marques les plus honorées dans le monde de la parfumerie, créant un héritage inégalé qui continue de prospérer jusqu'à présent ». Je n’ai pas la date de sortie en France mais cela ne devrait plus tarder. Il faudrait peut-être le réessayer car, en ce qui concerne ma première impression, je suis un peu mitigé.
Francis Kurkdjian, une successions de triomphes
Il est le parfumeur dont tout le monde parle et c’est encore plus le cas depuis qu’il a pris le relai de François Demachy à la tête des parfums Christian Dior. Francis Kurkdjian n’a que 54 ans et pourtant il a déjà derrière lui une carrière impressionnante. On lui doit, entre autres, des bests de la parfumerie tels « Le mâle » de Jean-Paul Gaultier sorti en 1995 ou encore, bien sûr « Baccarat Rouge 540 » lancé pour la maison de cristallerie puis pour sa marque de parfum éponyme en 2014. Il a fait ses armes avec Françoise Caron et a été nommé Chevalier des Arts et Lettres en 2009, année où il a co-fondé Maison Francis Kurkdjian avec son associé Marc Chaya. Il est, depuis 2021, le directeur artistique et parfumeur de la maison Christian Dior. Je dois dire que son univers olfactif est assez éloigné de ce que j’aime mais je connais son succès et il était légitime que je lui consacre un portrait. J’ai donc choisi quatre parfums que je considère comme parlants et révélateurs de son style.
Le premier parfum que j’ai choisi est aussi mon préféré dans cette sélection. Il s’agit de « Enlèvement au Sérail » que Francis Kurkdjian a composé pour la collection classique de la maison MDCI en 2006. La marque le décrit ainsi : « Ce fleuri oriental délibérément « rétro », un des premiers succès de la marque, est à nouveau disponible. Un parfum sophistiqué et complexe qui évolue tout au long de la journée, révélant différentes facettes du parfum au fur et à mesure que les notes s’estompent et se mélangent. Il se transforme en un bouquet floral doux et sensuel, avant de laisser place à des notes de fond chaleureuses et réconfortantes. Le parfumeur a ajouté une petite touche qui le rend subtilement, légèrement plus frais et plus jeune, mais Il a gardé toute sa puissance, sa profondeur, et un « velouté » rares de nos jours ». Je dirai pour ma part qu’il s’agit d’un néo-chypré assez traditionnel qui s’ouvre sur une envolée de bergamote de de mandarine avec le côté solaire de l’ylang-ylang qui s’enrichit d’un coeur de tubéreuse, de rose et de jasmin pour se poser sur un fond de patchouli, de santal, de vétiver et de vanille. C’est un chypre sans mousse de chêne, très enveloppant, suave, floral et sophistiqué. Il plaira, c’est certain, plus certainement aux femmes mais je pourrais tout à fait le porter. Il est très onéreux et, si j’ai un peu tourné autour, je n’ai pas franchi le pas. Il n’en reste pas moins que je le trouve absolument parfait tant au niveau composition qu’à celui de la tenue et du sillage. C’est une composition équilibrée et efficaces comme je les aime.
Je pense qu’on avait du m’offrir cet échantillon à l’occasion d’un achat car je ne savais même pas que je pouvais essayer « Rêve en Cuir » créé par Francis Kurkdjian en 2008 pour la maison Indult. Je ne savais pas trop à quoi m’attendre alors je l’ai posé sur une touche et j’ai bien aimé donc je l’ai essayé sur la peau. « Epicé et fumé, ce cuir ne manque pas pour autant de douceur. Rêve en cuir, est aussi bien conçu pour les hommes, que pour toutes ces femmes qui aiment emprunter la veste en cuir de leur compagnon. Les règles sont faites pour être brisées ». La pyramide peut paraître un peu surprenante car il s’ouvre sur des notes de clou de girofle et de citron, un coeur de bergamote douce et de mousse de chêne très original et un fond de cardamome associée au patchouli, au cèdre et à la vanille. Là encore, la composition est un peu néo-chyprée. Le parfum garde un certaine fraîcheur, et, pour le coup, il plaira peut-être un peu plus aux hommes. Sur ma peau, il s’agit d’un cuir sans cuir avec un côté frais. Je le trouve facile à porter mais il est moins aisé de le décrire car il oscille entre une famille olfactive et une autre. Je dirai qu’il est peut-être le moins « commercial » de ma sélection. En tout cas, je le trouve bien réussi et agréable à porter. J’aime beaucoup le sillage un peu translucide qu’il laisse autour de moi pendant un bon moment.
