Entretien avec Isabelle Larignon, parfumeure et talentueuse
Il y a quelques mois, grâce à Marion de la chaîne YouTube Des Paons Danse Cent Heures, j’ai découvert le premier parfum d’Isabelle Larignon, « Le Flocon de Johann K » qui m’a énormément plu. J’ai trouvé ce travail extrêmement différent de tout ce que je connaissais et je vous en avais d’ailleurs parlé. Le temps a passé et la créatrice a composé un second parfum, « Milky Dragon » et j’ai eu l’opportunité de lui poser quelques questions sur son travail lors d’un entretien. J’ai donc conservé cinq questions et je remercie cette créatrice atypique et novatrice dont le travail me plait beaucoup, d’avoir bien voulu me répondre.
Bonjour Isabelle, d’où venez-vous et quel a été le parcours qui vous a conduite à devenir parfumeure ?
J’ai ce que l'on appelle un parcours atypique. Je dirai que mes rêves de petite fille ont guidé mon cheminement et mon parcours professionnel. Enfant, j’avais le rêve unique d’être heureuse et le rêve multiple de devenir nez, chanteuse d’opéra et danseuse de tango. Rochelaise, je suis venue à Paris pour intégrer une classe de chant lyrique au conservatoire que j’ai étudié durant une petit dizaine d’années. J’ai arrêté du jour au lendemain. J’avais la voix mais guère la personnalité pour être une soliste de premier plan. J’ai alors repris des études, on me disait bonne communicante, alors que mes amis percevaient sûrement ma facilité à raconter des histoires. J’ai donc étudié la communication. J’ai de suite dirigée ma quête de stage vers la gastronomie. Etre parfumeur était un désir toujours présent mais tu, comme si je ne pouvais accéder à ce graal. Et puis le luxe artefact du secteur me rebutait ; les acteurs des métiers de bouche me semblaient alors plus proches de mes valeurs et puis du palais au nez, il n’y a qu’un voile… Le Dire et le Goût est né, ma première société, pour faire simple, j’accompagnais nombre d’entreprises dans leurs relations presse et en conception-rédaction-édition. J’écrivais donc beaucoup et j’aime toujours autant écrire. Après 7 ans d’activité, j’ai fait un burn-out. J’ai remercié mes clients actifs. Pour oublier la forçat de travail que j’étais, je dansais la nuit. Le tango argentin. Et puis le pain et la boulangerie paysanne sont venus à moi par un étrange hasard. Rentrant de 2 mois passés à Buenos Aires, je me souviens m’être dit les veilles d’une formation préparatoire au CAP boulanger “tu déconnes Larignon, tu n’as jamais voulu être boulangère mais parfumeur”. Je me mets à monter un dossier de candidature pour intégrer l’école Givaudan, c’était en 2012. Je ne l’ai jamais envoyé. Ce n’est qu’en 2018, alors que ma fille Rose n’a pas encore 2 ans, que le sentiment impérieux de me remettre sur le chemin de mes rêves, des odeurs et des parfums revint. En tant que maman, je me devais d’aller au bout de ce rêve. J’ai fait la formation longue de Cinquième Sens. Sur ce chemin d’apprentissage, j’ai eu la chance de rencontrer le parfumeur Bertrand Duchaufour qui me soutient dans mon travail de façon très généreuse. Générosité à noter, dans ce milieu très fermé et clanique. Je dirai que toutes mes expériences passées me servent aujourd’hui et que depuis toujours, je cherche à engendrer un geste beau, qu’il soit chanté, dansé ou écrit. Avec des mots ou avec des molécules.
Quels sont les parfums qui vous ont donné envie de réaliser vos propres créations ?
Il n’y en a pas tant que cela mais l’enchantement rare qu’ils me procurent est puissant : Aromatics Elixir de Clinique, Mitsouko et Jicky de Guerlain, Grey Flannel de Geoffrey Beene, Eau du Soir de Sisley, Eau d’Orange verte d’Hermès en version gel pour les mains, somptueux ; Dzongkha et Mont de Narcisse chez l’Artisan Parfumeur, la marque Serge Lutens il y a 20 ans me faisait rêver, je portais Chergui, et aujourd’hui je voue un culte à Nuit de Bakélite d’Isabelle Doyen pour Naomi Goodsir.
Votre premier parfum, Le Flocon de Johann K est pour le moins atypique et d’une fraîcheur absolument incroyable. D’où vous vient l’inspiration à chaque fois que vous voulez finaliser une création ?
Cela dépend si je crée pour moi ou pour une commande. Quand je formule en mon nom les inspirations sont diverses. Elles partent souvent d’une histoire. Pour Le Flocon de Johann K, l’inspiration vient d’un texte de l’astronome Johannes Kepler, intitulé Étrennes ou la neige sexangulaire (1610). Kepler y raconte sa quête d’un cadeau de nouvel an qui serait le plus proche du RIEN à offrir à son richissime mécène. Ce texte m’habite depuis plus d’une dizaine d’années et pour mon premier parfum, cette quête du rien était comme une évidence, comme une réponse à la tonitruante parfumerie actuelle. La quête de Kepler fut aussi mienne avec la tentative d’approcher une non odeur celle de la neige. Par contre, la neige et le flocon sont d’une grande richesse évocatoire : c’est blanc, pur, froid, glacé, poudreux, léger, doux, aérien, aqueux, mais cela peut aussi être dur, métallique et vous bruler. Et c’est aussi extrêmement structuré.
Je ne l’ai pas encore sentie mais votre seconde création s’appelle Milky Dragon. Ce nom m’évoque une certaine catégorie de thé Oolong. Pouvez-vous le décrire ?
Le parfum est effectivement inspiré du thé milky Oolong qui est une variété de thé taïwanais, copié par les Chinois. La feuille sèche de ce thé “bleu" a la particularité d’être très gourmande au nez, avec des notes beurrées, briochées, pralinées, coumarinées. Une fois infusée, la feuille développe des saveurs de fruits jaunes confiturés et des notes florales. Le parfum joue sur ces flaveurs, avec l’image également d’un jardin de thé pris dans la brume matinale. C’est un parfum gourmet plus que gourmand, avec un je-ne-sais-quoi addictif. Il est frais, vert, floral, fruité avec des effets chauds de tabac.
Comment voyez-vous l’avenir et la distribution des différents parfums sur lesquels vous aller travailler ?
Ahhh question très d’actualité, il se trouve qu'en éditant ces deux parfums, je n’ai ni pensé “création de marque”, ni développement commercial. Invitée par des amis qui ont un concept-store, j’étais animée par l’expression libre et artistique. Un peu victime de leur succès, la question de la distribution se pose car pas une semaine ne se passe sans que l’on me demande où sentir et acheter mes parfums. Pour l’instant, ils sont sur le e-shop de NEZ/ AUPARFUM et en vente directe parfumeur. J’aime l’idée de vendre en direct et de connaitre chacun des acquéreurs, ce modèle pour l’instant me convient. Une boutique à Mougins les distribue également. La revente pour l’instant est une histoire de rencontre et d’envie partagée. Comme celle avec Brooke Belldon basée à Londres qui a créé l’e-boutique Sainte Cellier qui vend une sélection très pointue guidée par le coeur. On y retrouvera donc mes parfums aux côtés notamment des marques ERIS Parfums et les Indémodables.
Pour terminer cet entretien, j’ai envie de souhaiter à Isabelle le succès que mérite son talent. J’espère que, dans quelques temps, ses deux parfums et le suivants seront un peu plus facilement accessibles et je dois dire que je croise les doigts car c’est un travail qui m’a beaucoup touché et je suis vraiment très content d’avoir pu le découvrir. Je remercie donc Marion de m’avoir fait connaitre « Le Flocon de Johann K » et j’ai hâte de découvrir « Milky Dragon ». Merci évidemment à Isabelle de s’être prêtée au jeu des questions, ce qui n’est pas toujours facile. J’espère que vous aurez bientôt l’opportunité de sentir, voire même de porter les parfums d’Isabelle car, vraiment, c’est un univers onirique, nouveau et poétique qui a su me séduire complètement.
Optico, un univers séduisant venu d'Italie
Je suis toujours content lorsque je découvre une marque que je trouve réjouissante. J’ai eu un vrai coup de coeur pour la maison italienne Optico Profumi lancée en 2016 et dont les créations sont signées par Nicola Bianchi. Le postulat est simple : une matière première représentative d’un pays mise en avant. Je dois dire que tous les parfums sont facilement identifiables et gardent un côté épuré tout en ayant vraiment une identité très marquée. Je remercie Nicolas et Benoît de la boutique lyonnaise Odorem pour m’avoir fait découvrir cette marque qu’ils ont glané lors du salon de Florence. J’ai beaucoup aimé et j’espère que, très bientôt, elle trouvera un écho et des points de vente en France. Pour l’instant, j’ai eu envie de vous parler des six parfums de la collection Optical Art que je trouve particulièrement réussis. Je n’ai pas réussi à en éliminer un alors je vais essayer d’être un peu plus synthétique que j’habitude pour que mon article ne soit pas trop long.
Nous avons commencé léger par « Italy » qui est une ode à la bergamote. Le parfum s’ouvre sur une très belle huile essentielle de bergamote de Calabre avec des notes d’orange amère de Sicile, de citron, de pamplemousse rose et de lavande de Provence, un coeur de fleur d’oranger, de rose blanche et de jasmin et fond d’ambre gris, de muscs blancs et de graine d’ambrette. Pour ma part, je sens surtout la bergamote et l’orange amère qui, au cours de l’évolution s’intensifient pour donner un parfum vraiment très pétillant et dense. Je trouve que la fraîcheur est idéale pour les étés que nous subissons depuis quelques années. Je dois dire que j’ai beaucoup aimé ce parfum car il y a un petit côté plus tenace que la moyenne et frais à la fois qui m’a vraiment surpris. « Italy » est une réussite, c’est indéniable.
Un départ sucré, un coeur de benjoin de Siam, de fève tonka et de graine d’ambrette et un fond de muscs blancs et de vanille très aromatique, tel est « Réunion ». J’ai trouvé ce parfum très équilibré. C’est une vanille très profonde, un peu gourmande mais sans excès, très naturelle, avec un côté invitation au voyage qui ne pouvait que me séduire. Je ne suis, en général, pas tellement attiré par les presque solinotes vanille mais il me faut bien admettre que « Réunion » est tellement équilibré que je pourrais tout à fait m’approprier. Là encore, on peut s’imaginer dans une île de l’hémisphère sud, au milieu de l’océan indien. J’ai adoré l’idée et je l’ai senti et re-senti. Je pense qu’il plaira autant aux amateurs de cette note gourmande qu’à ceux qui peuvent être un peu réfractaires à la vanilline de synthèse trop monolitique et sucrée que nous sentons trop souvent.
Je n’aime pas tellement les parfums boisés et pourtant, je pourrais tout à fait m’approprier « Gabon » qui est une effluve sombre mettant en valeur le bois d’ébène. L’envolée de bergamote et de safran peut être un peu difficile pour moi mais, curieusement, le coeur d’encens, de labdnanum, de papyrus, d’ébène, de oud, de cèdre et de santal, très profond et élégant a su me séduire et je trouve qu’il s’harmonise parfaitement avec un fond sombre de patchouli, de musc et d’ambre gris très facetté. J’ai vraiment aimé l’élégance un peu brute de ce parfum qui n’est pas vraiment animal ni froid mais, au contraire, chaud et sombre. Il diffuse une curieuse élégance racée et franche. Son évolution est un peu plus longue que celle des autres mais elle est particulièrement réussie. Vraiment, ce parfum, un peu fumé, me plait énormément.
J’ai été un peu moins attiré par « Costa Rica » car, il faut le dire, je ne suis pas tellement fan de la note de café en parfumerie. La note n’est pas trop envahissante et, de ce fait, l’équilibre est vraiment très bien respecté. Il s’ouvre sur une rose très discrète et un géranium délicat puis, le coeur de café, de cashmeran, de cèdre et de oud vient s’installer et se renforcer avec un fond d’ambre gris et de musc. Force m’est de reconnaitre qu’il y a vraiment, dans ce parfum, quelque chose d’original et d’élégant. La note de café qui pourrait être trop gourmande, ne prend pas trop de place. Je trouve qu’il s’agit plutôt d’un cocon boisé et réconfortant. Il n’est peut-être pas celui que je choisirai de prime abord mais je le trouve très chic et original. De ce fait, je dois bien me dire que je ne devrais jamais me faire d’idée préconçue en lisant la pyramide olfactive.
Les deux derniers sont vraiment mes préférés. Je vais commencer par « Sri Lanka » qui tourne, bien évidemment, autour du thé. Il s’ouvre avec des notes de bergamote, d’orange douce, de poivre rose, de badiane et de gingembre, se développe sur un coeur de thé vert, de cèdre, de vétiver et de bois de santal puis sur un fond de gousse de vanille, d’ambre, de fève tonka et de musc. J’aime beaucoup les parfums à dominante de thé surtout l’été et « Sri Lanka » est particulièrement facetté. Il évolue vers un fond riche et frais à la fois. Je le trouve pétillant et très facile d’accès. J’aime beaucoup le parfum en tant que tel mais c’est surtout lorsqu’il arrive sur les notes de fond sans perdre celles du coeur que je suis séduit. En tout cas, il fait partie de mes deux super coups de coeur dans la marque.
Quand on parle d’invitation au voyage, il me semble que « Malabar » en est la parfaite illustration. Après une envolée de mandarine, de coeur d’oeillet doux et une envoûtant cardamome, le coeur de fève tonka, de fruits secs, d’osmanthus et de fève tonka entourent un ylang-ylang vraiment lumineux et presque un peu vert, adouci par l’héliotrope et rendu plus vert par l’absinthe légèrement anisée. Le fond de vanille et d’ambre viennent renforcer un patchouli très finement travaillé. J’ai adoré ce parfum. Pour moi, il est vraiment parfait. Je pense qu’il m’a fait voyager dès que je l’ai senti. J’aime beaucoup ce travail autour de l’ylang-ylang, entre côté solaire et côté poudré. Je le trouve à la fois frais, enveloppant et particulièrement magique. Il m’a fait penser à la Polynésie et aux images d’un lagon bleu intense et de plages de sable ivoire. Vraiment, je pourrais le porter sans problème et je pense qu’il est utilisable toute l’année.
J’ai vraiment un coup de coeur pour cette maison italienne que je ne connaissais pas du tout. Le travail de Nicola Bianchi est comme une évidence. J’aime beaucoup la grande lisibilité des parfums qui gardent tout de même une certaine singularité. En tout cas, c’est un très bel univers. Je me sens séduit et j’espère vraiment qu’on pourra bientôt sentir et trouver ces parfums facilement en France.
Promenade dans mes doses d'essai
Il y avait longtemps que je n’avais pas remis le nez dans mes doses d’essai. J’avais un peu de temps et je m’y suis attelé. J’ai donc réessayé quatre parfums et je vais essayer de vous livrer mes impressions. J’ai opté pour des familles olfactives très différentes, tant qu’à faire, autant varier les plaisirs. Attention, je le répète à chaque fois, je n’ai absolument pas la prétention d’écrire une critique de parfums. Ce serait absurde car il n’y a pas plus délicieusement subjectif que notre perception olfactive. Je dois dire que j’ai plutôt retenu des fragrances qui me plaisent et que je vais paraître plutôt consensuel dans cet article. Il n’est nullement question de langue de bois mais plutôt d’affinités. Je dois dire que j’espère, comme toujours, vous donner envie de sentir, d’essayer et qui sait, peut-être vous ferez-vous des envies.
Le mot du parfumeur, Jean-Claude Ellena : «Visitant la Cité interdite à Pékin, je fus saisi par une odeur exquise qui me mena par le bout du nez jusqu’au Palais impérial, où fleurissent les osmanthus. En novembre, malgré leur taille minuscule, leurs fleurs exhalent des senteurs d’abricot et de freesia très présentes. De les imaginer associées à un thé du Yunnan, la plus belle province de Chine, naquit l’idée du parfum.» J’ai vraiment une attirance pour les notes d’osmanthus ainsi que de thé et je possédais un grand échantillon de « Osmanthe Yunnan » créé en 2005 par Jean-Claude Ellena pour les Hermessences. L’envolée de thé noir et d’orange nous emmène sur un coeur à la fois abricoté et très cuiré d’osmanthus et un fond délicatement boisé. C’est un jeu de cache-cache entre le thé, le cuir, les fleurs et les fruits. Le parfum est vraiment facetté, inédit et il offre une interprétation de l’osmanthus particulièrement étonnante. Sur ma peau, « Osmanthe Yunnan » est d’un équilibre parfait. Il me plait mais c’est vrai qu’il reste dans mes notes de prédilection. Il me fait penser à un sac en cuir dans lequel on aurait laissé quelques heures des fruits et une brassée de fleurs. L’impression est très naturaliste et j’aime beaucoup la fusion avec ma peau. Je ne suis pas toujours séduit par les Hermessences mais celle-ci me plait beaucoup et je pourrais tout à fait la porter. Je la trouve toute en finesse et en élégance.
Avec l’ouverture de la boutique Pierre Guillaume à Lyon, j’ai eu envie de redécouvrir plusieurs de ses parfums et j’ai remis mon nez sur « Un Crime Exotique 12.1 » que le parfumeur a lancé en 2006 et que la marque décrit ainsi : « Pierre Guillaume a exploré pour la première fois le thème du thé chypré en 2005, avec « Hyperessence Matale« , en le texturant d’agrumes et d’accents de cuir. 12 ans plus tard, il retravaille ce thème avec « Un Crime Exotique » 12.1 où la structure chyprée se pare de notes épicées et gourmandes. « Un Crime Exotique » 12.1 joue sur l’union insolite de la résine d’Elémi et du Pain d’épices, au cœur d’une farandole truculente d’odeurs, mêlant vapeur de thé, cannelle de Ceylan et anis étoilé. L’Absolu de Maté et la poudre de cacao teintent le Santal d’Océanie d’un un quaintexotisme … ». C’est un thé noir encore une fois qui s’enrichit d’épices, de notes de chocolat, d’ambre, de fruits, de tabac et de vanille. Il dégage une certaine gourmandise sans pour autant se faire sucré. Je trouve qu’il a un côté à la fois résineux et doté d’épices douces et addictives. J’aime beaucoup le départ très fruité sur ma peau et je comprends la notion d’exotisme évoquée dans son nom puis, en me laissant aller, je sens l’évolution, plus dense, épicée et tabac avec ce petit côté ambré vanillé très addictif. J’aime beaucoup « Un Crime Exotique ». Il est parfaitement conforme à une facette de mes goûts que je ne soupçonnait pas il y a quelques années. Vraiment, il me plait bien.
Je ne suis pas toujours très attiré par le oud, c’est même plutôt rare mais, volontairement, j’ai voulu essayer « Alhambra Oud » créé par Ramon Monegal pour sa marque éponyme en 2019 car je le trouve assez accessible à mon nez. C’est un travail autour de cette matière première qui, depuis quelques années, gagne toutes les collections. Il s’ouvre avec le oud directement mais il est adouci par des notes de pomme verte et de fleur d’oranger et cela le rend moins animal que je m’y attendais. Au coeur, il est associé à un jasmin presque humide, très dense et à une rose légèrement poudrée puis la fragrance se pose sur un fond étonnant car il s’enrichit du côté sombre et goudronné du bouleau ainsi que de la douceur de l’ambroxan. Je ne vais pas vous mentir, je ne me vois vraiment pas le porter mais force m’est de constater que je suis agréablement surpris par son évolution qui reste presque fraîche sur ma peau. La sensation est loin d’être désagréable. Je ne suis pas rebuté (c’est déjà ça) et je le supporte bien. Je l’ai porté par petites touches tout au long d’une journée et, vraiment, il ne m’a jamais dérangé. On ne peut pas parler de coup de coeur mais il m’a assez plu.
Lorsque Julien Rasquinet parle de « Tabac Rose » qu’il a créé en 2020 pour BDK, le parfumeur Julien Rasquinet affirme : « L’addiction opulente du tabac, renforcée par la gourmandise de la prune et du chocolat, rencontre la sensualité de la majestueuse rose turque. Contrastée par les notes épicées de poivre rose et de cannelle, cette douce volupté est prolongée par les notes profondes et mystiques de patchouli et de labdanum » et je trouve que tout est dit. Avec un départ très rond de prune rehaussé, voire même épicé de poivre noir associé avec le citron, le coeur de rose, de chocolat et de cannelle, très chaud et opulent, s’exprime et s’enrichit d’un fond de tabac et de patchouli rendu encore plus cuiré par le labdanum. Je dois dire que, et même si on ne doit plus le dire, ce parfum est un peu trop oriental pour moi. Il est dense, capiteux, profond et particulièrement bien construit. J’ai un peu tendance à dire que je le trouve à la fois addictif et répulsif. La dualité de mon impression me ravit car je n’ai aucun avis tranché. Là, à l’instant T, sur mon bras, je le trouve génial mais je sais que, dans quelques minutes, je ne l’aimerai plus puis que mon attirance reviendra. En tout cas, je me suis fait très plaisir à le sentir et à le réessayer. C’est un parfum complexe et très intéressant.
Voilà, j’espère vous avoir donné envie de sentir ces quatre fragrances. Je trouve qu’elles ne sont pas quelconques du tout et elles ne m’ont pas laissé indifférent. En tout cas, j’aime beaucoup l’idée d’explorer un peu ce que j’ai l’occasion de sentir. J’ai pris beaucoup de temps pour refaire ces expériences olfactives et je ne le regrette pas du tout. Ce ne sont pas forcément des parfums pour moi mais je les trouve très réussis.
Les trois parfums historiques d'Astier de Villatte
En novembre, la maison Astier de Villatte va s’éloigner un peu de l’univers des colognes qui ont fait sa réputation pour éditer trois parfums historiques en utilisant des matières premières exceptionnelles. Ce travail artistique est une collaboration entre l’anthropologue et historienne, spécialiste du parfum Annick Le Guérer qui donne très souvent des conférences passionnantes à l’Osmothèque de Versailles et est intervenue dans différents documentaires sur le sujet et le parfumeur bien connu et fort talentueux Dominque Ropion d’après une idée de Benoît Astier de Villatte et Ivan Pericoli, fondateurs de la marque et ces deux créateurs. J’ai eu la chance de découvrir ces créations ou re-créations en avant-première et je dois dire que j’ai été vraiment très surpris, parfois dérangé, parfois séduit mais je ne suis absolument pas resté indifférent. Alors je vais essayer de vous emmener dans ces trois univers historiques.
Dominique Ropion
Le premier parfum que j’ai pu sentir et essayer a pour nom « Le Dieu Bleu » et il est une interprétation d’un parfum consacré aux dieux par les égyptiens qui vivaient en 4000 avant J.C. C’est un parfum vraiment vraiment très étonnant avec des notes aromatiques plus que mystérieuses, très « toniques » mêlée à un miel de genêt, à des épices et à des bois chauds avec une myrrhe extrêmement présente. Il en résulte une effluve vraiment très étonnante, complètement atypique et qui ne ressemble à rien de ce que j’ai pu sentir jusque-là. Je ne saurais pas vraiment faire entrer ce parfum dans une famille olfactive car il est à mi-chemin entre un épicé et un aromatique baumé, résineux et particulièrement surprenant. Son évolution sur ma peau est vraiment très longue et sa tenue incroyable. Je dois dire que je ne pourrais probablement pas me laisser emporter sur les rives du Nil et m’approprier ce parfum divin. En effet, il m’éloigne un peu trop de mes goûts et je le trouve presque dérangeant tout en ayant conscience de la beauté et de la force du travail du parfumeur. Je sais, c’est paradoxal mais c’est mon ressenti. Pour moi, cet objet parfumé non identifié peut-être vraiment une signature mais nul doute qu’il ravira également les collectionneurs.
« Artaban » est à la fois un quatrième roi mage imaginé par le poète Henry Van Dyke et le nom de plusieurs rois perses et parthes. Il donne son nom à ce second parfum qui est, sans doute, celui qui m’a le plus dérouté. Il nous emmène juste après J.C. fait la part belle au costus, un bois dont l’odeur rappelle le gingembre et au styrax. J’ai trouvé, une fois encore que l’envolée était très aromatique, la marque parle de marjolaine et je suis allé sentir cette herbe afin de me faire une idée. Séchée, elle ressemble assez, avec son côté un peu rugueux, aux notes de tête. Ensuite, au coeur, il me semble avoir détecté de la badiane très tonique et des fleurs blanches, peut-être du jasmin. Le fond est construit autour du styrax avec des notes vanillées enveloppées d’encens et de cannelle. Je dois dire que j’ai vraiment été réfractaire au parfum à la vaporisation puis, curieusement, sur la touche, puis sur ma peau, la fragrance a pris sa place. Au côté âpre du départ vient s’ajouter les notes plus rondes et épicées. Finalement, j’ai assez aimé même si, je ne pourrais sans doute pas porter non plus ce parfum étonnant. Il demeure un peu trop baumé pour mon goût. Ceci dit, je le trouve vraiment très intéressant. Il m’a vraiment ramené aux origines du parfum. Je le trouve tout à fait impressionnant.
Aurore Dupin, baronne Dudevant, plus connue sous le pseudonyme de George Sand a toujours inspiré les parfumeurs. Je connais déjà trois parfums qui lui ont été dédiés, et pour « Les Nuits », inspirée d’une nuit chaude d’été dans la maison de Nohant, Annick Le Guérer a pu se procurer un fond de flacon de voyage ayant appartenu à l’écrivaine et qui a servi de base à la formule imaginée par Dominique Ropion. Alors là, je peux parler vraiment de coup de coeur ! Construit autour de l’une des plus belles roses Damascena que j’ai senti dans ma vie, ce parfum s’enrichit d’une formidable qualité d’iris, d’un patchouli terreux et profond, d’un ylang-ylang lumineux, d’un vétiver terreux et d’un accord cuiré légèrement fumé et très ambré. En principe, je ne suis pas vraiment un fan des ambrés fleuris mais Dominique Ropion a vraiment créé un parfum qui me réconcilie complètement avec ce style de fragrance. L’équilibre entre les notes poudrées, presque cosmétique de l’iris, l’opulence et la finesse de cette rose veloutée et le fond cuir et patchouli est une véritable merveille pour moi. Je parle parfois de chef-d’oeuvre en parfumerie et force m’est de constater qu’avec « Les Nuits », c’est ce qu’a réalisé Dominique Ropion. Vraiment, je suis emballé par ce parfum à la fois d’un classicisme étudié et d’une richesse impressionnante. Sur ma peau, il est extraordinaire et vraiment, je me suis fait plaisir quand je l’ai essayé.