Je connais assez mal Maison Francis Kurkdjian et j’ai un peu bataillé à trouver un parfum que j’aurais du plaisir à essayer. J’ai finalement été relativement séduit par « L’Homme à La Rose ». Lancé en 2020, c’est un parfum assez joli qui se développe bien sur ma peau. « L'Homme À la rose, une eau de parfum disruptive permettant aux hommes de porter une rose. La fragrance s'ouvre sur les notes fraîches et fusantes de pamplemousse, associées à la rose de Damas de Bulgarie et de rose Centifolia de Grasse aux notes de pamplemousses, reposant sur un fond boisé et ambré réconfortant ». Il s’agit indéniablement d’un floral boisé et un peu cuiré qui s’adresse plus aux hommes mais peut tout à fait plaire aux femmes. Après une envolée de pamplemousse amer et de sauge un peu aromatique qui se pare d’un coeur de rose damascena et de rose de mai associées à un accord muguet et à des notes ozoniques qui donnent au parfum une certaine fraîcheur. Je dois dire que, si j’aime beaucoup le départ, je suis un peu lassé par le fond d’ambroxan, de cèdre, de cistre labdanum et de notes de muscs et de coumarine. Globalement, je trouve que le parfum sent un peu synthétique si j’ose dire. Je lui préfèrerai d’autres parfums à dominante de rose qui correspondront plus à mes goûts.
Francis Kurkdjian a déjà signé plusieurs parfums pour Christian Dior avant et après qu’il soit devenu le parfumeur officiel de la maison. J’ai hésité à parler de la reformulation de « Eau Noire » ou de « Cologne Blanche » mais je ne les maîtrise pas assez. Je préfère donc revenir sur « Dioriviera » la première vraie création du parfumeur pour la collection Christian Dior Privé et qui est sorti en 2023. C’est un travail tout en fraîcheur autour de la figue et je l’ai posé sur ma peau avant de donner mes impressions. Il en décrit ainsi l’inspiration : « L'inspiration du sillage de Dioriviera a surgi en Provence : le soleil du Sud, les roses de mai en fleur, le souffle du vent tiède à travers les feuilles d’un figuier, majestueux, unique spectateur à mes côtés. Revenu à Paris, le temps de la création a commencé pour faire de cette idée mon 1er parfum pour Dior. Dioriviera a la beauté désinvolte de la modernité avec un sillage solaire qui traduit l’histoire d’amour de Christian Dior et la Riviera ». Dans ce parfum, on retrouve nettement une dualité entre la rose et la figue ce qui n’a rien de bien nouveau. Je ne peux pas dire que j’ai vraiment adhéré. La fragrance est plaisante, la tenue correcte et le sillage discret mais, pour être tout à fait honnête avec vous, pour moi, « Dioriviera » est quand même un peu un parfum banal que je ne trouve pas forcément passionnant. Il est, en revanche, très significatif du style Kurkdjian, c’est à dire consensuel et facile à porter.
Après avoir exploré ces quatre créations, je ne suis toujours pas complètement attiré par les créations, si qualitatives soient-elles de ce maître parfumeur connu et reconnu, qui a vraiment tiré des fils entre ses créations. Francis Kurkdjian, et il l’a dit lors d’un débat que j’ai pu suivre, considère vraiment le parfum comme un objet de luxe qui se doit d’être élégant pour être porté plus que comme une expression artistique. Ses composition ont donc, avant tout, un but commercial. Il ne m’appartient pas de porter un jugement sur cette position mais je dois dire que c’est un peu éloigné de ce que j’ai envie de découvrir en parfumerie. Je ne suis pas un fan des parfums de sa marque même si je les trouve toujours impeccablement réalisés. Pour moi, ils manquent un peu d’originalité de du petit côté dingue qui me fait aimer ce mode d’expression olfactif et qui me donne envie de les porter. Les deux premiers parfums que j’ai choisi dans cette sélection me plaisent, il ne faut pas non plus critiquer en bloc, et il est possible que je craque un jour pour « Enlèvement au Sérail » mais je trouve quand même le prix du flacon élevé et je ne suis pas sûr, actuellement, d’en avoir suffisamment envie pour franchir le pas. Wait & see…