J’ai beaucoup aimé l’expérience olfactive de cette découverte. Je trouve que Dominque Ropion et Annick Le Guérer, chacun dans sa spécialité, sont vraiment allés au-delà de la parfumerie telle que nous la connaissons. Pour moi, le seul bémol est le prix des flacons qui est tout de même très élevé. J’en ai une idée encore un peu floue mais j’ai cru comprendre que chaque flacon décliné en 10 ml, 30 ml et 100 ml était quand même onéreux. Ceci dit, les collectionneurs peuvent aussi opter pour un coffret regroupant 10 ml des trois fragrances accompagnés d’un livre qui se promet d’être passionnant. La sortie n’est prévue que dans quelques semaines mais j’étais impatient d’écrire cet article. Je pense qu’il faut absolument découvrir ces trois parfums hors-norme qui représentent la beauté d’une culture olfactive qui a traversé les siècles.
Ormaie, un univers original et 100% naturel
J’avais un peu découvert les création de la maison Ormaie il y a quelques mois aux Galeries Lafayette des Champs Elysées à Paris car un intervenant me les avait fait essayer mais j’étais un peu passé à côté. J’ai eu l’occasion d’y remettre mon nez lors de mon dernier séjour à Paris et j’ai décidé d’en faire une revue. Qu’est-ce que Ormaie ? C’est une marque de parfums 100% naturels et dont le flaconnage est resté artisanal née en 2018. Je ne suis pas forcément attiré par ce genre de fragrances car je trouve que, bien souvent, si les créations peuvent être belles, la tenue n’est pas au rendez-vous. Ceci dit, j’étais intrigué par Ormaie depuis que j’en avais entendu parler à nouveau par Marion sur sa chaîne YouTube Des Paons Danse Cent Heures et, lorsque je les ai vus, je les ai sentis à nouveau et j’en ai essayé plusieurs sur ma peau. J’en ai retenu quatre qui m’ont semblé originaux et intéressants. Je vais tenter de vous donner mes impressions.
Mon coup de coeur est une explosion de fraîcheur et d’agrumes ce qui est rare. Lorsque j’ai découvert « Les Brumes » lancé en 2018, je n’en n’attendait pas grand-chose et pourtant, je dois dire que j’ai été complètement séduit. La marque le décrit par ces mots : « Les Brumes réveillent le souvenir d’une matinée entre orangers et citronniers. On y devine la rosée du matin sur les citrus et les bois ». Pour moi, le côté fusant qui apparaît dès les notes de tête est un joli choc olfactif. L’association du citron et du gingembre un peu acidulée est adoucie par une bergamote et une mandarine légèrement plus suave et nous emmène avec plaisir et une certaine jubilation vers un coeur de jasmin et de tubéreuse resté frais et épicé de cardamome avec une pointe de sauge sclarée. Le fond, discret, de cèdre, de santal et de vétiver soutiennent une note de maté particulièrement bien vue. Sur ma peau, ce parfum a une très étonnante tenue et, à mi-chemin entre hespéridé et floral, il est une alternative de choix pour un été très chaud. Vraiment, ce parfum m’a séduit complètement et je dois dire qu’il est mon coup de coeur dans la marque.
Lancé également en 2018, « Toï Toï Toï » m’a également bien plu. « Toï Toï Toï se prononce « toy toy toy » est une expression allemande pour souhaiter « bonne chance » aux danseurs. Il évoque le parquet de l'opéra et cet instant mystique avant la représentation ». Le départ d’encens et de poivre noir est très épicé et vraiment surprenant et le coeur de cèdre, de santal et de patchouli ne le demeure pas moins mais ce sont surtout les notes de fond qui restent sur la peau au bout de quelques minutes qui sont originales. En effet, le vétiver et la vanille sont enveloppé d’une note de nagarmotha que je trouve assez inédite il faut bien le dire. Je ne savais pas ce qu’était cette plante herbacée qui pousse surtout en Nouvelle-Guinée, en Inde et en Australie. Je pense que c’est son utilisation qui donne à ce parfum cette originalité un peu addictive que je trouve vraiment étonnante. Sur ma peau, le parfum a une tenue un peu limitée, c’est dommage car il m’aurait bien plu. Je le trouve vraiment originale et il me semble que son créateur contourne vraiment les restrictions imposées par le tout naturel à sa palette pour inventer un parfum vraiment singulier.
J’aime bien la note de réglisse en parfumerie et il était vraiment logique que je m’arrête sur « Papier Carbone » créé aussi en 2018 et que la marque décrit ainsi : « Papier Carbone est un travail de mémoire. Le papier de l’école, le bois de la bibliothèque et la réglisse que l’on aimait enfant. Une odeur indélébile et rassurante ». Si je n’aime pas tellement l’envolée de bergamote, de café enveloppé de cardamome et de badiane, le coeur de sauge sclarée, de lavandin, de coriandre et de muscade qui vient vraiment créer une impression de bois de réglisse me plait beaucoup ainsi que les notes de fond qui perdurent et enrichissent ce côté boisé et presque poussiéreux. Le parfumeur a utilisé du patchouli très discrètement ainsi que de vétiver d’Haïti, de la graine d’ambrette et du bois de gaïac. Moins original que certaines autres créations de la marque, il n’en demeure pas moins que « Papier Carbone » est agréable à essayer et à porter. Franchement, il est facile et vraiment très joli dans son évolution. Je trouve qu’il vient prendre une place un peu vacante dans le paysage olfactive actuel.
J’ai hésité sur le dernier parfum que j’ai sélectionné et j’ai finalement opté pour « Marque-Page » sorti en 2021 et qui m’avait, je dois le dire, vraiment échappé. Je dois dire qu’il m’a surpris plus qu’il ne m’a vraiment plu. Je le trouve très original voire osé. « Marque-page s'inspire de la lumière qui joue avec les ombres de la terre cuite dans les souks, des vents chauds du désert ». Il s’ouvre sur des notes d’encens, de davana et d’armoise vraiment surprenantes avant de nous conduire sur un coeur de cuir, de géranium, de jasmin, de fleur d’oranger et d’iris puis un fond de oud, de nargamotha, de santal, d’ambre, de vétiver, de patchouli et de cèdre. Je dois bien le dire, il m’a dérouté notamment par le côté musc animal créé par l’association des matières utilisées. Parfois, les compositions sont déroutantes et pas du tout où on les attend. Je pensais « Marque-Page » un peu gourmand quand j’en lisais l’inspiration et bien pas du tout, ici point d’épices et de fruits confits mais vraiment un cuir animal, oud, très marqué. Je ne suis pas certain que je pourrais le porter mais je dois bien le dire, j’ai été impressionné par le parti pris de la marque et la prise de risque car vraiment, il ne sera pas le parfum de tout le monde.
J’ai fait l’impasse sur « 28° » que j’ai trouvé moins original quoi que très réussi, « Yvonne » dont je reparlerai plus tard, et « Le Passant » qui est une très belle lavande solinote d’une élégance rare mais je voulais vraiment ne sélectionner que quatre créations. Globalement, maintenant que j’y suis vraiment revenu, j’ai bien aimé l’univers de Ormaie alors que je n’avais pas du tout accroché au premier abord. Je dois bien dire qu’il y a quand même quelque chose qui m’a fait tiquer, ce sont les prix que je trouve vraiment très élevés. Certains parfums sont difficilement abordables il faut bien le dire et c’est dommage. Je pense que c’est un peu la rançon du 100% naturel bien souvent et Ormaie ne fait pas exception à la règle.
Pierre Guillaume Parfumeur, l'ouverture de la boutique lyonnaise
Nous avions déjà pas mal accès aux créations du parfumeur Pierre Guillaume à Lyon grâce à la très judicieuse sélection d’Anne de la Mûre Favorite qui nous a permis d’accéder à nombre de belles créations dans sa boutique nichée au coeur du 6ème arrondissement. J’en profite pour la remercier une fois encore pour son accueil toujours chaleureux, et la simplicité avec laquelle elle partage ses goûts et ses coups de coeur. L’ouverture de la boutique en nom propre de la marque au tout début de la rue Émile Zola, dans le carré d’or de la Presqu’île, tout près de la place des Jacobins si bien restaurée, m’a permis, étant donné qu’elle propose toute la collection, de faire de belles découvertes présentées par Pierre Guillaume qui parle très bien de ses créations et de ses inspirations. J'avais envie de parler de la boutique comme lieu et des découvertes que j’ai pu faire car le partage était aussi de la partie. Parmi ce que j’ai pu sentir, j’ai sélectionné cinq parfums dans les différentes collections et je dois dire que j’ai pu découvrir un univers parfois recentré sur des thèmes et parfois complètement éclectique. Je profite de cet article pour remercier Marion de la chaîne YouTube Des Paons Danse Cent Heures pour les pistes qu’elle me donne souvent à explorer dans les très nombreuses créations de la marque. Notre approche du parfum étant parfaitement subjective, je vais essayer de me référer à l’inspiration du parfumeur avant de vous livrer mes propres impression. Allez, je vous emmène dans les créations très foisonnantes de Pierre Guillaume.
Le tout premier parfum qui m’a surpris voire séduit est « Iris Oriental 14 » tiré de la collection numéraire et qui est un travail tout à fait déroutant qui est en fait une composition au coeur de laquelle cette matière première précieuse tient une place importante mais nous sommes très loin du solinote. Le parfumeur en exprime ainsi l’inspiration : « Un miel d’iris, baroque et radieux. Un Iris habillé d’un costume baroque ensoleillé : une intrigante robe orientale où le bois de Jinkoh animalisé s’allie à la richesse de l’absolu d’Iris et à la douceur du Miel de Figuier ». Pour moi, c’est un iris caché, boisé, un rien gourmand et épicé qui ne ressemble à rien d’autre. Dans ce parfum, la facette poudrée ou terreuse que produit souvent le rhizome d’iris n’est pas ce qui me frappe en premier. J’ai plutôt été impressionné par un côté à la fois un peu sombre et vaporeux comme s’il était transparent et tout en légèreté. Pourtant, il reste là, bien présent profondément identifiable. Je lui ai trouvé une élégance étrange. Lorsque Pierre Guillaume le qualifie de « baroque », je comprends parfaitement et j’adhère tout à fait. C’est un iris qui va vraiment surprendre, baumé, très profond et pourtant tout en finesse. J’ai beaucoup aimé ce parfum que je trouve très singulier et qui montre, une fois de plus que les possibilité du travail de l’une des reines des matières premières en parfumerie, sont infinie et qu’elle a encore de quoi nous surprendre.
Je ne connaissais pas vraiment la collection Contemplation aussi nous il était intéressant de mettre mon nez dans quelques créations de cette série de parfum très confidentiels. Là encore, j’ai marché sur les traces de Marion car je sais qu’elle a eu un engouement pour « Irizia Pearl » et elle m’en a parlé souvent. J’ai donc « fait mes devoirs » et il a été le premier que j’ai découvert. Je dois dire que je comprends son coup de coeur. « Un cocon de sève, de bois doux et de baumes… Entre Sève verte et fraîche et baumes doux et enveloppant la structure d’Irizia Pearl évoque les pulsations de sphères olfactives concentriques, formant un Cocon, dont elle est l’allégorie odorante. Toutes les notes apparaissent dés l’envolée et ne disparaissent vraiment jamais pour laisser place à d’autres. Toutes résonnent à l’unisson d’un cœur de Jasmin White Pearl, entouré d’une coque de baumes et de bois doux parcourus d’une vapeur de riz et de sève de santal ». Le mot « cocon » est presque un euphémisme car vraiment le côté enveloppant, réconfortant en diable de ce parfum à la fois presque amandé, poudré, légèrement vert et boisé avec également un côté baumé est comme une écharpe en soie ou en cachemire qui serait presque « isotherme ». En effet, je le crois facile à porter en toute saison en dépit d’une indéniable originalité. J’aime beaucoup ce que la marque décrit comme une vapeur de riz associé à cette variété de jasmin et au cashmeran. C’est une zone de confort universelle et pourtant « Irizia Pearl » ne ressemble à rien d’autre. Je pourrais tout à fait le porter et je le trouve d’un chic très contemporain. Il est typiquement un parfum qui pourrait devenir un classique.
Toujours dans cette collection Contemplation, j’ai été très agréablement conforté dans ce que m’évoquait son nom lorsque j’ai senti Habanera, également sorti en 2021. « Un ambre explosif et torride inspiré par le rythme lascif d’une danse sud-américaine, les peaux se frôlent et se cherchent, en un jeu de corps à corps sensuel. Habanera est un cortège de “baumes sous tension” portées par des volutes de tabac cubain, du cuir sur un accord copal du Mexique, safran et rose confite » tel sont les mots du parfumeurs pour traduire son inspiration et on y est ! Pour moi, en sentant cette rose confite, profonde, sombre et cuirée, j’entends comme une musique, un « tube » extrait de Carmen de Bizet chanté par Maria Callas au mythique concert de Hambourg. Elle est là, la gitane rêvée et « L’amour est un oiseau rebelle… ». C’est un parfum envoûtant, facetté qui traduit un univers très intense, presque subversif, presque bad girl ou bad boy. Je suis revenu à ce parfum toujours et encore. Je l’ai senti, ressenti, je n’arrivais pas à l’ôter de mon nez. Je ne pourrais sans doute pas le porter car il m’éloigne de mes goûts, mais j’adore le sentir. Je l’imagine sur une peau brune, entourée d’un halo de poussière de soleil. Je sais, c’est une impression un peu lyrique mais, comme le disait Carmen, « Si tu m’aimes, prends garde à toi » !
« Poire juteuse et chaleur boisée… C’est un verger oublié des rives du Lac de Côme sous le brun électrique d’un ciel d’orage… Le fruit frais, exprimé par des extraits naturels, dans une nouvelle concentration, la feuille et le bois de poirier y rencontrent les rameaux d’olivier et l’ambre gris ». Nous avons aussi senti et, pour moi c’est une découverte car je ne le connaissais pas, « Ciel d’Airain » issu de la Black Collection et créé en 2010. Je ne peux pas dire qu’il m’ait vraiment séduit au premier abord mais, je l’ai trouvé complètement inédit. Basé sur une association de bois de poirier et d’ambre gris, il pourrait paraître complètement incohérent sur le papier mais il faut le sentir. La marque le décrit comme boisé, casual, frais, fruité, mélancolique, poudré, propre, romantique, tendre et vert et c’est bien avec toutes ces élégantes contradictions que je l’ai ressenti. Il est d’une élégance indéniable et la douceur de la note de poire et de bois de poirier se charge des facettes infinies de l’ambre gris. Il change, tout le temps. Il est frais dans un certain sens mais sans pour autant être dénué d’une grande intensité. Il a presque un côté apaisant. Il est la chemise blanche un peu revue et corrigé par un styliste inattendu, la petite robe noire accessoirisée de manière qui pourrait sembler inappropriée. C’est un parfum qui m’a, en fin de compte, beaucoup plu par l’équilibre de ses notes et l’impression de n’avoir jamais senti rien de pareil.
Le coup de coeur de ce samedi est issu de la collection Contemplation et il s’agit de « Au Royaume des Femmes » que j’ai trouvé vraiment très duel comme la rencontre de deux univers. Lorsque Pierre Guillaume nous en a expliqué l’inspiration, j’ai tout de suite compris ce qu’il voulait dire et, ce qui est rare, j’ai eu l’impression de l’accord parfait entre deux mondes. « Sur les rives du lac Lugu, à l’orée de l’Himalaya, le pays des Mosuo est surnommé le royaume des femmes. Ce peuple d’anciens nomades, est une des dernières sociétés matriarcales de la planète : tous les privilèges, les pouvoirs reviennent aux femmes. Au royaume des femmes est une rose poivrée-fève tonka posée sur un lit de benjoin animalisé… un hybride entre guerrière tribale et diva disco, mon allégorie olfactive de l’empowerment féminin ». En effet, il y a vraiment un côté ethnique, baumé, très brut surtout à l’envolée puis vient cette note de benjoin très baumée, presque animale, presque charnelle qui va être sublimé par une rose poivrée très profonde et arrondie par la fève de tonka et complètement incongrue. Et pourtant, ça fonctionne et même très bien. J’ai eu une touche imprégnée de ce parfum sur moi toute la soirée et j’y suis revenu tout le temps. Vraiment je l’ai beaucoup aimée cette création que je trouve à la fois très immédiate et sophistiquée. Malgré un nom très genré, je le trouve tout à fait androgyne et je pourrais tout à fait le porter. En tout cas, c’est un parfum à découvrir absolument dans les boutiques en nom propres de la marque.
Vous l’aurez compris, je me suis laissé emporter par mes découvertes. Il y en a eu d’autres mais je ne veux pas être trop long. Il faut quand même que vous ayez envie de me lire jusqu’au bout. L’univers de Pierre Guillaume est foisonnant, divers et varié et je suis loin de tout connaitre et de pouvoir vous parler de l’ensemble des collections mais l’avènement de cette boutique permettra sans doute de faire de nouvelles découvertes et d’avoir très vite les nouveautés sous le nez. Pour ma part, j’en reste quand même, pour l’instant, et pour ne pas trop me disperser, à « L’Eau de Circé » qui est le parfum de la marque que je porte depuis le plus longtemps et pour lequel j’ai une tendresse mélancolique qui me suivra encore longtemps. Je louche aussi, à l’approche d’une saison plus froide, du côté de « Animal Mondain » qui avait été un énorme coup de coeur à sa sortie. En tout cas, il y aura sans doute d’autres découvertes dans la marque et je viendrai, avec plaisir, vous en parler.
Amandine Clerc-Marie, un beau travail des fleurs... entre autres
C’est en écoutant un podcast sur les parfumeurs de Firmenich que j’ai eu envie de me pencher sur le travail d’Amandine Clerc-Marie et notamment son travail sur les fleurs. J’ai fouillé dans mes doses d’essai et je me suis donc rendu en parfumerie et j’ai découvert quatre parfums que je ne connaissais pas et dont j’ai eu envie de parler. En tout cas, j’ai pu essayer quatre parfums très élégants, dans la belle tradition de le la création à la française notamment chez Chloé. Je dois dire que j’ai bien aimé ce travail tout en finesse et en charme. J’avais envie de vous en faire profiter car, à chaque fois que je suis le travail d’un parfumeur, je me laisse guider par le fil rouge tiré entre ses différentes créations. Avec Amandine Clerc-Marie, c’est vraiment le naturalisme floral qui est souvent mis en avant. Je trouve qu’il y a également quelque chose de très « végétal » dans la plupart des créations.
Le tout premier parfum dans lequel j’ai mis mon nez et dont j’avais une dose d’essai un peu par hasard est « Herba Mimosa » qu’Amandine Clerc-Marie a créé en 2019 pour la collection Atelier des Fleurs de Chloé. Floral, vert, ce parfum est une interprétation assez étonnante de cette fleur que j’aime beaucoup en parfumerie. « Cette fragrance tendre et poudrée fait écho à un souvenir de jeunesse de Amandine Clerc-Marie : l'émotion sensorielle ressentie en découvrant la floraison des mimosas sur les collines de Grasse, lorsqu'elle avait vingt ans. Des mimosas aux facettes poudrées, boisées, végétales et lumineuses qui donnent de l'ampleur à la composition ». La marque ne communique pas sur les notes mais présente le parfum comme un soliflore. Je trouve que ce n’est pas vraiment exact. J’aime beaucoup le côté un peu moins poudré que dans certaines autres compositions et la note verte qui perdure tout au long de son évolution. C’est un travail floral qui me séduit car il y a à la fois un certain naturalisme et un twist très vert, galbanum il me semble qui rend très agréable le cocon qu’il crée autour de moi.
« Une potion d’amour qui révèle la féminité et le pouvoir hypnotique des femmes qui le portent. Captivante et radiante, la fragrance s’ouvre sur des notes délicieuses de mûre, de kiwi et de fleur de mandarine. Un bouquet floral d'orchidée, de freesia et de fleur de nénuphar en note de cœur dévoile le côté séduisant de la fragrance. La sensualité est intensifiée par son fond boisé et musqué. Secret Love, une composition absolument féminine ». C’est cet été que j’ai découvert les deux créations d’Amandine Clerc-Marie pour Majouri et j’ai bien aimé surtout « Secret Love » que je trouve très agréable non seulement à sentir mais aussi à porter même s’il est vrai qu’il s’adresse plutôt aux femmes par con côté très orchidée doux et suave. Le départ de cassis nous accroche tout de suite et il s’enrichit du côté kiwi très acide et plus doux de la mandarine et nous emmène sur un coeur de freesia et de nénuphar à la fois prenant et un peu aquatique adouci par cette note suave, presque vanillée de l’orchidée. J’aime un peu moins le fond boisé et musqué qui, sur moi, manque un peu de délicatesse et casse légèrement le côté pétillant de la fragrance. Il n’en reste pas moins que c’est un parfum qui m’a beaucoup plu et auquel j’ai accordé vraiment de l’attention.
« Inspiré par le soleil des jardins marocains, M. Yves Saint Laurent a infusé la lumière dans ses plus belles créations. Atlas Garden met en tension la fraîcheur solaire de la Fleur d'Oranger et la chaleur addictive de la Fève Tonka. Deux ingrédients nobles travaillés autour d'un accord gourmand aux facettes mielleuses, inspiré de la Datte orientale ». « Atlas Garden », créé par Amandine Clerc-Marie en 2019 pour Le Vestiaire des Parfums Orientaux d’Yves Saint Laurent est l’un des grands succès de la collection et il me fallait absolument l’inclure dans ma sélection même s’il m’éloigne de ma zone de confort comme on dit. Je suis donc allé sur le stand de la marque au Printemps à Lyon pour le redécouvrir. L’ouverture est une envolée de fleur d’oranger, au coeur, on retrouve de l’amande avec un accord qui rappelle la datte et de la fève tonka et le fond est une overdose d’ambroxan. On dirait aujourd’hui que ce parfum est un « floriental ». Je dois dire que je ne suis pas très en accord avec la conseillère du stand qui prétendait qu’il m’allait bien. Il est très beau et très bien construit mais absolument pas pour moi car je le trouve trop liquoreux et trop opulent sur ma peau. J’aime beaucoup l’idée d’un oriental très dense que je pourrais porter mais, aussi réussi soit-il, ce ne sera pas « Atlas Garden » hélas.
Le dernier parfum dont je disposais de la dose d’essai n’est pas un floral mais un oud réalisé tout en finesse, sans trop d’animalité, avec une élégance peu commune pour Atkinsons. Amandine Clerc-Marie a créé « Oud Save The King » en 2013 et je ne m’étais pas vraiment arrêté sur ce parfum à tort car il est très intéressant et devient maintenant difficile à trouver. « Inspiré de l'histoire d'amour interdite entre le prince héritier Mohammed Ali Ibrahim d'Égypte et la star de cinéma américaine Mabel Normand, Atkinsons Oud Save The King est un parfum glorieusement sensuel et luxueux. Célébrant son affection pour tout ce qui est britannique et son amour pour Mabel, il mélange l'arôme distinctif de son thé préféré, Earl Grey, avec les tons riches et cuirés de l'accord Suede. Mais, à la fin de la journée, il est un prince égyptien, après tout, et il n'y a pas moyen de s'éloigner de ses racines exotiques, d'où les notes sensuelles et séduisantes de bois de santal et d'oud musqué qui en font un parfum sophistiqué et majestueux digne d'un Roi. Ou même d’un prince héritier ». Avec une envolée de bergamote et de thé noir, un coeur basé sur le bois de santal et un accord oud puis un fond d’iris et de cuir doux et presque daim, ce parfum tout en finesse m’a plus surtout lorsqu’il s’est développé sur ma peau. Je trouvais un peu curieux le départ très Earl Grey, presque addictif puis, arrivé sur les notes de coeur, j’ai eu l’impression d’un parfum un peu convenu mais le fond poudré et cuiré est vraiment beau. C’est une très belle création. J’espère qu’Atkinsons retrouvera des points de vente en France.
J’ai beaucoup aimé découvrir ou redécouvrir le travail d’Amandine Clerc-Marie bien que je ne l’ai fait que dans le but d’écrire cette revue. Il y a vraiment une signature derrière ces parfums. J’aime beaucoup la finesse et la délicatesse de chacune de ces fragrances même si elles ne sont pas forcément pour moi. Je vous engage donc, car nous avons tous nos goûts, à aller les sentir, voire même à les essayer et j’aimerais avoir votre retour.
Le bois de rose, intrigant et facetté
C’est une note harmonieuse, à mi-chemin entre plusieurs autres et je crois que c’est dans « H24 » d’Hermès que j’ai réussi à l’identifier le plus facilement la première fois que je l’ai senti. J’aime beaucoup le bois de rose en parfumerie. Il présente plusieurs facettes, la première est évidemment boisée, très nette et singulière, la seconde est épicée voire même un peu poivrée. On peut aussi, bien évidemment, trouver dans cette matière première, un versant floral très prononcé. Matière première très onéreuse, car il faut 100 kg de bois pour produire 1 l d’essence. Il est utilisé le plus souvent en traces pour apporter un twist qui va tout changer dans les parfums notamment aromatique ou floraux. Il peut aussi être associé à d’autres bois et aux muscs blancs. Je trouve que c’est une matière difficile à identifier mais qui apporte un fil conducteur entre toutes les fragrances qui en contiennent même une quantité infinitésimale. J’ai choisi quatre parfums dans lesquels j’arrive bien à identifier la note et je dois dire que, pour la plupart, je dos être sensible à son association avec les notes choisies par les parfumeurs.
Anaïs Biguine a pas mal utilisé cette note dans sa collection Les Cocottes de Paris et notamment dans « Melle Cléo » qu’elle a sorti en 2015 et que j’aime particulièrement. « Telle une hétaïre farouche, elle se distingue dans une sorte de lupanar qu’est l’opéra de Paris. L’eau de parfum Melle Cléo est une sorte de chorégraphie olfactive aux variations imprédictibles. Un bois de rose Botticellien, une belle de nuit digne des asparas et une fleur de coton pour la plus angélique des cocottes ». Pour symboliser cette égérie du Paris du XIXème siècle, la parfumeure a choisi de créer une fragrance particulièrement intrigante et, en même temps, très facile à porter. Il s’ouvre sur une envolée de bois de rose très épicée et enrichie de bergamote et de litchi très doux pour évoluer vers un coeur singulier d’ylang-ylang et de rose puis un fond de fleur de coton et de mousse de chêne. La douceur de ce parfum à la fois très tenace et un peu « pour soi » m’a plu tout de suite. Je ne sais pas si j’aimerais le porter car je lui trouve quelque chose de très « tendre » et je préfère, en principe, les parfums plus affirmés mais j’adore le sentir. Je dois dire que, sur ma peau, il matche particulièrement bien alors rien n’est jamais joué. Je trouve qu’Anaïs Biguine donne là une interprétation toute en nuance du bois de rose et, pour moi, c’est une vraie réussite.
« Avec Junky, Jardins d’Écrivains interprète le parallèle avec la dépendance olfactive. Le parfum a le pouvoir de provoquer un état propre à chacun ; son influence sur le comportement est indéniable et troublante. S’il raconte une partie de soi aux autres, il révèle également beaucoup à celui qui le porte. Junky se veut complexe et insolite. La fraîcheur du Cannabis accapare les premières notes. Le coeur ténébreux des fleurs crémeuses de Gardénia, d’Iris et de Violette se mêle à un fond de bois secs : Cachemire, Cèdre et Cade, subtilement rehaussé de résines et de Vétiver de Java. Junky invite à la singularité ». Avec ce parfum qu’elle a créé en 2014 pour sa marque originelle, Jardins d’Écrivains, Anaïs Biguine a donné une interprétation complètement différente du bois de rose qui est associé, dès l’ouverture avec la facette très verte du galbanum et très envoûtante du chanvre qui lui confère un côté très fugace mais étonnant cannabis que le coeur floral d’iris, de gardénia et de violette puis le fond d’encens, de mousse, de vétiver, de bois de cade, d’opoponax et de cèdre rend à la fois plus doux et plus complexe. Avec ce parfum, Anaïs Biguine explore un univers un peu subversif mais également addictif. Attention, « Junky » n’est pas le parfum de tout le monde, il faut l’assumer, il est très original et clivant, on l’aimera ou il nous rebutera mais il ne nous laissera pas indifférent. Je l’ai porté pour écrire cet article et j’avoue que le bois de rose épicé lui donne encore plus de singularité. Je ne suis pas certain d’être assez audacieux pour le porter mais il est fascinant.
Je n’ai jamais caché que j’avais eu un coup de coeur pour « Lost In Translation », sans doute le parfum le plus singulier proposé par Maison Matine à ce jour et cela ne s’est jamais démenti. Le parfumeur Laurent Marrone qui l’a créé l’an dernier en 2021 le décrit ainsi : « La révélation d'un paysage inconnu grâce à un accord osé de notes fumées, aquatiques et métalliques. Lost In Translation représente le début du confinement international. Un parfum profond et contemporain ». J’ai su, dès le départ de veuille de violette et de baie de genièvre que ce parfum allait me surprendre et cela s’est confirmé avec le coeur très affirmé de bois de rose floral et épicé, de thé et de poivre noir denses, profonds et très surprenant car il lui confère à la fois une certaine fraicheur et de la personnalité. Le fond de patchouli, de muscs et de tabac viennent ajouter à l’originalité de cette création particulièrement bien réussie. Je trouve que « Lost in Translation », à l’instar de plusieurs créations de cette petite maison à suivre absolument, est un bijou de parfumerie dont on parle peu mais qu’il faut absolument découvrir. Je pourrais tout à fait le porter. Je dois même dire qu’en le réessayant pour écrire cet article, je l’ai trouvé encore plus joli.
Je ne peux pas dire que je sois complètement fan du dernier parfum dont j’avais envie de parler mais je ne pouvais pas passer à côté car, en l’inventant, en 2017 pour sa marque éponyme, Ramon Monegal a créé un best-seller. Il s’agit, bien évidemment de « Flamenco ». « Émotion enivrante exprimée en chanson, la guitare et la danse qui, sous le charme de l'Alhambra, transcende dans ce parfum : des larmes salées comme la rosée méridionale, un éventail de pétales de fleur d'oranger, de rose et de jasmin, puis des volutes de santal et bois de cèdre. Cette fragrance magique finit en nectar voluptueux d’étamines safranées, ambre et musc ». Je dois dire que je suis très rebuté par l’envolée qui mêle l’iris et la violette poudrée avec cette note de framboise synthétique qui me dérangerait presque mais le coeur de rose et de bois de rose associé au jasmin est vraiment très beau quoiqu’un peu fugace car il s’enrichit d’un fond à la fois musqué et boisé avec un côté ambré. Je suis vraiment partagé lorsque je sens ce parfum. Il me faut vraiment laisser s’évaporer les notes de tête et, ensuite, je trouve l’évolution jolie. Je préfèrerais peut-être que le côté à la fois floral et poudré du coeur soit plus développé mais tel n’a pas été le désir du parfumeur et je le respecte. Il reste que je comprends son succès. Je connais plusieurs amateurs de parfums qui le portent et cela ne m’étonne pas car il est quand même très réussi.
Je me suis vraiment fait plaisir à traquer les traces de bois de rose dans ces parfums et je trouve qu’elles leur confèrent quelque chose d’unique, d’attirant et de vraiment élégant. Je trouve que, à l’instar de « H24 » d’Hermès, particulièrement l’eau de parfum qui vient de sortir, le bois de rose utilisé de manière un peu plus importante, est vraiment une facette voire une note particulièrement élégante et raffinée. Vraiment, je l’identifie maintenant assez bien et je comprends pourquoi j’aime plusieurs parfums qui en contiennent. J’aurai d’ailleurs pu en citer d’autres dans Les Cocottes de Paris ou encore des maisons comme Alexandre J, Majda Bekkali, Ormonde Jayne, Penthalogies et 1907 mais il fallait bien faire des choix. En tout cas, j’espère avoir piqué votre curiosité et j’aimerais avoir vos retours.
Cinq parfums ambrés que j'aime beaucoup
On doit désormais dire parfums ambrés plutôt que parfums orientaux. Je trouve la polémique un peu stérile mais donc je vais me plier à la nouvelle appellation pour introduire les cinq créations chaudes, enveloppantes, voire même ambrées (mais pas seulement même si le terme est générique) que j’ai choisi de présenter en ce début du mois d’octobre plutôt frisquet. Il faut bien admettre que j’ai un peu remisé mes parfums d’été au profit de fragrances plus enveloppantes même si je ne porte pas forcément ce que je pourrais m’approprier en plein hiver mais je commence à y mettre mon nez. Alors, ambrés fleuris, « florientaux », boisés chauds, musqués enveloppants, cuirs, j’ai décidé de faire la part belle à la première et à la deuxième catégorie qui, soit dit en passant, n’est pas celle avec laquelle je suis le plus à l’aise et que je porte finalement rarement. Alors me voilà parti dans un univers qui m’est un peu difficile parfois mais que je trouve particulièrement intéressant à découvrir ou redécouvrir.
« Le mythique et extrêmement prisé extrait d’Ambre gris utilisé en parfumerie est une exsudation rejetée par le cachalot ». Le premier parfum auquel je me suis intéressé fait la part belle à l’ambre gris puisqu’il est concentré à 10% de la totalité de la formule. « Ambre Suprême » a été créé en 2021 par Antoine Lie pour la collection des eaux de parfums de la maison originaire d’Annecy Les Indémodables qui met en avant de très belles matières premières. « Dans Ambre Suprême, une teinture d’Ambre gris authentique extraite grâce à notre technologie ultrasons est utilisée pour la première fois en surdosage à 10% par le parfumeur Antoine Lie, révélant et amplifiant ses facettes ambrées, animales, minérales et légèrement iodées. Un accord inédit, ‘patiné’ par cet extrait d’exception, au rendu totalement addictif ». Je trouve cette création absolument fascinante car j’ai senti, lorsque je l’ai découvert, toutes les facette de cette matière première devenue rare. Je ne me suis même pas plongé dans la pyramide olfactive tant je l’ai trouvé solinote et multinotes à la fois. Tout comme l’ambre gris que j’avais pu sentir, il se fait parfois ambré, bien sûr, mais aussi vanillé, animal, boisé et salin. C’est un parfum rare, puissant, pas forcément facile à s’approprier. Il peut s’apparenter à « MXXX » qu’Antoine Lie avait créé pour la marque américaine Eris dont j’ai déjà beaucoup parlé dans sa sa concentration mais la composition est différente. Je la trouve encore plus facettée. J’aime beaucoup « Ambre Suprême » dans l’idée mais je ne pourrais pas le porter. Il est un peu trop capiteux pour moi. Il n’en reste pas moins que j’adore le sentir.
Je n’ai pas souvent porté des parfums créés pour Comme des Garçons. Il y a eu « Daphné » créé par Antoine Lie en hommage à Daphné Guinness mais qui n’existe hélas plus et « Floriental » que la marque a sorti en 2015. Je l’ai essayé et utilisé il y a déjà quelques temps et il est vrai que je n’en parle pas beaucoup. « Floriental est un parfum floral dérangé qui défie les traditions de la parfumerie pour réinventer une fleur sans parfum. Un conflit créatif qui brouille les cartes entre le floral et l’oriental pour réaliser quelque chose de totalement différent. Sans notes de tête, cœur ou fond précises, chaque ingrédient émerge et se décline en une confusion créative ». Avec son ouverture de prune, le parfum, dès la vaporisation, est une véritable addiction. Cette note s’enrichit en coeur d’une rose poivrée et de ciste labdanum pour le côté cuiré et, en fond d’ambre, de bois de cèdre, d’encens, de santal et de vétiver. Élégant, inédit, enveloppant, « Floriental » est assez inclassable et je dois dire que j’ai beaucoup aimé le porter. Je ne sais pas si je le ferai à nouveau car il est tout de même éloigné de mes goûts mais je dois dire que je trouve que c’est une très belle création dont on ne parle pas assez souvent. Je l’ai re-senti très récemment pour écrire cet article et je pense que, à l’instar du « 401 » de Bon Parfumeur, il peut être une très belle alternative à des fragrances plus classiques dont on commence à avoir envie avec la fin de l’été.
J’ai, en revanche, souvent parlé de « Or du Sérail », créé par Bertrand Duchaufour pour Naomi Goodsir en 2014. Il est complexe, voire même compliqué, à la fois ambré et gourmand, avec quelque chose de tabac et de cuir. Il est étonnant et, au premier abord, je m’étais dit que je ne pourrais pas le porter. Il s’ouvre avec des notes de davana, de mangue, de pomme rouge, de sauge sclarée, de tabac et de vanille puis le coeur qui est construit autour d’un accord cire d’abeille avec des accents d’ylang-ylang et de lait de coco puis, la fragrance se pose sur un fond d’ambre, de cèdre, de ciste labdnaum, de maté, de muscs, de tabac et de vanille. J’aime beaucoup la note de mangue qui se marie très bien avec l’ylang-ylang puis le fond un peu cuiré. « Une fragrance opulente, qui nous emmène dans un palais oriental où se mêlent l'ambre et le bois. Un voile de tabac enveloppe les rêves des Mille et Une Nuits. Or du serail est un oriental gourmand, envoûtant ». Une fois posé sur ma peau, le parfum se développe, il prend des facettes ainsi que de l’ampleur. Je dois bien admettre que, s’il sort de mes goûts sur le papier, lorsque je le sens se développer sur ma peau, je le trouve complètement addictif. Pour l’instant, je n’ai pas vraiment eu de désir de le porter mais il reste dans un coin de ma tête. Je le trouve vraiment très beau, très envoûtant. Il me plait, je ne saurais pas complètement dire pourquoi mais j’ai peur que, toute une journée, il soit un peu gourmand pour mon goût. Je vais le réessayer cet hiver une fois encore.
Toujours réalisé par Bertrand Duchaufour mais cette fois pour Olibere en 2015, « Paradis Lointain » est plus un ambré fleuri très sophistiqué qui m’a plu comme très souvent les créations de cette marque dont, je trouve, on ne parle pas assez. « Est-ce un rêve, un souvenir lointain, ou bien la réalité ? Tout d’abord se laisser aller, tomber sous le charme de senteurs aguichantes des notes de tête : la Mangue pulpeuse, les Fruits de la Passion. Reprendre lentement ses esprits grâce à la vibrance des Epices fraîches ; la Baie Rose CO2 très lumineuse en tête, le Curcuma vert légèrement racinaire accompagnant parfaitement la Tubéreuse. Percer le mystère… Cette Tubéreuse charnelle, séductrice et opulente, dont les effets floraux sont renforcés par la présence de Pivoine, de Géranium et d’un fond Boisé doux. Enfin capituler face à la sensualité blanche des Muscs en fond et du Santal. Douceur révélée par une note de Miel ». Dès le départ, on est surpris par les notes épicées de genièvre, de curcuma, de baies roses, de bergamote et de fruits de la passion qui nous entraîne sur un coeur très sophistiqué de cire d’abeille, de clou de girofle, de gardénia, de tubéreuse et d’ylang-ylang puis sur un fond de miel, de mousse d’arbres, de santal et de vanille. Plus facile pour moi que « Or du Sérail », il n’en demeure pas moins dans le même esprit. Je l’ai réessayé pour écrire cet article et vraiment je l’aime beaucoup. Je le trouve à la fois exotique et très élégant. Je pourrais le porter je pense.
Je voulais terminer par un parfum que je trouve vraiment très beau et très marqué. J’aime beaucoup la version originale de « Halfeti », créé en 2015 par Christian Provenzano pour Penhaligon’s mais j’avoue lui préférer la version « leather » que le parfumeur a inventé en 2020 et qui me plait décidément beaucoup. La collection des Trade Routes de la marque n’est pas forcément pour moi mais ce parfum me cherche, me titille, me donne envie. « Le nom de Halfeti s'inspire d'un petit village de la province de Şanlıurfa dans la région de l'Anatolie du sud-est en Turquie. Dans ce village où poussent les roses noires démarre le voyage. La bergamote évolue tout au long du chemin pour laisser place à la cannelle et à la rose épicée. Le voyage se termine du bois de santal, de la vanille et l’union du cuir et de l’oud, dans des terres lointaines ». Pour « Halfeti Leather », les notes de oud sont remplacées par une très belle variété de patchouli. Il s’ouvre sur des notes de bergamote, associées à la cardamome, à la lavande, à la prune et à un accord vert. Le coeur est résolument épicé avec la noix de muscade et le cumin qui viennent rehausser une violette et une rose délicatement poudrées. Le fond, plus rond, est composé de cuir, de patchouli en très grande quantité et tout de même de quelques traces de oud. J’ai toujours aimé ce parfum mais je ne sais pas très bien si je pourrais le porter. Je m’interroge car il est puissant et il n’existe qu’en 100 ml. Il ne faut pas acheter à l’aveugle.
Je ne sais pas si j’arriverai facilement à parler de parfums ambrés mais j’avais envie d’en sélectionner cinq que j’aime particulièrement. J’espère vous donner envie de les découvrir. Peut-être d’ailleurs en connaissez-vous certains. J’attends vos retours et nos futurs échanges qui sont de plus en plus stimulants.
Mes parfums préférés : "Chypress"
« Tissé avec du zeste de bergamote pétillant enveloppé de fleur d'oranger crémeuse et de musc enveloppant chaud, c'est une déclaration d'être. Illuminez la ville en passant du jour au soir. Ceci est votre signature. Incontournable et captivant, un chypre floral raffiné pour une nouvelle ère. Opulent et énigmatique, ici pour les bons et les mauvais moments. Une partie de vous, une constante dans un monde en constante évolution ». Avec une envolée de bergamote, de fleur d’oranger, de néroli et de citron, un coeur de jasmin, de rose, d’osmanthus et d’ylang-ylang et un fond d’ambre, de vanille, de musc enveloppant le patchouli et la mousse de chêne, « Chypress » est une interprétation à l’anglaise d’un accord olfactif qui est parmi ceux que je préfère. Il était donc normal que, dès sa sortie en 2017, j’ai envie de l’essayer. J’ai tout de suite aimé la finesse et l’élégance de ce parfum dans la grande tradition de cette si belle maison. En règle général, je me sens plutôt attiré par le très classique univers de Floris London, maison de parfum appartenant toujours à la même famille depuis sa création en 1786. Je trouve que les parfumeurs actuels, Shelagh Foyle, Penny Ellis et Nicola Pozzani ont su à la fois s’adapter aux goûts actuels tout en gardant la plus grande qualité et la plus intemporelle des élégances. « Chypress » est une très belle illustration de cela.
Sur ma peau, c’est un vrai chypre, dans la plus pure tradition de française mais avec un twist, et notamment l’association d’osmanthus et de l’ambre qui vient changer un peu la donne. J’aime beaucoup l’évolution. Tout d’abord, il y a une fraîcheur presque florale qui se renforce avec les notes de coeur et prend de l’ampleur grâce à la prépondérance de l’ylang-ylang. Au fond, le patchouli est indéniablement la matière phare mais il est adouci par les notes vanillées qui ne sont jamais ni trop présentes ni trop orientales. La mousse de chêne arrive uniquement par petites touches et ajoute au côté très facetté du parfum. J’aime beaucoup son évolution que je trouve vraiment parfaitement dans mes goûts. Je pourrais porter « Chypress » absolument toute l’année. Il m’a fait envie dès que je l’ai découvert et j’ai toujours la même impression aujourd’hui.
Exquise Trouvaille : "Le Temps des Rêves"
Dans la série, « il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis », je voudrais revenir sur « Le Temps des Rêves », créé par Mathieu Nardin et Julie Masse en 2020 pour Goutal Paris et que j’avais trouvé, à sa sortie, plutôt ordinaire et pas forcément intéressant. Et bien, j’ai remis mon nez dessus et je l’ai même essayé. L’idée m’est venue car la boutique lyonnaise diffuse, dans la rue, ce parfum et vous pouvez le sentir en passant devant. J’ai fait un achat récemment et j’ai demandé à Catherine et Camille, que je salue, de me joindre un échantillon. Certes, je n’aime la fleur d’oranger que dans les madeleines et pas forcément sur moi et il y en a des multitudes, plus ou moins solinotes sur le marché mais j’ai trouvé que « Le Temps des Rêves », une fois posé sur la peau, se singularisait à bien des titres. C’est une fleur d’oranger certes, mais musquée, stylisée et très agréable même si elle n’est pas la plus originale que j’ai pu sentir. Sur moi, au cours de son développement, de petites facettes inattendues sont apparues, plus ou moins fugaces mais toujours très agréables et cette effluve que je trouvais un peu ennuyeuse a entretenu mon envie de la sentir et de la re-sentir. Le départ de fleurs d’oranger et de néroli du Maroc se double d’une note de bergamote très douce et enveloppante, au coeur, on retrouve la myrte, pas forcément très employée et parfumerie puis, en fond, la marque parle d’accords de fleurs de lait de son puis de bois de santal. Pour ma part, j’ai surtout une note propre et poudrée de muscs blancs un peu « à la Jo Malone » mais avec une opulence un peu différente, moins verte, plus ronde.
Julie Masse
Mathieu Nardin
« Il arrive, en de précieuses occasions, que l'on sente que nos rêves peuvent devenir réalité. Le Temps des Rêves, c'est ce temps chéri pendant lequel Annick Goutal s'est autorisée à rêver de devenir parfumeuse : un temps marqué par les paysages initiatiques de Grasse et leur odeur réconfortante de fleur d’oranger ». « Le Temps des Rêves » a quand même un joli côté épuré sans jamais être ennuyeux contrairement à ce que je pensais pouvoir dans ce parfum. Je ne sais pas à quoi ça tient mais j’aime beaucoup les facettes ciselées que je peux sentir au fur et à mesure que j’écris. C’est une fleur d’oranger certes mais elle ne sent ni un ingrédient alimentaire gourmand et frais, ni les lotions pour bébé qui ne me plaisent pas du tout. Je la trouve à la foi joyeuse, légère comme un tee-shirt blanc et parfaitement élégante. C’est typiquement un parfum d’été. Il n’a ni prétention, ni audace excessive mais seulement une envie d’apporter du bien être à celles et ceux qui le portent. Je vais recommencer à sentir les parfums que je n’aime pas pour voir si je n’ai pas changé d’avis.
Olivier Pescheux, des créations de caractère
Olivier Pescheux est surtout connu pour avoir beaucoup composé de parfums pour Diptyque mais il a également créé d’autres fragrances pour d’autres maisons. C’est une signature très facile à identifier car je trouve qu’il y a toujours dans son univers olfactif ce petit quelque chose comme un fil rouge qui est tout ce que j’aime lorsque j’explore l’univers d’un parfumeur. Je n’avais pas encore trouvé comment aborder son oeuvre pour lui consacrer un portrait parfumé alors je suis allé, très humblement, sentir, essayer, me promener dans ses créations et je dois dire que j’y ai pris beaucoup de plaisir. J’en ai retenu quatre que je trouve particulièrement significative de son style naturaliste et particulièrement intemporel. Vraiment, je le dis à chaque fois mais c’est vrai, j’ai aimé préparer cet article et je pense que vous aurez peut-être envie de m’emboiter le pas et de me faire un retour.
Le tout premier parfum que j’ai choisi de citer, je le connais depuis très longtemps. Il est sorti en 2015 et il s’agit deu « Soir d’Orien » qu’Olivier Pescheux a composé pour Sisley. C’est un flanker qui n’en n’est pas un et que la marque décrit ainsi : « Cette variation libre de l’Eau du Soir nous entraîne dans l’atmosphère si particulière, presque magique, d’un palais oriental. L’Alcazar se révèle sous une nouvelle facette et suggère un parfum voilé de mystère qui exalte une féminité resplendissante. Une composition aussi énigmatique qu’éblouissante de sensualité. Pétillant et envoûtant en tête, il séduit par son cœur floral-épicé et la chaleur d’un sillage délicatement boisé ». Pour ma part, je le trouve vraiment audacieux pour une femme et, s’il est estampillé féminin, je pense qu’il pourrait plaire sans équivoque à des hommes, dandys élégants, qui se l’approprieraient avec beaucoup de chic. Il s’ouvre sur une envolée très étonnante de citron d’Italie, de galbanum et de safran puis la rose de Turquie, le géranium et le poivre noir vraiment denses en constituent le coeur. Le fond est encore plus profond puisqu’il allie notes d’encens de Somalie, Patchouli très dark et un accord de bois de santal qui l’adoucit quelque peu. Je me souviens de mon impression lorsque j’ai découvert ce parfum. Le mot qui m’est venu est « troublant ». En tout cas, il pourrait être l’un des rares orientaux du circuit sélectif que je pourrais porter.
Lorsque je l’ai découvert (merci Jessica), j’avais j’avais beaucoup aimé la complexité de « Empower You » créé par Olivier Pescheux en 2020 pour la maison Orlov. « Cette Eau de Parfum Empower You est une explosion de lumière. Une façon irrésistiblement chic et moderne de porter les agrumes et les fruits frais d'un parfum. Emerveillez-vous devant la lumière dorée et ambrée d'un brillant coucher de soleil ». « Empower You », littéralement « vous responsabiliser », curieux nom pour un parfum et pourtant son envolée et son développement sont bien plus complexes qu’il n’y parait. Dès la vaporisation, la fraicheur et la douceur de la bergamote, de l’orange sanguine et de mandarine m’a accroché et je me suis laissé porter par l’évolution jusqu’aux notes de coeur de rose bulgare, de géranium, de jasmin sambac et de fleur d’oranger très floral presque chypré puis par le fond plus « viril » si j’ose dire de bois de cèdre, de patchouli, de bois d’akigala, d’encens et de muscs. Je n’aime pas genrer les parfums mais je dirais que celui-ci peut plus plaire aux hommes au aux « garçonnes » des années 20 mais je m’égare. Androgyne, facetté, élégant, « Empower You » n’a pas la vocation d’être d’une grande originalité mais de développer votre chic inné et le rendre acquis. J’aime beaucoup son évolution. J’avais pris des notes quand je l’ai essayé et je le fais rarement. Je suis très content d’avoir essayé ce parfum. Il est inteporel.
Vous le savez, je suis loin d’être un fan de Parfums de Marly. Je ne vais pas développer pourquoi mais ceux qui me connaissent savent mon opinion qu’il est inutile que j’expose gratuitement. Pourtant, lorsque j’ai remis mon nez dans l’échantillon que je possédais de « Herod » qu’Olivier Pescheux a créé en 2012, je dois bien dire que j’en ai apprécié la construction. « Herod est personnifié par son mélange de notes diverses, dégageant un parfum de vanille fumée. Cette eau de parfum s'ouvre sur des notes supérieures épicées de cannelle et de poivre pour ensuite montrer son âme puissante de feuille de tabac, d'encens, de ciste et d'osmanthus. Ces notes poivrées sont davantage entourées de gousses de vanille, de musc, de patchouli et d'un arrangement boisé de fond. Un parfum élégant et discernable, pour hommes et femmes, il est l'incarnation de la sophistication du vieux monde ». Il est vrai qu’on est très loin de ce chimique acidulé que l’on peut trouver dans la marque et que je ne peux pas sentir (sans jeu de mot). Certes, ce n’est pas le parfum le plus naturaliste qu’ait pu réaliser Olivier Pescheux et je le trouve très surévalué notamment au niveau de son prix mais, comme on dit, il fait bien le boulot. Il s’ouvre sur des notes de cannelle et de poivre, puis le coeur de feuille de tabac, d’encens discret, de ciste et d’osmanthus lui donnent un côté cuiré et rond. La vanille en note de fond n’a pas l’air trop chimique, idem pour le patchouli. Je peux cependant regretter l’abondance de muscs et de notes boisées synthétiques. Reste que le parfum n’est pas si mal sur ma peau. Je ne pense pas que je le porterais régulièrement mais, contre toute attente, je l’ai trouvé plutôt pas mal.
Je ne peux pas tracer un portrait parfumé d’Olivier Pescheux sans évoquer Diptyque d’autant qu’il a créé la fragrance de la marque que je préfère. J’ai nommé « L’Eau Moheli » (merci Marion pour la découverte) et dont j’ai déjà pas mal parlé. Je ne vais donc pas revenir dessus. J’ai beaucoup réfléchi et j’ai décidé de choisir « L’Eau du 34 » qu’Olivier Pescheux a créé pour la marque en 2013. « La boutique du 34 boulevard Saint Germain au printemps. L’air est frais, le soleil traverse les vitrines. L’atmosphère se charge des fragrances que l’on découvre, épices fraîches, bois blonds et lumineux, notes vertes et acidulées. Une douceur printanière qui n’attend plus que de s’évader sur la peau ». Il y a vraiment une fraîcheur qui se dégage de cette fragrance qui revisite un peu le côté chypré, fruité et frais de l’univers de la marque. L’aime beaucoup le départ de bourgeon de cassis, le coeur de lentisque et le fond de bois de gaïac et de mousse de chêne. Là encore, Olivier Pescheux, pousse l’élégance à son paroxysme avec une eau de toilette qui ne serait pas sans doute aussi fine si la dilution avait été moins importante. Je pourrais tout à fait porter ce parfum. Il est très chic, plein de petites facettes surprenantes. Il fait partie des fragrances de la marque qu’il faut vraiment découvrir.
C’est avec un intérêt certain que j’ai exploré les créations d’Olivier Pescheux pour en retenir quatre. Il y a des choses que je n’aime pas mais je trouve que, lorsqu’il a une certaine latitude, il est très inventif et soucieux d’une élégance à la française empreinte d’une certaine tradition de la parfumerie. En tout cas, je vous engage, comme d’habitude, à aller mettre certains de ces parfums sur votre peau et à les découvrir en profondeur.
Quelques nouveautées de rentrée
Le mois de septembre est un grand rendez-vous pour les parfumeries car, en principe, nombre de lancements arrivent mais, depuis la pandémie, tout est plutôt bouleversé. J’ai quand même commencé à sentir des choses et il est vrai que ça part un peu dans tous les sens. J’ai aimé certains parfums, d’autres m’ont un peu laissés indifférents et enfin un ou deux sont particulièrement désagréables pour moi. Je vais essayer de parler de tout ce que j’ai découvert, que mon ressenti soit positif ou négatif.
Cette fois, ce n’est pas Daniela Andrier qui a signé le nouveau féminin de Prada. En effet, « Paradoxe » a été composé par Nadège le Garlantezec, Shyamala et Antoine Maisondieu. Si j’adore le flacon, le triangle emblématique de la marque, il n’en n’est pas de même avec le parfum qui m’a franchement dérangé. « L'Eau de Parfum Prada Paradoxe, le nouveau parfum féminin signature de Prada, exprime l'essence de la féminité sous toutes ses formes. Paradoxe explore la réconciliation inattendue des contradictions et célèbre la multi-dimensionnalité des femmes. Paradoxe est le parfum qui célèbre la femme qui n’est jamais être la même, mais toujours elle-même ». Après un départ de néroli, les muscs blancs et des notes fruitées prennent le pas et sont renforcées par l’ambroxan. J’avoue que j’ai détesté. Tout d’abord, c’est encore un énième féminin « dans l’air du temps » sans mauvais jeu de mots. J’ai trouvé qu’il n’avait rien de beau, ni le départ, trop artificiel, ni le développement que je trouve quasi-inexistant. Les petites notes fruitées et métalliques me dérangent. Mon avis n’a pas valeur de critique et je me doute que ce parfum se vendra… au kilo !
« Le parfum du cèdre aussi puissant que sophistiqué nous emporte vers les sommets de l’Atlas au crépuscule. Des effluves de rose et d’immortelle s’invitent au voyage et dévoilent au petit matin des notes veloutées de prune. Une brume addictive s’échappe alors, laissant la vanille et le safran illuminer le jour », tels sont les mots d’Arnaud Poulain pour décrire « Cèdre » le nouvel opus de la collection Superfluide et j’avoue que c’est une très belle surprise. Certes, je trouve le prix un peu extravagant et, jusqu’ici, je n’avais pas vraiment aimé cette collection à part peut-être « Safran » contre toute attente car c’est une matière première qui ne me plait pas forcément. Même chose avec le cèdre. Je ne peux pas dire que les boisés soient les parfums que je préfère et pourtant, j’aime bien celui ci que je trouve à la fois novateur et élégant. Le départ de baies roses et de thym un peu aromatique est assez désagréable mais très vite, ce coeur construit autour d’un très bel absolu d’immortelle, de prune et de rose, me séduit et le fond d’ambroxan, de santal et de vanille safranée est vraiment joli. Un cèdre sans cèdre, interprétation un peu poudrée, boisée et ronde qui m’a déroutée mais que j’ai bien aimée.
J’avais pensé à un énième flanker de « J’adore » mais je dois dire que je me suis laissé séduire « J’adore Parfum d’Eau » la nouveauté de rentrée de Dior. « Un concentré d'eau et de fleurs dans une formule sans alcool pour un parfumage à la fois intense et naturel, dans une formule inédite. Une réinterpration de la promesse du plaisir porté par J'adore depuis 1999. J’adore Parfum d’eau traduit avec exactitude le bouquet floral emblématique de J’adore : des notes de jasmin sambac et de néroli se mêlent aux accents veloutés de magnolia dans une nouvelle sensation fraîche et spontanée. Le flacon de cette fragrance à la formule inédite chez Dior est d’un blanc mat opalescent. Le geste de parfum est lui aussi repensé : J’adore Parfum d’eau se vaporise avec générosité en nuage pour venir envelopper la peau ». Le l’ai trouvé très différent de l’original. Est-ce la formule ? Est-ce la création ? Est-ce le procédé ? Je ne saurai le dire mais j’ai bien aimé le côté très floral du coeur en revanche, je suis un peu moins séduit par les notes lactées dans le fond. Il n’en reste pas moins que c’est une jolie version à découvrir.
Créé par Nathalie Gracia-Cetto, « Legacy of Petra » est le nouveau parfum de la collection classique de Penhaligon’s. Je dois dire que j’en attendais beaucoup. Je suis un peu mitigé. « Vents vivifiants du désert. Une énigme de bergamote et baume. Le crépuscule accueille un convoi d'ambre boisé parfumé - et juste à temps pour le thé. La myrrhe chaude rend tentant de s'attarder. Mais n'est-ce qu'une façade ? Sûrement pas ». Avec un départ anisé de fenouil, un coeur de myrrhe et un fond de bois de réglisse et de vanille, c’est un parfum à la fois oriental, résineux et même aromatique. Il me semble identifier des notes de thé et de romarin tout au long de son évolution. Sur ma peau, les notes anisées prennent beaucoup de place et je dois dire que j’aurais préféré une prépondérance du bois de réglisse. Je trouve que c’est un très joli parfum mais il n’est pas pour moi en fin de compte. Il n’en reste pas moins que sa construction est très intéressante et que le rendu est beau. Il lui manque peut-être un petit quelque chose d’original.
Je n’avais pas vraiment aimé la première version de « H24 » en eau de toilette et, de ce fait, je n’attendais pas grand chose de la version eau de parfum mais il se trouve que son évolution est vraiment très différente et elle me plait bien davantage. Christine Nagel a complètement revisité sa création et vraiment, je trouve que c’est une réussite. « La fusion d'une sauge enveloppante, d'un narcisse électrique, d'un bois de rose vivifiant et d'une note de sclarène métallique et chaude. Un parfum vif, sensuel et lumineux ». Après le même départ de sauge sclarée, le parfum évolue sur un coeur de narcisse et un fond bois de rose et mousse de chêne. On est un peu moins dans une fougère et un peu plus dans une construction plus complexe pour moi. Le parfum prend de l’ampleur quand il se fond avec la peau. J’ai beaucoup aimé le style très épuré, très élégant de cette création. J’étais un peu dérangé par certaines notes aromatiques de l’eau de toilette et là, je trouve qu’elles s’harmonisent très bien avec le reste de la construction. Vraiment, c’est un parfum que je pourrais porter.
J’entends parler, notamment grâce aux posts Facebook de sa créatrice Sonia Constant, de « Noir Extrême » de Tom Ford en version parfum et j’ai enfin pu le sentir. J’avoue avoir été un peu dérouté car je le trouve très différent de l’eau de parfum qui m’est assez familière. Je ne peux pas dire que je ne l’ai pas aimé mais ce n’est pas vraiment une déclinaison, c’est une création à part entière. On retrouve la cardamome en tête avec des notes de gingembre, de néroli et d’agrumes. Le coeur est également toujours très « pistaché » par le kulfi mais la rose de Bulgarie, la fleur d’oranger et le. Jasmin sont tout aussi prépondérants et le fond est beaucoup plus cuiré. La fève tonka est moins ronde et plus travaillée de manière sèche. C’est un très beau parfum, très bien réalisé. Il me plait beaucoup mais je pense que l’on peut aimer l’eau de parfum et ne pas apprécier cette déclinaison comme l’inverse. Sonia Constant ne s’est pas contentée d’augmenter la concentration, elle a réalisé un nouveau parfum à part entière.
Alberto Morillas continue d’explorer les fleurs avec « Flora Gorgeous Jasmine » qu’il a créé pour Gucci. Je dois dire que j’ai bien aimé. « L’eau de parfum Gucci Flora Gorgeous Jasmine s’épanouit avec des notes de tête de jasmin grandiflorum. De tendres couronnes de fleurs de jasmin se métamorphosent dans le cœur et l’esprit de Gucci Flora Gorgeous Jasmine, laissant ainsi cette fleur précieuse s’exprimer pleinement. Mêlés à des notes de fond de bois de santal et de benjoin, ses accents sensuels laissent une empreinte unique sur la peau. Son énergie joyeuse est relevée de notes d’essence de mandarine et de magnolia qui insufflent à la fragrance une touche joyeuse. Réinventé par Alessandro Michele, le motif Flora emblématique de la Maison confère au flacon une touche magique, faisant de Gucci Flora Gorgeous Jasmine un objet d’inspiration ». Floral, épicé, élégant, ce parfum s’ouvre sur des notes de bergamote et de mandarine rehaussé d’essence de poivre noir. Le coeur est construit autour d’un absolu de jasmin grandiflorum et de jasmin sambac avec des accents de rose de Damas et de magnolia qui le rendent à la fois un peu poudrée et légèrement animale. Le fond de santal, de benjoin et de patchouli confère au parfum quelque chose de très facetté et un peu plus travaillé que nombre de sorties dans le circuit sélectif. En tout cas, j’aime bien, c’est élégant sans être chichiteux, facile à trouver et à s’approprier.
« La rosée qui mouille ses pétales. L'instinct premier de la rose sauvage est de libérer des vapeurs parfumées qui l'enveloppent d'une brume subtile. L'instinct du maître est de percer l'aura de la rose pour capter, dans un accord, cet instinct » tels sont les mots de Ramon Monegal pour décrire « Hazy Rose », qui inaugure une toute nouvelle collection, Perfume Rocks. Je pense qu’il était déjà sorti cet été mais j’étais complètement passé à côté. Je l’ai découvert récemment et j’ai tout de suite eu envie d’en parler. J’avoue avoir été complètement surpris par cette rose fantômatique que l’on trouve, que l’on perd et que l’on retrouve au cours de son évolution. Tout d’abord, il y a cette envolée de gingembre, de magnolia, de safran enveloppée d’une note de cashmeran et qui nous emmène sur un coeur de rose, de cèdre, de poivre rose et d’encens puis sur un fond de mousse de chêne, de benjoin, de caramel et de musc. La maison le décrit ainsi « A l'aube, lorsque l'obscurité commence à s'estomper avec la lumière naissante et que la chaleur du soleil gagne en intensité, la silhouette de la rose sauvage se brouille à contre-jour. La rosée qui mouille ses pétales s'évapore dans la chaleur des rayons du soleil et crée autour d'elle une aura qui bouge capricieusement dans la brise matinale. La curiosité inhérente à mon métier me pousse à approcher et à savourer cette reine juste au réveil et son parfum est unique. Mon instinct me guide jusqu'au moment où le cœur de la reine se découvre pour entrer, entre rosée et ténèbres, lui voler sa raison d’être ». Le mot qui me vient est indéniablement « mystérieux ». En effet, c’est une rose oxydée, un peu chyprée, un peu cuirée et épicée. Je lui trouve une élégance un peu sulfureuse. Sur ma peau, il est vraiment très moderne et extrêmement évolutif. J’ai du mal à le saisir et à décrire mon impression. La seule chose que je peux dire, c’est que je le trouve d’une élégance très contemporaine, urbaine et que le but de surprendre est atteint.
Je ne suis pas un fan de Maison Francis Kurkdjian mais j’ai quand même été mettre mon nez sur « 724 » décrit ainsi par la marque : « 724 rend hommage à la ville de NY dans une interprétation olfactive lumineuse et addictive. Clin d'oeil du 24/7 (24h sur 24, 7 jours sur 7), il traduit ainsi le bouillonnement incessant des grandes villes, propice aux rencontres et à la création. Réveil au cœur de la ville qui ne dort jamais. Sous le ciel bleu, les blanchisseries à la vapeur débordante éveillent nos poumons, telle l’association des aldéhydes à la bergamote, d’une fraicheur propre presque immaculée. Et déjà la ville bat son plein. Les fleurs blanches s’alignent en rythme : l’absolu de jasmin d’Égypte, le seringa et le pois de senteur s’enchainent en effervescence, tandis que le freesia et la fleur d’oranger déambulent avec allure. Au bout de cette architecture très verticale, alors que le soleil se couche, s’élèvent un bois de santal et un musc blanc rassurants et enveloppants. Une fragrance fusante, addictive et confortable, pour sentir et ressentir l’énergie des grandes villes, 24h sur 24, 7 jours sur 7 ». Je dois dire que cette fragrance, signée par Francis Kurkdjian ne m’a pas vraiment convaincu. Après un départ aldéhydé, un coeur pois de senteur et jasmin d’Égypte et son éternel fond bois de santal et muscs blancs, il plaira c’est certain. Pour ma part, je le trouve quelconque, sans réelle personnalité. Je trouve qu’il aurait davantage sa place sur les rayons d’un Sephora ou d’un Nocibé
C’est sans jeux de mots et en fermant les yeux que j’ai découvert « Eyes Closed », le tout nouveau Byredo, sans en attendre grand chose. Je dois dire que je ne suis pas du tout un adepte de la marque. Je trouve, les parfums peu inventifs et assez peu qualitatifs en règle général et à quelques exceptions près. La marque ne communique pas sur le parfumeur mais j’ai supposé qu’il s’agissait de Jérôme Épinette comme pour la plupart des créations de la marque. Le parfum s’ouvre sur des notes très élégantes de cannelle et de cardamome (je sens beaucoup la cardamome) puis le parfum évolue vers un coeur de graine de carotte et de gingembre qui enveloppent un beurre d’iris très présent, poudré et un peu terreux puis le fond de papyrus et de patchouli pose la fragrance. J’ai été surpris de la qualité de ce parfum. Très franchement, il a une vraie évolution et un certain naturalisme que je connais peu chez Byredo. J’ai choisi de ne pas me baser trop sur le story telling car je préfère transmettre ma propre impression, celle d’un iris à la fois velouté, poudré et un peu terreux, très enveloppant qui demeurera un peu clivant. Honnêtement, j’ai bien aimé. Je ne sais pas si je porterais ce parfum mais je trouve qu’il a beaucoup de charme même s'il est un énième iris. Il sera sans doute, avec l’éternel « Bal d’Afrique », une exception dans la marque.
Dans un précédent article, j’avais spoilé un peu ce que pourrait être « Uncut Gem », la toute nouvelle création de Maurice Roucel pour les Éditions de Parfums Frédéric Malle. Avec la sortie du parfum, je crois qu’il n’est pas mal de revenir dessus car j’ai pu l’essayer sur la peau de manière un peu plus précise. « Tout en contraste. Un parfum à la fois sauvage et sensible, classique et nouveau, dont la première impression fraîche et luxueuse se mue en un sillage brutal et irrésistible. Des notes de tête claires et épicées de bergamote, mandarine, gingembre, racine d'angélique et noix de muscade cèdent le pas au feu intérieur : un accord cuir, vétiver et encens, une grande quantité d'ambre et de musc qui vibrent sur la peau », tels sont les mots de Frédéric Malle pour décrire ce parfum très attendu qui serait celui que s’était créé Maurice Roucel. Le parfum s’ouvre sur une envolée de bergamote et de mandarine avec des notes vertes d’angélique et épicées de gingembre et de noix de muscade. Le coeur, encens, vétiver et cuir m’a semblé relativement classique et le fond ambré et musqué ne m’a toujours pas convaincu. Je ne peux pas dire qu’il m’ait séduit plus que ça. Je n’en dis pas plus, je vous engage à aller le sentir et vous faire votre propre avis.
Je ne peux pas dire que je sois attiré par les parfums Caron depuis le rachat de la maison c’est le moins que l’on puisse dire. Je demeure vraiment très nostalgique d’une époque révolue et, de ce fait, je n’attendais rien de « Tabac Blanc », la dernière création de Jean Jacques, le parfumeur de la maison. Je suis allé l’essayer sans la moindre idée préconçue mais sans vraiment beaucoup d’espoir d’être séduit. Et bien j’avais tort. J’ai trouvé ce parfum très intéressant. « Tabac Blanc est l’un des premiers parfums dont le maté est la pierre angulaire. Utilisée en surdosage, la plante sud-américaine est soutenue par l’éclat de la bergamote et du thé blanc. Viennent s’ajouter les notes florales du jasmin, et la sensualité du musc blanc. La fève de cacao est, quant à elle, mise en valeur par les senteurs boisées de la cannelle et celles intenses de la vanille. Troisième ingrédient phare de la formule, l’iris dévoile des pointes de violette grâce à l’utilisation de ses trois plus belles qualités : la concrète, l’irone et le résinoïde. Apparaissant en note de fond, l’iris enveloppe le parfum d’un cocon poudré et divinement élégant. Immersion dans les paysages luxuriants d’Amérique du Sud, Tabac Blanc est un tabac à la fraîcheur lumineuse et au confort enveloppant ». Le départ est vraiment très bergamote sur ma peau mais très vite, les notes de coeur de maté, de thé blanc et de jasmin, enveloppées d’un voile poudré d’iris viennent se développer et le fond d’absolu de fève de cacao et de cannelle viennent confirmer cette impression. Le parfum est évolutif, il passe par plusieurs phases de développement et je dois dire qu’il y a quelque chose qui m’a plu c’est qu’il prend de l’ampleur au cours de son évolution. Le sillage semble très correct et la tenue excellente. C’est une jolie surprise.
Je ne peux pas dire que j'ai été complètement convaincu par ce que j'ai senti ou essayé depuis la rentrée. J'avais peut-être des attentes plus importantes car j'ai trouvé le début de l'année foisonnant de belles créations et je ne m'y suis pas trop retrouvé. Il y a quand même de belles fragrances mais, pour la plupart, je n'ai pas eu d'emballement. Probable que plusieurs des parfums de cette fin d'été, ne se retrouveront pas sur mon top de cette année mais sait-on jamais, peut-être que je changerai d'avis après tout, comme le dit l'adage, "il n'y a que les imbéciles..."
Parfums de septembre
Il fait frais voire même froid et j’ai un peu oublié les fleuris légers, les salins et autres hespéridés pour revenir à des chypres plus enveloppant, des floraux plus opulents et des épicés voire même quelques cuirs légers. Je vais essayer de vous révéler quels sont les parfums que je porte le plus en cette fin d’été. J’aime beaucoup pouvoir complètement changer mes habitudes parfumées et je me suis dit que j’avais envie de partager un peu mes goûts et, peut-être, susciter chez vous une envie de découvrir ou redécouvrir les parfums que je porte le plus en ce moment.
Ça commence mal car le tout premier est discontinué mais j’ai du stock depuis qu’il est ressorti l’an dernier en édition limité pour les 40 ans de Goutal Paris. Il s’agit, bien évidemment, de « Mon Parfum Chéri », créé originellement pas Camille Goutal et Isabelle Doyen en 2011, c’est un parfum chypré floral avec une note de prune très prononcée en tête et qui va nous suivre tout au fond de l’évolution, un coeur de violette et d’iris qui vient enrichir la fragrance avant qu’elle ne se pose sur un socle de patchouli, héliotrope et mousse de chêne. « Au commencement de cette fragrance, il y a une petite concrète ayant appartenu à Colette qui avait été offerte à Annick Goutal. Cette senteur boisée obsède Camille et lui rappelle les films hollywoodiens des années 40, le satin affriolant, la dentelle raffinée et… l’image de sa mère s’apprêtant à sortir. Comme un joli retour des choses, Camille rend hommage à sa mère avec Mon Parfum Chéri Par Camille, treize ans après qu’Annick Goutal lui a dédié Petite Chérie », c’est ainsi que la marque décrivait l’inspiration de ce parfum à l’époque où il est sorti. À la fois vraiment chypré, poudré et épicé, ce parfum est l’équilibre parfait sur ma peau. Pour moi, il est toute l’âme de la maison qui s’appelait encore Annick Goutal. C’est un parfum d’une élégance éternelle, jamais vintage mais toujours intemporel. Lorsque je n’en n’aurai plus, il laissera sa place à « Passion » mais je le regretterai quand même.
Le second parfum est également créé par Camille Goutal et Isabelle Doyen, comme quoi il n’y a jamais de hasard, et il s’agit bien évidemment de « La Couleur de la Nuit », lancé en 2020 pour leur marque 100% naturelle Voyages Imaginaires. J’ai un énorme coup de coeur pour la maison et pour ce parfum en particulier. « La Couleur de la Nuit est une promenade nocturne mystérieuse dans une métropole asiatique, illuminée par les lanternes rouges et les néons fluorescents. De la fragrance émane l’atmosphère sombre, humide et légèrement éclairée par les lumières scintillantes d'un film de Wong Kar-wai. La fraîcheur de la lavande transcendée par le géranium contraste l’effet sombre et envoûtant de la vanille et du fir balsam, provoquant ainsi un élégant clair-obscur ». Il s’ouvre comme un aromatique, avec des notes de lavande et de bergamote mais, rapidement on arrive sur un coeur de géranium travaillé de manière plutôt ronde et soutenue par des notes de sapin baumier, de patchouli et de vanille en fond. C’est un parfum totalement inédit, complexe, qui ne rentre dans aucune case ni dans aucune famille olfactive. Vraiment, je ne peux pas le classifier. Il ne ressemble à rien d’autre. La seule chose que je peux dire, c’est que son sillage est modéré, sa tenue excellente et, bien évidemment, l’effluve qu’il dégage addictive, en tout cas pour moi.
Une autre envie, en ce moment, fait partie des nouveautés que j’ai pu aimer vraiment cette année et qui est également vraiment un coup de coeur, voire un coup de foudre. Il s’agit, bien évidemment de « Abyssae », créé par Daphné Bugey pour la collection La Botanique de L’Artisan Parfumeur. J’aime énormément ce parfum complètement inédit et qui, une fois encore, ne ressemble à rien d’autre. La marque le décrit ainsi : « Plongez au coeur des abysses pour y découvrir de nouveaux trésors cachés. Abyssae révèle son pouvoir apaisant. Portée par le souffle relaxant de l’eucalyptus, se déploie dans son sillage la douceur d'une rose, ourlée de cashmeran, une note douce et boisée ». Le départ est déjà dingue et la marque communique uniquement sur la note principale qui est l’eucalyptus, le duo de rose en coeur et le fond de cashmeran. Je trouve ce parfum absolument envoûtant. Il m’a plu tout de suite et je me suis même permis de le porter déjà quelques fois en été par temps un peu moins chauds que la canicule. Je le trouve vraiment profond, génial et sa tenue est assez exceptionnelle. Je me suis vraiment attaché à ce parfum. Il fait partie de mes deux coups de coeur parmi les nouveautés de l’année que j’ai bien du mal à départager. Je le porte beaucoup et vraiment je me fais plaisir.
Je porte également le parfum suivant depuis déjà quelques années et il est signé (décidément !) Isabelle Doyen. Vous vous en doutez, il s’agit bien évidemment de « Nuit de Bakélite » que la parfumeure a créé pour la maison Naomi Goodsir en 2017. C’est un parfum assez incroyable. Je dois dire que je n’aime pas tellement l’envolée très verte, très « dure » mais, après quelques minutes, la fragrance prend sa place. « Une fragrance obsédante, annonciatrice d'une femme dans toute sa séduction. Une tubéreuse verte dans un écrin végétal ». L’envolée d’angélique, de feuille tomate et de violette et de galbanum est absolument verte, fusante et presque désagréable mais très vite, les notes d’iris et de tubéreuse associées en coeur au karo karoundé, une fleur poussant sur un arbuste d’Afrique du Sud donne au parfum une dimension très florale qui n’est également que de courte durée. Le fond de bois de gaïac, de cuir, de davana, de labdanum, de styrax et de tabac lui donne une profondeur tout à fait surprenante. Doté d’un sillage très envahissant et d’une tenue hors du commun, « Nuit de Bakélite » est une création vraiment originale. Avec ce parfum, l’appellation « niche » prend tout son sens car il est impossible de lui trouver un équivalent. La qualité des matières premières est au top et vraiment, après l’avoir, dans un premier temps, écarté, je me rends compte que j’adore le porter.
« Le caractère du Quartier Latin s’est forgé au contact des livres, des comptoirs et des humeurs nocturnes. Un parfum artiste, original que la fève tonka et l’ambre rendent encore plus habité » tels sont les mots de la maison Memo pour décrire « Quartier Latin » que je me suis approprié il y a quelques temps et dont je m’étais un peu lassé. Créé en 2012 par Aliénor Massenet, il est sans doute mon seul boisé vraiment franc. Il est construit autour d’un cèdre très poudré, d’une huile de santal australienne très sèche et travaillée d’une manière très boisée et non pas lactée ou crémeuse, le fond, construit sur un accord d’ambre relevé de clou de girofle est à nouveau poudré par la fève de tonka. Je le trouve très « papyrus ». Il m’évoque un peu l’odeur des boutiques des bouquinistes du sixième arrondissement de Paris. C’est un parfum profond, élégant, très particulier. Il est doté d’un sillage limité et d’une excellente tenue. Au départ, lorsque j’ai vraiment découvert la marque, j’étais un peu passé à côté de ce parfum et puis, en en parlant avec des lecteurs de mon blog, j’ai eu envie de l’essayer et je me suis décidé. Il m’a plu. Je ne sais pas si je le rachèterai mais, en ce moment, il est un peu ma marotte. Je le porte vraiment beaucoup. Il me permet d’aborder cette famille olfactive que je connais très mal.
Il y a d’autres parfums que je porte pas mal mais il me fallait me limiter pour ne pas être trop long, cela fera peut-être l’objet d’un second article quand nous nous serons enfoncés un peu plus dans l’automne. En tout cas, j’espère que vous allez vraiment être curieux et aller découvrir ces parfums. Peut-être même me ferez-vous un retour… qui sait.